[BOUQUINS] Zhou Haohui – Avis De Décès

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Z. Haohui - Avis de Décès
Titre : Avis De Décès
Auteur : Zhou Haohui
Éditeur : Sonatine
Parution : 2019
Origine : Chine (2014)
352 pages

De quoi ça cause ?

Octobre 2002. Zheng Haoming, sergent renommé et respecté de la police criminelle de Chengdu est assassiné. Arrivés sur les lieux du crime, le capitaine Han Hao et son équipe font la connaissance du capitaine Pei Tao de la police de Longzhou, qui a découvert le corps.

Pei apprend à ses homologues de Chengdu que ce meurtre est très certainement lié à une autre affaire survenue vingt-deux ans plus tôt, un tueur en série nommé Eunémide avait alors commis plusieurs crimes avant de disparaitre sans jamais avoir été identifié.

Quand le retour du tueur aux avis de décès se confirme, le capitaine Han obtient la création d’une cellule interservices composée d’agents triés sur le volet.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Sonatine, une raison qui se pourrait se suffire à elle-même, mais aussi pour découvrir un nouvel auteur et élargir mon horizon en matière de littérature policière chinoise.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Sonatine et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Il n’y a pas encore pas si longtemps que ça, si vous m’aviez interrogé sur la littérature policière chinoise je vous aurais sans doute regardé avec des yeux ronds à faire pâlir de honte le plus crétin des poissons rouges. Puis j’ai découvert (merci à Net Galley) Chi Wei-Jan et aujourd’hui c’est au tour de Zhou Haohui de rejoindre mon cercle d’auteurs sinophiles. Deux approches différentes du polar, mais deux univers très marqués par leur identité asiatique ; et surtout deux belles découvertes littéraires !

Pour le lecteur occidental, le dépaysement est assuré en parcourant les rues de Chengdu, ville chinoise en plein essor économique où le modernisme cohabite avec la tradition et où l’on passe au détour d’une rue des quartiers résidentiels aux taudis. Chengdu est aussi une ville surpeuplée et fortement industrialisée, il en ressort un sentiment quasi permanent d’étouffement, voire d’oppression.

Imaginez un tueur en série tellement sûr de lui qu’il se permet de narguer la police en leur faisant parvenir l’avis de décès de ses futures victimes. Une simple feuille à la calligraphie anonyme indiquant le nom de la victime, la nature de son crime, la date de son exécution et l’identité de son juge et bourreau (toujours le même, Eunémide himself). C’est ce que nous propose Zhou Haohui, rejoignons donc la cellule 18/04 dans sa traque de l’impitoyable et insaisissable Eunémide.

Pour déjouer les plans du tueur, une cellule interservices réunissant la fine fleur de la police sera créée et placée sous le commandement du capitaine Han Hao, connu pour ses états de services irréprochables au sein de la police criminelle de Chengdu. Il sera appuyé par son fidèle bras droit, l’agent Yin Jian, par le capitaine Xiong Lyuan et l’agent Liu Song de l’UPS (Unité de Police Spécialisée) de Chengdu, par l’agent Zeng Rihua, expert informatique de la police criminelle de Chengdu, par Mu Jianyun, psychologue et maître de conférence à l’académie de police du Sichuan et enfin par le capitaine Pei Tao de la police criminelle de Longzhou.

Zhou Haohui apporte beaucoup de soins à ses personnages, chacun une personnalité qui lui est propre et des relations plus ou moins cordiales avec les autres, que ce soit en raison de leur vécu ou simplement par affinités. J’avoue que pour ma part j’ai eu un faible pour le trio Pei, Mu et Zeng.

Du tueur, le mystérieux Euménide, nous ne saurons finalement que peu de choses, le plus souvent invisible, mais omniprésent du début à la fin du récit. Ses cibles de prédilection sont des criminels ayant échappé à la justice, il devient alors juge et bourreau.

L’auteur nous mitonne une intrigue aux petits oignons où rien n’est laissé au hasard, les indices sont disséminés avec parcimonie dans un écheveau de fausses pistes. Les événements survenus en 1984 s’intègrent parfaitement à l’intrigue de 2002.

Avis De Décès est le premier opus d’une trilogie opposant la cellule 18/04 à Eunémide. Les deux suivants sont d’ores et déjà disponibles en VO, mais ne semblent pas encore avoir fait l’objet d’une traduction en anglais. La présente VF étant produite à partir de la version anglaise du roman, j’espère que l’attente ne sera pas trop pour découvrir la suite des événements.

Il faut dire que le final du présent roman est du grand art, on ne peut que trépigner d’impatience dans l’attente du second round (je ne vous donnerai pas le verdict de ce premier round).

Le polar made in China n’est pas un polar au rabais, la qualité est bel et bien au rendez-vous, il n’a pas à rougir face à ses pairs occidentaux. Il va falloir que je me penche sur la question, il me réserve sans doute encore quelques belles découvertes.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Fabio M. Mitchelli – Apocalypse Transferts

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F. M. Mitchelli - Apocalypse Transferts

Titre : Apocalypse Transferts
Auteur : Fabio M. Mitchelli
Éditeur : French Pulp
Parution : 2019
Origine : France
304 pages

De quoi ça cause ?

La société GameSoft France a mis au point une technologie qui devrait révolutionner le monde du jeu vidéo, beaucoup voudraient bien mettre la main sur leur algorithme, certains ne reculeront même devant rien pour parvenir à leurs fins…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que ça fait un moment que j’ai envie de découvrir l’univers littéraire de Fabio M. Mitchelli. Son dernier roman étant proposé par Net Galley, je ne pouvais pas rater cette opportunité.

