[BOUQUINS] Sonja Delzongle – Noir Comme L’Orage

Après une nuit d’orage, alors que la saison touristique commence à peine, des corps sont découverts sur l’île d’Oléron et ses alentours, attachés à des pieux métalliques plantés dans le sable face à l’océan, foudroyés. Sept dépouilles au total. Et des modes opératoires très proches.

Le capitaine Max Fontaine, en poste à la PJ de La Rochelle, va aussitôt être chargé de l’affaire. Sa priorité : trouver le lien qui unit les victimes pour espérer remonter jusqu’à leur assassin. Il ne se doute cependant pas de la douloureuse épreuve personnelle qu’il s’apprête à traverser, ni de la solitude, de l’impuissance et de la rage qui vont l’habiter durant cette enquête. Car de nombreux obstacles se dresseront sur sa route avant qu’il puisse accéder à la vérité.

Parce que c’est Sonja Delzongle, une belle et grande plume de la littérature noire.

J’ajouterai la magnifique couv’ illustrée par une photo de Dean Gill, un authentique chasseur d’orages (voir son site), qui capte d’emblée le regard.

Je remercie chaleureusement les éditions Fleuve et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Le moins que l’on puisse dire c’est que ça commence fort avec quatre scènes de crimes et sept victimes. Un point commun relie ces macabres mises en scène, l’arme du crime – nettement moins commune que le fameux point –, qui n’est autre que la foudre. Vous vous en doutez la coupable n’est pas Mère Nature…

C’est le capitaine Max Fontaine et son équipe qui vont hériter de cette délicate enquête. Une enquête qui s’annonce complexe au vu du peu d’indices à disposition des policiers… et de la mauvaise volonté de certains de leurs interlocuteurs.

Du fait de son parcours personnel, le personnage de Max avait a priori tout pour attirer l’empathie des lecteurs, mais sa tendance à l’autoapitoiement aura été rédhibitoire pour moi.

Heureusement que son adjoint, Thomas Bergerac, n’est pas affligé du même syndrome de Caliméro. J’ai beaucoup aimé ce personnage, gentil et dévoué, mais aussi un peu fonceur.

Le personnage le plus trouble et le plus complexe reste incontestablement celui de Bénédicte Saint-Roch.  En refermant le bouquin, le voile n’est pas complètement levé sur les multiples facettes de cette personnalité hors norme.

D’autres personnages du roman vous réserveront quelques surprises, parfois bonnes, souvent mauvaises, mais je ne vous en dirai pas plus.

Comme souvent avec Sonja Delzongle, la dimension humaine occupe une place de premier choix dans ce roman. le parcours de Max s’y prête fort bien, mais l’auteure va au-delà de cette différence. Il y sera aussi question d’amour, d’amitiés, de relations familiales (souvent compliquées), de tolérance (et d’intolérance). Et comme le monde n’est pas tout rose, elle saura, avec son talent habituel, disséquer les aspects les plus sombres de l’âme humaine.

Une seconde intrigue, sous la forme d’un double homicide, va venir se greffer à la trame principale du récit. Autant l’enquête autour des foudroyés vous tiendra en haleine jusqu’au clap de fin, autant ce double meurtre ne vous réservera aucune surprise (on devine d’entrée de jeu la personne qui se cache derrière ce crime… il faut dire l’auteure en fait une parfaite tête à claques).

Sonja Delzongle a décidé de situer son intrigue en 2025, ce n’est certes qu’un détail sans importance sur le déroulé des événements, mais je m’interroge tout de même sur ce choix. Pourquoi ne pas avoir situé son intrigue de nos jours ?

À la lecture du roman, on devine un gros travail de documentation préalable autour des orages et des différents phénomènes qui y sont liés (dont la foudre bien entendu). C’est parfois technique, mais ça reste parfaitement compréhensible pour le profane (que je suis, soit dit en passant).

Si l’intrigue principale est rondement menée, je dois toutefois avouer que la fin m’a un peu donné l’impression de tomber comme un cheveu sur la soupe. Sur le coup je suis resté plus que perplexe devant cet ultime revirement de situation.

C’est la principale raison pour laquelle je me suis donné quelques jours pour rédiger la présente chronique (en général je ne prends aucun recul, j’écris à chaud). Je ne voulais pas que ce bémol final vienne ternir mon ressenti global.

