[BOUQUINS] Thomas Perry – The Old Man

Ancien agent du Renseignement militaire américain, Dan Chase a été envoyé en Libye au début des années 1980. Sa mission : fournir 20 millions de dollars à un chef de guerre hostile à Kadhafi. Mais l’opération a mal tourné.

Trente-cinq ans ont passé. Chase vit en solitaire dans le Vermont avec ses deux chiens. Jusqu’au jour où son ancienne vie le rattrape.

Pour échapper à ceux qui veulent l’abattre, Chase se lance dans une longue cavale à travers les États-Unis et le Canada. Avant de comprendre qu’il n’a d’autre choix que de solder les comptes du passé…

C’est la couv’ qui a d’abord attiré mon attention, ce type de deux accompagné par deux gros chiens ça a titillé ma curiosité. Le pitch a fait le reste du job.

Je remercie chaleureusement les éditions L’Archipel et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

J’avoue très honnêtement que je n’avais jamais entendu parler de Thomas Perry avant de découvrir ce roman. Le gars n’en est pourtant pas à son coup d’essai puisque The Old Man est son vingt-troisième roman, dont plusieurs ont été traduits en français par diverses maisons d’édition (Presses de la Cité, Albin Michel, Fayard…).

Pour être totalement honnête je ne sais pas si ce roman aurait fait l’objet d’une traduction s’il n’avait fait l’objet d’une adaptation en série TV pour la chaîne FX en 2022 avec Jeff Bridges dans le rôle-titre. En France la diffusion est assurée par Disney+ à compter de septembre 2022.

N’allez surtout pas croire que je dis ça parce que le bouquin est sans intérêt, loin de là. Je l’ai trouvé captivant de bout en bout.

L’auteur nous fait vivre une chasse à l’homme haletante, d’abord du point de vue du fugitif, puis de ceux qui le traquent. On aurait pu craindre une certaine redondance, passant des épisodes de répit (durant lesquels Dan Chase s’installe dans sa nouvelle identité tout en préparant une éventuelle fuite) et ceux de traque, mais il n’en est rien. Tout est bien ficelé et rondement mené pour nous tenir en haleine.

On apprend progressivement le pourquoi du comment de cette chasse à l’homme, difficile alors de ne pas prendre fait et cause pour le fugitif ! Et puis un gars qui accorde autant d’attention à ses chiens ne peut qu’être un chic type.

Il faut dire que Thomas Perry fait tout pour rendre son personnage attachant, malgré un côté calculateur, voire manipulateur… mais comme dans tout roman d’espionnage, difficile de savoir exactement qui manipule qui.

Ne vous fiez pas à son âge, le bonhomme est parfaitement rôdé (passage par les Forces Spéciales et expérience de terrain obligent) pour déjouer les plans de ses poursuivants et éventuellement neutraliser ceux qui viennent se frotter à lui d’un peu trop prés.

Du côté des poursuivants j’ai bien aimé le personnage de Julian Carson, un « consultant » engagé par les agents du gouvernement pour les assister dans leur chasse à l’homme. Mais le jeune homme a oublié d’être bête, il ne va pas suivre aveuglément consignes de ses supérieurs mais essayer d’en apprendre plus sur le vieil homme.

Même si l’intrigue pourrait paraître cousue de fil blanc, elle vous réservera toutefois quelques surprises pour le moins inattendues (notamment concernant un personnage secondaire du roman).

Je ne m’épancherai pas davantage sur les personnages et l’intrigue car cela m’amènerait inévitablement à être un peu trop dissert et à donner un indice majeur sur la phrase suivante (suce pince…).

Si je me suis régalé quasiment de la première à la dernière page, j’ai toutefois un petit bémol sur le final du roman. Je ne peux malheureusement pas en dire plus, disons simplement que j’espérais autre chose.

[BOUQUINS] Stephen King – Holly

Dans une jolie maison victorienne d’une petite ville du Midwest, Emily et Rodney Harris, anciens professeurs d’université, mènent une vie de retraités actifs. Malgré leur grand âge, les années semblent n’avoir pas avoir de prise sur eux.

À quelques pas de leur demeure, on a retrouvé le vélo de Bonnie Dahl, récemment disparue. Elle n’est pas la première à se volatiliser dans ce périmètre. Chose étrange : à chaque fois, il s’agit de jeunes gens.

Sur l’insistance de la mère de Bonnie, Holly Gibney accepte de reprendre du service. Elle est loin d’imaginer ce qui l’attend : une plongée dans la folie humaine, là où l’épouvante n’a pas de limite.

Stephen King, what else ?

Les inconditionnels de Stephen King savent pertinemment que leur auteur fétiche peut mettre leurs nerfs à rude épreuve sans avoir recours au fantastique. Souvenez-vous de la solitude et de l’angoisse de Jessie, menottée à son lit dans un chalet paumé au milieu de nulle part, le cadavre de son mari gisant au pied du lit (Jessie, 1993). Osez affirmer que Annie Wilkes ne vous a pas donné quelques sueurs froides emportée par sa folie (Misery, 1989). Ou encore plus récemment avec le très bon Billy Summers (2022), un thriller pur jus maîtrisé de bout en bout.

Le personnage d’Holly Gibney a fait son apparition dans la trilogie Bill Hodges (Mr Mercedes, Carnets Noirs et Fin De Ronde). Stephen King la sortira ensuite de ses tiroirs pour lui confier un second rôle dans son roman L’Outsider puis dans la nouvelle Si Ça Saigne inspirée du même univers. Avec ce roman Holly gagne ses lettres de noblesse et occupe enfin le haut de l’affiche.

