[BOUQUINS] Sonja Delzongle – Noir Comme L’Orage

Après une nuit d’orage, alors que la saison touristique commence à peine, des corps sont découverts sur l’île d’Oléron et ses alentours, attachés à des pieux métalliques plantés dans le sable face à l’océan, foudroyés. Sept dépouilles au total. Et des modes opératoires très proches.

Le capitaine Max Fontaine, en poste à la PJ de La Rochelle, va aussitôt être chargé de l’affaire. Sa priorité : trouver le lien qui unit les victimes pour espérer remonter jusqu’à leur assassin. Il ne se doute cependant pas de la douloureuse épreuve personnelle qu’il s’apprête à traverser, ni de la solitude, de l’impuissance et de la rage qui vont l’habiter durant cette enquête. Car de nombreux obstacles se dresseront sur sa route avant qu’il puisse accéder à la vérité.

Parce que c’est Sonja Delzongle, une belle et grande plume de la littérature noire.

J’ajouterai la magnifique couv’ illustrée par une photo de Dean Gill, un authentique chasseur d’orages (voir son site), qui capte d’emblée le regard.

Je remercie chaleureusement les éditions Fleuve et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Le moins que l’on puisse dire c’est que ça commence fort avec quatre scènes de crimes et sept victimes. Un point commun relie ces macabres mises en scène, l’arme du crime – nettement moins commune que le fameux point –, qui n’est autre que la foudre. Vous vous en doutez la coupable n’est pas Mère Nature…

C’est le capitaine Max Fontaine et son équipe qui vont hériter de cette délicate enquête. Une enquête qui s’annonce complexe au vu du peu d’indices à disposition des policiers… et de la mauvaise volonté de certains de leurs interlocuteurs.

Du fait de son parcours personnel, le personnage de Max avait a priori tout pour attirer l’empathie des lecteurs, mais sa tendance à l’autoapitoiement aura été rédhibitoire pour moi.

Heureusement que son adjoint, Thomas Bergerac, n’est pas affligé du même syndrome de Caliméro. J’ai beaucoup aimé ce personnage, gentil et dévoué, mais aussi un peu fonceur.

Le personnage le plus trouble et le plus complexe reste incontestablement celui de Bénédicte Saint-Roch.  En refermant le bouquin, le voile n’est pas complètement levé sur les multiples facettes de cette personnalité hors norme.

D’autres personnages du roman vous réserveront quelques surprises, parfois bonnes, souvent mauvaises, mais je ne vous en dirai pas plus.

Comme souvent avec Sonja Delzongle, la dimension humaine occupe une place de premier choix dans ce roman. le parcours de Max s’y prête fort bien, mais l’auteure va au-delà de cette différence. Il y sera aussi question d’amour, d’amitiés, de relations familiales (souvent compliquées), de tolérance (et d’intolérance). Et comme le monde n’est pas tout rose, elle saura, avec son talent habituel, disséquer les aspects les plus sombres de l’âme humaine.

Une seconde intrigue, sous la forme d’un double homicide, va venir se greffer à la trame principale du récit. Autant l’enquête autour des foudroyés vous tiendra en haleine jusqu’au clap de fin, autant ce double meurtre ne vous réservera aucune surprise (on devine d’entrée de jeu la personne qui se cache derrière ce crime… il faut dire l’auteure en fait une parfaite tête à claques).

Sonja Delzongle a décidé de situer son intrigue en 2025, ce n’est certes qu’un détail sans importance sur le déroulé des événements, mais je m’interroge tout de même sur ce choix. Pourquoi ne pas avoir situé son intrigue de nos jours ?

À la lecture du roman, on devine un gros travail de documentation préalable autour des orages et des différents phénomènes qui y sont liés (dont la foudre bien entendu). C’est parfois technique, mais ça reste parfaitement compréhensible pour le profane (que je suis, soit dit en passant).

Si l’intrigue principale est rondement menée, je dois toutefois avouer que la fin m’a un peu donné l’impression de tomber comme un cheveu sur la soupe. Sur le coup je suis resté plus que perplexe devant cet ultime revirement de situation.

C’est la principale raison pour laquelle je me suis donné quelques jours pour rédiger la présente chronique (en général je ne prends aucun recul, j’écris à chaud). Je ne voulais pas que ce bémol final vienne ternir mon ressenti global.

[BOUQUINS] Christophe Royer – Famille Décomposée

À Lyon, au cimetière de Loyasse, un homme est retrouvé assassiné près de la tombe d’un célèbre guérisseur. Découvert par sa mère, tout porte à croire que ce meurtre n’est que le début d’une longue cabale déclenchée contre la famille Daventure.

De par sa complexité, cette nouvelle affaire est un défi de taille pour le commandant Nathalie Lesage et son équipe.

Dans les rues d’un Lyon aussi secret que mystérieux, où la petite histoire va croiser la grande, cette enquête va bouleverser la vie de notre héroïne…

Trois mots pour répondre à cette question : Taurnada, Royer et Lesage.

Taurnada parce que c’est une maison d’édition chère à mon cœur dont le catalogue regorge de pépites.

Christophe Royer parce que j’ai beaucoup aimé ses quatre précédents romans. Et de fait, celui-ci est la quatrième enquête mettant en scène Nathalie Lesage.

Je remercie chaleureusement les éditions Taurnada, et tout particulièrement Joël, pour leur confiance renouvelée depuis déjà quelques années (un échange commencé en 2017 avec le livre de Thierry Poncet, Zykë – L’Aventure).