Ma Chronique

Je remercie les éditions French Pulp et Net Galley pour avoir donné une suite favorable à ma demande.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à préciser que je n’adhère pas à l’idée que la violence des jeux vidéos puisse avoir un impact sur la délinquance ; les jeunes qui ne sont pas foutus de faire la différence entre le virtuel et le réel ont juste un sérieux déficit neuronal. L’inadaptation sociale et sociétale de certains n’étant pas politiquement correcte (et acceptable), le jeu vidéo devient donc un parfait bouc émissaire pour expliquer des comportements déviants.

Soit dit en passant dans son propos l’auteur confond deux types de jeux radicalement différents, le wargame est un jeu de stratégie militaire qui n’a rien à voir avec un FPS (First-Person Shooter ou jeu de tir à la première personne dans en français) qui, comme son nom l’indique, est un jeu de tir. Ce sont ces fameux FPS (comme la série Call Of Duty) que certains voudraient rendre en partie responsables de la violence des jeunes délinquants.

Pour l’anecdote (et pour le fun aussi), l’univers virtuel ne semble pas être très familier à Fabio M. Mitchelli qui écorne l’application Google Maps en la rebaptisant Goggle Maps.

Je referme ce bouquin avec un sentiment plutôt mitigé, globalement j’ai bien aimé, mais j’ai trouvé la partie virtuelle du récit parfois un peu confuse (je ne saurai dire si c’est volontaire ou non de la part de l’auteur) ; pour le peu qu’elle apporte à l’intrigue, elle aurait gagné à être revue sérieusement à la baisse. Heureusement que la situation se décante dans la seconde partie du roman, à partir de là j’avoue que j’ai eu beaucoup de mal à décrocher.

C’est donc délibérément que je vais faire l’impasse sur toute la partie virtuelle du récit. Sachez simplement qu’il est question d’un jeu vidéo hyper réaliste, mais aussi hyper violent qui exploite la fameuse technologie mise au point par GameSoft France.

Apocalypse Transferts est indéniablement un thriller efficace et nerveux. Une course-poursuite sanglante qui part dans plusieurs directions et vous réservera quelques belles surprises au détour de ses nombreux virages mortels. De fait c’est sombre à souhait et pas franchement optimiste (noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir), mais c’est aussi le but recherché.

Les personnages sont bien travaillés et nuancés. Hormis le flic, les autres acteurs de l’intrigue n’ont pas grand-chose pour s’attirer la sympathie des lecteurs ; je reconnais toutefois avoir eu un faible pour Tonton Jackson (derrière ce surnom un tantinet ridicule se cache une véritable machine de guerre).

Je doute que ce roman soit représentatif de l’univers de Fabio M. Mitchelli, il va falloir que je creuse la question, en me penchant notamment sur ses titres qui font partie de la collection La Bête Noire de Robert Laffont.

D’un point de vue purement technique j’ai trouvé que le fichier epub manquait de finition, l’intégration d’une table des matières aurait été un plus appréciable pour les lecteurs qui, comme moi, lisent sur plusieurs supports (PC et liseuse).

MON VERDICT

Morceau choisi que je dédie à la mémoire de mon père.

Merci pour les coups de ceinture, ils étaient mérités et m’ont appris à grandir en restant droit dans mes bottes… ce qui n’exclut pas d’avoir un bon nombre de conneries à mon actif.
Ils m’ont aussi appris que répondre crânement « même pas mal » après une punition est une très mauvaise idée !

Il repense aux rares fois où son père lui avait remis du plomb dans la tête, alors qu’il n’était qu’un ado boutonneux et effronté. Chaque fois qu’il dépassait les limites, le cuir de la ceinture du paternel venait caresser celui de ses fesses en claquant, lui laissant quelques marques superficielles qui disparaissaient le lendemain. Et après ? Cela avait-il fait de son père un bourreau d’enfants, un père indigne, une brute épaisse qui maltraitait son gosse ? Non, il avait éduqué son fils à sa manière, à sa façon, celle d’un papa qui avait connu un temps où les enfants respectaient leurs parents, une époque où les enfants restaient à leur place, une époque où ils étaient conscients que père et mère étaient là pour les placer sur le chemin de la vie, et non pas les laisser plonger dans l’abîme, les laisser s’éduquer seuls, comme certains parents démissionnaires peuvent le faire de nos jours.
(…) Il avait appris à respecter les autres et à aider son prochain, voilà ce qu’un tout petit nombre de coups de ceinture sur le cul lui avait valu.
Aujourd’hui, certains adolescents frappent leurs parents, les menacent, les blessent physiquement et leur font subir des douleurs psychologiques qui infligent bien plus de mal que deux ou trois coups de ceinturon.

[BOUQUINS] Emily Koch – Il Était Une Fois Mon Meurtre

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E. Koch - Il était une fois mon meurtre

Titre : Il Était Une Fois Mon Meurtre
Auteur : Emily Koch
Éditeur : Calmann-Lévy
Parution : 2019
Origine : Angleterre (2018)
416 pages

De quoi ça cause ?

Alex Jackson est dans un profond coma suite à un accident d’escalade. C’est du moins le verdict sans appel énoncé par les médecins, mais si le corps d’Alex ne lui obéit plus, son esprit fonctionne à plein régime.

Prisonnier d’un corps inerte, Alex va réaliser, au fil des visites de ses proches et à partir des bribes de ses souvenirs, que sa chute pourrait bien ne pas avoir été accidentelle…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que le pari un peu fou de proposer un thriller ayant pour héros victime d’un locked-in syndrom avait de quoi titiller ma curiosité.

Parce que malheureusement la question de la fin de vie est plus que jamais d’actualité avec l’affaire Vincent Lambert, entre les parents qui souhaitent la poursuite de son hospitalisation et son épouse qui voudrait lui accorder le droit de mourir dans la dignité.