L’intrigue se situe en 2021, un choix qui ne doit rien au hasard, comme le reste du monde, les États-Unis font face, tant bien que mal, à l’épidémie de Covid-19. Au-delà de la crise sanitaire à proprement parler, le contexte offre un terrain de jeu de premier choix pour les complotistes de tout poil. Le monde se divise en deux clans, les vaccinés et les antivax.

Pour les États-Unis l’année 2021 est doublement emblématique, le pays émerge de quatre années sous la présidence de Donald Trump. Là encore il y a les pro MAGA (Make America Great Again, le slogan de campagne de Trump) et les anti… Le pire c’est que rien ne garantit que le gugusse ne revienne pas à la Maison Blanche en 2028, surtout si les démocrates relancent Papy JB aka Le Sénile dans la course !

Mais revenons à nos moutons et au roman Holly.

Au fil de ses aventures nous avons vu s’étoffer la personnalité d’Holly Gibney, la frêle et timide que Bill Hodges a découvert sait désormais s’affirmer et à plus ou moins se faire confiance. Et elle en aura bien besoin pour affronter cette nouvelle affaire.

Pour elle l’affaire commence comme une « simple » disparition d’une jeune femme. Au fil de ses investigations elle va rapidement s’apercevoir que d’autres disparitions potentiellement suspectes ont eu lieu dans un périmètre relativement restreint… même si rien ne semble relier les victimes entre elles.

Le lecteur est quant à lui parfaitement conscient, dès les premières pages du roman, que ces disparitions n’ont rien d’ordinaires. Elles sont l’œuvre d’un couple de retraités qui, sous les dehors d’une respectabilité sans faille, ont imaginé un plan repoussant les limites de l’horreur pour se maintenir au top de la forme.

Pour la première fois Holly va donc se retrouver confrontée à une affaire ne faisant appel à aucun élément fantastique ou surnaturel. Elle aura pourtant à faire aux individus encore plus monstrueux et abjects que ceux qu’elle a déjà affronter. Comme le dira fort justement Izzy Jaynes à la fin de l’affaire :

L’autre nouveauté pour Holly est qu’elle sera quasiment seule sur une grande partie de son enquête. Son associé, Pete Huntley, est en effet cloué au lit par le Covid. Quant à Jerome et Barbara Robinson, qui lui ont prêté main forte plus d’une fois, ils seront fort occupés de leur côté par des projets personnels qui se concrétisent.

Au-delà de son enquête, Holly va aussi devoir composer avec une situation personnelle un peu compliquée. En effet au début du roman elle assiste aux funérailles de sa mère, terrassée par le Covid (un brin ironique pour quelqu’un qui rejetait l’existence de cette maladie). Si vous avez lu la trilogie Bill Hodges vous savez déjà que le personnage de Charlotte Gibney n’est pas franchement des plus avenants, toujours prompte à rabaisser Holly. Vous découvrirez que la daronne avait encore quelques coups foireux en réserve… heureusement, finalement les choses tourneront plutôt à l’avantage de notre brave Holly.

Si Stephen King impose à son intrigue un rythme de croisière plutôt pépère (les choses vont véritablement s’emballer vers la toute fin du roman), on ne s’ennuie pas une minute pour autant, on prend plaisir à suivre chacun des personnages dans leur parcours personnel. La plume de l’auteur fait mouche, comme toujours, notamment quand il faut pointer les travers de la société américaine. Mais il est tout aussi efficace quand il s’agit de rendre hommage à la littérature, et tout particulièrement à la poésie.

Indéniablement cette cuvée 2024 du King a tous les atouts d’un grand cru. L’absence d’élément fantastique ne m’a posé aucun problème, au contraire c’est même l’une des grandes forces du roman.

[BOUQUINS] Margot Douaihy – Repentie

Lorsque l’école catholique Saint-Sébastien devient la cible d’un terrible incendie criminel, les Sœurs du Sang Sacré et leurs élèves sont plongés dans le chaos. Insatisfaite de la réponse des autorités, la sardonique et entêtée Sœur Holiday est déterminée à démasquer elle-même le coupable et à ramener la paix dans ce sanctuaire où elle a trouvé refuge lorsqu’elle n’avait nulle part où aller.

Elle est plus fidèle que la plupart, mais Sœur Holiday n’est pas une sainte. Pour reconstituer les indices de ce mystère aux enjeux majeurs, elle devra d’abord affronter les péchés de son passé mouvementé.

Son enquête la mènera sur un chemin sinueux de suspicion et de secrets dans la chaleur moite et oppressante de la Nouvelle-Orléans.

Parce que le côté bonne sœur atypique me faisait fortement penser au personnage de Sœur Marie-Thérèse des Batignolles créé par Maëster pour Fluide Glacial. J’espérais bien retrouver ce côté irrévérencieux et un tantinet provoc dans le présent roman.

Margot Douaihy vous invite à faire connaissance avec une presque bonne sœur (elle n’a pas encore prononcé ses vœux définitifs) pas comme les autres. Sœur Holiday est ouvertement lesbienne, couverte de tatouage, adepte de musique punk rock et elle fume comme un pompier… Désormais en quête de rédemption elle enseigne la musique au sein de l’institut catholique de Saint-Sébastien en attendant d’entrer dans les ordres.