Après une escapade albigeoise des plus périlleuse, retour au bercail pour cette nouvelle enquête. Nathalie Lesage retrouve la ville de Lyon et son équipe avec la découverte d’un corps laissé en évidence sur la tombe d’un célèbre guérisseur. Une mise en scène qui avait pour seul objectif que ce soit la mère de la victime qui découvre le cadavre.

Une fois de plus Christophe Royer s’inspire du passé historique de la capitale des Gaules (titre que la ville de Lyon a porté jusqu’en l’an 297… il faut croire que les habitudes ont la dent dure) et y ajoute une pointe d’ésotérisme elle aussi extraite de la réalité lyonnaise.

Ainsi le fameux Maître Philippe (Nizier-Anthelme Phlippe de son vrai nom) et son disciple Papus (né Gérard Encausse) ont bel et bien existé, leur réputation ayant même largement dépassé les limites de la ville de Lyon pour s’étendre à l’international. De même, l’ordre des martinistes, quoique plutôt discret, existe bel et bien et aurait même encore une réelle influence à Lyon.

Bien entendu, le personnage de Raspoutine, à la réputation parfois sulfureuse, est lui aussi un personnage historique. Même si dans le roman il ne fait aucun doute que son prétendu descendant n’est qu’un gros mytho qui use de cette influence pour asseoir son autorité sur la bande de décérébrés qui l’entoure (le tout appuyé par quelques accès de colère durant lesquels il laisse libre court à sa violence).

Revenons donc à nos moutons. Le roman s’ouvre sur un rendez-vous galant obtenu via un site de rencontre, Nathalie Lesage s’y rend à contrecœur, tout ayant été manigancé par son amie Diane avec la complicité de Cyrille. Une rencontre qui va d’abord faire sourire – l’heureux élu étant un grand costaud qui arrive vêtu d’un kilt en cuir – mais comme le dit fort bien le dicton « l’habit ne fait pas le moine ».

Rapidement, Nathalie est rappelée par la dure réalité de son métier avec une victime sur laquelle le ou les coupables semblent s’être acharnés plus que nécessaire. Devant le manque d’indice l’enquête piétine même s’il semble évident que c’est la famille Daventure qui est visée par cette macabre mise en scène.

Cette famille qui se cache sous un semblant de respectabilité et de religiosité (la matriarche ne jure que par Maître Philippe, le citant à n’en plus finir à la moindre occasion) m’a beaucoup fait penser à la chanson Ces Gens-Là de Jacques Brel. Tout pour la façade, mais quand on commence à creuser c’est une autre vérité qui se révèle.

Et puis, et puis, et puis il y a Frida… Sauf qu’elle s’appelle Romy dans le roman, une adolescente recueillie par les Devanture à la mort de son père. Une ado qui se donne des airs de rebelle, mais qui rêve de voler de ses propres ailes pour partir loin de cette famille de cinglés.

Une gamine qui ne devrait laisser personne indifférent tant elle est attachante. Pour vous dire, même Nathalie Lesage baisse la garde face à cette ado qui n’est pas sans lui rappeler l’adolescente qu’elle était.

L’intrigue est rondement menée, captivante de bout en bout. On se doute bien qu’il y anguille sous roche et que cette foutue anguille va nous coller une paire de claques monumentale. Et pourtant, je n’avais pas imaginé quelque chose d’aussi glauque !

Pour les lecteurs qui fréquentent Nathalie Lesage depuis déjà quelque temps (depuis ses débuts pour ma part), on assiste à une évolution des plus positive pour le personnage. Il était temps que Christophe Royer lui accorde sa part de bonheur. Mais pas question pour autant qu’il lui offre une retraite prématurée, j’espère bien la retrouver pour d’autres enquêtes.

[BOUQUINS] Olivier Descosse – Le Cirque Du Diable

Massif de la Meije. Un corps congelé, entièrement nu, retrouvé par des surfeurs lors d’un ride dans le Cirque du Diable. Le lieu est inaccessible et connu pour les légendes funestes qui l’entourent. Au même moment dans le Haut-Var, trois cadavres calcinés sont découverts au fond d’une bergerie abandonnée, en pleine forêt.

La première affaire est confiée à Paul Cabrera, policier de la Crime qui a fait ses armes à la BAC Nord et se déplace uniquement en Harley ; la seconde à Chloé Latour, cheffe de groupe à la brigade criminelle de Marseille, dont la classe et la froideur suscitent défiance et jalousie.

La glace, le feu… Et si ces deux énigmes n’en faisaient qu’une ? Des sommets inviolés aux ZAD sauvages, des as de la glisse aux groupes survivalistes, Paul Cabrera et Chloé Latour réalisent d’étranges recoupements. Avec une certitude : le ou les assassins disposent de capacités physiques hors du commun.

Pour le plaisir de retrouver Chloé Latour que j’ai rencontré dans le précédent roman d’Olivier Descosse, Peurs En Eaux Profondes. Un personnage que j’ai appris à apprécier et qu’il me tardait de retrouver.

Je remercie les éditions XO et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Pour son nouveau roman, Olivier Descosse renoue avec deux de ses personnages récurrents. Deux pour le prix d’un… what else ? C’est Paul Cabrera – héros de trois romans publiés entre 2003 et 2005 –, qui va enquêter sur la scène de crime des Hautes-Alpes. Pour sa part, Chloé Latour – découverte l’an dernier dans Peurs En Eaux Profondes –, va devoir élucider le mystère autour d’un triple homicide dans le Haut-Var.