[BOUQUINS] Collectif, sous la direction d’Yvan Fauth – Déguster Le Noir

AU MENU DU JOUR


Titre : Déguster Le Noir
Auteur : Collectif, sous la direction d’Yvan Fauth
Éditeur : Belfond
Parution : 2023
Origine : France
304 pages

De quoi ça cause ?

Treize auteurs et autant de nouvelles pour mettre le goût à l’honneur, on passe à table… avec une nappe noire bien entendu.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

La question ne se pose pas. Déguster Le Noir est le cinquième et dernier voyage sensoriel orchestré par Yvan et les auteurs qui ont accepté de se prêter au jeu.

Du coup le recueil grille la priorité à ses pairs obtenus via Net Galley et toujours en attente de lecture.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Belfond et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée. Sans oublier Yvan, pour son amitié malgré la distance et pour nous avoir fait vibrer au fil de la découverte des cinq sens du noir.

Pour cet ultime voyage c’est le goût qui est mis à l’honneur. Treize auteurs ont répondu présents afin de sublimer le noir et faire frétiller nos papilles. Parmi eux, dix intègrent pour la première fois la redoutable black team d’Yvan Fauth.

Si la grande majorité des auteurs ne m’est pas inconnue, j’avoue que deux auteures du présent recueil sont des découvertes : Anouk Langaney et Patricia Delahaie.

Treize textes à dévorer ou à savourer, chauds ou froids, avec les doigts ou avec les couverts en argent de Mamie Germaine… Qu’importe du moment que vous vous régalez !

Le noir se décline à toutes les sauces sous les plumes acérées des auteurs, du policier au fantastique, en passant par la science-fiction.

C’est à Bernard Minier que revient l’honneur d’ouvrir les agapes avec une mise en bouche qui se déguste saignante. Le titre annonce la couleur.

Suivra une première « auteure découverte » avec Anouk Langaney et son texte qui se déroule comme un menu de l’apéritif au pousse café. Un menu fort appétissant soit dit en passant.

Cédric Sire pointe du doigt les diktats du mannequinat avec une riposte pour le moins radicale.

Pierre Bordage opte pour l’anticipation, un domaine dans lequel il n’a plus rien à prouver, pour nous faire goûter à l’amertume de son intrigue.

Christian Blanchard revisite Des Souris Et Des Hommes de Steinbeck, avec un personnage tout en muscles mais pas très futé et son acolyte toujours à la recherche d’un bon plan pour aller de l’avant.

Avec Nicolas Jaillet le burn-out prend tout son sens.

Jérémy Fel nous offre une vision d’avenir bien sombre, sur fond de réchauffement climatique, de secrets de famille et de télé-réalité.

Sous la plume de Sonja Delzongle, un grand classique de la littérature policière, la jalousie, est sublimé pour notre plus grand plaisir pervers.

Nicolas Beuglet nous une ode très particulière au « fait maison » qui ne devrait pas vous laisser indifférent. À savourer le ventre vide de préférence…

Concernant la nouvelle de Patricia Delahaie, seconde « auteur découverte » du recueil, je dois être passé à côté de quelque chose. Elle m’a totalement laissé de marbre.

Ian Manook nous initie à la préparation d’une feijoada sur fond de retrouvailles entre deux vieux amis. Un régal pour le palais mais aussi pour les amoureux de la langue Molière et son argot. Le titre du recueil prend tout son sens avec ce texte.

Jacques Expert donne la parole à un goûteur confronté à un chantage mortel, quelle que soit sa décision, le prix à payer sera énorme.

C’est R.J. Ellory, fidèle parmi les fidèles, puisque présent dans quatre de ces cinq recueils sensoriels, qui clôt ce festin. Et quelle fin de dégustation en apothéose !