En attaquant ce roman je m’attendais à retrouver une bonne sœur à l’image de Sœur Marie-Thérèse de Maëster et le ton irrévérencieux et un tantinet provoc indissociable du personnage. Si Sœur Holiday dénote parmi ses pairs, il n’en reste pas moins qu’elle est profondément croyante et sa foi semble inébranlable. Trop à mon goût ! Toutes ces bondieuseries pour grenouilles de bénitier ont été parfois à la limite du digeste pour l’athée viscéral que je suis… une génuflexion ou une prière de plus et je rejouais la scène du vomi de L’Exorciste.

Ce petit malentendu spirituel mis à part j’ai pris plaisir à suivre le parcours de Sœur Holiday, j’avais surtout hâte de découvrir comment elle en était venue à souhaiter intégrer les ordres. Force est de reconnaître que son parcours n’a pas toujours été une promenade de santé, mais aussi qu’elle a une grande part de responsabilité dans le drame qui sera à l’origine de sa soudaine vocation religieuse.

Quand on ose s’attaquer à l’institut qui lui a offert une seconde chance, Sœur Holiday voit rouge. Elle a la ferme intention de démasquer l’incendiaire / criminel. D’autant que rapidement un second incendie et une seconde victime frappe Saint-Sébastien. Mais voilà ne s’improvise pas détective qui veut, notre Sherlock Nonne va commettre des erreurs d’appréciation au fil de son enquête. En cela l’auteure marque un point, que sa nonne devienne détective hors pair en un claquement de doigt aurait clairement manqué de crédibilité.

Les personnages secondaires ne sont pas de simples faire-valoir, Margot Douaihy apporte beaucoup de soin à dresser leur profil et leur personnalité. À ce titre j’ai particulièrement apprécié le personnage de l’enquêtrice Riveaux, on devine rapidement qu’elle aussi traîne ses casseroles et ses zones d’ombre.

C’est d’ailleurs elle qui donne une possible piste pour les prochaines apparitions de Sœur Holiday. Rendez-vous auquel je répondrai présent avec plaisir… en espérant toutefois un peu moins de bondieuseries à deux balles.

Je vous laisse découvrir les autres intervenants au cours de cette intrigue et vous forger votre propre opinion sur chacun d’entre eux. Forcément il y en aura qui attireront davantage d’empathie que d’autres mais ne perdez pas de vue que l’habit ne fait pas le moine (ou encore la bite ne fait pas le rabbin).

Si l’intrigue dans son ensemble ne devrait pas mettre les nerfs des lecteurs les plus aguerris à rude épreuve, l’auteure parvient toutefois à suffisamment brouiller les pistes pour vous faire douter et mettre à mal vos certitudes. Finalement on referme le bouquin en se disant que le job est fait, ce qui n’est déjà pas si mal.

Le choix d’une narration à la première personne renforce le sentiment d’immersion au cœur de l’intrigue, on perçoit les événements tels que Sœur Holiday les perçoit, tout en gardant notre propre jugement de lecteur.

Si j’ai mis un temps plus que considérable à terminer ce roman et à rédiger ma chronique, ce n’est nullement à cause du bouquin mais plutôt faute à un emploi du temps professionnel particulièrement chargé ces dernières semaines. En rentrant j’étais plus attié par un verre de Jack que par ma liseuse pour décompresser.

[BOUQUINS] Adam Cesare – Frendo Est Vivant

Sortie tout juste indemne de l’enfer de Kettle Springs, où elle a échappé aux velléités homicides d’un clown démoniaque, Quinn peut enfin reprendre une vie normale en allant poursuivre ses études à l’université. Mais le répit est de courte durée. Un soir, lors d’une fête étudiante, un clown fait irruption pour s’attaquer à la jeune fille. Au même moment, un autre clown s’en prend à son père, resté à Kettle Springs.

Quinn décide alors de retourner au milieu des champs de maïs, là où tout a commencé. Drôle de décision quand on sait l’horreur qui l’attend là-bas…

Sonatine + Adam Cesare + Frendo = BINGO !!!

Je remercie les éditions Sonatine et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Dans l’un des films de la saga Scream, l’un des personnages, lors d’une énième discussion autour des films d’horreur (qui est quand même la thématique récurrente de la série), affirme qu’au cinéma les suites sont toujours moins réussies que le premier film. Globalement j’aurai tendance à partager son avis, du simple fait déjà que l’effet de surprise n’est plus au rendez-vous.

Adam Cesare évite partiellement l’écueil du déjà-vu en ancrant encore davantage son slasher dans l’univers 2.0. Au lieu de se contenter d’un retour de la vengeance d’Arthur Hill, l’auteur surfe sur les travers de ses contemporains et des réseaux sociaux. Course au sensationnalisme, business à tout prix, négationnisme et complotisme vont donc s’inviter dans les champs de maïs de Kettle Springs.

L’auteur (sur)exploite parfaitement la notion politique de l’« idiot utile » pour construire son intrigue. Un des personnages expliquera d’ailleurs ce concept à Quinn, sans réaliser qu’il en est un lui-même.

Comme dans le premier opus, l’auteur prend le temps de poser le retour à une vie presque normale des rescapés de Kettle Spring. Les blessures psychologiques et physiques ne sont pas encore totalement refermées un an après la tuerie. Pas évident aussi quand sur Internet les théories complotistes fleurissent, faisant de Quinn, Cole et Rust, les véritables instigateurs du massacre.

Au niveau des nouveaux personnages, Adam Cesare s’attarde surtout sur la jeune Jerri, et c’est plutôt une bonne chose, car on s’attache rapidement à cette gamine un peu paumée. Deux autres nouvelles têtes joueront un rôle important dans le déroulé du récit, la shérif Marta Lee, chef de la police de Kettle Springs et Izzy Reyes, propriétaire du cinéma et petite amie de Glenn Maybrook.