Deux flics qui bossent à la Crim’ de Marseille, mais ne se connaissent que de nom… et de réputation. Au fil des parties découpant le roman, le lecteur va alterner entre deux enquêtes distinctes. Il faudra quasiment attendre les deux tiers du bouquin pour que leurs enquêtes respectives ne fassent qu’une et que nos deux flics de choc (chacun à sa façon) se rencontrent et enquêtent de concert.

Paul et Chloé avaient chacun des a priori sur l’autre, leur coopération plus ou moins forcée, va leur permettre d’apprendre à se connaître et à se respecter. Deux personnalités affirmées qui vont s’avérer complémentaires sur une enquête particulièrement complexe et face à un tueur implacable.

J’ai bien aimé l’opposition des caractères de ces deux enquêtes qui, soit dit en passant, vont devoir mener sans l’aide directe de leurs équipes respectives. Ils pourront heureusement compter sur le renfort humain et matériel de la gendarmerie de Briançon.

Même si Chloé Latour est toujours minée par son passé douloureux, j’ai trouvé le personnage plus apaisé et moins directif que dans le précédent roman. Ou alors c’est que je me suis habitué aux petits travers de la nana.

Force est de constater qu’en matière de perversité meurtrière Olivier Descosse n’y va pas avec le dos de la cuillère. Deux de « ses » victimes feront en effet l’objet d’une mise à mort particulièrement atroce.

L’auteur nous concocte une intrigue qui tourne autour de thèmes qui sont dans l’air du temps, tel que l’écologie, la collapsologie et une pointe de survivalisme. Mais pas que… Une intrigue plutôt bien ficelée qui vous réservera quelques surprises au fur et à mesure que le voile se lèvera et que les implications des uns et des autres se préciseront.

Il est vrai que la nature en général, et la montagne en particulier, fait partie intégrante de l’intrigue. D’autant que le fameux Cirque du Diable est sujet à d’anciennes superstitions qui en font un endroit maudit.

Les chapitres sont courts, le style est direct, pas de fioritures pour égarer le lecteur, le fond avant la forme. Un choix généralement payant en matière de thriller, et la recette fonctionne parfaitement dans le présent roman.

J’ai lu une critique du roman dans laquelle le lecteur en question soulignait des erreurs de l’auteur concernant le fonctionnement et l’organisation de la Légion étrangère. N’étant pas expert en la matière je ne me prononcerai pas, une chose est sûre je n’ai rien trouvé de choquant susceptible de nuire au déroulé et à la crédibilité de l’intrigue.

Dans une interview publiée sur le site des éditions XO, Olivier Descosse promet que Chloé Latour et Paul Cabrera seront de retour dans de futurs romans, mais chacun de leur côté cette fois. Je ferai en sorte de répondre présent pour ces rendez-vous futurs, et qui sait, peut-être que d’ici là je prendrai le temps de découvrir les précédentes enquêtes de Paul Cabrera.

[BOUQUINS] Rémy D’Aversa – Chiaroscuro

Novembre, Lyon plongée dans un brouillard inquiétant.

Le capitaine de police Santonino Roccasecca est envoyé de toute urgence dans le VIIème arrondissement de la ville où trois têtes viennent d’être découvertes dans un congélateur. Le tueur en série, un certain Hector Bahiamantis, s’est défenestré, non sans avoir décapité, au préalable, sa propre mère qu’il a surprise en train d’appeler la police.

Coup de folie ? Coup de panique ? Sans doute… Tout le monde est soulagé, Bahiamantis ne pourra plus nuire. Mais bientôt, d’autres têtes sont découvertes dans des endroits stratégiques de Lyon. Les crimes sont signés d’une reproduction de Caravaggio, le peintre italien. Au dos, un message manuscrit à l’attention des policiers, et sur chacune des cartes, des empreintes. Celles de la future victime.

Commence alors une course contre la montre effrénée. L’inspecteur Roccasecca arrivera-t-il à temps ?

Parce que j’avais bien aimé la précédente enquête du capitaine Roccasecca, Géronimo. J’étais curieux de le retrouver avec son équipe, confronté un nouveau défi criminel.

J’ai fait connaissance avec le capitaine Roccasecca de la PJ de Lyon, à l’occasion de sa première apparition littéraire dans le roman Géronimo (ma chronique). Une rencontre plutôt convaincante qui m’a donné envie de le retrouver sur d’autres enquêtes.

J’ai beaucoup aimé le personnage de Santonino Roccasecca, un brin provocateur et anticonformiste, mais surtout bon vivant qui succombe sans modération aussi bien aux plaisirs de la bonne chère (entre lui et sa voisine, leurs petits plats vous mettront l’eau à la bouche) autant qu’aux délices de la chair (avec Chiara, sa voisine, escort de luxe et maîtresse attitrée, Clotilde, la procureure et maîtresse occasionnelle ou encore Marie, son ex-femme).

Sa nouvelle affaire réunissait tous les ingrédients pour être bouclée aussi vite qu’elle s’était ouverte. Un tueur en série qui se suicide après avoir décapité sa mère, trois têtes dans un congélateur et un journal intime. Bon débarras ! Sauf que les choses vont sérieusement se corser quand de nouvelles têtes décapitées vont faire leur apparition…

Dès lors les enquêteurs vont se retrouver confrontés à un tueur en série insaisissable qui semble prendre un malin plaisir à narguer la police. S’en suit un jeu de chat et de la souris parsemé de cadavres.