Comme à l’accoutumée je vous livre mes notes sur 5 pour chacune des nouvelles du présent recueil, je rappelle que ces notations n’engagent que moi et sont le reflet de mon ressenti en fin de lecture :

  • B. Minier – Le Goût Des Autres : 4
  • A. Langaney – Ripaille : 3
  • C. Sire – Tous Les Régimes Du Monde : 5
  • P. Bordage – Amertumes : 5
  • C. Blanchard – Joé : 5
  • N. Jaillet – Alfajores : 4
  • J. Fel – Dans L’Arène : 5
  • S. Delzongle – Jalousies : 4
  • N. Beuglet – La Visite : 5
  • P. Delahaie – Un Père A La Truffe : 2
  • I. Manook – Feijoada : 5
  • J. Expert – Le Goûteur : 4
  • R.J. Ellory – Scène De Crime : 5

Soit une très honorable moyenne de 4,3 sur 5, que j’arrondis volontiers à 4,5.

En matière de lecture je ne suis pas un grand fan de la nouvelle – à moins qu’elles ne soient signées Stephen King –, force est de reconnaître qu’à travers ces cinq recueils, ce difficile exercice plumesque a retrouvé grâce à mes yeux.

Mes sincères félicitations à Yvan pour avoir mené à bien un projet qui lui tenait à cœur, un projet qui a réuni 47 auteurs (sauf erreur de ma part) et 58 textes qui ont fait la part belle au noir, le déclinant à toutes les sauces. Merci à tous ces auteurs qui ont rejoint le projet et nous ont régalé tout au long de ce voyage en cinq étapes.

Je ne sais pas quels sont les éventuels projets éditoriaux futurs d’Yvan, mais s’il souhaite renouveler l’expérience avec une nouvelle approche (les 7 péchés capitaux par exemple, j’dis ça, j’dis rien), et pourquoi pas dans un autre registre, c’est avec le même enthousiasme que je répondrai présent.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Sonja Delzongle – Thanatea

AU MENU DU JOUR


Titre : Thanatea
Auteur : Sonja Delzongle
Éditeur : Fleuve Éditions
Parution : 2023
Origine : France
416 pages

De quoi ça cause ?

Esther quitte la PJ de Lyon et ses deux amies de toujours, Layla et Hélène, pour prendre un nouveau départ en Suisse. Elle va intégrer Thanatea, une entreprise spécialisée dans le funéraire et le suicide assisté.

Rapidement Esther va constater quelques phénomènes étranges ; est-elle en train de complètement perdre pieds ou est-ce que de sombres secrets se cachent derrière Thanatea.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Sonja Delzongle et que je n’ai pas encore pris le temps de m’intéresser à ses titres autres que ceux de la série Hannah Baxter.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fleuve et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Le dernier roman de Sonja Delzongle est avant tout l’histoire de trois femmes, amies d’enfance qui ne sont jamais quitté malgré les épreuves qu’elles ont pu traverser elles sont aujourd’hui toutes les trois officiers à la PJ de Lyon. Le départ d’Esther jette un froid sur le trio mais pour elle quitter la police et s’offrir un nouveau départ, loin de tout, était nécessaire.

Le ton est donné dès les premières pages puisque le roman s’ouvre sur un enterrement. Une de ces trois femmes est morte, ses amies assistent aux funérailles. Qui est la victime ? Comment en est-on arrivé là ?

C’est ce que l’auteure vous invite à découvrir en ramenant le lecteur quelques semaines plus tôt. Le jour où Esther quitte la police pour rejoindre Thanatea en tant que « préposée au café ».

La mort est un commerce comme un autre, nul n’oserait remettre en question l’utilité des entreprises funéraires qui sont un renfort indispensable pour les familles endeuillées. Il est vrai qu’en Suisse, où le suicide assisté est légal en cas de maladie incurable ou fortement invalidante, la chose prend une tout autre dimension.

Thanatea est une de ses entreprises spécialisées à la fois dans le service funéraire et le suicide assisté. C’est aussi le nom de l’île, au large du lac Léman (côté suisse) qui abrite cette infrastructure.

Inutile de vous ruer sur un Atlas ou sur Google Maps, point d’île sur le lac Léman, c’est une invention de l’auteure pour les besoins de son intrigue.

Croyez-moi vous aurez tôt fait d’oublier ce détail et même de vous en accommoder, Sonja Delzongle sait y faire pour brouiller les pistes et rapidement vous vous demanderez si Esther est en train de perdre pied ou s’il se passe vraiment des trucs pas très clairs sur Thanatea…

Parallèlement nous suivrons aussi les parcours de Layla et Hélène, confrontées à la fois à des affaires criminelles à résoudre mais aussi aux difficultés et aux aléas du quotidien.