Mais que les fans d’horreur et d’hémoglobine se rassurent, les choses vont rapidement déraper et échapper à tout contrôle. Les morts violentes et sanguinolentes ne tarderont pas à faire partie intégrante du décor… Je n’irai pas jusqu’à dire que ce retour de Frendo est plus soft que son aîné, mais il est incontestablement moins gore.

Si les codes du slasher sont respectés et que l’intrigue est globalement bien ficelée, j’avoue toutefois avoir été moins emballé par cette suite. Sans doute à cause de l’inévitable sentiment de déjà-vu, mais aussi par le fait que j’ai trouvé le déroulé des événements beaucoup trop improbable. C’est juste too much pour être crédible.

 Le côté divertissement horrifique est certes assuré mais je n’ai pas retrouvé ce clin d’œil au cinéma d’horreur qui était pourtant la griffe du premier opus. Cela ajouté au côté un tantinet surjoué de l’intrigue fait que cette suite m’a moins emballé. Elle aura toutefois eu le mérite de clore définitivement un des volets de l’intrigue.

[BOUQUINS] Julia Bartz – La Reine Du Noir

Pour beaucoup de lectrices, Roza Vallo est une romancière de génie, et peut-être plus encore, une sorte de gourou. Grâce à elle et à son livre La Langue du démon, nombre de jeunes filles et de femmes ont cessé de se considérer comme de petites créatures fragiles pour explorer leur côté sombre, pulsionnel, sexuel. Aussi, quand la grande prêtresse du roman d’horreur féministe décide d’offrir à cinq d’entre elles un séminaire d’écriture dans son manoir de Blackbriar, isolé au milieu des monts Adirondacks, les candidatures affluent.

Peu importe que Vallo soit une figure controversée et que l’endroit traîne une sinistre réputation. Lorsqu’elle est sélectionnée, Alex, une jeune autrice, y voit la chance de sa vie. Mais quand Roza Vallo décide d’instaurer une compétition acharnée, les tensions sont rapidement exacerbées entre les concurrentes. Jusqu’au jour où l’une d’entre elles disparaît…

Parce que c’est Sonatine et l’opportunité de découvrir une nouvelle auteure.

Si la couv’ a immédiatement su capter mon attention, c’est la promesse d’un « huis clos haletant, gothique et féministe » qui aura été l’élément déclencheur à l’acquisition de ce roman.

Je remercie les éditions Sonatine et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Commençons par ce qui fâche : la quatrième de couverture. À la fois mensongère (il n’y a pas vraiment de tensions entre les concurrentes, au contraire, elles sont plutôt solidaires dans le défi qui leur est imposé) et beaucoup trop bavarde (la disparition d’une candidate ne survient que dans la deuxième moitié du roman).

Heureusement cette maladresse est partiellement compensée pour une couv’ que je trouve superbe. Le ton est donné avant même d’ouvrir le bouquin.

Le mal étant fait, le roman se divise donc en deux parties. Dans la première on fait connaissance avec les cinq participantes à la retraite littéraire organisée par Roza Vallo. On voit leurs relations évoluer tandis qu’elles se plient aux règles draconiennes imposées par la maîtresse de cérémonie. Un huis clos littéraire plutôt paisible même si l’on peut s’interroger sur le comportement et les intentions de Roza Vallo.

C’est au lendemain d’une soirée particulièrement agitée que tout ce petit monde va s’apercevoir qu’une des participantes manque à l’appel. Et ce n’est que le début d’une descente aux enfers vertigineuse. Clairement, l’ambiance et le rythme de l’intrigue changent du tout au tout. On entre alors effectivement dans la phase huis clos haletant, et ce jusqu’à son dénouement.

Les personnages peuvent se diviser en deux groupes, avec les habitants du domaine (Roza Vallo, la cuisinière et la gouvernante) d’un côté, et les participantes à cette fameuse retraite littéraire (par ordre d’apparition : Alex, Poppy, Taylor, Keira et Wren) de l’autre. Sans vouloir en dire trop, là encore ne tenez rien pour acquit, les cartes pourraient être rebattues, et pas qu’une fois… Là encore la promesse féministe est tenue, avec parfois le côté revendicatif du terme.

Le domaine de Blackbriar pourrait presque faire office de personnage à part entière, coupé du monde (c’est encore plus vrai au cœur de l’hiver) et au passé douloureux (les précédents propriétaires ont été retrouvés morts sans que la lumière ait été totalement faite sur ce drame… juste une version officielle bancale à plus d’un titre). C’est justement le domaine et son histoire qui apportent la touche gothique.

La promesse d’un huis clos haletant et oppressant est donc largement tenue. Cerise sur le gâteau, bien souvent indissociable d’un bon huis clos, la dimension psychologique est parfaitement maîtrisée. La tension monte crescendo jusqu’à pousser les personnages (et accessoirement les lecteurs) dans leurs ultimes retranchements.

Le récit est rédigé à la première personne, c’est Alex qui nous fait vivre le déroulé des événements. Si son côté Caliméro m’a parfois agacé (surtout dans la première partie du roman), je reconnais que la construction est bien ficelée, on est en totale immersion au cœur de l’intrigue.

Pour un premier roman, Julia Bartz réussit à imposer sa griffe dans l’univers du noir. Certes on pourrait lui reprocher quelques invraisemblances, mais elles sont rapidement emportées par le déroulé de l’intrigue.

