[BOUQUINS] Catharina Ingelman-Sundberg – Comment Braquer une Banque Sans Perdre Son Dentier

C. Ingelman-Sundberg - Comment Braquer Une Banque...Un invité surprise qui, à peine arrivé dans mon Stock à Lire Numérique, s’est retrouvé au sommet, me regardant avec ses yeux de cocker. Franchement comment vouliez vous que je puisse résister à un titre pareil ? Jugez-en par vous même, Comment Braquer Une Banque Sans Perdre Son Dentier ? de Catharina Ingelman-Sundberg (un nom à rallonge qui va bien avec le titre).
Martha, Le Génie, Stina, Le Râteau et Anna-Greta sont cinq septuagénaires pensionnés à la maison de retraite Le Diamant. Afin de lutter contre les conditions drastiques de leur pension ils décident de devenir « les vieillards les plus emmerdants du monde« . De fil en aiguille ils envisagent même de faire un casse, non seulement dans le but de s’enrichir mais aussi pour se retrouver en prison, qui, selon eux, propose de meilleures conditions d’hébergement…
Rien que le titre m’aurait donné envie de craquer, ajoutez à cela une couv’ que je trouve très « parlante » et un pitch plutôt alléchant et voilà comment la chose est arrivée entre mes mains. Maintenant restait à savoir si le contenu serait à la hauteur…
Direction la Suède donc pour suivre notre équipée sauvage en déambulateur. Si un doute subsiste dans certains esprits autant lever le voile de suite : non ce bouquin n’est pas un thriller bourré d’adrénaline. L’auteure joue bel et bien la carte de l’humour (avec tout de même un soupçon de suspense) en nous invitant à suivre le périple improbable de nos papys et mamies qui vont découvrir que devenir un criminel est plus difficile qu’il n’y paraît. Et l’humour est bel et bien au rendez-vous, le bouquin ne vous tirera peut être pas de grands éclats de rire mais vous laisserez certainement échapper quelques sourires au fil des pages.
L’auteure soigne ses personnages, nos petits vieux ont chacun une personnalité bien affirmée, avec des forces mais aussi quelques faiblesses (ils n’ont plus 20 ans) ; ils sont la parfaite illustration de l’adage « l’union fait la force« . Ensemble rien ne peut leur résister, seuls ils redeviennent de frêles vieillards (ou presque).
Je m’attendais à une lecture divertissante et je n’ai pas été déçu, sans être transcendant le bouquin tient ses promesses. Une découverte que je ne regrette pas et qui apporte son lot de bonne humeur.
L’auteure réussi à aborder un sujet épineux (voire douloureux) avec humour et intelligence. J’ignore tout des conditions d’hébergement dans les maisons de retraite en Suède mais je suppose que là-bas, comme un peu partout soit dit en passant, ça ne doit pas être bien folichon. On ne peut pas vraiment dire que bosser 35 ans (et plus si affinités) de sa vie pour finir seul(e) dans un de ces mouroirs soit une perspective des plus engageante. On peut toujours espérer y échapper mais malheureusement le choix ne nous appartient pas toujours…

Municipales 2014

Pour répondre aux interrogations, muettes ou non, d’une partie de mon lectorat local je vais revenir sur les raisons de mon silence radio concernant les élections municipales. La raison première est simple : je n’ai pas été voté.
Ayant la flemme de faire les démarches pour mon changement d’adresse je suis toujours inscrit sur la commune de Dumbéa. Vu que j’habite Nouméa je ne vois pas pourquoi j’irai voter pour un maire d’une commune que je ne fréquente qu’occasionnellement. J’ai tout de même prévu de faire ce changement d’adresse avant les Provinciales, même si, en cas d’oubli, plus ou moins volontaire, ça ne changera pas grand chose pour ce scrutin (les deux communes appartenant à la Province Sud).
J’ai tout de même suivi à distance les résultats locaux et surtout les comportements des divers partis en lice. La division du camps loyaliste est pathétique et pourrait bien lui coûter cher lors des Provinciales, d’autant qu’en face les indépendantistes semblent décidés à faire front commun.