Ma Chronique

Je ne voudrais pas paraître fanfaronner en disant que la mort ne me fait pas peur, mais elle est de toute façon inéluctable, alors autant se faire une raison et ne plus y penser. Cette acceptation ne signifie pas pour autant que je sois pressé de passer de vie à trépas, j’aime la vie et j’entends bien continuer à la croquer à pleine de dents… et parfois même brûler la chandelle par les deux bouts. Par contre j’avoue sans fard que la dépendance et la souffrance me terrifient ; à ce titre le locked-in syndrom serait de loin mon pire cauchemar.

Et c’est justement ce qui arrive au héros du roman d’Emily Koch, Alex Jackson, bien que parfaitement conscient, il se retrouve prisonnier d’un corps qui ne lui obéit plus. Le moins que l’on puisse dire c’est que le choix du thème est plutôt audacieux pour un premier roman. Plus audacieux encore le choix de placer au centre d’un thriller un héros cloué dans son lit d’hôpital, incapable du moindre mouvement. Et pour couronner le tout, l’auteure nous propose un récit à la première personne, nous plaçant dans la peau et surtout l’esprit d’Alex.

Non seulement Emily Koch ose, mais en plus elle s’en tire d’une façon tout simplement magistrale, le résultat est tout simplement bluffant. Un tel degré de maîtrise a de quoi nous laisser sur le cul, et c’est quasiment KO debout (mais un sourire béat aux lèvres) que l’on referme ce bouquin.

L’auteure nous offre un huis clos époustouflant, d’autant que vous en aurez deux pour le prix d’un. D’une part quasiment tout le récit se déroule dans la chambre d’hôpital d’Alex, d’autre part Alex est enfermé dans son propre corps (d’où le nom français de syndrome d’enfermement parfois utilisé en lieu en place de l’anglicisme locked-in syndrom).

Alex dont seul l’esprit semble encore fonctionner normalement, qui ressent de fait non seulement les émotions, mais aussi les douleurs physiques liées à son état. Qui voudrait forcer son corps à répondre alors que celui-ci s’obstine dans son inertie. C’est depuis son lit d’hôpital qu’il essayera de comprendre ce qui lui est arrivé, aussi bien à partir des visites qu’il reçoit, qu’à partir des bribes de souvenirs qui se remettent peu à peu en place. Au fil des pages, on devient Alex, on lutte avec lui, on souffre avec lui, on doute avec lui.

Contre toute attente cette enquête semblable à nulle autre est captivante de bout en bout. Les différentes pièces du puzzle s’imbriquent à la perfection au fur et à mesure qu’Alex approche de la vérité sur les circonstances de sa chute.

Une des autres grandes forces de ce roman est de réussir à donner corps aux autres personnages uniquement par la perception qu’Alex a d’eux. Ça pourrait sembler un peu léger, mais là encore l’auteure tire parfaitement son épingle du jeu, tous prennent véritablement part au déroulé de l’intrigue.

Plus le dénouement approchait plus se posait la question de la fin, il eut vraiment été dommage que le charme soit rompu par un mauvais choix final ; un écueil adroitement contourné qui nous offre une fin en totale cohésion avec l’ensemble du récit (vous comprendrez aisément que je ne m’attarde pas sur la question).

Un thriller psychologique d’une rare intensité, mais aussi profondément humain. Encore une fois je tire mon chapeau à Emily Koch et lui décerne avec plaisir un doublé coup de cœur / coup de poing amplement mérité.

À la décharge des médecins, d’un point de vue strictement médical il n’est pas évident de différencier un locked-in syndrom comme celui d’Alex (le corps n’a aucune réaction, mais l’esprit fonctionne) d’un état de coma végétatif (dans lequel l’esprit est supposé être aussi inerte que le corps). Les ondes cérébrales échappent encore aux IRM, à moins de répondre à des schémas que le corps médical est en mesure d’interpréter.

Sur la question des soins en fin de vie (il en sera forcément question dans le roman) ma position est dans la logique de ce que j’ai écrit en ouverture de cette chronique ; si je ne veux ni souffrance ni dépendance, je ne peux donc qu’être farouchement opposé à toute forme d’acharnement thérapeutique.

La loi française étant encore frileuse sur la question, seules les directives anticipées permettent au patient de faire connaître ses choix (ça peut paraître macabre d’y penser alors que l’on est encore en pleine santé, mais c’est justement avant qu’il ne soit trop tard qu’il faut accomplir les démarches). Mon choix est fait, ma décision est irrévocable et c’est mon dernier mot Jean-Pierre.

Pour être totalement honnête, si j’en avais la possibilité et les moyens j’irais même beaucoup plus loin dans le baisser de rideau, un ultime voyage vers des contrées pratiquant l’euthanasie ou le suicide assisté avant d’aller boire un verre avec la Faucheuse.

MON VERDICT
Coup double

 

[BRD] Les Frères Sisters

À L’AFFICHE DU JOUR

Les Frères Sisters

Titre : Les Frères Sisters
Réalisation : Jacques Audiard
Production : Why Not Productions
Distribution : UGC
Origine : France / USA (2018)
Durée : 2h10

Casting

John C. Reilly : Eli Sisters
Joaquin Phoenix : Charlie Sisters
Jake Gyllenhaal : John Morris
Riz Ahmed : Hermann Kermit Warm
Rutger Hauer : Le Commodore

Le pitch

Charlie et Eli Sisters sont des tueurs à gages qui travaillent pour le compte du Commodore. Ce dernier leur confie une nouvelle mission : neutraliser Hermann Kermit Warm, un chimiste qui a mis au point une méthode révolutionnaire de prospection minière.

Pour leur faciliter la tâche, le Commodore a déjà envoyé un détective sur les traces du chimiste, quand il l’aura trouvé il en informera les frères Sisters qui n’auront qu’à venir le cueillir.

