[BOUQUINS] Margaret Atwood – La Servante Écarlate

AU MENU DU JOUR

M. Atwood - La Servante écarlate

Titre : La Servante Écarlate
Auteur : Margaret Atwood
Éditeur : Robert Laffont
Parution : 1987 (réédition 2017)
Origine : Canada (1985)
544 pages

De quoi ça cause ?

Les États-Unis sont devenus la République de Gilead, une dictature théocratique où les femmes sont divisées en castes selon leur rang social et le rôle qui leur a été attribué. Mais Gilead se meurt de son infertilité, les Épouses ne peuvent plus procréer, c’est aux Servantes d’assurer une descendance à leur Commandant.

Defred est une de ces Servantes, reconnaissables à leur tunique rouge. Elle nous raconte son quotidien et partage ses souvenirs de la vie d’avant…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Quelle question ! Parce que c’est un roman devenu culte qui revient souvent (pour ne pas dire toujours) et en bonne position dans les listes des livres qu’il faut AB-SO-LU-MENT avoir lus avant de sucer les pissenlits par la racine.

Ça fait des années que je me dis qu’il faut que je m’y mette, finalement c’est la série télé The Handmaid’s Tale qui aura été l’élément déclencheur. Je voulais impérativement avoir lu le bouquin avant de me laisser tenter par la série.

Ma Chronique

Il m’aura fallu plus de 30 ans pour enfin me décider à lire ce roman, et pourtant je n’avais aucun a priori à son encontre, ni même une quelconque réticence ; au contraire, ça fait des années que je me dis qu’il faut absolument que je le lise.

Finalement c’est la série TV The Handmaid’s Tale et la sortie récente de la « suite » du présent bouquin, Les Testaments, qui m’auront poussé à franchir, ENFIN, le pas.

Avec ce roman Margaret Atwood nous propose une vision dystopique de notre avenir, un monde particulièrement glauque et désespérant, surtout pour la gent féminine. Une société complètement déshumanisée régie par un pouvoir théocratique qui a définitivement banni tout ce qui touche à culture. Un monde formaté où les sentiments n’ont plus droit de cité.

La narratrice, Defred (qui se comprend comme « de Fred », donc appartenant – pour un temps – à Fred, son Commandant), partage son morne quotidien avec le lecteur, mais aussi ses souvenirs du monde d’avant (le monde tel que nous le connaissons, la technologie du XXIe siècle en moins). Le fait qu’elle ait connu ce « monde d’avant » rend la description du quotidien à Gilead encore plus abrupt, encore plus insupportable.

Defred, comme les autres Servantes, joue un rôle essentiel (mais néanmoins ingrat et infamant) pour la survie de Gilead ;  donner un enfant à son Commandant. Une fois par mois elle passe à la casserole en respectant scrupuleusement un cérémoniel de copulation particulièrement dégradant. Le mot copulation est le seul qui me vienne à l’esprit pour désigner un acte mécanique dénué de tout sentiment (faire l’amour est donc inapproprié) et de tout plaisir (tout comme baiser). Les Servantes sont ainsi réduites à de vulgaires matrices potentielles.

Si le récit est glaçant, le ton de la narratrice, à la fois résigné et détaché, nous empêche de nous prendre totalement d’empathie pour le personnage. Je n’aurai pas la prétention de dire que dans la même situation j’aurai fait mieux (c’est typiquement le genre de réaction qui me hérisse le poil), mais j’aurais aimé éprouver un réel sentiment de révolte dans le récit. Point de révolte, juste, parfois, une profonde injustice parfois, avant de retomber dans la résignation.

Dans la même veine, nous n’avons qu’une vague idée de l’existence d’une résistance via le réseau Mayday, mais pas des masses d’infos quant à la nature de ses opérations sinon des exfiltrations en cas de danger immédiat. Voilà qui est un tantinet frustrant, surtout quand la quatrième de couverture annonce : « En rejoignant un réseau secret, elle va tout tenter pour recouvrer sa liberté ».

Malgré ce petit bémol, il n’en reste pas moins que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce bouquin, je ne regrette pas de m’être enfin décidé. Sa place d’œuvre majeure dans le genre dystopique, aux côtés de classiques immortels tels que 1984 (George Orwell, 1949), Le Meilleur Des Mondes (Aldous Huxley, 1932) ou encore Fahrenheit 451 (Ray Bradbury, 1953) n’est en rien usurpée.

C’est le premier roman de Margaret Atwood que je lis, au vu de la qualité de l’écriture (et de la traduction) je sais d’ores et déjà que ce ne sera pas le dernier. À commencer par Les Testaments, je vais faire en sorte de ne pas attendre 30 ans avant de me lancer dans l’aventure (déjà d’un point de vue purement biologique je ne suis pas du tout certain d’avoir 30 ans devant moi).

Si le bouquin est sorti en 1985, il reste terriblement d’actualité, peut-être même plus encore que lors de sa parution initiale. Un cri d’alarme qui nous invite à ne jamais accepter l’inacceptable, à rester vigilant face aux concessions qu’on nous demande de faire. À force de courber l’échine, on finit pour nous la mettre bien profond et à sec !

Je terminerai donc cette chronique en faisant mienne la devise de la résistance : Nolite te salopardes exterminorum. Ne laisse pas les salopards te tyranniser. Un cri du cœur que chacun de nous devrait garder présent à l’esprit… juste au cas où.

Y a-t-il des questions ?

MON VERDICT

[BRD] Star Wars – Les Derniers Jedi

A L’AFFICHE DU JOUR

Star Wars VIII
Titre : Star Wars – Les Derniers Jedi
Réalisation : Rian Johnson
Production : Lucasfilm Ltd.
Distribution : Walt Disney Company
Origine : USA (2017)
Durée : 2h32

Le casting

Daisy Ridley : Rey
John Boyega : Finn
Oscar Isaac : Poe Dameron
Mark Hamill : Luke Skywalker
Adam Driver : Kylo Ren

Le pitch

Rien ne semble pouvoir arrêter la progression du Premier Ordre. Les forces de la Résistance sont acculées. Leur dernier espoir repose sur Luke Skywalker, le légendaire maître jedi, que Rey est venu sortir de sa retraite.