Premier tour
Si globalement le RUMP a pris une claque méritée je reste surpris quant aux scores de ses candidats sur les communes du Grand Nouméa : Naturel à Dumbéa (37,5% des voix), Martin à Paita (35,4% des voix) et Gay au Mont Dore (43,3% des voix). Toutefois rien n’est encore gagné pour eux, si l’opposition parvient à un semblant d’unité ils pourraient dégager.
Sur Nouméa, sans surprise c’est la liste de Calédonie Ensemble (affilié UDI) menée par Sonia Lagarde (36,3% des voix) qui arrive en tête du premier tour, suivie par la liste UFC (un méli-mélo de partis qui se réclament de l’UMP) de Gaël Yanno (34,7% des voix) et la liste RUMP de Gaby Briault (15,4% des voix). Et fait encore moins surprenant, qui se ressemble s’assemble, le second tour opposera CE à une coalition UFC/RUMP.
Second tour
Malheureusement pas de miracle sur le Grand Nouméa, les trois ténors restent le cul vissé à leur fauteuil municipal. Naturel avec 46,9% des voix (4 listes au second tour), Martin avec 52% des voix (deux listes au second tour) et Gay avec 48,7% des voix (trois listes au second tour).
Certains diront contre toute attente mais pour ma part je dirai naturellement, les électeurs de Nouméa se sont mobilisés contre la tentative de diabolisation de Calédonie Ensemble, Sonia Lagarde remporte, avec 51,6% des voix, le duel qui l’opposait à Gaël Yanno et ses UMPistes. Si on m’avait posé la question j’aurai annoncé 80% de chances que Lagarde passe.

Conclusion qui n’engage que moi et ne fait que conforter mon opinion première : Calédonie Ensemble s’impose, au vu des résultats de l’ensemble du Territoire, comme le parti le plus représentatif du camps loyaliste. Se débarrasser du RUMP fut ardu, ce n’est pas pour foutre des clones à la place, non merci ! C’est donc sans le moindre regret (et presque convaincu) que je voterai Calédonie Ensemble aux Provinciales.

[BOUQUINS] Un DSK (Doublé Stephen King) au programme

Comme vous le savez sans doute le chroniquage de nouvelles ce n’est pas ma tasse de thé, mais quand la chose est signée Stephen King ça change la donne. Si en plus je tombe sur deux titres disponibles exclusivement en numérique, c’est l’occasion rêvée de vous offrir un tir groupé.

Double SKSale Gosse

Albin Michel (Mars 2014) – 3.99 €
Une nouvelle livrée en primeur aux fans français et allemands en remerciement de leur fidélité.
Qu’est-ce qui a bien pu pousser George Hallas, comptable jusqu’alors sans histoires, à flinguer devant témoins un gamin ? Condamné à mort, il ne s’est jamais expliqué sur les raisons de son acte. A quelques jours de son exécution il fait appel à son avocat, Leonard Bradley, afin de lui confier sa confession. Une confession qui va au-delà de tout ce que pouvait imaginer l’avocat…
Avec cette courte nouvelle (112 pages) Stephen King confirme qu’il est un exceptionnel conteur. Le sort de George Hallas est prévisible (ce qui ne l’empêche pas d’être l’une des scènes les plus intenses du roman), la « surprise » finale aussi, mais cela ne nuit en rien à notre envie d’en savoir plus sur le cheminement de George Hallas. Un récit relativement classique mais rondement mené.
Si l’univers carcéral n’est pas totalement étranger à Stephen King, je pense notamment à la nouvelle Rita Hayworth Et La Rédemption De Shawshank (extraite du recueil Différentes Saisons) ou encore au roman-feuilleton La Ligne Verte, dans cette nouvelle il ne sert que de toile de fond au récit, l’essentiel se déroule à l’extérieur. Qu’importe, l’auteur décrit ce milieu avec une précision glaciale.
Alors folie ou possession (ou un truc du genre) ? A la lecture de cette nouvelle on est bien entendu tenté de croire en la version de George Hallas, mais mettez-vous à la place de Leonard Bradley, si un tueur d’enfant vous livrait une telle confession, le croiriez-vous sur parole ?
En bonus on le droit à un extrait du prochain roman de Stephen King, Joyland (sortie en mai 2014), un roman publié directement au format poche aux Etats-Unis, mais comme d’hab, les éditeurs français ne ratent pas une occasion de traire les vaches à lait que nous sommes… En attendant l’extrait lu me laisse perplexe, pas assez long pour se faire une idée de la chose, en encore moins pour me faire bavé d’impatience ; mais c’est Stephen King, donc je craquerai. C’est gravé dans le marbre !

