[BOUQUINS] Anonyme (Bourbon Kid) – Noir Comme L’Enfer

Dans la petite ville de Désespoir, trois jeunes femmes ont été kidnappées. La police arrête un suspect. Surprise : son ADN correspond en tout point à celui de Jack l’Éventreur. Avant d’être interrogé, l’homme disparaît mystérieusement. Une seule personne semble en mesure de le retrouver : le Bourbon Kid, le tueur le plus impitoyable que la terre ait jamais porté.

Pendant ce temps, une femme-robot ressemblant trait pour trait à Jasmine, l’ex-prostituée tueuse de démons, commet des vols à main armée dans toute la région. Appelés à la rescousse, les Dead Hunters, vénérable confrérie de chasseurs sanguinaires, entrent dans la danse.

Toutes les pistes les conduisent bientôt vers le mystérieux strip-club d’une ville nommée Ténèbres, où plane l’ombre d’un revenant inattendu : Adolf Hitler himself !

Bourbon Kid, what else ?

D’autant que la quatrième de couv’ nous promet une intrigue encore plus barrée qu’à l’accoutumée.

Ami(e)s lecteurs et lectrices, préparez-vous : ce roman va vous révéler des vérités qu’aucun manuel d’Histoire n’osera jamais raconter. Et pour cause — même les historiens les plus chevronnés ignorent ces révélations explosives ! Imaginez un peu : vous allez enfin découvrir qui se cache derrière le cold case le plus célèbre du monde… Oui, Jack l’Éventreur en personne ! Et si cela ne suffisait pas à piquer votre curiosité, sachez que vous apprendrez aussi toute la vérité sur le suicide d’Hitler, et sur celui d’Eva Braun. Rien que ça.

Vous l’aurez compris : pour ce nouvel opus, notre mystérieux auteur Anonyme, alias le Bourbon Kid, place la barre très haut dans le grand art du portnawak assumé. Et c’est tant mieux, car c’est exactement ce que l’on vient chercher en ouvrant un roman de cette saga : du chaos jubilatoire, de l’action débridée et une bonne dose d’humour noir. Le côté complètement barré est non seulement assumé, mais fièrement revendiqué.

Quel plaisir de retrouver le Bourbon Kid, l’équipe des Dead Hunters au grand complet, Sanchez et Flake en tête, sans oublier Jacko, le gardien du Purgatoire et de l’Enfer, dont le rôle continue de s’étoffer au fil des tomes. L’auteur joue à fond la carte du fan service sans jamais tomber dans la redite : on retrouve le même cocktail explosif d’action (énormément d’action — et non, jamais trop !) et d’humour, qu’il s’agisse de dialogues lunaires ou de situations totalement improbables.

Dans le précédent roman, Kill the Rich, le thème du voyage dans le temps faisait déjà une apparition remarquée. Ici, il devient le cœur même de l’intrigue, avec un choix audacieux : renvoyer les personnages à la Fête de la Lune de Santa Mondega, six ans plus tôt. Autrement dit, pile au moment où tout a commencé, dans Le Livre sans Nom. Un retour aux sources malin et réjouissant, qui permet de revisiter les événements fondateurs avec un nouveau regard.

On constate aussi une évolution du Bourbon Kid : s’il reste fidèle à sa devise — « on tire d’abord, on discute après ! » — il semble s’être quelque peu assagi… ou du moins, plus réfléchi (tout est relatif).

Et puis vient la fin. Ce fameux mot, FIN (peut-être), qui clôt la plupart des romans du cycle et nous laisse toujours avec la même question : vraiment la fin ? À en juger par les dernières pages et la place grandissante du voyage temporel, on peut parier sans trop se tromper qu’Anonyme nous réserve encore quelques surprises infernales.

Bref, Noir Comme L’Enfer est un pur concentré de ce que la saga Bourbon Kid fait de mieux : du fun, du sang, et une bonne dose de déraison. Un défouloir littéraire aussi absurde qu’irrésistible, à consommer sans modération.

[BOUQUINS] Dan Brown – Le Secret Des Secrets

L’éminent professeur de symbologie Robert Langdon se rend à Prague pour une conférence sur la noétique donnée par son amie de longue date, Katherine Solomon. La scientifique est sur le point de publier un ouvrage révolutionnaire sur la nature de la conscience humaine.

Un meurtre sauvage va soudain précipiter leur séjour dans le chaos. Katherine disparaît, et son manuscrit est piraté sur le serveur de son éditeur. Commence alors une course contre la montre dans Prague et ses mystères. Langdon se retrouve pourchassé par une étrange créature mythologique et devient la cible d’une organisation dont le projet pourrait changer à jamais notre conception de l’esprit humain.

Parce que c’est le grand retour de Dan Brown et de son héros récurrent, Robert Langdon. Un retour que les fans attendaient – espéraient – depuis huit longues années.

Quel plaisir de retrouver l’expert en symbologie Robert Langdon après huit longues années d’attente ! Et cerise sur le gâteau, il est accompagné de Katherine Solomon, brillante scientifique spécialisée en noétique, déjà croisée dans Le Symbole Perdu (troisième opus de la série, paru en 2009). À vrai dire, c’est même Katherine – ou plus exactement son prochain ouvrage – qui se trouve au cœur de cette nouvelle intrigue.

L’essentiel de l’action se déroule à Prague, cité aux mille visages, chargée d’histoire. Autant dire un terrain de jeu idéal pour Robert Langdon. Mais le jeu va vite tourner au cauchemar – pour le plus grand plaisir du lecteur.

Sur le plan thématique, Le Secret Des Secrets est sans doute le roman le plus audacieux de la série. Dan Brown y explore les frontières du savoir et de la foi, s’attaquant à des questions vertigineuses : quelle est l’origine de la conscience ? Que se passe-t-il après la mort ? Et surtout, la science peut-elle réellement répondre à tout ? L’auteur aborde ces sujets à travers une approche résolument scientifique – sans pour autant négliger les dimensions spirituelles –, en confrontant notamment les visions matérialistes et noétiques du monde.