Ma chronique

Avec Les Frères Sisters, Jacques Audiard tente un pari plutôt osé, tourner un western avec des acteurs américains et le proposer à un public américain. Histoire de corser encore les choses, le réalisateur reconnaît volontiers ne pas être un grand amateur de western…

Le western est au cinéma américain ce que la choucroute est à la gastronomie alsacienne ; un incontournable du genre. Un genre qui compte un nombre impressionnant de films considérés comme cultes, régulièrement remis à l’ordre du jour par les réalisateurs les plus prestigieux (tels que Clint Eastwood avec Impitoyable, Quentin Tarantino avec Django Unchained ou encore Alejandro Gonzales Inarritu avec The Revenant).

Jacques Audiard tente toutefois d’imposer sa marque de fabrique en prenant le genre à contre-pied, avec un film plutôt intimiste qui mise davantage sur les personnages que sur l’action. Il y a bien quelques fusillades, mais elles sont davantage suggérées que mises en scène (on entend et on voit les flingues tirer, point barre).

L’accent est mis en priorité sur la relation et le contraste entre les deux frères. Charlie, le cadet, est un chien fou incontrôlable qui prend plaisir à faire ce qu’il fait alors que Eli, l’aîné, souhaiterait se ranger et vivre une vie « normale ». Il n’en reste pas moins que les frangins sont solidaires en toute circonstance, chacun pouvant compter sur le soutien de l’autre. Je m’incline devant le jeu des acteurs John C. Reilly et Joaquin Phoenix qui donnent vie aux deux frangins avec beaucoup de brio.

De la même façon Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed campent avec beaucoup de conviction leur personnage respectif. Respectivement un détective un peu désabusé qui va voir dans cette mission l’occasion de donner un nouveau sens à sa vie, et un scientifique doux rêveur et idéaliste (pour ne pas dire utopiste).

Ce sont ces quatre personnages qui porteront le film sur leurs épaules du début à la fin, les autres rôles ne sont là que pour donner corps à l’intrigue.

Une approche osée, mais qui risque de déconcerter plus d’un amateur de western, surtout au niveau du public américain ! Pour ma part je me suis laissé entraîner par le film et j’avoue avoir pris un réel plaisir à le visionner.

Même si le film a été couronné par quatre César (meilleur réalisateur, meilleure photographie, meilleur son et meilleurs décors) lors de la cérémonie 2019, il n’a visiblement pas réussi à séduire le public outre-Atlantique. Même en France, malgré un accueil critique plutôt favorable, le public est resté frileux. Commercialement parlant le film est un cuisant échec, il a en effet généré un box-office mondial d’à peine 13 millions de dollars, pour un budget de 36 millions.

♥♥♥½

[BOUQUINS] Steve Hamilton – La Deuxième Vie De Nick Mason

AU MENU DU JOUR

S. Hamilton - La deuxième vie de Nick Mason
Titre : La Deuxième Vie De Nick Mason
Auteur : Steve Hamilton
Éditeur : Clamann-Lévy
Parution : USA (2016)
Origine : France
310 pages

De quoi ça cause ?

Nick Mason sort de prison après cinq ans de détention alors qu’il devait purger une peine de vingt-cinq ans. Il doit sa libération a un deal passé avec Darius Cole, un puissant caïd e Chicago condamné à perpét.

Mais Nick Mason n’est pas pour autant totalement libre. Le deal est simple : quand le téléphone sonne, il répond et il fait ce qu’on lui demande sans discuter…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

C’est le hasard qui m’a poussé à me pencher sur ce bouquin, le pitch m’a plu alors pourquoi pas ? Le fait que des auteurs comme Don Winslow, Michael Connelly, Lee Child, Harlan Coben ou encore Stephen King l’encensent m’a un peu aidé, j’avoue.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Calmann-Lévy et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Malgré une quatrième de couv’ des plus attrayante (à mon goût en tout cas) et un accueil outre-Atlantique dithyrambique (aussi bien par la critique que par ses pairs… et non des moindres), il restait un frein susceptible de freiner mes ardeurs.

Ce roman est en effet le premier tome d’une trilogie, du coup l’idée de devoir patienter pendant un temps indéterminé avant de découvrir la suite a jeté un froid sur mon enthousiasme initial (chat échaudé craint l’eau froide… suivez mon regard vers un certain GRRM qui nous fait languir depuis des années avec la suite du Trône de Fer). Une rapide recherche sur le Net a suffi à dissiper mes doutes, les deux autres opus sont d’ores et déjà disponibles en VO, on peut donc légitimement espérer une traduction française dans des délais raisonnables.

Si Steve Hamilton a déjà plusieurs romans à son actif, dont quelques-uns traduits en français, j’avoue humblement que je ne connaissais pas du tout l’auteur avant de croiser ce titre dans le calendrier « à paraître » de Babelio. Tant qu’à découvrir un nouvel auteur, autant commencer par le début d’un nouveau cycle (sa précédente série, Alex McKnight, compte déjà onze titres, dont seulement trois dispo en VF chez Seuil).

La première phrase du roman donne le ton d’emblée :

La liberté de Nick Mason dura moins d’une minute.

Plus tard, Darius Cole lui exposera la condition sine qua non à sa remise de peine :

Pendant ces vingt ans-là, ta vie m’appartiendra, oui, à moi.

Enfin, à sa sortie de prison, Marcos Quintero, l’homme de confiance de Cole, enfoncera le clou en lui fixant une seule et unique règle qui régira ses prochaines années :

Je vais te donner un portable. Tu réponds quand je t’appelle. Où que ce soit. Jour et nuit. Pas question d’être occupé. Pas question d’être indisponible. Il n’y a que toi qui réponds. Et tu fais exactement ce que je te dis de faire.

Pas simple dans ces conditions pour Nick Mason de renouer le contact avec son ex et surtout avec sa fille ; d’autant que le téléphone ne tardera pas à sonner. Et Nick de comprendre dans quel merdier il s’est fourré !