Alors que la résistance se fait inexorablement exterminer, Rey découvre un Luke désabusé qui refuse de s’impliquer dans le conflit…

Ma chronique

Autant je suis complètement sous le charme de l’univers Marvel remanié par Disney, autant la sauce a du mal à prendre avec l’univers Star Wars. Après un septième épisode en demi-teinte (un manque total d’originalité à mon goût), j’espérais beaucoup de ce huitième opus. Sans trop y croire toutefois… La preuve, j’ai attendu qu’il soit diffusé par Canal+ pour le découvrir.

Clairement ce huitième opus est plus osé que son prédécesseur, on peut même dire qu’il n’hésite pas à s’écarter des sentiers balisés de l’univers Star Wars. OK le pari était osé, mais le résultat n’est pas du tout convaincant.

A aucun moment je n’ai senti opérer la magie Star Wars, j’étais simplement devant un bon (voire moyen) film de science-fiction. Bien foutu, visuellement convaincant, mais avec un scénario un peu léger et sans grande surprise.

Le Réveil De La Force m’avait consterné par la platitude des personnages, ce huitième opus ne fait malheureusement que confirmer cette impression. Je serais tenté de dire que les plus intéressants à suivre ont été le droïde BB-8 et les Porgs de la planète sur laquelle Luke s’est exilé… malheureusement dans les deux cas l’intérêt n’est qu’humoristique.

Le grand retour de Luke Skywalker était certainement l’un des aspects les plus attendus de ce huitième film, là encore on déchante rapidement. Exit le puissant maître jedi, on a l’impression de se retrouver face à un clone au rabais de Thyrion Lannister (Game Of Thrones). Ses états d’âme sont aussi creux que ceux de son ex-disciple et actuel ennemi, Kylo Ren.

Est-il besoin de vous préciser que je n’attends pas grand-chose du neuvième film, dernier opus de cette troisième trilogie et fin annoncée du cycle Skywalker ? Même les quelques questions laissées en suspens avec ce huitième film ne parviennent à éveiller mon intérêt.

J’ajouterai, pour enfoncer le clou, que les spin-off Star Wars Story ne m’inspirent pas davantage…

Incontestablement pour moi la machine à broyer Disney a complètement salopé la licence Star Wars.

♥♥♥

[BOUQUINS] Luke Rhinehart – Invasion

AU MENU DU JOUR

L. Rhinehart - Invasion

Titre : Invasion
Auteur : Luke Rhinehart
Éditeur : Aux Forges de Vulcain
Parution : 2018
Origine : USA (2016)
448 pages

De quoi ça cause ?

Alors qu’il est de sortie pour une campagne de pêche, Billy Morton remonte une étrange boule de poils. Si la chose semble bel et bien vivante et dotée d’une certaine forme de conscience, elle ne ressemble à rien de connu.

Il n’en reste pas moins que la boule de poils semble se prendre d’affection pour Billy, elle le suit en effet jusque chez lui. D’abord intriguée, la famille Morton, Billy, Carlita et leurs jeunes fils Jimmy et Lucas, adopte la chose et l’appelle Louie.

Louie s’avère être un extraterrestre et ne pas être le seul représentant de son espèce, les Protéens, à être de passage sur Terre. La philosophie des protéens est on ne peut plus simple : « faut rigoler ! »… et c’est encore mieux si la rigolade se fait aux dépens des autorités et du système.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

À la base afin de participer à une opération FB lancée par Lau Lo, SP voyageurs sans frontières, pour diverses raisons ça n’a pu se faire.

Tout venant à point à qui sait attendre, l’éditeur m’a finalement fait parvenir le roman au format PDF (merci David). Restait à savoir si j’allais ou non le lire…

Ma chronique

Merci à David des éditions Aux Forges de Vulcain pour son envoi du roman (enfin presque… des épreuves non corrigées) au format PDF.

Et me voilà face à un cruel dilemme, le lire ou ne pas le lire ? D’un côté j’avais vachement envie de découvrir ce bouquin, mais de l’autre le format PDF est pour moi absolument rédhibitoire. Le choix s’est imposé de lui-même, si l’EPUB ne vient pas à toi, va à l’EPUB ; en clair il me « suffisait » de créer un fichier EPUB à partir du PDF.

Simple non ? Pas si simple que ça en fait. Une conversion directe PDF en EPUB via Calibre donne un résultat purement et simplement catastrophique. Par contre convertir un PDF en fichier Word via NitroPDF est une opération nettement plus simple. Il restait ensuite à retravailler le fichier Word afin de virer les pieds de pages et les césures de mots.

La seconde étape consistait à convertir le fichier Word au format EPUB. Pour je ne sais quelle raison Calibre s’est de nouveau ligué contre moi, l’opération n’a jamais abouti ! Je suis parti d’une page vierge sur Sigil, j’ai créé une feuille de style et j’ai alimenté le fichier par des copier-coller successifs (un par chapitre, plus quelques autres pour respecter (plus ou moins) la mise en page d’origine. Et me voilà avec un fichier EPUB complet !

Alléluia ? Non pas encore… Un premier survol du fichier pour corriger les coquilles les plus évidentes et formater le texte. L’ami Groucho (merci à toi) s’étant volontiers prêté au jeu de la relecture, j’ai pu apporter quelques corrections complémentaires.

Et c’est cette version que j’ai lue, en gardant le PDF ouvert comme support afin d’apporter les ultimes (?) corrections et obtenir enfin un fichier EPUB propre. Ce fut laborieux, mais ça en valait la peine.

Après cette longue digression technique, revenons à nos moutons et mes impressions suite à la lecture de cette Invasion extraterrestre qui ne ressemble à nulle autre.