Pour l’anecdote, la noétique, discipline à la croisée de la science et de la philosophie, n’est pas reconnue par la communauté scientifique dans son ensemble. Beaucoup la considèrent comme un courant spéculatif plus que comme une science exacte. Les thèses défendues par Katherine Solomon risquent donc de faire grincer des dents les matérialistes les plus rigides. Pour ma part, je choisis l’ouverture d’esprit : je lis avant tout un roman, non un traité scientifique. Si les idées exposées nourrissent l’intrigue et la réflexion, alors c’est tout bénéfice – et c’est précisément le cas ici.

Ces thématiques permettent aussi à Dan Brown de mettre en garde contre les dérives de la recherche lorsqu’elle tombe entre de mauvaises mains : manipulation mentale, contrôle des consciences, justification politique sous couvert de « sécurité nationale ». Une inquiétante perspective, d’autant plus crédible qu’elle résonne avec les débats contemporains sur l’intelligence artificielle ou les neurosciences.

Comme toujours, on ne peut qu’être admiratif devant l’ampleur du travail documentaire accompli par l’auteur. Dan Brown décrypte littéralement chaque élément de son intrigue. On comprend mieux pourquoi ses romans ne paraissent pas « à la chaîne ».

Outre le duo Langdon–Solomon, le roman offre une galerie de personnages secondaires aussi riches qu’ambigus. Le lecteur, tout comme les héros, apprend à se méfier des apparences : les intentions de chacun sont troubles, les alliances fragiles, et même les mythes prennent une tournure inattendue – à l’image de cet étrange golem, bien différent de la légende que l’on connaît.

L’intrigue, haletante, ne laisse guère de répit ni aux protagonistes ni au lecteur. On court, on doute, on découvre, au rythme d’une mécanique parfaitement huilée. Oui, certaines scènes flirtent parfois avec l’invraisemblance, mais n’est-ce pas justement ce qui fait le charme des aventures de Langdon ? L’essentiel, c’est que la tension ne retombe jamais, et que l’on se surprenne à tourner les pages sans voir le temps passer.

Sur le plan de la construction, Dan Brown reste fidèle à sa recette gagnante : chapitres courts, écriture fluide et visuelle, découpage quasi cinématographique. Rien d’inutile, tout concourt à faire de ce roman un pur page-turner.

Comme je le fais toujours avec les romans de Dan Brown, la tablette est toujours à portée de main afin de pouvoir faire des recherches internet pour avoir un visuel des bâtiments, monuments ou œuvres d’art mentionnés dans le bouquin.

L’attente fut longue, mais quel retour en apothéose ! Dan Brown signe ici un thriller palpitant, où science, spiritualité et suspense s’entrelacent avec une redoutable efficacité.

[BOUQUINS] Didier Fossey – Érèbe

Paris 2017. Depuis plusieurs semaines, des jeunes femmes travaillant dans des cabarets et bars de nuit de la capitale disparaissent mystérieusement.

Eneko Etxeparre, commandant de police à la BRP, s’intéresse à ces disparitions dans le cadre d’une enquête conjointe avec la brigade criminelle de Versailles.

Leurs investigations vont les mener très loin dans les ténèbres de la nuit parisienne, là où tout devient permis.

Didier Fossey oblige. Un auteur qui ne m’a jamais déçu, surtout quand il met en scène Boris Le Guenn et son groupe.

Quand un ancien se plonge dans le côté obscur des nuits parisiennes, ça promet de décoiffer !

On va commencer par un petit bémol de pure forme, la quatrième de couv’ est beaucoup trop « bavarde », c’est pourquoi j’ai pris le parti d’opérer des coupes franches dans sa retranscription.

Dans un premier temps on suit une équipe de la BRP Paris menée par le commandant Eneko Etxeparre. Un flic qui se consacre pleinement à son métier depuis la mort brutale de sa femme et de sa fille lors des attentats de novembre 2015.

Etxeparre et son groupe son spécialisés dans le monde de la nuit, ils s’assurent que les cabarets, discothèques et bars de la capitale ne se laissent pas aller à des dérives illégales.

C’est au cours d’une de ses « visites » que le gérant d’un cabaret l’informe de la disparition d’une de ses barmaids. Etxeparre va mettre son groupe sur le coup en off, afin de voir si ça débouche sur du concret.

Et du concret notre ami Etxeparre va en recevoir bien au-delà de ses attentes. Pour arrêter un tueur d’une perversité hors norme, la BRP va devoir s’associer à la BAC Paris et à la Crim’ Versailles.

Cerise sur le gâteau pour les fidèles lecteurs de Didier Fossey. V’là t’y pas que le commandant Boris Le Guenn et son groupe vont faire figure de guest stars. Je vous rassure tout de suite, pas question pour eux de faire de la figuration, ils vont s’impliquer pleinement dans cette enquête conjointe.

Pour info le titre du roman, Érèbe, est le pseudo utilisé par le grand méchant de l’histoire pour partager son « art » sur le Dark Net. Dans la mythologie grecque Érèbe désigne à la fois une divinité infernale née du chaos et la zone la plus obscure des Enfers.

Autant vous prévenir, les sévices qu’Érèbe inflige à ses victimes sont d’une violence inouïe, âmes sensibles s’abstenir !

Fidèle à son habitude Didier Fossey accorde un soin tout particulier à ses personnages. Pour chacun il développe un vécu et une personnalité unique. Forcément ce côté humain force l’empathie – ou l’antipathie selon l’effet recherché – du lecteur. J’ai tout particulièrement apprécié le binôme formé par Eneko Etxeparre et sa seconde de groupe Isabelle Danglard ; leurs personnalités opposées insufflent une réelle dynamique au récit.