La construction du roman permet non seulement de suivre le déroulé de l’intrigue, mais aussi d’en apprendre davantage sur le passé de Nick Mason, notamment sur les raisons de sa condamnation et, de fait, sa rencontre avec Darius Cole. Des flashbacks parfaitement intégrés au récit présent sans rompre le rythme (soutenu) de croisière imposé par l’auteur.

Une intrigue que Steve Hamilton mène à la baguette sans le moindre faux pas. Pas véritablement de revirements inattendus de situation, mais il n’empêche que vous aurez du mal à lâcher ce bouquin une fois qu’il vous aura pris dans ses mailles. Un premier tome qui remplit parfaitement le contrat en somme : planter le décor et les personnages, et nous donner envie de découvrir la suite…

Sans surprise, ce premier tome ne nous livre pas toutes les clés permettant de discerner l’avenir de Nick Mason, de nombreuses questions restent sans réponse, il a toutefois le mérite d’apporter une conclusion cohérente à tout un pan de l’intrigue.

J’ai beaucoup aimé le soin apporté aux personnages, notamment l’absence de manichéisme, il n’y a pas du tout blanc ou du noir, juste une large palette de nuances de gris. J’aurais beaucoup de plaisir à retrouver Mason, Cole et Quintero ; mais aussi Sandoval, un inspecteur qui s’est juré de renvoyer Mason en taule.

Vous l’aurez compris j’ai succombé aux charmes de cette découverte.

MON VERDICT

[BRD] Captain Marvel

À L’AFFICHE DU JOUR

Captain Marvel

Titre : Captain Marvel
Réalisation : Anna Boden & Ryan Fleck
Production : Marvel Studios
Distribution : Walt Disney Company
Origine : USA (2019)
Durée : 2h04

Casting

Brie Larson : Vers / Carol Danvers / Captain Marvel
Samuel L. Jackson : Nick Fury
Ben Mendelsohn : Général Talos
Jude Law : Yon-Rogg

Le pitch

Vers vit sur la planète Hala, capitale du peuple Kree, un peuple qui doit faire face aux attaques à répétition des Skrulls, des extra-terrestres métamorphes qui cherchent à étendre leur empire galactique.
Elle n’a de son passé aucun souvenir sinon la vague vision d’un crash de son vaisseau, abattu par les Skrulls.

Au cours d’une mission visant à exfiltrer un espion Kree, elle est faite prisonnière et interrogée par le général Talos, un chef militaire Skrull. Au cours de cet interrogatoire, elle découvre des bribes de son passé en totale contradiction avec le peu qu’elle en connaissait.

Elle parvient à s’échapper et trouve refuge sur Terre. Poursuivie par les Skrulls, elle rencontre Nick Fury qu’elle parvient à convaincre de l’aider à enquêter sur ces visions de son passé. Visions impliquant un certain professeur Lawson et un projet militaire top secret dont les Skrulls voudraient s’emparer…

Ma chronique

Captain Marvel est le vingt-et-unième film du MCU (Marvel Cinematic Universe), le dernier avant le très attendu Avengers – Endgame et l’occasion de découvrir un super-héros féminin que Marvel et Disney annoncent comme étant le plus puissant de cet univers.

Une découverte (totale pour ma part, ne connaissant pas le personnage des comics) qui nous invite à voyager dans l’espace (dans une autre galaxie) et dans le temps (l’action se situe en 1995), l’occasion de rencontrer deux peuples extra-terrestres; les Krees et les Skrulls, qui se livrent une guerre sans merci depuis de longues années.

La dimension intergalactique et le conflit opposant les Krees aux Skulls permettent au film d’imposer sa propre identité au sein du MCU. D’autant que l’on comprend assez vite que la réalité est sans doute bien plus complexe que ce que Yon-Rogg affirme à sa protégée, Vers.

L’intrigue est menée de main de maître du début à la fin (chapeau bas aux réalisateurs qui font, avec ce film, leurs premiers pas dans le MCU) avec un bon dosage entre action, suspense et humour. Vous découvrirerz comme Vers va redevenir Carol Danvers avant de devenir Captain Marvel.

Sans surprise le film est visuellement irréprochable avec un contraste saisissant entre Hala, planète Kree technologiquement très avancée, et la ville de Los Angeles de 1995.

Les plus observateurs auront peut-être reconnu deux personnages précédemment croisés dans Les Gardiens De La Galaxie (qui, chronologiquement parlant, se déroule après Captain Marvel), Ronan et Korath, deux Krees qui donneront bien du fil à retordre aux Gardiens.

Alors Captain Marvel, elle déchire grave ou pas ? En la découvrant au début du film, on a de quoi être plus que dubitatif sur la question, certes elle est capable de tirer des rayons d’énergie avec ses mains, mais c’est un pouvoir qu’elle maîtrise mal et j’ai envie de dire que Iron-Man aussi sait faire ça. Au fur et à mesure du déroulé de l’intrigue, elle gagne en maîtrise et surtout acquiert de nouveaux pouvoirs ; tant et si bien qu’à la fin le doute n’est plus permis : tremble Thanos…

Comme d’hab, n’oubliez pas de rester jusqu’à la fin du générique. La première scène post-générique confirme ce que l’on pouvait supposer à la fin d’Infinity War. La seconde met en scène Goose, le « chat » qui a adopté Nick Fury.

Rien à redire, ce Captain Marvel se situe dans le haut du panier du MCU, une découverte fort sympathique qui fait un peu plus que d’assurer son rôle de divertissement en plantant de nouveaux arcs d’évolution possibles de l’univers Marvel.

Je ne spoilerai rien (ou alors pas grand-chose) en disant que Captain Marvel va rejoindre les rescapés des Avengers, il n’en reste pas moins qu’en l’état actuel des choses on ne voit pas bien comment ils vont pouvoir revenir sur le claquement de doigts final de Thanos… Réponse prochainement avec Avengers – Endgame (annoncé en Blu-Ray pour fin août).