Si on ne sait pas exactement où tout cela va nous mener, on se laisse toutefois porter par le talent narratif de l’auteure. Au fil des pages et des revirements de situation on va réaliser – à l’instar de Layla et Hélène – que l’on ne connaît vraiment des autres que ce qu’ils veulent bien nous révéler. Chez certaines personnes le fameux « jardin secret » peut s’avérer plus vaste et plus inextricable qu’une forêt tropicale.

Sonja Delzongle sait y faire pour mettre les neurones de ses lecteurs à rude épreuve, vous n’avez pas fini de vos poser des questions et d’être surpris par les révélations en cascade. Une lecture totalement addictive et captivante de bout en bout.

Mon plus grand regret : que l’une de ces trois drôles de dames doive mourir. Et ladite mort surviendra elle aussi de la façon la plus inattendue qui soit.

La mort est un commerce comme un autre… ou pas. Entre de mauvaises mains et pour de mauvaises raisons, les dérives de la thanatopraxie repoussent les limites morales et n’ont plus rien d’honorables.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Sonja Delzongle – L’Homme De La Plaine Du Nord

AU MENU DU JOUR

S. Delzongle - L'homme de la plaine du Nord
Titre : L’Homme De La Plaine Du Nord
Série : Hanah Baxter – Livre 4
Auteur : Sonja Delzongle
Éditeur : Denoël
Parution : 2020
Origine : France
400 pages

De quoi ça cause ?

À peine rentrée à New York où elle espérait passer un moment tranquille, Hanah Baxter se retrouve sous le coup d’un mandat d’arrêt international pour le meurtre d’Anton Vifkin, son ancien mentor.

Extradée à Bruxelles, elle apprend de la bouche du commissaire Peeters, en charge de l’enquête, que l’accusation repose sur une simple lettre anonyme. En fait Peeters compte surtout sur l’aide de Baxter pour résoudre, une bonne fois pour toute, le mystère de la mort d’Anton Vifkin.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est l’occasion de retrouver Hanah Baxter, un retour attendu après trois longues années d’absence.

Ma Chronique

Encore un roman dont la sortie a été perturbée par la crise sanitaire liée au COVID-19, si le bouquin a pu être publié quelques jours avant le début du confinement dans sa version numérique, ce n’est qu’avec le déconfinement que la version papier a pu être découverte en librairie.

Si on pensait retrouver une Hanah Baxter apaisée après son périple breton (je fais bien sûr référence au roman Récidive, le précédent opus de la série), le répit sera de courte durée pour notre profileuse préférée. La Belgique lui réserve un nouveau rendez-vous avec son passé, via notamment la personnalité trouble d’Anton Vifkin qui fut son mentor.

Une fois de plus Hanah Baxter se retrouve personnellement impliquée dans une affaire qui n’en finira pas de lui réserver des surprises. Une affaire aux facettes multiples dont le fil rouge entre les différents éléments se met en place lentement mais sûrement, suivant le rythme de l’implacable mélodie que nous interprète Sonja Delzongle.

Si vous ne connaissez pas encore le parcours de Hanah Baxter, je ne peux que vous recommander de lire les précédents romans de la série avant de vous lancer dans cet ultime opus. D’une part parce que se sont trois thrillers haut de gamme que vous découvrirez, mais aussi et surtout parce qu’ils vous permettront de mieux appréhender le personnage d’Hanah Baxter (même si l’auteure prend soin de défricher le terrain pour ceux et celles qui commenceraient par le présent roman).

Avant d’embarquer pour ce périple belge en compagnie d’Hanah baxter je vous invite à boucler votre ceinture. Le voyage ne sera pas de tout repos ! Une fois de plus Sonja Delzongle n’hésite pas à malmener ses personnages (nombre n’en reviendront pas… et ce n’est pas dans leur sommeil qu’ils passeront de vie à trépas).

Ainsi vous croiserez un tueur à gages, travesti à ses heures, bien déterminé à finir un boulot commencé vingt ans plus tôt. Mais aussi une énigmatique jeune femme, propriétaire d’un manoir délabré dans lequel elle prend soin de son jeune frère et de sa mère… avant de se consacrer à de plus sombres occupations.