Attention, Madame Bartz, je ne serai pas aussi conciliant avec vos prochains romans…

[BOUQUINS] Nikki Erlick – La Mesure

« Il est désormais difficile d’imaginer un avant, un monde dans lequel elles n’étaient pas encore là. Quand elles firent leur apparition, personne n’avait la moindre idée de ce qu’il fallait faire de ces étranges petites boîtes. Elles étaient arrivées pendant la nuit, par millions, dans toutes les régions et tous les pays. Sur chacune, était inscrit un message simple, quoiqu’énigmatique, rédigé dans la langue maternelle de son destinataire :

À l’intérieur se trouve la mesure de votre vie.

Chaque boîte contenait une cordelette, dissimulée sous un fin tissu d’un blanc argenté, si bien que celui qui soulevait le couvercle réfléchissait à deux fois avant de regarder ce qu’il y avait dessous. Car il ne pourrait plus jamais revenir sur ce geste-là. »

Si le concept de base n’est pas totalement innovant, j’étais curieux de découvrir comment Nikki Erlick comptait aborder cette nouvelle affaire de « prédestination ».

Je remercie Fleuve Edtions et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Imaginez qu’un matin en vous levant vous trouviez, devant votre porte, une boîte fermée avec comme unique inscription « À l’intérieur se trouve la mesure de votre vie »… Trois possibilités s’offrent alors à vous :

  • Vous ouvrez la boîte et découvrez qu’elle contient un long segment de corde,
  • À l’inverse, vous vous retrouvez face à un court segment de corde,
  • Vous n’ouvrez pas la boîte.

Quel sera votre choix ?

C’est à cette épineuse question que devront répondre tous les habitants, âgés de 22 ans et plus, de la planète. Une seule certitude s’impose à l’esprit de tous : plus rien ne sera jamais pareil.

Si l’idée de base classe le roman dans le registre de la science-fiction, Nikki Erlick choisit de placer l’humain – pour le meilleur et pour le pire – au cœur de son approche.

Pour cela elle opte pour un roman choral, donnant voix à huit individus, qui se connaissent ou pas, qui se rencontreront ou non, courts et longs segments. Quel sera l’impact de ces boîtes sur leur vie personnelle et professionnelle, sur leurs projets et leurs ambitions ? Comment vivre en connaissant (ou pas) l’âge approximatif de sa propre mort et celle de ses proches ?

Paradoxalement en plaçant la mort au centre de son intrigue, l’auteure nous livre une ode à la vie riche en émotions. Si dans l’ensemble les personnages renvoient plutôt une image flatteuse de l’humain, il fallait bien un mouton noir dans le lot. Un candidat à la présidentielle qui va utiliser le prétexte de ces boîtes pour servir ses ambitions personnelles en jouant avec la peur des électeurs (un principe malheureusement vieux comme le monde).

Nikki Erlick réussit à nous faire oublier notre envie de savoir d’où viennent ces foutues boîtes et comment elles sont arrivées à leurs destinataires, la question se pose bien entendu durant quelques chapitres, avant d’être éclipsée par la vie de ses personnages. Si le récit est empreint d’une certaine noirceur avec une pointe de cynisme, il se veut aussi formidablement optimiste ; on serait presque dans le registre du feel good 2.0.

Pour un premier roman, l’auteure impose sa griffe avec une intrigue brillamment menée de bout en bout. Une lecture qui va amener les lecteurs à se poser des questions, pas seulement sur le choix initial qui est offert aux personnages du roman, mais aussi sur la façon d’aborder la vie et l’avenir. Ça ne durera peut-être qu’un temps, mais c’est déjà un sacré tour de force.

Dans le roman, Wes Johnson cite l’écrivain américain Ralph Waldo Emerson pour qui le plus important « n’est pas la durée de la vie, mais sa profondeur. » Une idée largement inspirée de Sénèque pour qui : « La vie ressemble à un conte ; ce qui importe, ce n’est pas sa longueur, mais sa valeur. »

Plus près de nous, Jacques Brel déclara, au cours d’une interview en 1971 : « Ce qui compte, c’est l’intensité d’une vie, pas la durée d’une vie. »

Je vous laisse méditer ces belles paroles. Si ce n’est déjà fait, je ne peux que vous encourager à découvrir ce roman.

[BOUQUINS] Gretchen Felker-Martin – Chasse À L’Homme

Une épidémie a transformé les êtres humains à haut niveau de testostérone en des créatures uniquement mues par leurs besoins les plus primaires : se nourrir, violer, tuer. Tous les individus masculins sont ainsi devenus de dangereux zombies.

Beth et Fran, deux femmes trans, sont chasseuses d’hommes : elles ont en effet besoin d’absorber les œstrogènes contenus dans leurs testicules pour éviter la contagion.

Bientôt, elles vont devoir affronter des ennemis plus impitoyables encore : une armée de féministes radicales, qui haïssent les femmes trans encore davantage que les hommes.

Parce que c’est Sonatine, ce qui pourrait une raison suffisante. Mais pas que…

Impossible de rester de marbre face à cette couille couv’. Mais encore…

Il faut bien répondre à la question en accroche de la quatrième de couv’ : « Le roman le plus dérangeant de l’année ? »

Je remercie les éditions Sonatine et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Commençons par le commencement avant de reprendre depuis le début. Dérangeant ? Oui et non. Oui pour la thématique de la transsexualité et la question du genre, une question qui bien souvent pousse l’individu lambda à faire la politique de l’autruche : « Ça ne me concerne pas, alors je m’en fous ! ». Mais ceux-là ne sont pas les plus dangereux, les pires sont les tenants de la « bien-pensance » qui prônent une tolérance absolue jusqu’à ce qu’ils soient directement confrontés à la question et retournent leur veste de façon radicale.