Concernant le MCU j’aime finir mes chroniques en parlant gros sous, c’est vrai que les chiffres ont de quoi donner le vertige. Le budget de Captain Marvel se situerait autour de 175 millions de dollars (ce qui est plutôt raisonnable pour le MCU) ; un investissement largement rentabilisé puisque le film a d’ores et déjà engrangé plus de 1 milliard de dollars au box-office mondial.

Au vu de tels résultats, on peut, sans trop prendre de risques, parier que Captain Marvel aura le droit à d’autres films en solo. D’autant que le conflit entre les Krees et les Skulls est loin d’être terminé… et qu’elle a fait une promesse à Yon-Rogg à la fin du film.

♥♥♥♥♥

[BOUQUINS] Sylvie Brunel – Toutes Ces Idées Qui Nous Gâchent La Vie

AU MENU DU JOUR

S. Brunel - Toutes ces idées qui nous gâchent la vie

Titre : Toutes Ces Idées Qui Nous Gâchent La Vie
Auteur : Sylvie Brunel
Éditeur : JC Lattès
Parution : 2019
Origine : France
280 pages

De quoi ça cause ?

Climat, écologie, alimentation, santé… Sylvie Brunel entend bien tordre le cou à toutes ces idées reçues dont on ne cesse de nous rabâcher les oreilles ; ces contre-vérités qui nous pourrissent la vie ou cherchent à nous culpabiliser à tout prix.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que je suis de ceux qui estiment que tous ces cris d’alarme catastrophistes sont du grand portnawak, pour ne pas dire du grand foutage de gueule. Mais aussi et surtout que sous cet étalage de prétendus bons sentiments se dissimule des enjeux et des motivations bien plus inavouables.

Ma Chronique

Je remercie les éditions JC Lattès et Net Galley qui ont répondu favorablement à ma demande.

Un retour de lecture un peu tardif (j’ai le bouquin depuis le 23 avril) qui s’explique par la nature même de l’ouvrage. Il ne s’agit pas d’un roman, mais d’un essai on ne peut plus sérieux, bien qu’intéressé par le propos (sans pour autant adhérer à 100%), ce n’est pas une lecture aussi fluide que le serait une fiction.

À vrai dire c’est le titre initial du bouquin qui m’avait fait craqué pour lui, Toutes Les Idées Reçues Qui Nous Pourrissent La Vie, j’ai trouvé ça délicieusement provocateur à l’ère du politiquement correct à tout prix. Le titre retenu finalement est un peu plus modéré, mais annonce tout de même la couleur.

Loin de moi l’idée de vouloir remettre en question les compétences de Sylvie Brunel, géographe et économiste française reconnue, globalement je dois reconnaître que je trouve même son (contre) argumentaire plutôt pertinent et convaincant (d’un autre côté, elle prêche un convaincu). Force est toutefois de reconnaître que, parfois, j’ai trouvé son propos un peu péremptoire ; je ne suis pas certain que d’user du même ton que ces noirs corbeaux de l’Apocalypse qu’elle entend dénoncer soit le choix le plus approprié. Difficile d’affirmer, sur de tels sujets que tout est noir au blanc, il me semble plus adapter de jouer avec les différences nuances de gris.

Je ne vais pas revenir sur l’ensemble des thèmes abordés dans cet ouvrage, une fois n’est pas coutume je vais vous proposer quelques extraits (non exhaustifs) illustrant le propos de Sylvie Brunel à vous de vous faire votre propre opinion.

Avenir, alimentation, démographie, biodiversité, futur de l’humanité et de la terre sur laquelle elle vit et qu’elle ne cesse de transformer, toutes ces questions reviennent chaque jour ou presque dans les médias. Pour chacun de ces sujets, combien d’accusations et de mensonges, proférés au nom d’une écologie qui se veut aussi radicale qu’intégrale ! Rétablir les faits en se fondant sur des données scientifiques, sans présupposés idéologiques, devient urgent, car non seulement nous nous gâchons la vie avec des prédictions apocalyptiques, mais nous nous engageons en leur nom dans des directions qui nous mènent droit dans le mur.

En 1960, nous étions 3 milliards sur la terre dont un tiers souffrait de la faim et nous vivions en moyenne 45 ans. Un demi-siècle plus tard, nous sommes plus du double, 7,7 milliards, et pourtant la faim ne touche plus qu’une personne sur 12 (ce qui est encore trop). Et nous vivons en moyenne 72 ans. 142 pays sur 230 sont au-dessus de cette moyenne, avec, dans 40 d’entre eux, une espérance de vie record : plus de 80 ans. Presque tous les pays de l’Union européenne en font partie. Des pays où, précisément, on fait très attention à la nature.

Que nos animaux d’élevage doivent être traités avec respect, oui. Que les modes d’élevages les plus écologiques doivent être privilégiés, oui. Supprimer l’élevage au nom des affamés et de la planète, non : ce serait bien pire… Alors, savourons ces bonnes choses que nous proposent des éleveurs amoureux de leur métier et fiers de leurs produits, au lieu de leur pourrir la vie !

Non, la France ne produit pas « trop ». Il n’est pas sûr que réduire la production, comme beaucoup le souhaitent, améliore le portefeuille du paysan, le nôtre et la santé de l’humanité sur la planète. C’est même le contraire qui risque d’arriver. Le temps où nous souffrions de la faim et des maladies liées à la faim n’est pas si lointain. Et il peut revenir.

Il faut cesser de présenter les humains comme néfastes, proliférants et destructeurs, cesser de nous bassiner tous les jours avec le prétendu glas de la biodiversité !

La nature peut effectivement se passer de l’être humain, mais il n’est pas du tout certain qu’elle s’en porte mieux, et il n’y aurait de toute façon plus personne pour se poser la question.