J’ai trouvé l’intrigue plus aboutie que la précédente, il faut dire aussi que l’affaire est nettement plus complexe et réservera aux policiers son lot de fausses pistes.

Au niveau des personnages Rémy D’Aversa développe presque exclusivement les personnalités de Santonino, Chiara et Marie. Les membres de l’équipe d’enquêteurs sont quelque peu laissés sur le bas-côté, nous n’apprendrons pas grand-chose de leurs caractères et vécus.

Il n’en reste pas moins que Blanchet en amoureux transi de la belle Chloé m’a fait sourire plus d’une fois. J’ai aussi apprécié les interventions du légiste, Andoni Urcelay (il faut dire qu’il est pas mal sollicité sur cette affaire).

J’avoue que le titre m’intriguait, ne voyant pas du tout à quoi il pouvait faire référence. En tout cas une chose est sûre, il ne s’agissait pas d’un chef indien cette fois… ni d’un chat. Une spécialité culinaire italienne ? Que nenni ! Si vous n’avez pas succombé à l’appel de Google, vous apprendrez en temps et en heure qu’il est parfaitement adapté à l’intrigue et au tueur en série du roman.

Je terminerai par un petit bémol qui porte davantage sur la forme que sur le fond, les correcteurs et correctrices des éditions Alter Real ont laissé passer quelques coquilles qui piquent les yeux. Dommage que Antigone n’ait pas eu l’occasion de jeter un œil au manuscrit avant publication du bouquin.

Quoi qu’il en soit, cela ne m’empêchera pas de répondre présent pour la prochaine enquête de ce cher Santo.

[BOUQUINS] Estelle Tharreau – Le Dernier Festin Des Vaincus

Un soir de réveillon, Naomi Shehaan disparaît de la réserve indienne de Meshkanau.

Dans une région minée par la corruption, le racisme, la violence et la misère, un jeune flic, Logan Robertson, tente de briser l’omerta qui entoure cette affaire. Il est rejoint par Nathan et Alice qui, en renouant avec leur passé, plongent dans l’enfer de ce dernier jalon avant la toundra.

Parce que c’est Taurnada, une maison d’édition dont le catalogue est riche en pépites.

Parce que c’est Estelle Tharreau, après quatre romans et un recueil de nouvelles, je suis toujours aussi convaincu par la puissance et la justesse de son écriture.

Je remercie les éditions Taurnada, et tout particulièrement Joël, pour leur confiance renouvelée.

Dans son avant-propos, Estelle Tharreau partage un constat glaçant :

L’auteure n’a pas peur de se frotter à des thèmes qui envoient du lourd, qu’il s’agisse du système judiciaire américain (La Peine Du Bourreau) ou le syndrome de stress post-traumatique chez le soldat (Il Était Une Fois La Guerre), à chaque fois on devine un gros travail de documentation préalable à l’écriture du roman, mais surtout elle parvient à construire une intrigue solide autour de sa thématique, une intrigue centrée avant tout sur l’humain.

Cette fois c’est la condition des autochtones au Canada qui servira de toile de fond à ce nouveau roman. Un sujet ignoré par la plupart des Français qui a pourtant de quoi faire réfléchir. Estelle Thareau parvient, en quelques pages, à nous plonger en totale immersion dans son intrigue tandis que l’on découvre une bien sombre réalité.

L’un des points les plus glaçants abordés dans le roman concerne les pensionnats autochtones, qui ne sont malheureusement pas nés de l’imagination de l’auteure. Les jeunes innus devaient subir un enseignement religieux strict, mais sans aucun apport éducatif, auquel s’ajoutaient brimades, privations et sévices en tout genre. Déjà par nature j’ai envie de bouffer du curé, ce n’est pas ce roman qui va me réconcilier avec l’Église et ses sectaires.

Pour planter le décor direction le Grand Nord québécois, entre la réserve innue de de Meshkanau et la ville de Pointe-Cartier les relations sont sur le fil du rasoir. Au mieux chaque communauté ignore l’autre, au pire quelques heurts peuvent éclater. Les autorités de chacune de ces deux entités font au mieux pour entretenir un équilibre précaire.

L’annonce de l’ouverture prochaine d’une scierie industrielle à grande échelle va pourtant faire l’unanimité contre elle. Pas pour les mêmes raisons, les uns veulent préserver leur confort quand les autres se posent en défenseur de l’environnement et de leurs traditions. La moindre étincelle pourrait bien mettre le feu aux poudres…

Et si cette étincelle était la disparition, au cours de la nuit de la Saint Sylvestre, de la jeune Naomi Sheehan ?

Du côté de Pointe-Cartier, les autorités souhaitent faire le moins de vague possible autour de cette disparition. C’est pourquoi le chef de la police Roy charge de l’enquête un jeune flic sans envergure, Logan Robertson, en lui recommandant de se contenter du minimum vital… sauf que Robertson va s’avérer être moins docile et plus curieux que ce qu’il laissait présager.

Dans la réserve de Meshkanau, il n’y a guère que Marie Fontaine, animatrice d’une radio autochtone, qui semble s’émouvoir de la disparition de Naomi.

En fait le véritable électrochoc va venir de l’extérieur, porté par deux étudiants que tout semble opposer, Nathan Lebel, fils d’un notable de Pointe-Cartier et défenseur autoproclamé de la cause innue, et Alice Tremblay, une Innue pas franchement enthousiaste à l’idée de renouer avec son passé.