Si vous cherchez de la science-fiction pure et dure, je pense que vous pouvez passer votre chemin. Certes il est bien question d’extraterrestres, mais ils sont surtout prétextes à une satire virulente de l’Amérique de Donald Trump, mais aussi un réquisitoire à charge contre la connerie du genre humain (surtout de ceux qui détiennent le pouvoir, qu’il soit politique et/ou économique).

L’arme de Luke Rhinehart pour taper là où ça fait mal est la même que celle de ses Protéens, le rire. Un rire sans limites ni tabous, un rire parfois un peu lourdingue, mais un rire qui fait mouche à tous les coups (ou presque). Sourires, rires et fous rires assurés au fil des chapitres !

Il faut dire aussi que Louie est bien tombé en se faisant « adopter » par Billy Morton (même si on peut se demander lequel a réellement adopté l’autre). Vétéran du Vietnam et ex-hippie, il a gardé de ces années un petit côté anarchiste et une âme rebelle à toute forme d’autorité. Carlita, son épouse, bien qu’avocate partage la même méfiance envers l’autorité en général, et les uniformes en particulier.

Partageant plus ou moins les idées de Louie et des ses potes sur le genre humain, la famille Morton vont se retrouver entraînée dans une aventure aussi rocambolesque que déjantée… une aventure qui ne tardera pas de faire d’eux la bête noire de la NSA et consorts, au même titre que les protéens.

Une aventure totalement improbable, mais le côté burlesque, voire grand guignol, de l’intrigue est pleinement assumé, pour ne pas dire revendiqué.

Si l’essentiel de l’intrigue nous est narré par Billy Morton via des extraits du roman qu’il a écrit, Mon ami Louie, d’autres points de vue, plus ou moins officiels, apportent un autre éclairage sur l’évolution des événements.

Je serai tenté de vous parler de la fin du roman, mais ce serait un peu con venant de quelqu’un qui s’efforce, au fil de mes chroniques, de ne pas spoiler. Pour faire simple, on va dire qu’elle est très ouverte, pour ma part ça ne me dérange pas, même si je n’aurai pas été contre un ultime chapitre supplémentaire.

L’idée de départ était plutôt bonne et le bouquin recèle vraiment de quelques très bonnes trouvailles, mais il pêche par quelques longueurs, et une amère impression de redondance à force de tirer encore et toujours sur les mêmes ficelles. À se demander si Luke Rhinehart ne considère pas réellement que le lecteur américain est trop con pour comprendre du premier coup les piques qu’il lance.

Beaucoup de travers pointés du doigt (et certains peuvent s’appliquer bien au-delà des frontières US), mais aucune réelle alternative n’est proposée. Je pense pouvoir affirmer sans me tromper (seul l’auteur pourrait confirmer ou infirmer mon propos) que la volonté Luke Rhinehart était avant tout de nous faire sourire, pas forcément de nous amener à réfléchir sur la meilleure façon de changer le monde. Pour tout dire le contraire eut été un peu prétentieux !

Je referme ce bouquin (ou plutôt ma liseuse) plutôt satisfait de cette découverte, mais pas transcendé ; j’en espérais davantage, peut-être trop.

MON VERDICT

 

[BOUQUINS] Kurt Vonnegut – Tremblement De Temps

AU MENU DU JOUR

K. Vonnegut - Tremblement de Temps

Titre : Tremblement De Temps
Auteur : Kurt Vonnegut
Éditeur : Super 8
Parution : 2018
Origine : USA (1997)
304 pages

De quoi ça cause ?

En février 2001 un tremblement de temps renvoie l’humanité dix années plus tôt, en 1991. Les hommes vont se voir contraints de revivre cette décennie sans rien pouvoir changer quant à leurs choix et décisions du moment. Dix années durant ils seront à la fois acteurs et spectateurs de leur vie, impuissants à réparer les erreurs et mauvais choix, condamnés à en subir à nouveau les conséquences…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que je n’ai jamais lu de roman de Kurt Vonnegut alors qu’il semble être considéré par beaucoup comme un porte-drapeau de la littérature underground US.

Parce que justement Super 8 nous propose un titre encore jamais publié en français.

Parce que Super 8 et Net Galley ont accepté de donner suite à ma demande.

Ma chronique

Je tiens à remercier les éditions Super 8 et la plateforme Net Galley pour la confiance qu’ils m’ont témoignée en acceptant ma sollicitation pour ce titre.

Une demande acceptée qui a toutefois bien failli rester sans suite, le roman m’ayant été proposé au format PDF j’ai informé l’éditeur que je ne le chroniquerai pas. Quelque temps plus tard, un peu par hasard, j’ai découvert que le titre était désormais disponible au format EPUB, je suis donc revenu sur ma décision.

Un roman (?) qui a bien failli ne jamais voir le jour comme nous l’explique Kurt Vonnegut dans son prologue :

Et voilà que moi, à l’hiver 1996, je me trouvais être le créateur d’un roman qui ne tenait pas debout, qui n’allait nulle part et qui, pour commencer, n’avait jamais demandé à être écrit. Merde ! J’avais, si vous voulez, passé pas loin d’une décennie sur ce poisson ingrat. Et il n’était même pas bon à appâter les requins.
(…)
Mon gros poisson, qui puait pas mal, était intitulé Tremblement de temps. Baptisons-le Tremblement de temps I. Et baptisons celui-ci, ragoût concocté à partir des meilleurs morceaux du précédent et mélangé à des réflexions et expériences des sept derniers mois environ, Tremblement de temps II.

Bien que le roman ait été publié en 1997 et que l’auteur jouisse d’une certaine notoriété, il faudra attendre 2018 pour qu’une version française soit publiée à l’initiative de Super 8. L’occasion pour les lecteurs français de découvrir un inédit édité à titre posthume (Kurt Vonnegut est mort en 2007, à l’âge de 84 ans).