Un Visage Dans La Foule (co-écrit avec Stewart O’Nan)

Bragelonne (Mars 2014) – 2.99€
Au tour d’une nouvelle écrite à quatre mains, en collaboration avec Stewart O’Nan, de passer au grill.
Depuis la mort de son épouse Dean Evers n’a plus que la TV et ses matchs de baseball pour compagnie nocturne. Rien à redire jusqu’à ce qu’il se mette à apercevoir, chaque soir, un visage connu dans la foule des spectateurs. Jamais le même, mais tous ont deux points communs : ils sont morts et surtout ils lui renvoient son passé en pleine gueule…
Une histoire courte (44 pages) sur fond de baseball (un peu indigeste pour le profane que je suis) qui gagne en profondeur au fil des pages. A travers un récit plein d’humanité (bien que fortement teinté de fantastique) les auteurs mettent leur personnage face à ses responsabilités et surtout face à ses erreurs passées. Facile de lui jeter la pierre mais qui peut prétendre être blanc comme neige ?
Petit bémol au niveau de la mise en page plutôt minimaliste (quelques sauts de ligne histoire d’aérer le texte auraient été un plus appréciable), dommage, d’autant plus que Bragelonne n’est pas novice en matière de numérique.
Quelques mots purement anecdotiques pour conclure. Stewart O’Nan est un inconditionnel de Stephen King, c’est lui qui lui aurai envie de se lancer dans l’écriture. Non seulement il lui a dédié son roman The Speed Queen (1997) mais en plus le King est un des personnages principaux du récit. En 2004, tous deux fans de baseball, ils co-écrivent un essai (Faithfull) consacré aux Red Sox de Boston. Cette nouvelle est leur première collaboration sur une oeuvre de fiction.

A la base j’avais prévu un triplé du King mais malheureusement la nouvelle inédite A La Dure (incluse dans la version poche du recueil Nuit Noire, Etoiles Mortes), pourtant annoncée en numérique à la même date que le bouquin (le 12 mars) a été repoussée à une date ultérieure. A défaut d’info plus précise quant à l’ultérioté de la chose je me suis contenté d’un duo royal.