Le décor est planté, les personnages sont en place, l’intrigue peut alors déployer ses ailes et prendre son envol. Des ailes bien noires comme vous l’aurez compris, et encore ce n’est que la partie visible de l’iceberg… attendez-vous à une plongée dans ce que l’âme humaine a de plus sombre et abject. Il va falloir avoir le cœur et les tripes bien accrochés cette traversée au d’un océan agité par de sombres remous.

Entre Pointe-Cartier minée par la corruption, le racisme et les non-dits, et Meshkanau où la violence, l’alcool et la misère régissent le quotidien de tout à chacun ; on est bien loin d’une invitation au voyage… mais c’est pourtant une vérité que l’on se doit de regarder en face.

Une fois de plus la plume d’Estelle Tharreau est d’une redoutable efficacité, implacable et sans concession. Une fois elle sait trouver les mots juste pour faire mouche et taper là où ça fait mal. Une fois de plus elle nous laisse au bord du KO technique, mais qu’est-ce c’est bon… qu’est-ce que c’est bien fait. On en redemande !

[BOUQUINS] Guillaume Musso & Miles Hyman – La Vie Secrète Des Écrivains

Après avoir publié trois romans devenus cultes, le célèbre écrivain Nathan Fawles annonce qu’il arrête d’écrire et se retire à Beaumont, une île sauvage et sublime au large des côtes de la Méditerranée.

Vingt ans après, alors que ses romans continuent de captiver les lecteurs, Mathilde Monney, une jeune journaliste, débarque sur l’île, bien décidée à percer son secret. Commence entre eux un dangereux face-à-face, où se heurtent vérités et mensonges, où se frôlent l’amour et la peur…

Je n’ai pas pour habitude de relire un bouquin déjà lu, d’une part parce que je n’en vois pas forcément l’intérêt, d’autre part parce que mon Stock à lire Numérique ne cesse d’enfler plus vite que je ne lis.

Bien qu’ayant déjà lu La Vie Secrète Des Écrivains (lien vers ma chronique), j’étais curieux de découvrir ce que pouvait donner son adaptation graphique. Raconter la même histoire sur moins de 200 pages (le roman compte tout de même 352 pages) sans la dénaturer me semblait être un sacré challenge.

Autre challenge, plus personnel cette fois : comment écrire la chronique d’un roman déjà chroniqué sans radoter ? En relisant mon billet concernant le roman de Guillaume Musso j’ai constaté que j’avais fait l’impasse sur le personnage de Mathilde, me concentrant sur le binôme Nathan / Raphaël. Du coup la réponse s’est imposée d’elle-même, non seulement rendre à Mathilde la place qui lui appartient, mais aussi me centrer davantage sur l’aspect policier du bouquin.

Force est de reconnaître une première impression des plus positives, d’emblée j’ai retrouvé l’ambiance du roman, avec en bonus un visuel du plus bel effet.

Nathan Fawles était un écrivain à succès qui a mis fin à sa carrière du jour au lendemain il y a une vingtaine d’années. Depuis il s’est retiré sur l’île de Beaumont où il coule des jours heureux. Mais ça, c’était avant…

Coup sur coup il va recevoir la visite de Raphaël Bataille, un écrivain en herbe qui veut à tout prix lui soumettre son manuscrit et de Mathilde Monney, une jeune et séduisante journaliste suisse sans pas si innocente qu’elle ne le laisse à penser. Pour essayer de percer les secrets de Mathilde, Nathan va devoir, à son grand désarroi, faire appel à Raphaël.

Cerise sur le gâteau, v’là t’y pas qu’un cadavre est retrouvé, le corps exposé dans une mise en scène macabre. Du coup les autorités décrètent un blocus de l’île.

Dans le roman chaque chapitre s’ouvre sur une citation d’un auteur (Umberto Eco, Margaret Atwood, Agatha Christie, Milan Kundera…), le principe est repris et magnifié ici puisque ladite citation est enrichie d’une illustration mettant en avant son auteur.

On retrouve bien les ingrédients du thriller psychologique dans le face-à-face entre Mathilde et Nathan. Il a beau soupçonner que cette femme peut être dangereuse, voire lui être fatale, il va entrer dans son jeu de séduction sans toutefois baisser totalement sa garde.

Chacun cherche la vérité, mais laquelle ? Comme le dit Nathan : « La vérité n’existe pas. Ou plutôt si, elle existe, mais elle est toujours en mouvement, toujours vivante, toujours changeante. » Une affirmation qui va prendre tout son sens dans la dernière partie du roman.

Le lecteur va quant à lui se balader au cœur d’une intrigue riche en rebondissements, certes si vous avez déjà lu le roman vous n’apprendrez rien de nouveau, mais cela ne m’a pas dérangé outre mesure. À vrai dire je n’ai pas eu l’impression d’une relecture, mais plus de la lecture d’une réécriture, à la fois fidèle à l’original tout en proposant une construction différente.

Le trait et le choix des couleurs de Miles Hyman collent parfaitement au récit. On en viendrait presque à regretter que cette île de Beaumont soit fictive, les illustrations nous donnent vraiment envie d’y passer des vacances… et plus si affinités.

Résultat des courses, j’ai dévoré cette lecture d’une traite. Revenant même parfois en arrière pour le seul plaisir de profiter pleinement des illustrations. Une belle (re)découverte qui pourrait bien me pousser vers d’autres adaptations graphiques de romans déjà lus.