Ce que vous croiserez surtout ce sont les côtés les plus obscurs de l’âme humaine, les dérives et déviances les plus dépravées et les plus perverses.

Une intrigue riche en rebondissements qui n’en finira pas de vous faire douter de tout et de tout le monde. A chaque instant vos certitudes risquent d’être balayées par un nouveau revirement de situation. Et là encore, Sonja Delzongle sait y faire quand il s’agit de jouer avec les nerfs du lecteur !

Nul doute que le personnage d’Hanah Baxter restera pour moi une très belle découverte littéraire, un personnage atypique auquel je me suis tout de suite attaché. J’ai pris beaucoup de plaisir à suivre ses aventures mouvementées, et c’est avec un évident pincement au cœur que je la quitte au terme de cet ultime rendez-vous.

MON VERDICT
Coup de poing

[BOUQUINS] Collectif, à l’initiative d’Yvan Fauth – Écouter Le Noir

AU MENU DU JOUR


Titre : Écouter Le Noir
Auteur : Collectif
Éditeur : Belfond
Parution : 2019
Origine : France
288 pages

De quoi ça cause ?

13 auteurs réunis autour du thème de l’audition.
11 nouvelles sur fond noir.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que cet ouvrage est une initiative d’Yvan, ami (même si nous ne nous « connaissons » que par le biais du net) et blogueur pour qui j’ai énormément d’estime.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Belfond et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Je ne suis pas forcément un grand fan de la nouvelle même si je reconnais volontiers que, pour un auteur, l’exercice est délicat, voire périlleux. Le temps de quelques pages, il faut donner vie à des personnages et mener à terme une intrigue ; aller à l’essentiel pour toucher le lecteur au cœur et aux tripes, en évitant les raccourcis trop faciles qui laisseraient une impression de travail inachevé (ou pire, bâclé).

Les auteurs ayant répondu à l’invitation d’Yvan comptent parmi la fine fleur de la littérature noire francophone (mais pas que…), le nec plus ultra du genre. À travers ce recueil ils confirment leur immense talent, certains se dévoileront même sous un jour totalement inattendu.

C’est Barbara Abel et Karine Giebel qui ouvrent le bal, avec une nouvelle à quatre mains qui donne le ton et m’a laissé sans voix (à défaut de me laisser sans ouïe). Suivront, par ordre d’apparition, Jérôme Camut et Nathalie Hug, Sonja Delzongle, François-Xavier Dillard, R.J. Ellory, Nicolas Lebel, Sophie Loubière, Maud Mayeras, Romain Puértolas, Laurent Scalese et Cédric Sire.

Si aucun des auteurs présents ne m’est inconnu, il y en a certains dont je n’ai pas encore eu l’occasion d’explorer l’univers (Barbara Abel, Nicolas Lebel, Sophie Loubière et Laurent Scalese) ; découvrir leurs nouvelles me donne un aperçu de leur immense talent et ne fait qu’attiser davantage ma curiosité eu égard à leur travail…

Je ne vais pas me lancer dans un avis détaillé pour chacune des nouvelles ici présentes, d’une part afin de laisser intact le plaisir de la découverte, mais aussi parce que j’estime que cette approche ne ferait pas pour autant avancer le schmilblick (et un peu aussi par pure fainéantise).

Tour à tour les auteurs explorent le thème de l’audition sous toutes ses facettes (qu’il s’agisse de surdité, de bruits en tout genre – parfois amis, parfois ennemis – ou encore de musique…). De même les auteurs jouent sur tout le spectre du noir, du classique sur fond policier / thriller, au fantastique en passant même par l’humour.

Comme souvent dans ce genre de recueil, il y a les nouvelles qui font mouche et celles pour lesquelles on a l’impression d’avoir raté le coche sans vraiment pouvoir s’expliquer le pourquoi du comment de la chose. Il n’en reste pas moins que globalement la qualité est au rendez-vous (certaines flirtent même avec l’excellence) ; pas vraiment une surprise vu le panel des auteurs ayant accepté de se prêter au jeu.