[BOUQUINS] Mallock – Les Larmes De Pancrace

Mallock - Les Larmes De PancraceJe ne peux résister plus longtemps à l’envie de me plonger dans la lecture de la nouvelle enquête de l’incomparable Mallock, ou plutôt des Mallock avec l’auteur d’un côté et son commissaire homonyme de l’autre. La chose s’appelle Les Larmes De Pancrace et, bien entendu, est signée Mallock.
Jean de Renom, nobliaux et viticulteur de la région bordelaise est assassiné à l’entrée de son château alors qu’il rentrait d’un voyage à Paris. Les soupçons se portent immédiatement sur Camille, son épouse. Tout l’accuse en effet. Mais Mallock, appelé à la rescousse par son ami, Gilles Guédrout, commissaire à Bordeaux, chargé de l’affaire et proche du couple de Renom. Mallock creuse deux autres pistes pour tenter de comprendre les dessous de l’affaire : une affaire criminelle datant d’il y a une trentaine d’année et une ancienne malédiction prononcée par le dernier des Templiers sept siècles plus tôt…
La première surprise est de découvrir un Mallock (le flic) en vacances, et vous savez quoi ? Un Mallock en vacances ça ressemble à n’importe quel quidam vacancier. Exit le gros ours mal léché. Gaffe m’sieur Mallock faudrait pas sombrer dans la guimauve (un vrai gosse avec les gerbilles du juge… jouissif !). Mais heureusement il ne perd rien de sa verve, de son intelligence et de son cynisme quant il s’implique dans l’enquête. Tout comme l’auteur ne perd pas la richesse caractéristique de sa plume. Pour notre plus grand plaisir !
J’me disais : je les attends au tournant les Mallock, ils m’ont un peu trop facilement emballé lors de notre première rencontre ; cette fois je vais me tenir sur mes gardes. Mais voilà le Mallock (l’auteur) est un fourbe doublé d’un génie (si si n’ayons pas peur des mots), dès les premières pages nos bonnes résolutions tombent à l’eau, on entre en transe littéraire, on fusionne avec le roman. Comme dans Le Cimetière Des Hirondelles le fourbe nous livre un(e) coupable tout(e) désigné(e), à Mallock (le flic) de deviner le pourquoi du comment de la chose et de démêler l’écheveau ; qui plus est présentement la personne qui semble tirer les ficelles saute aux yeux, telle l’absence de nez au milieu de la figure (avouez que ça se remarque mieux que la présence d’un nez). Coupable connu(e), marionnettiste identifié(e) ; alors quoi ? The end ? Que nenni ! Une certitude ne constitue en rien une preuve à charge. Et c’est là que le génie intervient, Mallock (l’auteur) réussi à nous étonner et même à nous surprendre en nous offrant une intrigue originale (délicieusement vicelarde), riche en rebondissements et en personnages toujours aussi mitonnés aux petits oignons avec amour. Car voyez vous, s’il est évident que Mallock (l’auteur) aime Mallock (le flic), il ne dédaigne pas pour autant ses autres protagonistes, récurrents (l’équipe du Fort) ou nouveaux venus, tous ont le droit à un travail de fond soigné.
En guise de cerise sur le gâteau, Mallock (l’auteur) nous offre un voyage dans le passé avec le périple du dernier des Templiers, l’occasion de revenir rapidement sur l’histoire douloureuse du Temple (un Ordre au service de Dieu, trahi et exterminé sur ordre de la Papauté). Curieusement, bien que viscéralement athée depuis la nuit des temps et peut être même au-delà, j’ai toujours éprouvé un vif intérêt pour ces moines-guerriers et leur Ordre (rassurez-vous je ne fais pas partie de ces mystiques qui cherchent le fameux trésor du Temple).
Difficile d’ignorer l’autre invité l’honneur : le vin. Etant d’avantage consommateur occasionnel que connaisseur je reconnais humblement que le milieu viticole reste une zone d’ombre dans ma culture générale. J’ai pris plaisir à découvrir certaines facettes de cet univers (impitoyaaable) en compagnie des Mallock ; nul doute qu’eux savent apprécier à sa juste valeur la dive bouteille.
Sous le charme, subjugué même. Je déclare forfait… Les Mallock m’ont vaincu par KO ! Un style incomparable associé à une intrigue sans fausse note et parfaitement ficelée, l’alchimie façon Mallock ne peut laisser personne indifférent. De nouveau bluffé, sur le cul le Lord même si j’avais deviné certains aspects de l’énigme. Merci les Mallock, j’en redemande !
D’ailleurs M’sieur Mallock (l’auteur), j’peux vous poser une petite question ? Nous, lecteurs numériques, avons-nous espoir de trouver un jour les deux premières enquêtes du commissaire Mallock au format epub ? Allez quoi, ce serait sympa…

Allo Houston…

J’ai un problème,
C’est que je t’aime

PC HS
Bin non ce n’est pas moi qui ai un problème mais plutôt mon PC. Depuis la semaine dernière il ne répond plus quand je l’appelle (le bouton d’allumage ne tient plus en position ON). J’avais déjà eu un souci similaire avec un précédent PC, c’est que dalle et surtout purement mécanique.

Sauf que ça tombe au mauvais moment !
Comme je comptais lui offrir une cure de jouvence via quelques upgrades bienvenus compte tenu de l’âge de la bête ; je vais le laisser en stand-by jusqu’à ce que la situation permette de faire d’une pierre deux coups.

En attendant j’ai la tablette (comme quoi j’ai eu raison de craquer) pour gérer le quotidien.
C’est moins pratique qu’un PC mais ça me permet d’assurer le minimum vital et d’éviter le blackout total.