On retrouve la même maîtrise dans le déroulé de son intrigue, imposant un rythme qui va crescendo – la dernière partie du récit mettra vos nerfs et votre palpitant à rude épreuve.  Une intrigue richement documentée du fait de l’expérience policière de l’auteur et des renforts pour le familiariser avec le monde de la nuit en région parisienne.

Ça faisait longtemps que je n’avais pas dévoré un bouquin quasiment d’une traite (certes il n’est pas très épais, mais quand même). En refermant le bouquin je ne vous cacherai pas que j’espère bien retrouver Etxeparre et son équipe, nul doute que le monde de la nuit est un terrain de jeu prospère.

[BOUQUINS] Estelle Tharreau – L’Alpha & L’Oméga

Cédric est l’enfant non désiré de Nadège Solignac, tueuse en série.

Au fil du temps, il découvre son passé familial et tente de grandir sous l’ombre meurtrière de sa mère.

Mais un tel monstre peut-il aimer ? Peut-on seulement lui survivre ?

La principale raison tient à la maison Taurnada. Je leur suis d’une fidélité indéfectible, j’essaye de ne passer à côté d’aucun de leurs titres… Même si dans le cas présent je poste cette chronique avec un retard assumé.

Si l’auteure, Estelle Tharreau, ne m’a jamais déçu (bien au contraire), j’avoue que j’ai éprouvé un plaisir malsain à l’idée de retrouver le personnage de Nadège Solignac. Un sacré spécimen tout en noirceur et totalement dénué d’empathie, que l’on avait découvert dans Mon Ombre Assassine.

Je remercie chaleureusement les éditions Taurnada et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée. Je profite aussi de cette chronique pour m’excuser auprès de Joël pour le retard pris dans mes lectures. J’ai en effet de nombreux titres des éditions Taurnada en attente, je m’engage à tous les lire et chroniquer chacun d’entre eux… en revanche je ne peux m’engager sur un délai pour ces retours.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je vous recommande vivement de lire Mon Ombre Assassine avant de vous lancer dans ce roman. Vous aurez ainsi en main toutes les clés de « l’Affaire Solignac », un atout indéniable pour comprendre et apprécier pleinement tous les tenants et les aboutissants de L’Alpha & L’Oméga. Si vous comptez suivre ce conseil, je vous invite à ne pas aller plus loin dans la lecture de cette chronique.

Alpha : première lettre de l’alphabet grec, dans une meute (ou dans un groupe) désigne le(s) leader(s).
Oméga : dernière lettre de l’alphabet grec, dans une meute désigne les individus se situant au bas de la hiérarchie. L’oméga pourra servir de souffre-douleur au reste de la meute, mais il est aussi possible qu’il joue un rôle de médiateur afin de faire baisser les tensions et éviter les hostilités.

C’est avec un réel plaisir que j’ai retrouvé le personnage de Nadège Solignac, tueuse en série implacable dont la noirceur d’âme n’a d’égale que son absence d’empathie. Bien que déclarée innocente par la justice, elle est mise au ban de la société par la rumeur. Mais elle s’en fout, du moment qu’elle peut mener sa vie comme elle l’entend et poursuivre ses « petites affaires ».

Les choses vont toutefois se compliquer quand elle va mettre au monde un fils. Comme toute mère bien attentionnée, la première question qui lui vient à l’esprit et de savoir s’il doit vivre ou si elle doit s’en débarrasser. Ne parvenant pas à trancher, elle opte pour une solution à la Nadège Solignac, s’il survit à sa mise à l’épreuve alors soit, sinon… bin tant pis.

Dès lors le roman va s’articuler autour de trois points de vue, celui de Nadège bien entendu, celui de Cédric, son fils, et – dans une moindre mesure – celui de Julien (le frère de Nadège). Estelle Tharreau nous invite à suivre une intrigue qui va s’étaler sur plusieurs années. Fidèle à son habitude, elle décortique avec intelligence la personnalité de chacun, nous offrant un thriller psychologique d’une rare intensité.

Alpha & Oméga. Nadège & Cédric. Mais la hiérarchie n’est pas figée dans le marbre… Avec l’éducation que lui a prodigué Nadège, il est plus que probable que Cédric se verrait bien devenir l’Alpha… Mais quand ? Et à quel prix ?

L’auteure nous tient en haleine sans tomber dans la facilité de la surenchère, tout se joue en finesse dans une implacable guerre des nerfs. On découvre de nouveaux pans de la face cachée de la très respectable famille Solignac, avec une ultime révélation qui ne manquera pas de vous laisser sur le cul.

Plus le temps passe, plus le lecteur réalise que Cédric est bien le fils de sa mère… pour le meilleur et pour le pire. Une fois de plus, Estelle Tharreau nous offre un roman coup de poing parfaitement orchestré, de la première à la dernière page.

[JEUX VIDEO] Clair Obscur – Expedition 33

Système d’exploitation : Windows 10
Processeur : Intel i7-8700K ou Ryzen 5 1600X
RAM : 8 Go
Carte graphique : NVidia GTX 1060 6 Go ou AMD RX5600XT 6 Go
Espace disque : 55 Go

À la tête de l’Expédition 33, partez éliminer la Peintresse pour que plus jamais elle ne peigne la mort.

Explorez un monde rappelant la France de la Belle Époque et affrontez des ennemis uniques dans ce RPG au tour par tour avec mécaniques de temps réel.

Si vous vous intéressez un temps soit peu à l’univers du jeu vidéo, vous ne serez sans doute pas passer à côté du méga coup du cœur du moment, Clair Obscur – Expedition 33. Un jeu 100% made in France. Cocoricooo pour un tire qui bat tous les records ! Expedition 33 ce sont plus de deux millions d’exemplaires vendus (toutes plateformes confondues) en moins de 15 jours, et les retours des joueurs sont majoritairement dithyrambiques.