Pour ma part je revendique mon statut d’individu genré et racisé : je suis un homme blanc hétérosexuel et j’en suis fier. Ce n’est pas pour autant que je ferme ma porte (et mon esprit) aux autres, du moment qu’ils respectent mon identité autant que je respecte la leur.

Pour être tout à fait franc, ce qui m’a le plus dérangé dans ce bouquin est le recours à l’écriture inclusive. Certes ça sert le propos de l’auteure et ça peut même se comprendre, mais il n’en reste pas moins que ça pique méchamment les yeux… avec le temps qu’il faut pour avoir un rencart chez un ophtalmo, c’est sadique comme démarche.

Dérangeant sur la forme ? Non, il faut plus que ça pour m’empêcher de dormir ou me choquer. Il n’en reste pas moins que c’est un bouquin à réserver à un « public averti ». C’est trash, cru et explicite ; qu’il s’agisse de décrire la violence où la sexualité, l’auteur n’y va pas par quatre chemins.

Revenons au début donc. Tout commence par une épidémie baptisée T. Rex – juste avec le nom, tu devines que ça ne va pas une être simple grippe. Kezaco exactement ? Je laisse la parole à Gretchen Felker-Martin pour un point épidémiologique :

Sympathique, non ?

Pour les quelques hommes épargnés par le virus, la protection passe par la consommation massive d’œstrogènes. Et la meilleure source d’œstrogènes se trouve être les coucougnettes de ces mâles mutants… sauf qu’ils ne se laisseront pas castrer sans opposer une vive résistance.

C’est ainsi que l’on fait connaissance avec Beth et Fran, des transsexuelles, chasseuses d’hommes et préleveuses de couilles. Deux amies réunies par la nécessité de survivre au caractère diamétralement opposé, alors que Fran laisse libre cours à son côté féminin, Beth apparaît plus rugueuse, brute de décoffrage.

Dans ce monde de demain pas très accueillant, un danger pire que les nouveaux mâles guette les survivant(e)s transgenres. Les TERF, des milices de femmes qui vouent une haine farouche aux trans. Pour elles il n’y a pas à tortiller du cul, un bon trans est un trans mort.

Voilà pour ce qui est de poser le décor de ce roman post-apocalyptique qui ne ressemble à nul autre. Un pari audacieux de la part de Gretchen Felker-Martin (qui est américaine comme vous l’aurez certainement deviné) pour un premier roman… ça passe ou ça casse, selon les lecteurs.

J’ai la chance d’appartenir à la première catégorie, même si je suis bien loin de considérer ce bouquin comme une œuvre majeure du genre. J’ai aimé le côté très glauque – presque poisseux – qui se dégage du roman et un style à l’image du décor…

Le fait de ne n’avoir éprouvé de réelle empathie pour aucun des personnages ne m’a pas dérangé outre mesure ; je me suis davantage positionné en tant que lecteur / spectateur de l’intrigue plutôt que de lecteur / acteur.

Outre nos deux chasseuses de couilles sur pattes, vous ferez aussi la connaissance du Dr Indi Varma qui, en plus de réparer les petits et gros bobos de sa communauté, synthétise les œstrogènes. Chez les TERF c’est le personnage de Ramona Pierce qui est de loin le plus intéressant du fait de ses contradictions entre son devoir et ses sentiments.

À aucun moment je n’ai eu envie d’abandonner ma lecture, au contraire, chapitre après chapitre, rebondissement après rebondissement, il me tardait de savoir comment allait se terminer cette foire d’empoigne version XXL.

Je ne chercherai pas à convaincre ceux et celles qui seraient réticents à l’idée de se lancer dans ce bouquin, c’est vrai que cela reste une lecture très spéciale. Peut-être que moi-même, dans un autre état d’esprit, j’aurai pu avoir un ressenti totalement différent… Allez savoir, avec les OLNI (Objets Littéraires Non Identifiés) tout est possible.

[BOUQUINS] Scott Snyder & Francesco Francavilla – La Nuit De La Goule

Un passionné enquête sur un ancien studio de cinéma qui aurait brûlé et finit par tomber sur ce projet. Il remonte la piste du réalisateur, qui vit reclus dans une maison de retraite. Selon lui, une goule hanterait son hospice, et la découverte d’une vieille bobine de La Nuit de la Goule risque bien de réveiller la bête, que le film soi-disant disparu avait détruit.

Je remercie les éditions Delcourt et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

La Nuit De La Goule est avant tout un hommage au cinéma d’horreur des années 50/60 (l’âge d’or de la Hammer et ses deux acteurs fétiches, Peter Cushing et Christopher Lee), et sur ce point c’est une totale réussite.

Pour la petite histoire la BD a d’abord été diffusée, en version originale, sous forme de feuilleton numérique en six épisodes, avant d’être publiée en un volume unique par Dark Horse.

Pour son intrigue Scott Snyder s’inspire très librement d’une créature mythique de la littérature arabe, la goule, un monstre nécrophage. Si Francesco Francavilla me demandait : « Quoi ma goule ? Qu’est-ce qu’elle a ma goule ? », je lui répondrais qu’il s’est contenté du minimum syndical avec sa bestiole. Une vague forme noire aux yeux rouges… ça va mec, pas trop fatigué ?

Heureusement pour le reste le dessinateur est irréprochable en alternant les styles au gré de l’intrigue. Le trait est toujours fin et précis, mais le fond s’adapte parfaitement au récit, le dessinateur optant même pour une palette de couleurs à part pour les scènes d’horreur.