[BOUQUINS] Harry Crews – Nu Dans Le Jardin D’Eden

H. Crews - Nu Dans Le Jardin D'EdenTiens donc, mais que vient ce titre sorti de nulle part au coeur de mes chroniques ? Je clame mon innocence votre honneur, la coupable est une belette cannibale d’origine belge (si si ça existe). Elle a posté un post tentateur dans son blog et moi, pauvre victime innocente je suis tombé dans le piège de la tentation. Et voilà comment Harry Crews et son roman, Nu Dans Le Jardin D’Eden, se sont retrouvés d’abord entre mes mains puis dans ces modestes colonnes.
Au début des années 60 Garden Hills, la plus grande mine de phosphate du monde, était un Eldorado inespéré pour les habitants de la région mais le rêve a vite fait de se casser la gueule et les investisseurs de retirer leurs billes. Aujourd’hui Garden Hills se sont douze bicoques et une poignée d’habitants qui survivent tant bien que mal. Au sommet de la hiérarchie on trouve Fat Man, l’héritier fortuné qui fait vivoter tout le monde mais il n’y a pas grand chose à attendre de lui. De l’autre côté il y a Dolly, elle rêve de redonner à Garden Hills un nouvel essor grâce au tourisme et au cabaret. Rien ni personne ne pourra la faire renoncer à ses rêves de renouveau…
Vous l’aurez compris ce n’est ni une version érotique de la Bible (l’original l’est suffisamment comme ça), ni une partie de jambes en l’air dans le jardin de la voisine (ou du voisin puisqu’en Belgique il semblerait que le prénom Eden soit mixte. Pour ma part la seule Eden que je connaisse est Eden Capwell de Santa Barbara… Oui je sais c’est du lourd au niveau des références culturelles). Nope rien d’aussi léger ici puisqu’on plonge au coeur de la noirceur et de la misère d’une communauté oubliée de tous ou presque.
En plus de la chronique forte élogieuse de la tentatrice susnommée (non ce n’est pas une dissimulation de fellation) il faut dire que deux autres choses (non que je considère la Belette Cannibale comme une chose) ont contribué à me faire craquer. La première, aussi bête que cela puisse sembler, est l’éditeur : Sonatine, à l’heure d’aujourd’hui je n’ai jamais été déçu par son catalogue. La seconde tient d’avantage à ma curiosité personnelle, pourquoi un bouquin écrit en 1969 ne sort en français qu’en 2013 (l’année suivant la mort de son auteur) ? Et puis bon Harry Crews lui même fait ce qu’il faut pour attiser notre curiosité : « C’est le meilleur roman que j’aie écrit. Au moment où je l’ai terminé, je savais que jamais je ne ferais rien d’aussi bon. »
Paré pour une coloscopie dans le trou du cul du monde ? Le bled en question est aussi déglingué que paumé, noyé sous la poussière et la puanteur du phosphate. Pour ceux qui restent, victimes d’un rêve brisé, il subsiste l’espoir d’un retour à la prospérité, le retour du fils prodigue qui relancera la mine. A se demander s’ils y croient vraiment ou s’ils se rattachent à ce rêve pour éviter de crever la gueule ouverte, le nez dans leur misère. Pathétique me direz-vous ? Et bien non justement, et c’est là tout le talent d’Harry Crews, sous sa plume il donne à chacun de ses personnages une profondeur et une humanité presque palpable.
L’auteur nous plonge dans la vie de quelques uns de ces paumés abandonnés de tous, quelques flashbacks permettent de découvrir leur parcours. Fat Man et Dolly bien sûr, mais aussi des personnages secondaires comme Jester ou Iceman. Des rencontres émouvantes, des destinées hors normes, au fil des pages vous partagerez leurs émotions.
Si vous souhaitez de l’action passez votre chemin. Toutefois, même s’il ne passe pas grand chose de palpitant à Garden Hills, je peux vous promettre que vous ne vous ennuierez pas une minute en lisant ce bouquin. Bien qu’écrit (et bien écrit) en 1969, le récit est intemporel, il pourrait s’appliquer à n’importe quel bled qui subirait le même coup du sort de nos jours.
Le titre original Naked In Garden Hills (Nu Dans Garden Hills pour les anglophobes) trouve son explication dans le roman mais je ne vous en dirai pas plus. Lisez ce bouquin pour le savoir, vous ne regretterez pas cette expérience de lecture.  C’est relativement court (235 pages) mais intense.