Je ne sais pas si ce Tremblement De Temps est représentatif du travail de Kurt Vonnegut, mais c’est, de prime abord en tout cas, totalement déroutant comme lecture. Le pitch proposé n’est que très vaguement évoqué et sert surtout à l’auteur de prétexte pour nous parler de lui à travers diverses anecdotes le concernant lui ou ses proches et autres réflexions sur des sujets divers et variés.

Son alter ego fictionnel (avec qui il échange beaucoup), Kilgore Trout, écrivain de SF qui a la particularité de jeter aux ordures ses nouvelles sans même chercher à les faire publier, intervient souvent pour nous faire part, lui aussi de ses réflexions et son vécu (?).

J’avoue qu’au début de ma lecture je me suis demandé dans quel bourbier j’avais mis les pattes et quel pouvait bien être l’intérêt de la chose que j’étais en train de lire. La réponse s’est imposée d’elle-même après quelques chapitres ; tout l’intérêt de ce bouquin pour le moins atypique réside dans la plume de Kurt Vonnegut.

Force est de reconnaître que l’auteur est un conteur hors pair, on boit littéralement ses phrases, c’est un véritable régal pour les yeux, le cœur et les neurones (mon athéisme viscéral m’interdit d’y ajouter l’âme… mais grande est la tentation de le faire). J’en profite d’ailleurs pour saluer le travail de la traductrice Aude Pasquier.

Kurt Vonnegut a autant de gouaille que de talent, la langue de bois et le politiquement correct ne sont définitivement pas sa tasse de thé, il dit ce qu’il a à nous dire sans y aller par quatre chemins, pimentant même son propos d’un humour aussi ravageur que corrosif.

Morceau choisi à propos de l’Église :

« Quand ils ont découvert que j’étais divorcé, ai-je dit, ils m’ont prescrit toutes sortes de pénitences qu’il fallait que j’accomplisse avant de redevenir assez pur pour pouvoir me marier chez eux.
— Eh bien, voilà, a dit Trout. Imaginez les pinailleries qu’il aurait fallu que vous surmontiez si vous aviez été un ancien taulard. Et puis, si ce pauvre enculé qui vous a écrit a vraiment trouvé une Église qui l’a accepté, il pourrait très bien être de retour en prison à l’heure actuelle.
— Pourquoi ? ai-je demandé. Pour avoir piqué dans le tronc des pauvres ?
— Non, a répondu Trout. Pour avoir plu au Christ en abattant un médecin qui se rendait à son boulot dans une usine à avortement. »

Si l’auteur peut se targuer d’avoir eu une vie bien remplie ponctuée de nombreuses rencontres, mais aussi de deuils ; les interventions de Kilgore Trout quant à elles apportent un brin de folie à l’ensemble, à travers notamment des rencontres avec des personnages hauts en couleur et ses nouvelles aux histoires pour le moins ubuesques.

Ce bouquin n’est à nul autre pareil, un véritable fourre-tout sans queue, ni tête, mais qui se lit malgré tout avec beaucoup de plaisir (et j’en ai été le premier surpris). Une lecture quasi expérimentale qui vaut son pesant de cacahuètes. A réserver toutefois aux amoureux des mots qui ont un peu de temps à perdre…

Je ne peux pas dire, en refermant ce bouquin, que j’ai découvert l’univers littéraire de Kurt Vonnegut, par contre j’ai appris beaucoup de choses sur Kurt, non seulement l’auteur, mais aussi l’homme qu’il était. Une belle rencontre par écrits interposés qui m’a donné envie de découvrir ses « vrais » romans.

Je laisse le mot de la fin à Kurt Vonnegut :

Écoutez : nous sommes sur terre pour glandouiller. Ne laissez personne prétendre autre chose !

MON VERDICT

[BOUQUINS] Alastair Reynolds – Vengeresse

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A. Reynolds - Vengeresse

Titre : Vengeresse
Auteur : Alastair Reynolds
Éditeur : Bragelonne
Parution : 2018
Origine : Angleterre (2016)
408 pages

De quoi ça cause ?

Adrana et Arafura Ness, deux soeurs, intègrent, contre l’avis de leur père, l’équipage du Monetta, un voilier solaire commandé par le capitaine Rackamore. Leur tâche : apprendre à parler aux os et permettre ainsi au capitaine de diriger son vaisseau sur les écrins les plus rentables et assurer la sécurité de l’expédition.

Mais les écrins et leurs richesses attisent aussi la convoitise des pirates qui préfèrent attaquer un équipage sur le retour et les dépouiller sans avoir à s’exposer aux dangers des écrins. Pour les bâtiments de la Congrégation, il n’y de pires perspectives que de croiser la route du Voilier-Noir et de son impitoyable capitaine, la redoutable et redoutée Bosa Sennen…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que ça fait un bail que je n’ai pas plongé le nez dans un roman de science-fiction. Il s’avère que j’ai flashé sur la couv’ de celui-ci.

D’autre part le mélange de science-fiction et de flibusterie sur fond d’un space opera avait de quoi titiller ma curiosité.

Ma chronique

Alastair Reynolds est réputé pour appartenir à l’école hard SF (à partir des connaissances scientifiques actuelles on extrapole leur possible évolution future permettant ainsi de définir un éventuel futur plausible), avec Vengeresse il change de registre pour un space opera nettement plus abordable pour le grand public. Un pari gagnant puisque le roman a été récompensé en 2017 du Locus Award du meilleur roman young adult (même si ni l’auteur ni l’éditeur n’ont classé le roman dans cette catégorie).

De fait l’auteur nous plonge dans un futur lointain (très, très lointain), au cœur d’un univers qui a ses propres règles de fonctionnement, sans vraiment s’appesantir sur la question ; le lecteur est mis devant le fait accompli (c’est comme ça, point barre), du coup il faut un petit moment pour vraiment entrer au cœur du récit. Soyez assurés qu’une fois vos repères trouvés (et ça vient assez vite finalement), la magie opère et l’on se laisse guider par l’imagination d’Alastair Reynolds.