[BOUQUINS] Julia Bartz – La Reine Du Noir

Pour beaucoup de lectrices, Roza Vallo est une romancière de génie, et peut-être plus encore, une sorte de gourou. Grâce à elle et à son livre La Langue du démon, nombre de jeunes filles et de femmes ont cessé de se considérer comme de petites créatures fragiles pour explorer leur côté sombre, pulsionnel, sexuel. Aussi, quand la grande prêtresse du roman d’horreur féministe décide d’offrir à cinq d’entre elles un séminaire d’écriture dans son manoir de Blackbriar, isolé au milieu des monts Adirondacks, les candidatures affluent.

Peu importe que Vallo soit une figure controversée et que l’endroit traîne une sinistre réputation. Lorsqu’elle est sélectionnée, Alex, une jeune autrice, y voit la chance de sa vie. Mais quand Roza Vallo décide d’instaurer une compétition acharnée, les tensions sont rapidement exacerbées entre les concurrentes. Jusqu’au jour où l’une d’entre elles disparaît…

Parce que c’est Sonatine et l’opportunité de découvrir une nouvelle auteure.

Si la couv’ a immédiatement su capter mon attention, c’est la promesse d’un « huis clos haletant, gothique et féministe » qui aura été l’élément déclencheur à l’acquisition de ce roman.

Je remercie les éditions Sonatine et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Commençons par ce qui fâche : la quatrième de couverture. À la fois mensongère (il n’y a pas vraiment de tensions entre les concurrentes, au contraire, elles sont plutôt solidaires dans le défi qui leur est imposé) et beaucoup trop bavarde (la disparition d’une candidate ne survient que dans la deuxième moitié du roman).

Heureusement cette maladresse est partiellement compensée pour une couv’ que je trouve superbe. Le ton est donné avant même d’ouvrir le bouquin.

Le mal étant fait, le roman se divise donc en deux parties. Dans la première on fait connaissance avec les cinq participantes à la retraite littéraire organisée par Roza Vallo. On voit leurs relations évoluer tandis qu’elles se plient aux règles draconiennes imposées par la maîtresse de cérémonie. Un huis clos littéraire plutôt paisible même si l’on peut s’interroger sur le comportement et les intentions de Roza Vallo.

C’est au lendemain d’une soirée particulièrement agitée que tout ce petit monde va s’apercevoir qu’une des participantes manque à l’appel. Et ce n’est que le début d’une descente aux enfers vertigineuse. Clairement, l’ambiance et le rythme de l’intrigue changent du tout au tout. On entre alors effectivement dans la phase huis clos haletant, et ce jusqu’à son dénouement.

Les personnages peuvent se diviser en deux groupes, avec les habitants du domaine (Roza Vallo, la cuisinière et la gouvernante) d’un côté, et les participantes à cette fameuse retraite littéraire (par ordre d’apparition : Alex, Poppy, Taylor, Keira et Wren) de l’autre. Sans vouloir en dire trop, là encore ne tenez rien pour acquit, les cartes pourraient être rebattues, et pas qu’une fois… Là encore la promesse féministe est tenue, avec parfois le côté revendicatif du terme.

Le domaine de Blackbriar pourrait presque faire office de personnage à part entière, coupé du monde (c’est encore plus vrai au cœur de l’hiver) et au passé douloureux (les précédents propriétaires ont été retrouvés morts sans que la lumière ait été totalement faite sur ce drame… juste une version officielle bancale à plus d’un titre). C’est justement le domaine et son histoire qui apportent la touche gothique.

La promesse d’un huis clos haletant et oppressant est donc largement tenue. Cerise sur le gâteau, bien souvent indissociable d’un bon huis clos, la dimension psychologique est parfaitement maîtrisée. La tension monte crescendo jusqu’à pousser les personnages (et accessoirement les lecteurs) dans leurs ultimes retranchements.

Le récit est rédigé à la première personne, c’est Alex qui nous fait vivre le déroulé des événements. Si son côté Caliméro m’a parfois agacé (surtout dans la première partie du roman), je reconnais que la construction est bien ficelée, on est en totale immersion au cœur de l’intrigue.

Pour un premier roman, Julia Bartz réussit à imposer sa griffe dans l’univers du noir. Certes on pourrait lui reprocher quelques invraisemblances, mais elles sont rapidement emportées par le déroulé de l’intrigue.

Attention, Madame Bartz, je ne serai pas aussi conciliant avec vos prochains romans…

[BOUQUINS] Marc Levy – La Symphonie Des Monstres

En rentrant chez elle un soir, Veronika découvre la disparition de son fils âgé de neuf ans. Désemparées, elle et sa fille Lilya cherchent à comprendre où Valentyn a été emmené. Elles vont remuer ciel et terre pour retrouver la trace du petit garçon – l’une animée par sa témérité d’adolescente, l’autre par sa détermination de mère. Mais l’ennemi est partout, et Lilya et Veronika ne pourront se fier à personne… ou presque.

Ensemble, elles vont tenter de déjouer « la Symphonie des monstres », un projet bien plus terrifiant qu’une fiction.

Parce que c’est Marc Levy et que ce nouveau roman semble suivre la même voie engagée (même si l’auteur réfute ce terme) que sa trilogie des 9.

Avec sa trilogie des 9 (C’Est Arrivé La Nuit, La Crépuscule Des Fauves et Noa), Marc Levy s’essayait avec une grande efficacité au roman engagé façon techno thriller. La Symphonie Des Monstres, le vingt-cinquième roman de l’auteur, suit cette même voie, la cible désignée étant le régime de Valdimir Poutine et ses exactions en Ukraine.