Afin d’illustrer mon propos ci-dessus, je terminerai cette chronique par l’attribution d’une note (sur 5) à chacune de ces nouvelles ; comme d’hab cette notation n’engage que moi :

B. Abel et K. Giebel – Deaf : 5
J. Camut et N. Hug – Archéomnésis : 2.5
S. Delzongle – Tous les chemins mènent au hum : 3.5
F.X. Dillard – Ils écouteront jusqu’à la fin : 5
R.J. Ellory – Bloodline : 4.5
N. Lebel – Sacré chantier : 3.5
S. Loubière – Zones de fracture : 4
M. Mayeras : Echos : 4
R. Puértolas – Fête foraine : 4
L. Scalese – Quand vient le silence : 5
C. Sire – Le diable m’a dit : 5

Ce qui nous fait une honorable moyenne de 4.2 sur 5 que j’arrondis volontiers à 4.5 pour saluer l’initiative de ce recueil.

Mon cher Yvan tu peux considérer que le challenge a été remporté haut la main. Tu peux remettre ça quand tu veux !

MON VERDICT

[BOUQUINS] Sonja Delzongle – Récidive

AU MENU DU JOUR

S. Delzongle - Récidive

Titre : Récidive
Auteur : Sonja Delzongle
Editeur : Editions de l’Epée
Parution : 2017
Origine : France
416 pages

De quoi ça cause ?

Hanah Baxter ne supporte pas l’idée que son père, l’assassin de sa mère, ait pu être libéré après 25 années de détention. Non seulement l’idée la révolte, mais elle craint aussi la vengeance de son géniteur, quand le verdict est tombé son père, Erwan Kardec, a promis de la traquer et de la tuer.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Pour le plaisir de retrouver Hanah Baxter, une profileuse hors-norme, mais d’une redoutable efficacité.
J’ai assisté à sa première apparition dans Dust, sous le soleil écrasant du Kenya, l’auteure m’avait alors impressionné par sa maîtrise et j’avais tout de suite accroché au personnage d’Hanah. Puis il y eut Quand La Neige Danse et les paysages hivernaux de l’Illinois ; incontestablement l’essai a été transformé ! Quel que soit le climat, je suis emballé…

Ma chronique

C’est toujours un plaisir de retrouver un personnage auquel on s’est attaché au fil des romans. Hanah Baxter est de ceux-là, il me tardait d’assister ENFIN à la confrontation annoncée entre elle et son père. Si dans le roman précédent Hanah était un peu en retrait, cette fois elle est bel et bien au centre du récit et de l’intrigue (voire même des intrigues).

Une intrigue qui exigera de nombreux aller-retour entre New York et Saint Malo et vous proposera une narration selon trois axes. Le principal étant celui d’Hanah qui enquête depuis New York sur les circonstances d’un naufrage survenu dans la baie de Saint Malo durant l’hiver 1905. Naufrage dont elle est encore loin de se douter des conséquences et implications sur son passé mouvementé.

Le second axe vous permettra de suivre Erwan Kardec, dont le séjour en prison n’a en rien apaisé la haine qu’il nourrit pour sa fille. Plus que jamais déterminé à la retrouver et à l’attirer jusqu’à lui, quitte à semer la mort sur son passage. Une mort qui le ronge lentement mais sûrement de l’intérieur, pas question toutefois de mourir avant de s’être vengé.

Enfin l’auteure nous invite à suivre l’enquête de gendarmerie sur les meurtres qui secouent la paisible cité bretonne. Particulièrement via le lieutenant Yann Maurice qui dirige la Brigade de Recherches (BR) de Saint Malo et cache, lui aussi, un lourd secret.

Plus que jamais les relations entre les personnages sont au coeur de l’intrigue. Avec, en premier lieu, la relation père fille, plus que tumultueuse qui lie Hanah à son meurtrier de père. Mais aussi les relations d’Hanah avec les figures de son passé et même ses relations présentes (elle est en pleine phase de remise en question).

Puisqu’on est dans le relationnel, restons ici et penchons-nous sur le cas Yann Maurice. Jeune flic brillant contraint de cacher son homosexualité à ses hommes, mais aussi et surtout à son propre père (eh oui, encore des relations familiales tendues).

Avec tout ça Sonja Delzongle nous offre un thriller psychologique rondement mené et n’hésite pas à malmener Hanah. Il faut dire que la confrontation avec son paternel lui réservera de sacrées surprises quant à son propre passé. Comme Hanah j’ai pris la révélation en pleine poire, je n’avais rien vu venir.