Plutôt que de prendre le risque de vous gâcher l’effet de surprise et le plaisir de la découverte (bon OK, aussi un peu parce que je suis en mode grosse feignasse aujourd’hui), je ne m’épancherai pas sur les fondamentaux de cet univers. Disons simplement que la Congrégation est le résultat de treize Occupations successives (ou vagues extra-terrestres, plus ou moins hostiles) et que chacune a laissé des traces technologiques de son passage.

C’est le premier roman que je lis de cet auteur et ne revendiquant aucune affection particulière pour la hard SF je me suis lancé sans le moindre a priori. Le mélange des genres entre SF et flibusterie avait titillé ma curiosité, force est de constater que le charme a opéré chez moi ; cette chasse au trésor version futuriste et interplanétaire m’a emballé (même si j’aurai apprécié que certains éléments de l’intrigue soient un peu plus développés).

Le récit est écrit à la première personne, c’est Arafura ‘Ara’ Ness qui nous fait vivre l’intrigue de son point de vue. Un choix qui contribue à dynamiser le récit même si cela se fait au détriment des personnages qui manquent parfois de profondeur. On assiste certes à l’évolution d’Ara au fil de son aventure, mais les autres sont un peu laissés pour compte. Peut-être un choix délibéré de l’auteur compte tenu du jeune âge de sa narratrice (au début du roman elle n’est pas encore majeure).

J’espérais beaucoup du personnage de Bosa Sennen et sur ce point la sauce a eu du mal à prendre. Certes elle ne manque de cruauté, mais c’est limite surjoué et cliché (la truffe qui parle d’elle à la troisième personne, elle se prend pour Jules César l’autre). Qui plus est on devine rapidement qui elle est (ou a été) avant de devenir Bosa Sennen.

Un roman de SF clairement orienté grand public qui aurait gagné à être un peu plus étoffé. À ce titre je peux comprendre qu’il ait pu surprendre, voire décevoir, les puristes, notamment les fans d’Alastair Reynolds. D’un autre côté c’est peut-être aussi l’occasion d’attirer un public moins élitiste (n’y voyez là aucune consonance péjorative) vers la SF.

D’ores et déjà une suite est annoncée pour début 2019 (en VO), espérons que Bragelonne nous proposera une traduction française rapidement (Vengeresse est paru en 2016, il a fallu attendre 2018 pour le découvrir en VF). Pas de cliffhanger haletant à la fin de ce roman, la première phase de l’histoire est bouclée, la suite devrait donc donner à l’intrigue une tout autre dimension tout en restant dans la continuité de l’intrigue.

Ce premier tome est une sympathique introduction à un univers potentiellement prometteur, au vu des questions restées sans réponse en refermant le bouquin, gageons que la suite ne pourra qu’être plus consistante. Est-ce qu’un second tome suffira à boucler la boucle ou va-t-on s’orienter vers une trilogie (et plus si affinités) ? À l’heure qu’il est je pense que seul Alastair Reynolds est en mesure de répondre à cette question…

MON VERDICT

[BOUQUINS] Andy Weir – Artemis

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A. Weir - Artemis

Titre : Artemis
Auteur : Andy Weir
Editeur : Bragelonne
Parution : 2018
Origine : USA (2017)
332 pages

De quoi ça cause ?

Jazz est coursière sur la cité lunaire d’Artemis, histoire d’arrondir les fins de mois elle joue volontiers les contrabandiers afin de procurer à ses clients des marchandises pas toujours très légales

Quand l’un de ses riches clients lui propose une opération de sabotage, Jazz hésite, mais, face à la forte prime promise, elle finit par accepter. Mais les choses ne vont du tout se passer comme prévu, Jazz va devoir se battre pour sa propre survie, mais aussi pour celle d’Artemis…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que j’ai adoré Seul Sur Mars du même auteur, il me tardait donc de découvrir son second roman.

Ma chronique

Je n’ai pas de réel programme de lecture en tête, disons que je sais grosso modo quels sont les 3 ou 4 prochains titres que je lirai sans pour autant pouvoir dire dans quel ordre je les accrocherai à mon tableau de chasse. Jusqu’à ce que débarque dans mon Stock à Lire Numérique un « incontournable », le bouquin pour lequel je bouleverserai ce programme déjà bien instable. Artemis fait partie de ces troubles-fêtes, Andy Weir m’avait bluffé avec son premier roman, Seul Sur Mars, il me fallait savoir, sans plus attendre, si l’essai serait transformé ou non.

Andy Weir reste dans la science-fiction, mais se rapproche de nous en situant son action sur la lune, une lune habitée par quelques humains regroupés dans la cité d’Artemis. Cette fois son personnage principal aura donc de la compagnie (pas forcément toujours bienveillante, mais ceci est une autre histoire).

L’auteur nous propose un récit à la première personne, c’est Jazz qui nous raconte son périple avec un subtil mélange de cynisme et de bonne humeur. Je ne sais pas si pour un auteur de sexe masculin il est difficile de se mettre dans la peau d’une femme, mais le fait est que Andy Weir y arrive à merveille. Mais bon, force est de reconnaître que Jazz n’a pas vraiment le profil type de la ménagère pantouflarde. Elle serait plutôt du genre débrouillarde et un brin roublarde.

Avant de nous plonger au coeur de l’intrigue, l’auteur nous invite à suivre Jazz dans son quotidien. Une entrée à la matière plutôt bienvenue pour se familiariser avec Artemis (et par la même une partie de ses habitants) et comprendre les motivations futures de la jeune femme.

On retrouve rapidement la griffe de l’auteur, avec une bonne base documentaire scientifique qu’il réussit à vulgariser et à intégrer à l’intrigue sans jamais que cela devienne indigeste. Je ne sais pas si tout est scientifiquement exact ou plausible, le fait est que ça colle parfaitement au récit, ce qui me suffit amplement (après tout la fiction autorise quelques libertés avec la rigueur scientifique).