Il faut dire que les raisons de tirer à boulets rouges sur le tsar du Kremlin ne manquent pas. J’ai ainsi découvert avec consternation que Maria Lvova-Belova et le programme de déportation (reconversion) d’enfants ukrainiens sont bien réels (ce suppôt de Poutine fait d’ailleurs l’objet d’un mandat d’arrêt international depuis mars 2023 au même titre que son maître).

Qu’un tel programme puisse exister de nos jours est déjà une honte, mais je vous garantis qu’en découvrant par le détail ce qui se cache derrière, vous aurez beaucoup de mal à accepter que cela puisse être vrai. Faut vraiment être dégénéré du bulbe pour imaginer un truc pareil !

Valentyn, le jeune fils de Veronika, fait justement partie des victimes de ces rafles perpétrées par les forces russes. Un garçon brillant, mais mutique, à 9 ans, il n’a pas encore prononcé le moindre mot.

Dès lors Veronika et Lilya, la sœur aînée de Valentyn, vont tout mettre en œuvre pour le retrouver. Quitte à agir parfois de façon pas franchement coordonnée… L’éternel problème des parents confrontés à un(e) adolescent(e) qu’ils n’ont pas vu grandir. Cerise sur le gâteau, se retrouver en territoire occupé par les forces ennemies n’aide pas franchement à l’épanouissement familial.

Dans ce roman j’ai beaucoup aimé les personnages de Valentyn et Lilya, deux enfants au caractère bien trempé et à la personnalité affirmée. Si je peux sans mal imaginer la détresse d’une mère face à de tels événements, je dois pourtant reconnaître que le personnage de Veronika ne m’a pas inspiré outre mesure.

L’intrigue du roman se déroulant en Ukraine, je n’ai pas été plus surpris que ça de découvrir que Vital (l’un des 9, résidant avec son frère et leur gouvernante dans un luxueux manoir aux abords de Kyiv) ait un rôle à jouer dans le déroulé des événements. Je n’en dirai pas plus, mais ce n’est pas le seul membre des 9 qui sera amené à intervenir pour aider Veronika à retrouver son fils.

Marc Levy lève ainsi le voile sur un aspect méconnu du conflit, une guerre qui se joue sur le front numérique. L’existence des hackers russes au service de Poutine est désormais un secret de Polichinelle, les Ukrainiens ne sont pas en reste, depuis le début du conflit ils ont créé une véritable armée numérique (IT Army) pour contrer leurs homologues russes… et plus si cela peut nuire à l’envahisseur.

Une fiction fortement ancrée dans la réalité et l’actualité, rondement menée par son auteur. Pas forcément de quoi provoquer de brusques poussées d’adrénaline, mais son intrigue devrait toutefois vous tenir en haleine jusqu’au clap de fin.

Un roman qui ne devrait laisser personne indifférent par les thèmes qu’il aborde. À son échelle le bouquin fait office de barrage contre l’ignorance, après l’avoir lu vous ne pourrez plus vous réfugier derrière l’excuse foireuse du « On ne savait pas ». Même s’il faut bien avouer qu’au niveau individuel on ne peut pas faire grand-chose pour faire bouger les choses.

Pas de classico opposant Marc Levy et Guillaume Musso cette année, ce-dernier ayant travaillé sur la transposition en roman graphique de La Vie Secrète Des Ecrivains, toujours pour les éditions Calmann-Lévy.

[BOUQUINS] Jacques Saussey – Ce Qu’Il Faut De Haine

Ce matin-là, comme tous les dimanches, Alice Pernelle s’éclipse de la maison de ses parents pour aller courir avec son chien. Mais en arrivant au bord de la Cure, cette rivière qui traverse son village natal, un tableau macabre lui coupe les jambes et lui soulève l’estomac. Un corps écartelé et grouillant de vers gît sur la rive.

Alors que les enquêteurs en charge de l’affaire font de glaçantes découvertes et se confrontent à des témoignages décrivant la victime comme une femme impitoyable, les habitants de Pierre-Perthuis, petit hameau du Morvan, sont ébranlés. Les visages se ferment. Les confidences se tarissent.

Hantée par les images de ce cadavre, Alice a pourtant besoin de réponses pour renouer avec l’insouciance de sa vie d’étudiante. Au risque d’attirer l’attention de l’assassin sur elle…

Parce que c’est Jacques Saussey, un incontournable de la littérature policière francophone.

Comme le pitch a titillé ma curiosité et qu’il s’agit d’un one-shot, je me suis laissé tenter sans opposer la moindre résistance.

Je remercie les éditions Fleuve et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Le moins que l’on puisse dire c’est que ça commence fort, très fort même, avec la découverte d’une scène de crime particulièrement sordide. Et ce n’est que le début, les enquêteurs vont découvrir un mode opératoire plus pervers que tout ce qu’ils auraient pu imaginer.

L’enquête autour de ce crime va se dérouler en simultané à Paris (c’est la brigade criminelle qui va être saisie du dossier) et dans le Morvan (via la gendarmerie).  L’une des grandes questions autour de ce crime sera en effet de faire le lien entre la victime qui vivait et travaillait à Paris, et la commune de Pierre-Perthuis où le corps a été retrouvé.

Au fil de leur enquête, les policiers vont découvrir que la victime était une femme détestée de tous. Il faut dire que les RH d’entreprises en difficulté la recrutaient pour mettre en place un plan d’épuration du personnel. Plan qu’elle exécutait sans une once d’empathie ou de considération.