L’auteure ne laisse rien au hasard, perfectionniste et marionnettiste, elle nous promène dans son roman (une promenade qui n’est pas toujours de tout repos), n’hésitant pas à nous entraîner sur de fausses pistes (avec de vraies surprises), mais au fur et à mesure que l’on avance dans l’intrigue les différentes pièces du puzzle s’imbriquent entre elles de façon cohérente et convaincante.

Un thriller qui n’en est pas vraiment un (l’enquête policière sur les meurtres de Saint Malo tendrait presque à passer en second plan), mais profondément humain qui confirme l’immense talent de Sonja Delzongle. En refermant le roman, on a la sensation que la boucle est bouclée pour Hanah, du coup c’est avec une légère appréhension que l’on se demande : et maintenant ? C’est qu’on n’a pas envie de la laisser filer notre Hanah, comme bon nombre de lecteurs, j’ai bon espoir de la croiser à nouveau…

En attendant, si ce n’est déjà fait, je vous invite vivement à découvrir cette trilogie (pour le moment) ; lire les bouquins dans l’ordre ne s’impose pas vraiment, chaque intrigue étant indépendante, mais je ne saurais que trop vous recommander de le faire ; comme toujours en présence d’un personnage récurrent, c’est un vrai plus de pouvoir suivre son évolution.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Sonja Delzongle – Quand La Neige Danse

S. Delzongle - Quand la neige danseSonja Delzongle m’avait forte impression avec Dust et son escapade kényane pour le moins originale, il me tardait de la retrouver afin de voir si mon enthousiasme resterait le même. C’est désormais chose faite après avoir lu Quand La Neige Danse, son dernier roman avec, cerise sur le gâteau, le retour de Hanah Baxter, sa très atypique profileuse.
Crystal Lake, en un mois quatre enfants ont déjà mystérieusement disparu et l’enquête n’avance pas. Un matin les parents recoivent un colis anonyme contenant chacun une poupée de porcelaine, copie conforme de leur fille. Joe Lasko, le père d’une fillette disparue, est contacté par Eva Sportis, la jeune femme du pays, devenue détective, souhaite aider à faire avancer l’enquête. Face au manque total d’indices, la jeune détective va faire appelle à son ancienne mentor, Hanah Baxter…
Le moins que l’on puisse c’est que pour son nouveau roman, Sonja Delzongle change totalement de registre. A la poussière et aux fortes chaleurs du Kenya, succèdent la neige et le soufle glacial de l’hiver de l’Illinois. Rassurez vous, il faut plus que quelques flocons pour figer la plume de l’auteure !
Plus encore que dans Dust, le climat et les conditions météo jouent un rôle primordial dans le déroulé de l’intrigue ; Sonja Delzongle réussit quasiment à faire de l’hiver un personnage à part entière de ce roman.
Au niveau des personnages (les vrais humains cette fois), l’auteure laisse aux habitants de Crystal Lake (Joe Lasko, Eva Sportis, les policiers chargés de l’affaire, les autres intervenants) le devant de la scène, Hanah Baxter reste en retrait sans jamais tirer la couverture à elle, mais sans jamais s’éclipser totalement non plus. De fait l’intrigue obéit à une dynamique propre à Crystal Lake, adaptée à la fois au contexte et à ses acteurs.
Une intrigue menée d’une main de maître avec un rythme qui monte crescendo et des révélations qui s’enchaînent. Le palpitant s’affole, les nerfs remontent à fleur de peau et les neurones carburent à tout va. Une fois que Sonja Delzongle vous aura ferré (et ça arrivera très vite), vous ne pourrez plus échapper à ses lignes, écrites sans concession certes, mais sans surenchère non plus.
Au final non seulement mon enthousiasme pour l’univers littéraire de l’auteure s’est confirmé, mais il est même monté de plusieurs crans. J’ai hâte de retrouver Hanah Baxter, car il ne fait aucun doute qu’elle est appelée à revenir sur le devant de la scène… du crime !
De fait je ne peux que renouveler mon doublé : coup de coeur, coup de poing ! Merci madame Delzongle.