La vraie écologie doit être de pouvoir mettre à la portée de tous un progrès durable et respectueux autant de la planète que de l’humanité.

Nous n’avons aucune idée de ce que sera le monde de demain. Mais la peur a toujours été mauvaise conseillère. Préparons-nous sereinement à l’incertitude. Apprenons à répondre aux défis de la nature, du nombre, du changement, sans chercher de boucs émissaires ni nous imposer de sacrifices inutiles. Car jamais l’être humain n’est meilleur que lorsqu’il a confiance.

Oyez,oyez braves gens ! Non, la fin du monde n’est pas pour demain (ni après-demain) ! Non, l’humanité ne court pas à sa perte !

Pour ma part je ne supporte pas les donneurs de leçons qui veulent nous imposer leur façon de voir les choses et/ou leur mode de vie.

Je respecte les choix de chacun tant qu’on ne vient me chier dans les bottes. Tu veux être végétarien, végétalien ou végan, c’est ton droit le plus strict, je n’ai rien à y redire. Par contre ne vient surtout pas m’empêcher d’acheter (à l’attention de ces salopards d’antispécistes qui saccagent les boucheries) une bonne côte de bœuf, et moins encore de m’en régaler.

Comme je l’ai dit plus haut je n’adhère pas à tous les points abordés par l’auteure, il n’en reste pas moins que cet ouvrage a le mérite de proposer d’autres axes de réflexion… une initiative plutôt bienvenue alors que la tendance du moment serait plutôt à vouloir imposer la pensée unique !

MON VERDICT

[BOUQUINS] Patrice Guirao – Le Bûcher De Moorea

AU MENU DU JOUR

P. Guirao - Le bûcher de Moorea
Titre : Le Bûcher De Moorea
Auteur : Patrice Guirao
Éditeur : Robert Laffont
Parution : 2019
Origine : France
400 pages

De quoi ça cause ?

À Moorea, Lilith, photographe de presse, et Maema, journaliste, sont amies et travaillent toutes deux pour le quotidien La Dépêche de Tahiti. Elles sont envoyées sur une scène de crime particulièrement sordide, plusieurs corps ont été incinérés après avoir été démembrés dans un macabre simulacre de bûcher funéraire.

Pourquoi une telle mise en scène ? Mise en scène ou authentique crime rituel ? L’enquête s’annonce particulièrement complexe, les deux amies ne comptent pas être tenues à l’écart par la gendarmerie en charge de l’affaire.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est un titre appartenant à la collection La Bête Noire des éditions Robert Laffont.

Pour le cadre, un thriller se déroulant en Polynésie Française, voilà qui n’est pas ordinaire.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Robert Laffont et Net Galley qui ont donné une suite favorable à ma sollicitation pour ce titre.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à préciser que la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française ne peuvent aucunement être considérées comme des territoires voisins. D’une part c’est une assertion géographiquement erronée, même si ces deux territoires sont baignés par le Pacifique Sud, il y a plus de 4600 kms entre Nouméa et Papeete (à titre de comparaison, la distance séparant Paris à Moscou, à vol d’oiseau, est de 2500 kms). D’autre part c’est culturellement parlant tout aussi faux, comme son nom l’indique la Polynésie est de tradition polynésienne alors que la Nouvelle-Calédonie est de tradition mélanésienne. Administrativement la Polynésie Française a le statut de collectivité d’outre-mer (COM)depuis 2003 (anciennement territoire d’outre-mer, TOM) ; la Nouvelle-Calédonie, anciennement TOM, est devenue collectivité sui generis (ou COM à statut particulier) en 1999.

Avec ce roman je découvre une forme littéraire que je ne connaissais pas, le roman noir azur, un roman noir fortement imprégné de vie tropicale ; Patrice Guirao en parle mieux que moi :

Le roman « noir azur » est une alternative. Il ne suffit donc pas que le roman noir s’inscrive dans un cadre insulaire tropical pour qu’il devienne « noir azur ». Il faut qu’il s’imprègne de l’essence de la vie et des pulsations des forces naturelles en présence dans cette partie du monde. On doit y entendre les bruits de l’océan et les silences des lagons, y voir les couleurs qui chatoient et l’immensité des petites choses, la fragilité et la tendresse, comme la puissance et la violence contenues.

Extrait du Petit manifeste élargi du polar « noir azur » joint au présent roman.

Calédonien d’adoption depuis bientôt 40 ans et grand amateur de polars / thrillers / romans noirs, il m’est impossible de ne point succomber à la tentation face à une telle promesse.

L’auteur vivant en Polynésie Française depuis de nombreuses années doit avoir une bonne connaissance des us et coutumes du peuple polynésien, et plus particulièrement des traditions tahitiennes. D’ailleurs la présence d’un glossaire expliquant les nombreux termes tahitiens est une bonne initiative même si on en saisit globalement le sens dans le contexte.

Direction Moorea donc pour y suivre Lilith et Maema qui vont prêter main-forte à la gendarmerie afin de résoudre un crime particulièrement sordide. Une enquête qui leur réservera bien des surprises, et pas toujours des plus agréables.

Parallèlement l’auteur nous invite à suivre Nael, un tueur en série qui sévit en Métropole, choisissant ses victimes au hasard et variant les modes opératoires, la police n’a pas encore fait le lien entre ces nombreuses scènes de crimes. Habitué à ne rien laisser au hasard (à part le choix de ses victimes), il va pourtant être sérieusement ébranlé par une découverte faite sur les lieux de son dernier forfait. Il va rapidement comprendre que pour trouver les réponses à ses questions, il va devoir se rendre en Polynésie Française.