Artemis est donc une cité lunaire, du coup on peut clairement situer l’intrigue dans un futur indéterminé mais oubliez les cités futuristes à la Star Wars et consorts. Si les technologies utilisées sont bel et bien futuristes , les conditions de vie des habitants restent assez proches de celle des terriens, en plus contraignantes compte tenu des limites imposées par l’environnement lunaire.

Andy Weir nous propose un récit de science-fiction aussi rythmé qu’un thriller, des intérêts (pas toujours très sains) économiques et politiques (forcément pourris) viendront en effet corser les choses, sans parler d’un puissant syndicat du crime qui n’appréciera pas vraiment que l’on vienne fouiner dans ses affaires.

Heureusement Jazz ne manque pas d’ingéniosité, comme dirait l’autre (grosso modo), « sur Artemis on n’a pas de pétrole mais on a des idées« , le pétrole étant à remplacer par des GPD, la devise en cours sur Artemis. Mais surtout elle ne sera pas totalement seule contre tous, quelques précieux alliés viendront lui prêter main forte.

Pour répondre à mon interrogation première, OUI, l’essai est transformé et brillamment transformé. Andy Weir s’impose comme un acteur majeur de la scène littéraire SF, non seulement il propose des intrigues parfaitement maîtrisées mais il parvient à rendre accessible à tous une des branches les plus élitistes de la SF, la hard science.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Sylvain Neuvel – Le Sommeil Des Géants

AU MENU DU JOUR

S. Neuvel - Le sommeil des géants

Titre : Le Sommeil Des Géants
Série : Les Dossiers Thémis – Tome 1
Auteur : Sylvain Neuvel
Editeur : Le Livre de Poche
Parution : 2017
Origine : Canada (2016)
384 pages

De quoi ça cause ?

Attirée par une étrange lueur bleue, Rose Franklin, onze ans, chute dans un trou. En reprenant ses esprits, elle réalise qu’elle se trouve dans une immense main métallique parcourue de faisceaux lumineux.

Dix-sept ans plus tard, Rose Franklin est devenue une scientifique reconnue. On lui propose de diriger une équipe chargée de percer tous les secrets de cette mystérieuse main. Une mission qui leur réserve bien des surprises…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

C’est Stelphique (à lire ici) qui, la première, m’a fait connaître ce bouquin avec un billet des plus élogieux. Ne le trouvant pas en numérique je suis passé à autre chose en attendant. Et un jour, au fil de mes errances, v’là t’y pas que je le croise chez mon fournisseur préféré… Il ne restait plus qu’à lui trouver une place de premier choix dans mon Stock à Lire Numérique.

Ma chronique

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je vais commencer pas disséquer le bandeau (cette bande rouge avec une écriture blanche, sur laquelle les commerciaux écrivent tout et n’importe quoi pour attirer les curieux). En l’occurrence il est écrit « Captivant. Entre World War Z et Seul Sur Mars« .

World War Z ? Une histoire d’apocalypse zombie qui se décline sous la forme d’un rapport rédigé par un consultant de l’ONU. Rapport constitué d’extraits d’entretiens, de témoignages… Sur le fond rien à voir avec le présent bouquin, sur la forme par contre on retrouve un roman constitué essentiellement d’entretiens menés par un personnage dont on ne sait rien (et dont on ne saura jamais rien), çà et là d’autres supports viennent combler les blancs.

Seul Sur Mars ? L’histoire d’un mec « oublié » sur la planète Mars et qui doit se démerder pour assurer sa survie. Heu… Bin à l’heure d’aujourd’hui je cherche toujours un quelconque point commun entre le bouquin d’Andy Weir et celui de Sylvain Neuvel.

OK, vous me direz qu’un bandeau soit un tissu de conneries on a l’habitude. Mais ne fuyez pas ce roman à cause d’une stratégie marketing foireuse ; s’il y a bien un mot qui définit à la perfection mon ressenti après avoir refermé ce bouquin c’est tout simplement CAPTIVANT.

Honnêtement je pense que même si je n’avais jamais entendu parler de ce bouquin auparavant, et que l’auteur soit, pour moi, un parfait inconnu, il aurait retenu mon attention au fil de mes errances en librairie ou sur les différentes plateformes d’achat que je fréquente. Impossible en effet de résister à cette superbe couverture, et donc de se pencher sur la quatrième de couv’… et voilà, le tour aurait été joué, j’aurai été ferré !

M’est d’avis que les principales difficultés avec une narration indirecte (par entretiens interposés) se déclinent à la fois au niveau des personnages et de l’intrigue. Concernant les personnages, leur personnalité se définit ici non seulement au travers de leurs propres interventions, mais aussi par le biais du vécu et du ressenti des autres. Quant à l’intrigue, il faut réussir à capter en permanence l’attention du lecteur et donc assurer sa continuité et son rythme.

Sylvain Neuvel relève haut la main ces deux challenges.

Ses personnages ont une réelle profondeur et chacun une personnalité bien affirmée, l’auteur adapte ainsi sa narration à chacun. J’ai eu un faible pour Kara, sans doute pour son côté réfractaire à toute forme d’autorité (bien qu’elle soit militaire), mais aussi pour Vincent, un tantinet asocial et cynique. Même celui qui mène les entretiens nous devient sympathique, malgré une apparente froideur on sent qu’il fera tout son possible pour protéger son équipe.

Difficile de parler des personnages sans mentionner Thémis, comme dirait l’autre « Qui est-il ? D’où vient-il ? Formidable robot. Des temps nouveaux« . Sauf qu’en l’occurrence c’est « elle » (après le sexe des anges, découvrons le sexe des robots… tout un programme) et que la seule certitude que l’on ait à son sujet est qu’elle vient plutôt des « temps anciens » (Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine… ça vous rappelle quelque chose ?).