Impossible, pour le fan de jeu de rôles que je suis, de faire l’impasse sur ce titre. Il me fallait ensuite avoir une expérience de jeu suffisante (une quinzaine d’heures) pour vous proposer une chronique aussi objective que possible… Clairement, à chaud j’aurai pondu quelques lignes à 100% positives, alors que là je peux me permettre d’être plus critique : on va dire du positif à 99% !

Dès le prologue vous en prenez plein les mirettes, le décor fait effectivement penser au Paris de la Belle Époque… Profitez en, une fois sur le continent vous n’aurez guère le temps de vous extasier devant les paysages (ce qui ne vous empêchera de profiter pleinement de la qualité graphique irréprochable).

Ce prologue fait aussi office de tutoriel, notamment afin de vous initier au système de combat au tour par tour. Un choix audacieux qui prendra tout son sens au fur et à mesure de la progression de vos personnages. mais je reviendrais sur ce point ultérieurement.

Prenez votre temps lors de ce prologue pour faire le tour des possibilités et essayer de glaner quelques objets susceptibles de vous servir par la suite (notamment dans la seconde partie, sur la scène du Festival). En effet il n’y aura pas de retour en arrière possible une fois l’Expédition 33 partie.

Honnêtement je pense pouvoir affirmer que c’est la première fois que je trouve que la musique d’un jeu vidéo apporte un réel plus au scénario. Évidemment c’est indiscutable au cours des nombreuses cinématiques qui viendront s’insérer dans votre aventure, mais aussi dans les phases d’exploration. Elle vient en effet renforcer les émotions qui ne manqueront pas de vous traverser au fil du jeu.

Vous avez un doute sur ce dernier point ? Allez sur Youtube et cherchez Expédition 33 gommage Sophie, lancez l’extrait proposé par Momoterasu et osez me dire que ça vous laisse de marbre. Je peux vous assurer qu’en jeu, connaissant le lien et l’histoire de Sophie et Gustave, l’effet est décuplé.

À peine l’Expédition 33 posera-t-elle le pied sur le continent que vous comprendrez pourquoi personne n’est jamais revenu de ces expéditions. Votre aventure commence vraiment à cet instant… et Gustave sera votre seul personnage.

En terme d’exploration aussi les équipes de Sandfall Interactive naviguent à contre-courant. Pas de monde ouvert comme vous pouvez en trouver dans Skyrim ou Dragon Age Inquisition. Ici vous voyagerez sur un continent divisé en plusieurs zones de d’exploration, la quête principale vous invite à passer d’une zone à l’autre de façon relativement linéaire. Heureusement de nombreuses zones optionnelles vous permettront de diversifier votre expérience de jeu, et même dans les zones « passage obligé » vous aurez accès à de nombreuses quêtes secondaires.

Ces différentes zones d’exploration vous offrent une grande variété de décors, mais pas toujours évident de se repérer. Une carte qui se dessinerait progressivement, au fur et à mesure de notre parcours, eut été un plus appréciable. Heureusement des zones de repos permettent un voyage rapide de l’une à l’autre. Encore faut-il se souvenir d’où se trouve tel personnage ou tel lieu si besoin d’y retourner pour compléter une quête.

Au fil de l’aventure, Gustave va retrouver quelques compagnons d’infortune, votre équipe va ainsi progressivement se renforcer. Chaque personnage à sa propre technique de combat, à vous de faire évoluer ses points d’attributs, ses compétences et son équipement afin d’optimiser son efficacité. À ces critères d’évolution habituel du jeu de rôle, viendra s’ajouter l’utilisation de pictos et de points de lumina, maîtriser ces éléments deviendra rapidement impératif tant ils peuvent améliorer les performances au combat de vos personnages.

Comme indiqué précédemment Sandfall Interactive a tout misé sur le combat au tour à tour, adapter sa stratégie à son adversaire sera bien souvent la clé de la survie, pas question de foncer dans le tas comme un bourrin et détruire la barre d’espace du clavier afin d’enchaîner les coups. Utilisez les bonnes compétences de chacun de vos combattant et surtout ne négligez pas les parades et les contres. Vous serez rapidement convaincu par ce système de jeu qui impliquerez de réfléchir même au cœur de l’action.

Je pourrai encore vous parler du jeu pendant des plombes tant il y a de – bonnes – choses à dire, mais je suis convaincu que nombre de lecteurs ont déjà renoncé à lire ce post dans son intégralité. Je vous invite donc à découvrir sans plus tarder cette pépite afin de vous faire votre propre idée sur la chose.

Ah si, un dernier mot avant de vous laisser vaquer à vos occupations. Une fois la quête principale achevée vous pourrez continuer à explorer le continent et à faire progresser vos personnages pour affronter des ennemis jusqu’alors impossible à terrasser.

[BOUQUINS] Emil Ferris – Moi, Ce Que J’Aime C’est Les Monstres – Livre Deuxième

Le meurtre d’Anka Silverberg, la muse sombre et survivante de l’Holocauste de Karen Reyes n’a toujours pas été élucidé. L’arrestation de son voisin, la gangster Kiri Jack Gronan, a soulevé un coin du voile noir qui flotte sur son quartier, dans les années 1960, laissant entrevoir un monde en ébullition constitué de prostituées et de truands, d’êtres fantomatiques et de hippies. Et la mort de sa tendre maman a laissé un vide sidéral dans l’âme déjà chamboulée de Karen. Mais Uptown n’attend pas…

Notre petite artiste doit désormais faire face à une vie nouvelle où tout tremble et vacille, et dans laquelle même les quelques certitudes qu’elle avait semblent sur le point de voler en éclats. Mais Karen est un être farouche – 1/3 loup-garou, 1/3 détective, 1/3 enflammée. Toute de curiosité, d’imagination et de compassion, elle veut désormais bannir de son existence les tabous et les mensonges censés la protéger mais qui ont fini par empoisonner ses rêves.