L’intrigue est décrite selon deux arcs narratifs distincts (avec chacun son ambiance graphique donc), d’une part les faits qui se déroulent dans le présent, d’autre part les extraits du film. Film nous permet de suivre une troupe de soldats américains de la Première Guerre mondiale, la troupe part en éclaireur dans un village italien qui serait occupé par les Allemands. Mais c’est tout autre chose qu’ils vont croiser lors de cette excursion.

Globalement j’ai trouvé ce second arc narratif plus abouti que le premier. Il faut dire que la surprise n’est pas vraiment au rendez-vous, les quelques rebondissements ainsi que le twist final sont relativement prévisibles.

Heureusement sous la trame plutôt classique on retrouve de vrais sujets de réflexion tels que les traumatismes vécus en temps de guerre par les militaires et leur impact lors d’un retour à la vie civile, ou encore les relations familiales (entre un père et son fils en premier lieu).

À l’instar des films de la Hammer, et malgré quelques bémols, le divertissement est bel et bien au rendez-vous. À l’inverse du grand frisson, mais je doute que les auteurs aient eu la prétention de vous donner des sueurs froides et des nuits pleines de cauchemars. Oserai-je donc terminer ce billet par un ironique : « Que de la goule ! » ? Ah bin oui, j’ai osé.

[BOUQUINS] Robert McCammon – Swan Song – La Glace Et Le Feu

Sept années ont passé, l’holocauste nucléaire a obscurci le ciel d’un voile de poussière et recouvert la terre d’un linceul de neige grise, cédant la place à un hiver sans fin dont les mâchoires gelées se referment lentement, mais inexorablement sur la planète entière.

Et dans ce monde d’après, les hommes continuent à s’entredéchirer, pour les ressources, pour le pouvoir, par pure folie.

Néanmoins l’espoir subsiste, infime, précieux, dans des amitiés improbables nées d’une lutte commune pour la survie, dans l’éclat fascinant d’un anneau de verre aux couleurs étincelantes et qui semble révéler à ceux qui le touchent un monde idyllique. Dans les mains d’une jeune fille capable de faire renaître ce qui semblait définitivement mort.

Dans ce monde à l’agonie, le moment est venu de savoir si un nouveau printemps est possible.

Parce que c’est la suite de Swan Song, une suite qui nous fait faire un bon dans le temps de sept années après les événements décrits dans le premier opus du diptyque.

Sept années se sont écoulées depuis que le monde a été dévasté par le feu atomique, sept années d’un hiver nucléaire qui a rendu la nature hostile et où survivre est un combat au quotidien pour les quelques rescapés de la folie des hommes.

On retrouve Josh et Swan, tous deux lourdement marqués par les radiations, qui sillonnent le pays, de colonie en colonie, en compagnie de Rusty, du chien Killer et du cheval Mulet.

Sister et Paul suivent tant bien que mal les images que l’anneau de cristal transmet à Sister. Elle est désormais convaincue qu’elle doit retrouver Swan, mais pas facile de suivre une piste aussi diffuse.

Le colonel Macklin et Roland n’ont de cesse de grossir les rangs et les stocks de leur Armée de l’Excellence ; tant pis si pour y parvenir ils doivent piller les colonies qu’ils croisent et tuer tout individu susceptible de représenter une menace.

De son côté l’homme à l’œil écarlate, ainsi que le surnomme Swan, continue de traquer inlassablement Sister et son anneau, plus déterminé que jamais à détruire cette chose qu’il ne connaît pas et qui lui fait redouter le pire.

Le pire, pour celui qui pourrait bien être le Diable en personne, est que l’espoir refasse surface des profondeurs. Cet anneau et Swan pourraient bien être les vecteurs de cet espoir…

Ce second opus est encore plus glauque que le précédent, il faut dire qu’à la survie à proprement parler va s’ajouter un combat entre le Bien et le Mal qui va, plus que jamais, prendre des dimensions mystiques, voire bibliques.

À l’instar du Fléau de Stephen King (publié une première fois en 1977 et réédité en 1990 dans une édition intégrale et révisée), Robert McCammon opte pour un manichéisme assumé, pour ne pas dire revendiqué.

Un second opus qui vous réservera encore bien des surprises (bonnes ou mauvaises) avec son lot de morts violentes. Mais qui vous permettra aussi de faire de belles rencontres avec de nouveaux personnages, notamment Robin et Glory.

Mais le maître-mot de ce second opus reste l’espoir malgré la noirceur et la violence quasi omniprésentes. Un espoir qui se conjugue au féminin et qui pourrait bien donner une seconde chance à l’Humanité… Reste à savoir si elle saura la saisir.

Les chapitres courts et l’écriture directe de Robert McCammon permettent de maintenir le rythme et l’intensité, surtout au cœur des phases d’action (et elles sont nombreuses).

D’ores et déjà je peux affirmer que Swan Song restera l’une des plus belles découvertes littéraires de cette année 2023, une œuvre majeure dans le registre post-apocalyptique.

Je serai tenté d’interpréter le titre de deux manières, la plus évidente étant l’odyssée de Swan (la chanson de Swan), la seconde étant le chant du cygne de l’humanité avant son extinction… ou sa renaissance. Mais ça n’engage que moi.

[BOUQUINS] Robert McCammon – Swan Song – le Feu Et La Glace

Missiles et fusées se croisent dans le ciel et font s’abattre sur la terre des tornades de feu. Un vent terrible se lève, les poussières radioactives voilent le soleil, la vie telle qu’on la connaît va s’achever.