Si l’intrigue peut paraître, de prime abord, relativement classique (la découverte d’un artefact extra-terrestre n’est pas vraiment une innovation dans le monde de la SF), elle n’en demeure pas moins soignée et maîtrisée. L’auteur vous propose un univers dans lequel la science-fiction, le thriller et même la géopolitique se côtoient et se mélangent. Non seulement le tout est cohérent, mais il devient très vite totalement addictif et ne manque ni de rythme, ni de surprises.

Comme son nom ne l’indique pas forcément, Le Sommeil Des Géants est le premier tome d’une trilogie (Les Dossiers Thémis). La mise en bouche est une totale réussite, j’ai adoré me plonger dans ce bouquin (impossible de le lâcher un fois que l’on a mis le nez dedans) et il me tarde de découvrir la suite. D’autant que le cliffhanger final vous laissera très certainement sur le cul !

MON VERDICT

[BRD] Valérian Et La Cité Des Milles Planètes

A L’AFFICHE DU JOUR

Valérian

Titre : Valérian Et La Cité Des Mille Planètes
Réalisation : Luc Besson
Production : EuropaCorp / TF1 Film Production
Distribution : EuropaCorp
Origine : France / USA (2017)
Durée : 2h17

Le casting

Dane DeHaan – Valérian
Cara Delevingne – Lauréline
Clive Owen – Commandeur Filitt

Le pitch

Quand les agents Valérian et Lauréline arrivent sur Alpha, ils sont attachés à la protection du Commandeur Filitt, qui leur explique que la survie de la station est menacée par une zone radioactive qui ne cesse de s’étendre sans que personne n’en comprenne le pourquoi du comment.

Une réunion du Conseil est interrompue par une attaque, tous les membres présents sont neutralisés, y compris Valérian et Lauréline, et le Commandeur est enlevé par les attaquants…

Ma chronique

Avant d’aller plus avant dans cette chronique je tiens à préciser que je ne connaissais les BD Valérian que de nom, jamais eu l’occasion (ni même l’envie) de me pencher sur la question. Je découvre donc le film, son univers et les personnages l’esprit libre de toute référence.

Le moins que l’on puisse c’est qu’avec ce film Luc Besson en a fait couler de l’encre ; et pas souvent en des termes élogieux ! J’étais donc curieux de me faire ma propre opinion sur la chose.

Visuellement parlant le film s’avère être une très bonne surprise, Luc Besson et ses équipes s’en sont donnés à coeur joie pour régaler nos pupilles. Les décors sont somptueux, les effets spéciaux très réussis et certaines scènes même ne manquent pas de poésie (je pense notamment au show transformiste de Bubble, interprétée par Rihana, qui est franchement bluffant).

L’intrigue tient la route sans vraiment donner dans l’originalité et sans grande surprise. On se prend au jeu même si à la fin du film on aurait tendance à penser qu’ils ont assuré le minimum syndical. C’est toujours mieux qu’un naufrage pur et dur ! Au moins le divertissement a été au rendez-vous.

En fait la grosse faiblesse du film tient dans ses personnages, en premier lieu le couple Valérian et Lauréline. Ils sont trop lisses, creux et sans le moindre charisme. Même les dialogues sonnent faux, on aurait presque l’impression que les acteurs lisent leur texte sur un prompteur.

Malgré cet accueil mitigé, Luc Besson n’exclut pas l’idée de travailler sur une suite. Certes le potentiel ne manque pas, reste à trouver l’art et la manière d’en extraire « toute la substantifique moelle« , comme dirait ce brave William (le chat qui expire).

Un film qui se laisse regarder, mais qui ne laissera pas sa trace dans les annales du cinéma. Un sympathique divertissement familial qui ne sollicite pas trop les neurones. Il est vrai qu’au vu du budget (plus de 197 millions €), on on pouvait s’attendre à quelque chose de vraiment grandiose et finalement on sort de là avec le sentiment que c’est « la montagne qui accouche d’une souris » (cette fois merci à Jean, le fabuliste qui aime les fontaines).

♥♥♥

[BOUQUINS] Julien Capron – Mise A Jour

AU MENU DU JOUR

J. Capron - Mise à Jour

Titre : Mise A Jour
Auteur : Julien Capron
Editeur : Seuil
Parution : 2017
Origine : France
224 pages

De quoi ça cause ?

Léandre Batz est journaliste d’investigation en mal d’inspiration. Quand l’actrice Olivia Muller lui confie que sa demande d’adoption a été rejetée parce que sa nOte est mauvaise il sent qu’il tient quelque chose. Pourquoi une actrice comme Olivia ne bénéficie pas d’une meilleure évaluation ? Qu’est-ce qui se cache derrière ces nOtes et le tout-puissant réseau social eVal ?

Une enquête qui va pousser Léandre à se confronter à son frère, Robin, le créateur et PDG d’eVal.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

C’est clairement la couv’ qui a attiré mon attention, cet oeil qui semble vous fixer avait quelque chose d’intrigant. Le pitch m’a semblé prometteur, comme 1+1 font 2, il était évident que je craquerais.

Ma chronique

D’entrée de jeu vous pouvez ignorer la mention Thriller sur la couv’, ce n’est ni un thriller, ni même un roman policier. Certes il y a enquête, mais uniquement journalistique et sans scène de crime sordide.

Bon alors kezaco Mise A Jour ? Une arnaque ? Un mensonge ? Si le terme thriller est effectivement usurpé, tout n’est pas non plus à jeter ; pour tout vous dire je me suis rapidement pris au jeu et j’ai avalé le bouquin quasiment d’une traite.

J’ai adhéré à la construction plutôt originale du roman. Un chapitrage très sommaire, au fil des pages les divers intervenants semblent s’adresser directement aux lecteurs, comme si c’était nous qui menions cette investigation autour d’eVal et de la nOte.

Un choix narratif qui fait mouche, mais qui a aussi son revers. Les personnages paraissent superficiels, leur personnalité n’étant que peu travaillée. Concrètement c’est peu comme dans la vraie vie, tu ne sais d’eux que ce qu’ils veulent bien te dire, ou ce que les autres te disent… à toi de te démerder avec ça pour te faire une idée.