[BOUQUINS] Yannick Monget – Résilience

Y. Monget - RésilienceVoilà un titre qui pourrait parfaitement s’inviter à mon challenge SF, mais ce Résilience de Yannick Monget ne se contente pas de nous livrer une vision du futur bien sombre, il entend faire réfléchir le lecteur en s’appuyant sur un scénario catastrophe mais pas du tout improbable.
Suite aux effets combinés de catastrophes nucléaires en série et d’une pandémie virale ravageuse, l’humanité a quasiment été éradiquée de la surface de la Terre. Les survivants sont regroupés dans diverses bases de vie en Antarctique et d’autres régions isolées du Monde. Comment a-t-on pu en arriver là ? Et surtout existe-t-il encore un espoir de sauver la planète ?
Ah que je vais avoir du mal à vous pondre une chronique qui tienne la distance, non pas que ce fut un calvaire de lire ce roman, bien au contraire j’ai été séduit et plus qu’agréablement surpris. La principale difficulté tient justement dans la profondeur de ce roman, vous aurez entre les mains, à la fois un roman d’anticipation post-apocalyptique, un thriller riche en rebondissements, un bouquin d’espionnage dans lequel fiction et (triste) réalité cohabitent sur fond de géopolitique et d’écologie. Ca fait beaucoup non ?
N’ayant franchement pas la fibre écolo (au sens politique du terme) et n’étant pas non plus un antinucléaire convaincu, je craignais un peu que cet aspect du roman ne soit quelque peu indigeste. Mais en fait l’auteur ne se lance pas dans un manifeste antinucléaire à la sauce verdâtre façon Greenpiss ; son roman, richement documenté, se lit (et se ressent) d’avantage comme un cri d’alarme visant à attirer notre attention sur ce qui pourrait arriver en cas de mauvaise gestion continue de la question du nucléaire. Sur le sujet les politiques, de droite ou de gauche, sont muselés par les (faux) enjeux économiques et par une poignée de lobbyistes qui leur serve un discours erroné, et bien entendu c’est ce même discours qu’ils nous refourguent. Et oui ce bouquin va certainement vous pousser à vous poser des questions et même à remettre en cause certains points que vous teniez auparavant pour acquis (j’vous rassure ça ne vous fera pas virer écolo, ici on parle de questionnements intelligents). Le discours de l’auteur est d’avantage écologue (fidèle à l’essence même de l’écologie) qu’écologiste (exploitation politique, souvent à tort et à travers, de l’écologie).
Mais rassurez vous ce discours est mis au service d’une intrigue aux multiples facettes menée tambour battant. Les chapitres alternent en effet entre une intrigue qui se déroule deux ans après l’effondrement de l’humanité, et une autre qui vous fera vivre les derniers mois du monde tel qu’on le connait. L’auteur ne situe pas précisément dans le temps la catastrophe, toutefois, une lecture attentive des multiples notes et renvois permet de se faire une petite idée de la chose, disons que les années 2050/2080 seraient une échéance probable. Mais ce n’est pas tant la date éventuelle qui fait froid dans le dos, mais plutôt le réalisme du scénario imaginé par l’auteur.
La dernière partie de l’ouvrage est un condensé de notes et annexes en rapport avec le nucléaire, sans prendre pour argent comptant toutes les affirmations de l’auteur, force est de reconnaître qu’il est sacrément documenté sur la question. Toutes ces informations permettent en partie de répondre aux questions que l’on se pose après la lecture du roman et à réfléchir à notre avenir. Quand je dis notre avenir je ne me la joue pas nombriliste, c’est bel et bien de l’avenir de l’espèce humaine (par moment le terme humanité me semble déplacer pour nous désigner) dont il est question. Quelle que soit votre position vis-à-vis du nucléaire ça ne coûte rien de parcourir ces quelques pages, après à chacun de se forger son opinion (pour ma part je reste dans la catégorie Sans opinion, ou plus exactement Oui mais… pour une fois !).
A la base le bouquin a d’abord été distribué uniquement en version numérique par Symbiom (voir la page du livre sur leur site) au prix de 13€, face au succès rencontré par le roman, une version papier a été publiée au prix de 25€. C’est sur la version numérique que j’ai jeté mon dévolu, en introduction l’auteur s’adresse à ses lecteurs numériques en affirmant comprendre le piratage tout en dénonçant le partage de masse (qui n’est autre qu’une forme plus aboutie du piratage) ; je ne m’inviterai pas dans ce débat vous savez sans doute que je pratique les deux sans avoir le moindre scrupule. Par contre l’auteur termine son plaidoyer en invitant les lecteurs-pirates à se procurer une version légale de Résilience, une fois n’est pas coutume je l’ai fait, non pour le financement de projets de Symbiom mais simplement pour remercier l’auteur pour ce bon moment de lecture passé avec son bouquin. Depuis samedi dernier l’auteur propose (via la page Symbiom) son roman sous forme de feuilleton numérique gratuit, laissant à chacun le soin de payer ou non selon ses moyens, ses envies et sa conscience.