Comme annoncé à la fin de ma chronique du premier opus du roman graphique Moi Ce Que J’Aime C’Est Les Monstres, j’enchaîne rapidement avec le second volume.

Ce second livre est la suite directe du précédent même s’il se concentre davantage sur Karen et son entourage. A commencer par elle-même qui assume pleinement son orientation sexuelle – et ce malgré les protestations posthumes de maman. C’est d’ailleurs peut-être une conséquence directe du décès de sa mère, si la jeune fille se referme moins sur elle-même.

Si elle entretenait déjà une relation privilégiée avec son grand frère, Deeze, elle va s’investir encore davantage dans cette relation. Si elle se doutait bien que le frangin n’était pas un enfant de chœur, elle était loin d’imaginer jusqu’à quel point il s’était embourbé. Pour échapper à la conscription et à l’envoi au Vietnam, il fait office d’homme de main – plus main de fer que gant de velours – pour un caïd du milieu.

Ce second opus accorde aussi une plus grande place aux personnages secondaires, certains déjà croisés dans le premier livre (le Cerveau et Franklin) prendront une place plus importante dans l’intrigue ou révèleront une facette inattendue de leur personnalité. D’autres feront leur apparition, la plus importante, pour Karen en tout cas, étant certainement Shelley.

Et Anka Silverberg, la belle voisine prétendument suicidée, dans tout ça ? Si le mystère autour de sa mort semble se dévoiler progressivement, il subsiste toutefois quelques zones d’ombre dans le déroulé exact des faits. Nous n’apprendrons par grand-chose de plus sur son passé au cœur de l’Allemagne nazie… et pourtant on se doute bien qu’il y a encore beaucoup à découvrir.

On pourrait penser que cette absence de continuité frustrerait le lecteur, mais il n’en est rien. Les autres aspects du récit, que ce soit par leur densité ou leurs thématiques, comblent sans mal ce vide. On comprend sans mal que Karen a d’autres chats à fouetter, même si elle n’oublie pas totalement la promesse qu’elle s’est faite de découvrir toute la vérité sur la mort d’Anka.

Je ne reviendrai pas sur la qualité du dessin et la claque visuelle qui en ressort, je me suis suffisamment étendu sur le sujet lors de ma chronique du précédent opus.

Il y a toutefois un élément visuel que j’avais oublié de mentionner et qui a pourtant son importance puisqu’il s’agit du chapitrage du récit. Afin de rester dans la thématique chère à Karen, chaque chapitre s’ouvre sur la représentation (fictive) de la couverture d’un magazine Pulp.

Vous l’aurez compris en lisant ma chronique, ce second livre n’est pas le dernier de la série (contrairement à ce que j’imaginais), il reste pas mal de points en suspens et de questions sans réponses. Il va donc falloir s’armer de patience (moins de 7 ans ? on y croit) pour découvrir la suite. J’espère que le tome 3 restera la priorité d’Emil Ferris, plutôt que le prequel annoncé.

Encore une fois je tiens à remercier les éditions Monsieur Toussaint Louverture qui nous offrent une version française qui fait honneur à l’original.

[BOUQUINS] Emil Ferris – Moi, Ce Que J’Aime C’est Les Monstres – Livre Premier

Chicago, fin des années 1960. Karen Reyes, dix ans, adore les fantômes, les vampires et autres morts-vivants. Elle s’imagine même être un loup-garou : plus facile, ici, d’être un monstre que d’être une femme.

Le jour de la Saint-Valentin, sa voisine, la belle Anka Silverberg, se suicide d’une balle en plein cœur. Mais Karen n’y croit pas et décide d’élucider ce mystère. Elle va vite découvrir qu’entre le passé d’Anka dans l’Allemagne nazie, son propre quartier prêt à s’embraser et les secrets tapis dans l’ombre de son quotidien.

Les monstres, bons ou mauvais, sont des êtres comme les autres, ambigus, torturés et fascinants.

Attention OLNI (objet littéraire non identifié) en approche. Attention chef d’œuvre.

Ça fait déjà quelques années que ce roman fait partie de ma bédéthèque, j’attendais simplement la sortie du second tome pour pouvoir enchaîner sans attendre (il aura quand même fallu patienter sept ans pour découvrir le diptyque dans son intégralité).

Pour un premier essai Emil Ferris a placé la barre haut, très haut même ! Il lui a fallu six ans de travail pour venir à bout de son roman graphique, un pavé de plus de 800 pages. La genèse du bouquin, expliquée sur le rabat de la quatrième de couverture, est aussi extraordinaire que le bouquin lui-même. Je n’en dirai pas plus, les plus curieux – et accessoirement les plus fainéants – peuvent toutefois aller sur la page Wikipédia de l’auteure pour en apprendre davantage.

Avant de découvrir le fond, c’est d’abord la forme qui frappe le lecteur. Ça envoie du lourd (au sens propre, comme au figuré). Emil Ferris opte en effet pour un dessin presque exclusivement réalisé au stylo-bille (un choix d’autant plus audacieux qu’il laisse peu de marge pour les corrections… un loupé et c’est toute la planche qu’il faut redessiner) et donne vie à ses illustrations à grand renfort de hachures. D’autre part l’auteure revendique sa volonté de casser les codes de la bande dessinée traditionnelle, optant pour une mise en page qui peut, de prime abord, paraître chaotique, avant de s’avérer parfaitement réfléchie.

Au fil des pages nous suivrons Karen Reyes, une jeune fille pas forcément très bien dans sa peau qui cache son mal-être sous un déguisement de loup-garou. Le bouquin se présente comme un mix entre journal intime et carnet de croquis, Karen nous raconte pêlemêle son quotidien auprès de sa mère et de son frère Deeze, son « enquête » sur la mort de la voisine, Anka Silverberg, qui va la plonger au cœur de l’Allemagne nazie et ses réflexions sur la société américaine. Là encore ça peut paraître un peu fourre-tout, mais à aucun moment le lecteur ne se sentira perdu.