Et puis il y a Gaspard. Un personnage que rencontrera Nael un peu par hasard, et le moins que l’on puisse dire c’est que cette rencontre sera pour le moins déconcertante (pour lui, et pour nous). Je serai tenté de dire qu’il y a deux approches possibles face à ce brave Gaspard. La première étant « simplement » d’accepter qu’il soit ce qu’il affirme être et de fait la touche de fantastique qu’il apporte au roman. La seconde option étant de considérer Gaspard comme la créature qu’il est et rien de plus, les « dialogues » de Nael devenant des monologues avec sa propre conscience. Personnellement j’ai opté pour le premier choix, d’autant que j’ai trouvé Gaspard fort sympathique et plein d’à-propos.

Vous l’aurez compris, l’intrigue est fortement teintée de noir ; ce qui n’empêche pas la touche azur d’être omniprésente et particulièrement bien traitée. Certains lecteurs pourraient trouver que certains détails de ces scènes de vie tahitienne sont à la limite du cliché facile ; pour ma part j’estime qu’elles sont le reflet d’une réelle douceur de vivre tropicale. Douceur qui ne fait malheureusement pas obstacle à la misère, à la délinquance et au crime. Comme le chantait fort justement le grand Charles (mais non, pas de Gaulle ! Aznavour) : « Il me semble que la misère serait moins pénible au soleil« .

Malgré la noirceur de son intrigue, l’auteur conserve un ton résolument frais et optimiste, les quelques touches d’humour sont bienvenues et sonnent juste. Ce roman este une belle découverte malgré un élément du final que j’ai trouvé un peu tiré par les cheveux. La collection La Bête Noire ajoute une nouvelle corde à son arc avec ce titre.

Il semblerait que Patrice Guirao ait décidé de faire de Lilith un personnage récurrent de ses prochains romans, un second opus est annoncé pour janvier 2020 ; le court extrait offert à la fin du roman a de quoi nous faire baver d’impatience. Il me tarde de retourner à Moorea pour y retrouver Lilith et ses amis… et pourquoi pas Gaspard ?

MON VERDICT

[BOUQUINS] Marc Levy – Ghost In Love

AU MENU DU JOUR

M. Levy - Ghost in love
Titre : Ghost In Love
Auteur : Marc Levy
Éditeur : Robert Laffont
Parution : 2019
Origine : France
360 pages

De quoi ça cause ?

Extrait de la quatrième de couv’

Que feriez-vous si un fantôme débarquait dans votre vie et vous demandait de l’aider à réaliser son vœu le plus cher ?
Seriez-vous prêt à partir avec lui en avion à l’autre bout du monde ? Au risque de passer pour un fou ?
Et si ce fantôme était celui de votre père ?

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Marc Levy et ce malgré une pointe d’appréhension due à une impression de déjà-vu. Fidèle de la première heure, je n’allais pas me laisser décourager par un léger doute.

Ma Chronique

En découvrant la quatrième de couv’ du dernier Marc Levy, deux remarques me sont venues quasiment au même moment. La première, plutôt positive, étant que l’auteur revenait à ses premières amours avec son histoire de fantôme. La seconde, conséquence directe de la première, me faisant craindre une impression de déjà-vu / déjà-lu.

Difficile en effet de ne pas penser au premier roman de l’auteur, Et Si C’Etait Vrai (2000), comédie romantique assumée teintée de fantastique (même si en l’occurrence Lauren n’était pas vraiment un fantôme) ; mais aussi, pour la relation au père décédé, au roman Toutes Ces Choses Qu’On Ne S’Est Pas Dites (2008).

Si similitudes il y a, ce vingtième roman de Marc Levy n’en possède pas moins une identité qui lui est propre. Le déjà-vu est resté cantonné au stade d’impression, sans jamais se confirmer dans les faits. Pour tout vous dire, les lecteurs les plus assidus reconnaîtront de nombreuses références au premier roman de l’auteur ; c’est voulu, parfaitement intégré à l’intrigue et totalement assumé.

L’auteur nous propose une comédie romantique décomplexée, légère et pleine d’émotions (mais sans aucune mièvrerie). Les chapitres sont courts, l’auteur va a l’essentiel sans se perdre en digressions stylistiques inutiles, une réussite qui doit beaucoup aux dialogues qui font immanquablement mouche. Bonne humeur et sourires sont assurés quasiment du début à la fin du roman.

Ce n’est pas ce roman qui fera taire les détracteurs de Marc Levy, intellos autoproclamés ne jurant que par cette prétendue grande littérature tout aussi autoproclamée. Et j’ai envie de dire que c’est très bien ainsi, qu’ils ressassent leur bile et crachent leur venin (avec un peu de chance, certains s’étoufferont même avec)… Pendant ce temps là Marc Levy continue d’être un des auteurs les plus populaires en France (mais pas que…), pour le plus grand plaisir de ses lecteurs.

Même confrontés à une situation hautement improbable (pour ne pas dire complètement absurde, pour les esprits les plus cartésiens), les personnages sonnent vrai, aussi bien en tant qu’individu que dans les relations qui se tissent entre eux ; on a une réelle envie de croire à cette histoire.

On a tous, ou presque (bienheureux et bienheureuses ceux et celles qui n’ont pas encore connu cette épreuve), perdu un être cher, partit trop tôt ou trop vite ; je suis convaincu que parmi nous, une immense majorité ne cracherait pas sur quelques jours de plus en sa compagnie (même en l’état de fantôme) pour faire table rase des non dits.

Une lecture dévorée quasiment d’une traite, on s’amuse et on fait le plein de bonne humeur sans prise de tête. Le contrat est rempli, je valide et merci encore Monsieur Marc Levy !

Difficile de désigner un vainqueur pour l’édition 2019 du classico littéraire opposant Guillaume Musso et Marc Levy, deux romans aussi aboutis l’un que l’autre, mais radicalement différents. Pour la prise de risque, je donnerai l’avantage à Guillaume Musso.

MON VERDICT