[BOUQUINS] Yrsa Sigurdardottir – Je Sais Qui Tu Es

Y. Sigurdardottir - Je Sais Qui Tu EsMême si mon Stock à Lire Papier est nettement moins impressionnant que son alter ego numérique (sauf gros craquage non dispo en édition numérique je me contente des achats chez France Loisirs) il faut quand même que je pioche dedans de temps en temps histoire de le faire fondre, et retrouver le plaisir d’une lecture d’un « vrai » livre. C’est donc à France Loisirs que je dois cette chronique venue du froid, l’auteure, Yrsa Sigurdardottir (et encore là je l’écris avec l’alphabet français), est islandaise et son bouquin s’appelle Je Sais Qui Tu Es.
Un couple, Gardar et Katrin, entreprend de rénover une maison abandonnée dans les sauvages fjords de l’ouest de l’Islande. Leur amie Lif les suit parce qu’elle cherche à faire le deuil de son mari, récemment décédé. Tous trois ont une chose en commun : ils s’attendent à être seuls. Très vite, une présence inquiétante se manifeste dans les parages…
Le roman alterne, d’un chapitre à l’autre, entre deux intrigues. D’une part on a notre trio parti retaper une bicoque sur une île paumée au milieu de nulle part, une île supposée déserte au coeur de l’hiver, mais ils vont rapidement s’apercevoir qu’ils ne sont pas seuls et que cette présence inattendue n’est pas franchement amicale. D’autre part on suit le Dr Freyr, un psychiatre qui prête main forte à la police sur une enquête sur un suicide, une enquête qui pourrait être liée, d’une façon ou d’une autre, avec la disparition, trois ans plus tôt et toujours inexpliquée, du fils du Dr Freyr et peut être même d’une autre disparition, tout aussi mystérieuse, survenue il y a 60 ans. Quel est le lien entre ces deux intrigues ?
D’une grande patience tu devrais faire preuve pour avoir la réponse, ce n’est que dans les derniers chapitres que l’on découvre ce fameux lien. L’auteure nous offre une intrigue qui navigue entre le thriller et le fantastique (sauce maison hantée) sans que l’on sache vraiment de quoi il retourne. Mais surtout elle mise tout sur l’ambiance qui, d’un côté comme de l’autre, devient de plus en plus oppressante et ne manquera de vous prendre aux tripes. Le rythme imposé est relativement lent mais à aucun moment on ne s’ennuie justement en raison de ce climat presque malsain qui, peu à peu, prend ses aises (et à nous le malaise). La dernière partie s’emballe, et nous avec, les révélations s’enchaînent et nous font découvrir l’intrigue sous un angle nouveau.
Bref l’auteure nous entraîne dans les terres reculées de l’Islande pour un séjour pour le moins glaçant, et pas uniquement à cause du froid hivernal. Un pari largement réussi pour Yrsa Sigurdardottir, une pointe de regret toutefois au niveau de la toute fin du bouquin, j’aurai aimé plus de détails sur le devenir de certains des personnages…