Dans une plaine déserte du Kansas brûlée par le feu nucléaire, Josh, une force de la nature, se voit confier une mission par un vieillard mourant : ­protéger une enfant.

Dans les décombres d’un New York annihilé par les bombes, une sans-abri à moitié folle découvre un étrange anneau de verre.

Dans les ruines souterraines d’un camp survivaliste des montagnes de l’Idaho, un adolescent apprend à tuer…

Je connaissais Swan Song de nom et de réputation, il faut dire que pour beaucoup il se classe parmi le must-have du roman post-apocalyptique. Top dans lequel on retrouve quelques titres incontournables tels que Le Fléau de Stephen King, La Route de Cormac McCarthy, Je Suis Une Légende de Richard Matheson, World War Z de Max Brooks ou encore La Planète Des Singes de Pierre Boulle.

Un grand merci à Monsieur Toussaint Louverture qui nous permet enfin, 36 ans après sa publication, de découvrir ce titre dans sa version française.

Publié outre Atlantique en 1987, Swan Song est considéré comme l’une des œuvres majeures de Robert McCammon et même comme un des meilleurs romans post-apocalyptiques. Le public francophone aura dû s’armer de patience pour pouvoir, 36 ans plus tard, découvrir l’œuvre dans sa version française.

Un grand merci aux éditions Monsieur Toussaint Louverture qui nous propose une version française déclinée en deux tomes, chacun bénéficiant d’une couverture magnifique (félicitations à l’illustrateur, Bernard Khattou).

Un petit mot sur l’époque de publication du roman, en 1987. Sur le plan des relations internationales la Guerre Froide oppose encore les blocs Ouest (avec les États-Unis en tête de file) et Est (mené par l’URSS), bien que lointaine la menace nucléaire reste une réalité.

D’un point de vue technologique, nous étions bien loin du monde 2.0 que nous connaissons quasiment tous aujourd’hui… mais cela n’est pas un problème puisque le feu nucléaire sonnera le glas de toute technologie.

Après une première partie qui pose le décor et les personnages principaux, une guerre nucléaire totale ravage la planète (Qui a tiré le premier ? On ne le saura jamais… pour ce que ça change). Après avoir assisté à la destruction des États-Unis, Robert McCammon nous plonge au cœur de l’hiver nucléaire qui suivra.

Au niveau des personnages, on découvre – par ordre d’entrée en scène –, Sister Creep une SDF un peu fêlée qui prêche (dans le vide) dans les rues de Manhattan ; Josh Hutchins, un catcheur d’une taille impressionnante qui fait route vers le Kansas pour un prochain combat ; Darleen Prescott et sa fille Swan qui font aussi route vers le Kansas en espérant des lendemains meilleurs et enfin les époux Croninger et leur fils Roland qui s’offrent un séjour survivaliste dans un bunker sous les montagnes de l’Idaho.

Au final nous serons amenés à suivre Josh et Swan qui après une rencontre fortuite ont miraculeusement survécu à l’holocauste, Sister Creep qui s’est liée d’amitié avec un autre survivant de Manhattan, Artie, et Roland Croninger qui échappera à l’enfer du bunker dévasté en compagnie du colonel Macklin, un vétéran du Vietnam (1987, rappelez-vous…) considéré comme un héros de guerre.

Nous suivrons ces personnages au fil de leurs errances dans un monde dévasté qui leur est désormais inconnu, leur caractère et leur personnalité se forgeront au fil des épreuves et des rencontres – parfois bonnes, souvent mauvaises. Chez certains cette nouvelle donne fera ressortir ce qu’ils ont de meilleur, chez d’autres ce sera au contraire l’occasion de laisser s’exprimer leurs instincts les plus primaires.

C’est justement par cette opposition quasi manichéenne entre le bien et le mal que le roman m’a parfois fait penser au Fléau de Stephen King (que je considère comme une œuvre culte du genre), mais attention malgré cette similitude dans le traitement des personnages, les deux romans sont radicalement différents.

Robert McCammon a un incroyable talent de conteur pour nous plonger au cœur de ce monde ravagé, et pour nous faire vivre les événements en nous mettant dans la peau de ses personnages. Un récit façon point of view avant l’heure…

J’ai été tellement emballé par cette lecture que je comptais enchaîner directement avec le tome 2, finalement, comme cette suite se déroule 7 ans après les événements que l’on vient de découvrir, je vais m’autoriser un court break avant de revenir à la charge.

On fustige souvent les éditeurs français qui découpent en plusieurs tomes un récit publié initialement en un seul volume – et je suis souvent de ceux que cette manœuvre bassement commerciale fait rager –, mais en l’occurrence le découpage du récit permet une édition en deux tomes sans que cela ne pénalise pas outre mesure le lecteur (qui devra tout de même payer deux bouquins pour connaître la fin de l’histoire).

Swan Song a remporté la première édition (1987) du prix Bram-Stoker du meilleur roman (à égalité avec Misery de Stephen King) . Prix décerné par les auteurs de la Horror Writers Association qui récompense les œuvres de dark fantasy ou d’horreur dans différentes catégories (meilleur roman, meilleur premier roman, meilleur recueil de nouvelles…).

Pour l’anecdote les lecteurs francophones de Robert McCammon ne sont pas les mieux lotis. Les éditions Bragelonne ont publié en 2008 les deux premiers titres de la série Le Chant De l’Oiseau De Nuit avec Matthew Corbett comme héros récurrent et depuis silence radio… À ce jour la série compte neuf tomes en VO.

De nombreux autres titres restent inédits en langue française.