Difficile de ne pas ressentir d’empathie pour le personnage de Karen, son histoire est plaidoyer pour le droit à la différence, ou plus exactement pour le droit d’être soi-même, sans avoir à se soucier de ce qu’en penseront les autres. J’ai aussi eu un faible pour le frangin, Deeze, un curieux mélange de bad boy et de Dom Juan.

Au fil des pages on trouvera de nombreuses références à l’art, avec notamment des reproductions de l’auteure de toiles existantes. J’avoue que je n’ai pu résister à l’envie de comparer les œuvres originales avec les reproductions de l’auteure et son style graphique très particulier, force est de constater que le résultat est bluffant.

Dès sa publication le bouquin a connu un énorme succès public et critique mais il a aussi été salué par de grands noms de la bande dessinée contemporaine (notamment part Art Spiegelman, l’auteur du roman graphique Maus). Il s’est aussi imposé dans de nombreux festivals dédiés à la BD, raflant plusieurs prix, dont Eisner en 2018 (meilleur album, meilleur auteur et meilleure colorisation) et le Fauve d’or (distinction qui récompense le meilleur album) au festival d’Angoulême 2019.

Un grand merci aux éditions Monsieur Toussaint Louverture qui nous livre une véritable œuvre d’art, grâce à leur travail, le contenant est à la hauteur du contenu.

Je m’en vais de ce pas (ou presque) me lancer dans la lecture du second opus.

[BOUQUINS] Patrick Senécal – Civilisés

« Recherchons douze individus pour expérience scientifique passionnante. Celle-ci, supervisée par des psychologues, cherche à étudier et analyser les compor­­tements des humains lorsqu’ils se retrouvent dans un groupe précis dans un contexte particulier. […] »
 
Ils seront donc douze individus, provenant de tout horizon, à vivre quelques jours ensemble, isolés du reste du monde. Ils formeront malgré eux une communauté de laquelle surgira parfois le meilleur, parfois le pire, et souvent le plus ridicule de l’humain.

Force est de reconnaître que la couv’ attire inévitablement le regard ; je ne dis pas forcément que vous serez sous le charme – l’effet contraire étant tout aussi probable –, mais elle ne devrait laisser personne indifférent.

Parce que c’est Patrick Senécal. Ce n’est que le troisième roman que je lis de cet auteur, mais la quatrième de couv’ laisse présager quelque chose de différent de ce qu’il propose d’habitude.

Commençons par une remarque de pure forme. Si la couv’, signée Jeik Dion, capte tout de suite le regard, force est toutefois de reconnaître qu’elle n’a pas grand-chose à voir avec l’intrigue du présent roman.

Afin de demeurer sur la forme, je tiens à préciser que, dans la mesure du possible, je cherche à privilégier les éditions québécoises quand je lis des textes d’auteurs originaires du Québec. Je trouve que cela rend les échanges entre les personnages plus réalistes, plus bruts de décoffrage. C’est aussi l’occasion de relever – gentiment – les contradictions de ces fervents défenseurs de la langue française qui n’hésitent pourtant pas à ponctuer leurs propos de termes 100% anglais.

Fin des digressions de pure forme… entrons dans le vif du sujet !

Tout commence (ou presque) par une petite annonce publiée en novembre 2022 dans différents médias québécois. Ladite annonce s’ouvre sur ces termes :

Et s’achève par une promesse :

Sans vouloir aller trop vite en besogne je peux d’ores et déjà vous assurer que la promesse finale sera tenue… au-delà de tout ce que pouvaient imaginer les candidats !

Dès les premières lignes du roman on découvre que Patrick Senécal va s’amuser avec ses lecteurs au fil des pages. Il s’adresse directement à nous afin de partager quelques remarques sur le processus de création littéraire, d’autres fois simplement pour souligner tel ou tel point du récit. Du coup, bien que la situation de nos « heureux élus » vire au drame sanglant et mortel, on ne peut s’empêcher un certain détachement, comme si tout cela n’était qu’un jeu macabre imaginé par l’auteur. Une sensation renforcée par le recours fréquent à l’humour (noir, forcément).

Au terme du processus de sélection, douze candidats seront retenus pour participer à cette expérience, des profils très différents les uns des autres. Ladite expérience commencera dès leur embarquement sur un yacht de luxe, ils ne savent rien de leur destination, ni du déroulé de leur « aventure ». Tout ce qu’ils savent c’est qu’ils partent pour 10 jours au terme desquels ils seront indemnisés de 3000 dollars.

Quant à toi ami lecteur, tu devineras sans peine quel sera le grain de sable qui va faire dérailler une mécanique moins bien huilée qu’elle n’y paraît. Force est de constater que tu avais raison, dès la seconde phase de l’expérience les choses dérapent et échappent à tout contrôle… et que ce foutu grain de sable est bien celui que tu soupçonnais.

Avec son lot pour le moins hétéroclite de candidats (de moins en moins heureux d’avoir été sélectionnés) l’auteur peut, au gré de ses envies, les faire se rapprocher ou s’opposer sur fond de thèmes sociétaux d’actualité (la « culture » woke, les rapports au sexe ou à l’intégration, le racisme, la drogue…). Mais ne comptez pas sur Patrick Senècal pour vous assommer avec des leçons de morale à deux balles, ses personnages sont ce qu’ils sont, point barre.

Vous l’aurez compris, l’auteur abandonne le sérieux de ses précédents romans. S’il reste dans le registre noir c’est pour mieux jouer avec les codes du genre, les remanier et les tordre, quitte à parfois provoquer des situations totalement invraisemblables. Mais on s’en fout ! On a juste envie de suivre Patrick Senécal pour découvrir où nous mènera son grain de folie.