MON VERDICT
jd5Coup double

[BOUQUINS] Sonja Delzongle – Dust

S. Delzongle - DustAu menu du jour, un bouquin tombé entre mes mains un peu par hasard, ou plutôt du fait de nombreuses critiques enthousiastes lues çà et là sur le net. Il n’en fallait pas plus pour me motiver à découvrir Dust de Sonja Delzongle.
Hanah Baxter est une brillante profileuse installée à son compte. Elle est contactée par Collins, le chef de la police criminelle kényane ; les enquêteurs sont sur les dents face à un tueur en série qui sévit depuis plus de deux ans. Il signe ses crimes d’une croix tracée au sol avec le sang de ses victimes. Rapidement Hanah va se rendre compte que l’affaire est bien complexe qu’elle n’y parait…
Embarquement immédiat pour le Kenya. Dépaysement garanti ! On sent que l’auteure maîtrise son sujet, qu’il s’agisse de la culture kényane (ou plutôt devrai-je dire des cultures kényanes), des paysages, des croyances et traditions, les descriptions sont d’un réalisme saisissant. On découvre un pays déchiré entre modernisme et tradition, où la sorcellerie est plus qu’un simple mythe et où la sécurité n’est souvent qu’illusoire.
« Hanah sentait son pouls battre au galop. À côté de l’univers que lui décrivait Swili, les rues de New York et même le Bronx lui paraissaient être le monde des Bisounours. »
De prime abord le pitch peut sembler classique : une profileuse qui court après un tueur en série ; rien de neuf sous le soleil. Mais rapidement on réalise que l’on tient entre les mains un thriller dense, complexe et surtout captivant. A l’enquête initiale viennent se greffer une seconde, puis une troisième et enfin une quatrième enquête ; on se doute bien qu’il existe un lien entre elles mais l’auteure sait brouiller les pistes pour nous tenir en haleine.
Au centre de l’intrigue un problème, ou peut être devrai-je dire un fléau, méconnu en Occident et plus ou moins volontairement ignoré en Afrique : la chasse aux Albinos. Des croyances primales mais encore tenaces aujourd’hui prêtent aux membres et organes des Albinos de puissants pouvoirs magiques, du coup les sorciers sont particulièrement friands de cette matière première pour réaliser leurs foutus grigris et potions. La demande ne s’arrête pas aux portes de l’Afrique, difficile de quantifier un pareil trafic humain mais il est de dimension internationale (sans surprise l’Asie fait partie des gros clients de ces trafiquants). Aussi incroyable que cela puisse paraître, surtout en plein XXIème siècle, cela existe bel et bien ; une recherche sur Google suffira à le confirmer.
Sonja Delzongle ne soigne pas que son intrigue, ses personnages sont particulièrement bien travaillés et ont parfois une personnalité complexe. A commencer par Hanah Baxter que l’on ne peut pas vraiment qualifier de professionnelle de la relation humaine, mais elle n’en reste pas moins attachante dans son obstination à découvrir la vérité.
Le personnage le plus trouble, et ce dès sa première apparition, reste incontestablement Darko Unger. Quel est son véritable rôle dans cette affaire ? De prime abord il apparaît nettement pas tout à fait blanc, ni tout à fait noir (sans jeu de mot douteux, s’agissant d’un Albinos), reste à deviner si le gris tire plus vers le clair ou le foncé…
Au niveau des flics kényans avec qui Hanah va devoir bosser, j’ai eu un faible pour Kate Hidden, la touche féminine de l’équipe et nouvelle recrue de la crim’. Mais j’ai aussi adoré détesté Mendoza, la parfaite tête à claques !
Pour faire simple ce bouquin est une totale réussite à tout point de vue, pas une baffe, ni un uppercut mais un méga coup de genou dans les couilles. Ce bouquin vous prendra aux tripes, les vrillera en tout sens avant de vous lâcher hagard ; mais entre temps vous serez passé par toute la gamme des émotions en compagnie de Baxter. Enooorme coup de coeur !
« Incompréhension, mutisme, révolte, autant de sentiments qui frappaient, pêle-mêle, comme de la grenaille, tous ces hommes, alors qu’ils venaient de lever le voile sur la folie humaine à son paroxysme. »
Dust est le quatrième roman de Sonja Delzongle, toutefois je ne pense pas parvenir à mettre la main sur les précédents qui ont été édités avec parcimonie, mais je compte bien surveiller les prochains afin de ne pas les rater.

MON VERDICT
jd5Coup double