[BOUQUINS] Glenn Cooper – Le Livre Des Prophéties

G. Cooper - Le Livre Des ProphétiesComme je vous l’ai dit précédemment j’avais un duel au sommet pour élire ma prochaine lecture, qui de Glenn Cooper ou de Mallock allait remporter la palme ? Et finalement c’est Glenn Cooper qui sortira le premier de mon Stock à Lire Numérique. Un choix strictement personnel, basé sur aucun critère qualitatif ; c’est juste que j’attends cet ultime opus de la trilogie Will Piper depuis plus longtemps que la suite des enquêtes de Mallock. Place donc au Livre Des Prophéties.
2026. A quelques mois du 9 février 2027, date présumée de la « fin des temps », de nouvelles cartes postales de l’Apocalypse mettent le FBI sur les dents. Les cibles visées sont toutes sino-américaines, Pékin crie à la provocation et menace les Etats-Unis de représailles économiques. Nancy Piper dirige l’enquête au sein du FBI. Quand Phillip, leur fils, disparaît, Will Piper sort de sa retraite pour le retrouver et comprendre les raisons de sa soudaine fugue…
Ce roman fait donc suite au Livre Des Morts et au Livre Des Âmes, si les deux précédents se déroulaient pour l’essentiel dans le présent cet ultime chapitre se situe résolument dans l’avenir. Même si chacun de ces titres peut se lire indépendamment je trouve dommage de ne pas attaquer la série dans l’ordre. Si vous avez le début, ou si vous avez la mémoire qui flanche, l’auteur nous offre une piqûre de rappel dès les premières pages ; un habile résumé des faits qui s’intègre parfaitement au récit.
L’intrigue se déroulant en 2026 je pourrai presque inclure ce titre dans mon challenge SF, mais l’aspect science-fiction reste plus que minimaliste (quelques innovations technologiques tout à fait crédibles). Pour l’essentiel on est embarqué au coeur d’une enquête policière (même si Will Piper n’est plus au FBI) avec quelques flashbacks plus ou moins historiques (comme d’hab on croise quelques personnages célèbres dans des situations totalement fictives). Un cocktail original mais parfaitement maîtrisé par Glenn Cooper, ce qui ne surprendra pas les habitués de l’univers de Will Piper.
Quelques mots sur l’intrigue pour commencer. D’ores et déjà je peux rassurer ceux qui pourraient craindre un risque de redondance à force d’exploiter le filon de la bibliothèque et ses fameux parchemins, l’auteur réussit encore à innover et même à nous surprendre. Contrairement à ce que pourrait laisser penser ma présentation l’affaire des cartes postales passe rapidement en arrière plan, l’intrigue s’offre une dimension internationale d’importance avec les tensions entre les Etats-Unis et la Chine, mais aussi avec un retour de Will Piper en Angleterre (une grande partie du Livre Des Âmes se déroulait déjà sur les terres anglaises) et une découverte des plus surprenantes à propos de l’Horizon (ne me demandez pas quoi je serai muet comme une tombe de carpe).
Au niveau des personnages c’est bien entendu Will Piper qui occupe le devant de la scène. Un Will Piper de 64 ans, retraité du FBI, qui a à peine eu le temps de se rétablir d’un infarctus, avant de replonger dans le feu de l’action. Heureusement le poids des années n’a en rien altéré la vivacité d’esprit (ni son côté bourru et asocial) de Will, forcément à son âge il vaut mieux compter sur ses neurones que sur ses muscles pour se sortir d’un merdier.
On découvre le personnage de Philip Piper, le fils de Will et Nancy. Devenu adolescent et totalement impliqué dans la présente affaire il occupe de fait une part importante dans l’intrigue. En digne héritier de ses parents le gamin réfléchit vite et bien. Au fil du récit on voit évoluer la relation qu’il entretient avec son père.
Je ne m’étendrai pas d’avantage sur les autres personnages qui interviendront, de façon plus ou moins déterminante, sur le déroulement de l’intrigue afin de laisser intact le plaisir de la découverte aux futurs lecteurs (pourtant je vous assure que ce n’est pas l’envie qui me manque d’en prendre certains comme défouloir).
J’avais reproché (et je campe sur ma position) aux deux premiers opus une intrigue parfois trop prévisible même si le second se situait un cran au dessus de son aîné. La tendance se confirme avec ce troisième et dernier volume, l’auteur mène sa petite affaire à un rythme effréné qui va crescendo, les rebondissements se succèdent, bref, impossible de lâcher le bouquin une fois que vous serez plongé dedans. Gleen Cooper réussit littéralement à nous prendre en otage, pour notre plus grand plaisir.
Maintenant que la saga Will Piper semble terminée je vais pouvoir me pencher sur les autres titres de l’auteur, ça tombe ils squattent eux aussi mon Stock à Lire Numérique ; toute la question est de savoir quand est-ce que je trouverai un moment pour ça, j’ai déjà plus ou moins programmé mes futures lectures, de quoi m’occuper un certain temps…