Nul doute que derrière ce détachement apparent, la dernière journée des survivants (si vous n’aviez pas encore compris qu’il y aurait des morts, je suis navré pour vous) vous réservera bien des surprises.

Je ne m’attarderai pas sur le profil des différents candidats, disons simplement qu’il y en a une qui a eu le don de m’horripiler tout au long de sa présence. L’archétype presque caricatural de la woke attitude qui a honte de sa couleur de peau, honte de sa sexualité, honte d’exister et qui ne peut s’empêcher de se sentir complice /coupable de toutes les tares de l’humanité… Le profil type du très-bien-vivre-ensemble sur fond de politiquement correct dopé à l’hypocrisie et à la bien-pensance.

Un roman original que vous aurez bien du mal à lâcher. Si le choix narratif de l’auteur peut, de prime abord, paraitre déconcertant, force est de reconnaitre que l’ensemble fonctionne à la perfection, en grande partie du fait de ce choix justement.

[BOUQUINS] Guillaume Clicquot – Prenez-Moi Pour Une Conne

AU MENU DU JOUR


Titre : Prenez-Moi Pour Une Conne
Auteur : Guillaume Clicquot
Éditeur : Fayard
Parution : 2023
Origine : France
324 pages

De quoi ça cause ?

« Je m’appelle Orane de Lavallière, j’ai 58 ans. J’ai sacrifié tous mes diplômes pour me dévouer à ma famille et à la réussite de mon mari, Xavier. Ma mission de mère au foyer accomplie, ce salopard m’a quittée pour une jeunette. Une histoire banale. Il m’a prise pour une conne, et il n’avait pas tort. Endormie par mon confort de vie et aveuglée par mes certitudes de petite bourgeoise naïve et coincée, je n’ai rien vu venir. Xavier m’a détruite. Je me suis relevée. Pourtant son souvenir m’obsède, son existence me ronge. Je me sens impuissante. À moins que… »

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Avant toute chose c’est le titre du roman qui a attisé ma curiosité, le pitch a fait le reste.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

J’avoue sans aucune honte qu’avant de croiser ce roman via Net Galley je ne connaissais pas du tout Guillaume Clicquot mais, paradoxalement j’ai déjà eu l’occasion de me frotter à son travail, ses précédents romans Garde Tout, Surtout Les Gosses (2015) et Poivre Et Sel (2018) ayant tous les deux fait l’objet d’adaptations cinématographiques (respectivement Papa Ou Maman et Joyeuse Retraite, films sur lesquels il a endossé la casquette de scénariste).

Tout au long du roman l’auteur laisse la parole à Orane de Lavallière, femme trahie et bafouée par son mari, qui va passer du chagrin, à la colère… et plus si affinités. En attendant le résultat de sa mise en scène, elle nous raconte son histoire, sa vie de famille et de couple.

Comme dans un épisode de Columbo on sait d’entrée de jeu qui est la victime et qui est la coupable. Autant dire que le côté strictement policier du roman est secondaire.

Nous avons donc un macchabée et une coupable mais en l’occurrence nous d’emblée envie de prendre parti pour Orane qui nous apparaît comme la véritable victime dans cette histoire. Victime d’un sale type, égoïste, infidèle et lâche (il plaque sa femme par mail… après 3 enfants et 33 ans de vie commune).

Donc cette « brave » Orane décide que finalement la meilleure option est de supprimer son ordure d’ex-mari. Mais voilà, il ne faut pas faire n’importe quoi et encore moins n’importe comment, pas question de se faire épingler par les flics. Ce salopard ne mérite pas que justice lui soit rendue.

C’est donc à grand renfort de romans policiers, de séries TV et de programmes judiciaires comme « Faites entre l’accusé » ou « Enquêtes criminelles », qu’elle va peaufiner son plan et surtout répertorier les erreurs à ne pas faire.

Toute cette partie du récit a quelque chose de réellement jubilatoire, bien que l’on sache pertinemment que si le plan fonctionne un homme mourra. J’avoue sans complexe que l’on éprouve un plaisir sadique à suivre Orane dans ses préparatifs.

Le reste du roman est dans la même veine, cela peut paraitre cruel et amoral de se réjouir de la mort de quelqu’un mais je suis incapable de porter le moindre jugement contre Orane. Tout comme je suis incapable de juger une femme qui bute le mec qui lui fait vivre un enfer… c’est presque dommage qu’il n’y en ait pas plus qui franchissent le pas, ça éviterait bien des féminicides.

Alors happy end ou triomphe de la justice ? Ne comptez pas sur moi pour vous révéler le fin mot de l’histoire.

Un grand merci à Guillaume Clicquot pour ce roman que j’ai dévoré d’une traite. Typiquement le genre de bouquin qui met du baume au cœur. En le refermant vous réaliserez que sous couvert d’humour et de second degré, l’auteur nous questionne sur la place de la femme dans notre société qui s’affirme moderne et égalitaire.

Attention ça piquer…

Je me permets une petite remarque à l’attention de l’auteur et accessoirement des relecteurs et correcteurs. À de nombreuses reprises dans le roman on trouve un problème de guillemet fermé à la place du guillemet ouvert ainsi « Fête des Mères » devient »Fête des Mères ». Ce n’est pas que ce soit rédhibitoire mais à force de se répéter ça fini par piquer les yeux.

Dans le même ordre d’idée, on retrouve quelques erreurs résiduelles (fautes d’accent surtout) qui n’auraient pas dû échapper à un correcteur vu que même Word tique face à ce genre de coquilles.

D’ailleurs tant que je suis dans la suite Microsoft Office, le tableur s’appelle Excel et non Exel.