Le principe de la nOte est on ne peut plus sommaire, tu notes un individu, un spectacle, un établissement, un article… par un code couleur basique (Vert : Bon – Orange : Moyen – Rouge : Mauvais), l’appli eVal calcule ensuite une moyenne en nuançant la couleur (de très clair à très foncé). Aucun commentaire justifiant ton évaluation, un simple clic est le tour est joué.

Je rappelle la hiérarchie sur eVal ? La plupart des gens sont orangeclairs ou vertclairs. Au-dessus de vertclair, on est une star ; au-dessous d’orangeclair, on entre dans les premiers cercles de l’enfer. Je dirai : orange pour un type qui empêche son voisinage de dormir depuis deux mois ; orangefoncé pour un P-DG qui vient de déménager son usine pendant la nuit en laissant quatre cents ouvriers sur le carreau ; rouge pour un politique qui vient de tomber pour corruption ; rougeclair pour un serial killer ; rougefoncé pour un serial killer djihadiste qui fait collection d’artefacts nazis.

Une investigation qui permet à l’auteur d’aborder les dérives du numérique et le rapport de l’individu au monde virtuel (en pointant du doigt les réseaux sociaux, cela va de soi). Les analyses et points de vue s’intègrent parfaitement au récit.

Par contre j’ai été moins absorbé par les digressions sur le théâtre et le métier de comédien. Pour tout vous dire, j’y ai même trouvé quelques longueurs (ce milieu ne m’attirant pas du tout, je partage là un ressenti 100% personnel).

Mise A Jour est annoncé comme le premier tome « d’une série aux marges de l’anticipation », je serai au rendez-vous pour la suite. Le roman n’est pas parfait mais suffisamment réussi pour me donner l’envie de retrouver Léandre, Sixt et les autres.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Julie Armen – Opération Borodine

AU MENU DU JOUR

J. Armen - Opération Borodine
Titre : Opération Borodine – La 23e République
Auteur : Julie Armen
Editeur : Le Clot Perret (auto-édition)
Parution : 2017
Origine : France
356 pages

De quoi ça cause ?

Face à une vague d’attentats sans précédent, les autorités françaises accordent de plus en plus de place à l’Islam dans les instituions et le quotidien des Français. Suite à un énorme mensonge d’État, le président nomme un islamiste soi-disant modéré comme Premier ministre et ministre de l’Intérieur, celui par qui la paix entre les communautés doit arriver.

Avec la bénédiction du pouvoir en place et la soumission des Français (au nom du « vivre ensemble »), l’Islam s’impose peu à peu. D’abord modéré puis de plus en plus radical. Plus rien ne semble pouvoir empêcher la France de devenir un Califat régi par la charia.

La résistance s’organise, mais la répression est brutale. Un groupe de résistants pacifistes prépare pourtant une opération d’envergure avec l’aide d’un allié inattendu : la Russie…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce qu’il a été numérisé par ChrisEbouquin et qu’elle m’a fort aimablement demandé si j’étais intéressé par la découverte. Le pitch ayant immédiatement fait mouche j’ai accepté sans hésitation.

Parce que c’est un roman autoédité et que force est de constater que cette année je n’ai accordé que peu de place à l’auto-édition dans mon blog. Les journées ne faisant que 24 heures, et parce qu’il faut bien dormir (et malheureusement bosser), il faut faire avec… et faire des choix.

Ma chronique

Après L’Appel Du Néant je reste donc en immersion dans l’islamisme, sauf que, quand Maxime Chattam ancre son roman dans la réalité et l’actualité, Julie Armen, avec son Opération Borodine, nous propose une dystopie des plus cauchemardesque. Une vison d’avenir improbable, mais qui n’en reste pas moins glaçante.

Une lecture qui m’a rappelé Guerilla de Laurent Obertone, certes les scénarios sont radicalement différents, mais il est intéressant de voir que dans les deux romans l’État est complice (plus encore chez Julie Armen, le pouvoir collaborant directement à cette islamisation de la nation), mais aussi que les auteurs insistent lourdement sur la soumission du peuple de France (au nom du fameux « vivre ensemble »).

Julie Armen nous plonge, dès les premières pages de son roman, dans une France qui va mal et qui a déjà fait de nombreuses concessions à l’islam. Une France en proie au terrorisme islamiste avec des attentats quasiment quotidiens. Bref, il y a vraiment quelque chose de pourri au royaume de France ! On serait tenté de se dire que ça pourrait difficilement aller plus mal, en réalité ce ne sont là que les prémices de la descente aux enfers que nous a concoctée l’auteure.

Au milieu du chaos, on va suivre trois femmes (Claire, Pauline, et Viane) et leur entourage, voisines et amies, qui organiseront plus ou moins activement un réseau de résistance pacifique sur fond de rapprochement avec la Russie qui fait figure de terre d’asile pour les « vrais » Français.

Et une quatrième, Fatima, qui va mener ses propres actions. Une façon pour l’auteure d’éviter les amalgames en soulignant bien la différence entre Islam et islamisme. Tous les musulmans ne sont (heureusement) pas des islamistes.

Si un tel scénario devait se produire en France je reste très sceptique sur une intervention russe en notre faveur, en tout cas pas avec quelqu’un comme Vladimir Poutine à la tête du pays… J’espère surtout qu’en de pareilles circonstances les Français seront nettement plus réactifs que dans le roman de Julie Armen. C’est quand même aux Français de défendre leur identité et leur pays.

Je craignais que l’aspect très russophile du roman ne me dérange, mais finalement ça s’intègre parfaitement à l’intrigue et du coup ça passe comme une lettre à la poste (même si je demeure sceptique sur un tel élan de générosité de la part de la Russie).

Une agréable découverte qui se lit quasiment d’une traite, la plume de Julie Armen assure une grande fluidité dans la lecture.

MON VERDICT