Il est vrai qu’en découvrant le personnage le lecteur n’a pas vraiment envie de lui souhaiter tout le bonheur du monde, mais de là à lui souhaiter une fin aussi horrible, il y a un pas. Un pas que l’assassin a franchi avec une détermination sans faille, il en faut de la haine pour mettre en place une vengeance aussi impitoyable.

Les chapitres consacrés à l’enquête (ou plus exactement aux enquêtes) sont entrecoupés par l’enquête d’Alice (la jeune femme qui a découvert le corps) mais aussi par des chapitres donnant la parole à notre assassin.

Jacques Saussey opte pour une approche directe et des chapitres courts afin de maintenir le lecteur en apnée. Lecteur qui devra avoir le cœur (et les tripes) bien accroché, l’auteur ne nous épargne rien dans le calvaire qu’a subi la victime.

Une intrigue maîtrisée de bout en bout dont le dénouement vient balayer tout ce que l’on tenait alors pour acquis.

J’avoue ne pas avoir eu des masses d’empathie pour le personnage de Marianne Ferrand, la capitaine de la Crim’ en charge de l’enquête. Un peu plus pour le gendarme Gontran de Montboissier et beaucoup plus pour la jeune Alice Pernelle.

Les personnages secondaires ne servent pas uniquement de faire-valoir, ils ont un réel rôle à jouer dans le déroulé de l’intrigue.

Une lecture totalement addictive, j’ai quasiment dévoré le bouquin d’une traite.

[BOUQUINS] Arthur Caché – Une Bonne Raison De Mourir

De quoi ça cause ?

Quand un ancien géologue disparaît mystérieusement près de Paris, Béryl, jeune chef de groupe à la Crim’, se saisit aussitôt de l’affaire.

Assistée de Rudy, son adjoint au passé tourmenté, puis d’Ara, un ancien flic reconverti dans le trafic de contrefaçons, elle remonte la piste d’une compagnie pétrolière en Turquie.

Mais tandis que les découvertes troublantes se multiplient et que les cadavres s’accumulent, des profondeurs de la mer Noire surgit un terrible secret…

Béryl comprend alors que le plus effroyable des comptes à rebours a déjà commencé…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Taurnada et l’occasion de découvrir un auteur que je ne connais pas.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Taurnada, et tout particulièrement Joël, pour leur confiance renouvelée.

Découvrir l’univers littéraire d’un auteur est toujours plus ou moins source de questionnements, mais quand celui-ci rejoint une maison d’édition en qui j’ai une totale confiance, les doutes sont vite remplacés par la curiosité. C’est donc totalement confiant que j’ai abordé le roman d’Arthur Caché.

Commençons par un petit bémol indépendant de l’auteur. La quatrième de couv’ (je sais que c’est un exercice délicat pour un éditeur) est beaucoup trop « bavarde ». Elle fait en effet état d’événements que le lecteur ne découvrira que dans la dernière partie du roman. Je n’irai pas jusqu’à parler de spoilers (ça ne m’a en rien gâché la surprise), mais peut-être qu’un lecteur plus affûté aurait eu la puce à l’oreille.

Si l’intrigue démarre de façon plutôt classique, les choses vont rapidement se compliquer pour Béryl et son groupe d’enquête. Tout commence par un appel et un message laissé à l’intention du commandant Béryl Schaeffer, puis l’appelant disparaît de la circulation avant d’être retrouvé mort quelque temps plus tard. Une intrigue qui débute en mode diesel avant de réellement trouver son rythme de croisière une fois qu’elle se déplacera en Turquie.

Une enquête complexe du fait de dimensions économiques et politiques qui viennent se greffer sur l’aspect purement policier. Une enquête qui va se dérouler entre la France et la Turquie, et qui pourrait bien impliquer de grosses entreprises de l’industrie pétrolière. Et encore, ce n’est que la partie visible de l’iceberg.

Les trois principaux enquêteurs, Béryl et son adjoint, Rudy, assisté par Ara, un ex-flic turc, ont des personnalités torturées comme on les aime. Chacun doit vivre avec son passé et ses drames personnels pour aller de l’avant.

Pour Béryl l’enquête va s’avérer doublement éprouvante, celle-ci lèvera en effet le voile sur une facette guère reluisante de la personnalité de son défunt père, une figure patriarcale qu’elle idolâtre… avant de réaliser qu’il avait, lui aussi, son côté obscur.

Arthur Caché nous livre une intrigue parfaitement maîtrisée et richement documentée. Une intrigue qui ne manquera pas de vous surprendre avec un final (heureusement 100% fictif) en apothéose. Quand les intérêts économiques et politiques priment sur l’aspect humain, le résultat n’est jamais beau à voir (et cela ne relève malheureusement pas que de la fiction).

La plume de l’auteur s’adapte au rythme de l’intrigue et permet une lecture parfaitement fluide. En revanche, force est de reconnaître que les cliffhangers en fin de chapitre (comme par exemple : « Elle ne le savait pas encore, mais un étrange événement… ») produisent un effet contraire à celui escompté. On lit un thriller, on se doute bien qu’il va se passer un truc nouveau, inutile d’appâter le lecteur avec des accroches limites marketing !

Finalement j’ai eu raison de faire une fois de plus confiance aux équipes des éditions Taurnada, elles ont eu le nez creux en invitant Arthur Caché à les rejoindre. Je guetterai désormais les prochains romans de l’auteur, qu’ils soient avec ou sans Béryl Schaeffer.

Si la couv’ fait bien référence à l’industrie pétrolière, dans le présent roman la clé de voûte de l’intrigue n’est pas un puit de forage mais une plateforme pétrolière.