Je le répète ce n’est nullement rédhibitoire mais je pense sincèrement que ce sont des maladresses qui auraient pu facilement être évitées / corrigées.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Stephen King – Conte De Fées

AU MENU DU JOUR


Titre : Conte De Fées
Auteur : Stephen King
Éditeur : Albin Michel
Parution : 2023
Origine : États-Unis
736 pages

De quoi ça cause ?

Charlie Reade, 17 ans, est un lycéen comme les autres, jusqu’au jour où il vient en aide à un voisin reclus et irascible, Howard Bowditch. La relation entre le vieil homme et l’adolescent, tendue au début, va peu à peu évoluer vers une confiance mutuelle, voire une amitié improbable. Jusqu’à ce que Howard révèle à Charlie un secret qui va à jamais changer sa vie…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

C’te question ! Stephen King, le seul et unique.

Ma Chronique

Stephen King est un touche-à-tout qui réussit presque à tous les coups à surprendre ses lecteurs (je n’ai toujours pas digéré Sleeping Beauties, même si depuis il a largement su se faire pardonner). Ce n’est pas la première fois qu’il met en scène des univers parallèles (Le Talisman Des Territoires, coécrit avec feu Peter Straub), tout comme il s’est déjà essayé à la fantasy avec Les Yeux Du Dragon (plutôt destiné à un public jeune) ou encore le cycle de La Tour Sombre (il faut absolument que je trouve le temps – c’te bonne blague – de le reprendre depuis le début et d’aller jusqu’au bout cette fois).

Dès la dédicace le King annonce la couleur en pensant à REH (Robert E. Howard, créateur, entre autres, de Conan et Solomon Kane), ERB (Edgar Rice Burroughs, papa notamment de Tarzan et de John Carter) et bien évidemment l’incontournable HPL (H.P. Lovecraft, père fondateur du mythe de Cthulhu).

Un petit mot sur la forme avant d’entrer dans le vif du sujet, chaque chapitre (il y en 32, plus l’épilogue) est présenté par une illustration de Gabriel Rodriguez (chapitres impairs) ou de Nicolas Delort (chapitres pairs). Un choix qui ne s’imposait sans doute pas mais qui ajoute un incontestable bonus esthétique au roman, même si certaines viennent spoiler la suite des événements (je pense surtout au sort du Grand Intendant).

Qui saurait mieux raconter cette histoire que Charlie lui-même ? L’auteur opte donc naturellement pour un récit à la première personne avec son jeune héros comme narrateur.

Charlie prend le temps de nous raconter son histoire et notamment les épreuves qu’il a dû traverser (le décès brutal de sa mère et l’alcoolisme de son père en réponse à ce drame). On pourrait penser que c’est juste afin de faire pleurer dans les chaumières mais ce serait mal connaître le King. Rien n’est laissé au hasard sous la plume du maître, sans ces deux épreuves Charlie n’aurait sans doute pas pris les mêmes engagements vis-à-vis de M. Bowditch.

Vient ensuite la rencontre avec M. Bowditch alors que ce dernier est en bien mauvaise posture… et le coup de foudre de Charlie pour la chienne Radar. Puis l’on suit l’évolution de la relation entre le vieil homme et l’adolescent. C’est à travers cette relation que l’on éprouve rapidement de l’empathie pour ce vieux grincheux (pas de problème au niveau de Charlie, il gagne immédiatement nos cœurs).

Stephen King n’a pas son pareil pour décrire cette relation intergénérationnelle, ainsi que lien qui va se nouer entre Charlie et Radar. Il ne se passe grand-chose de vraiment palpitant pendant ce premier tiers du roman, et pourtant le lecteur (moi en tout cas) ne s’ennuiera jamais tant le récit est vivant et vibrant d’humanité.

Et puis tout bascule. Charlie apprend qu’il existe un mode parallèle, Empis, auquel on peut accéder en descendant un long escalier camouflé par le cabanon de jardin de M. Bowditch. Sceptique dans un premier temps, Charlie va constater par lui-même que son vieil ami ne délirait pas en lui faisant ces révélations.

Dans un premier temps c’est par amour pour Radar que le jeune homme va s’aventurer dans les profondeurs d’Empis et affronter les dangers de la Citadelle. Frappé par l’injustice qui dévaste les habitants d’Empis, soumis à la folie vengeresse d’un tyran de plus en plus incontrôlable, Charlie va prendre fait et cause pour les Empisariens.

Là encore le talent de conteur de Stephen King fait des merveilles. Il donne véritablement vie à ce monde imaginaire. Pour ce faire il puise dans les contes de fées, dans leur forme originelle, pas les versions aseptisées et édulcorées de Disney, mais aussi et surtout dans l’univers de Lovecraft (souvent cité par Charlie).

On découvre alors de nouveaux personnages, parfois surprenants, pour ne pas dire déroutants (à l’image du Snab). Des réfugiés qui essayent tant bien que mal d’échapper au fléau gris qui s’étend inexorablement, les condamnant à une lente et douloureuse agonie. Une famille royale en déroute, frappée elle aussi par une terrible malédiction. Des habitants « sains » (comprendre épargnés par le gris) pourchassés par les troupes du tyran et emprisonnés dans les pires conditions.

Dans le camp du Mal il faudra se montrer patient pour découvrir le tyran en question… mais il sera à la hauteur de sa sinistre réputation. Avant ça nous aurons croisé le chemin d’une géante cannibale et pétomane, d’une escouade de morts-vivants électrifiés et bien d’autres surprises… souvent mauvaises pour Charlie et ses amis.

Alors oui certains diront que c’est un tantinet manichéen, mais après tout Stephen King nous offre un conte de fée pour adultes dans un univers où tout est permis. Le combat qui oppose le Bien au Mal n’a jamais cessé – et ne cessera sans doute jamais – d’être source d’inspiration pour les auteurs. À ce petit jeu Stephen King et son Conte De Fées tirent leur épingle du jeu.

MON VERDICT

Illustration de Nicolas Delort

Illustration de Gabriel Rodriguez