[BOUQUINS] David Coulon – Demain Disparue

Pourquoi Lif et Romuald ont-ils accepté cette invitation à dîner ?
Leur couple bat de l’aile, le village dans lequel ils doivent aller est complètement isolé et une effroyable tempête menace.
Mais une promesse est une promesse, il faut sauver les apparences.

Cependant, à peine arrivés, les événements étranges se succèdent : Qu’arrive-t-il à Marie, l’amie de toujours de Lif ? Elle ne la reconnaît plus. Qui sont ces deux adolescents également présents au dîner ? Et pour quelles raisons leurs amis ont tant insisté pour les voir ce soir ? Ce soir en particulier…

Très vite, Lif n’a plus qu’un seul objectif : fuir cette maison où la peur règne en maître.
D’autant qu’elle n’est pas seule, elle doit également protéger l’enfant qu’elle porte dans son ventre.

Parce que David Coulon m’avait agréablement surpris et déconcerté avec son roman Trouble Passager.

Force est de reconnaître que le pitch du présent roman avait tout pour titiller ma curiosité.

Je remercie les éditions Fayard et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Si le bouquin commence de façon assez classique (un couple en instance de séparation accepte une invitation à diner chez des amis qui habite un village tranquille), David Coulon donne rapidement à son récit une tournure pour le moins inattendue.

Dès les premières pages l’auteur parvient à imposer une ambiance oppressante alors que le cœur de l’intrigue n’est pas encore réellement enclenché, par sa narration même des événements anodins deviennent de potentielles sources d’angoisse. Les choses iront crescendo jusqu’à devenir franchement anxiogène une fois que David Coulon aura entraîné Lif dans les méandres de son scénario machiavélique.

Bien qu’il soit question de dérèglement climatique dans ce roman, je ne le qualifierai pas pour autant d’engagé… pour le bien de la cause écologiste. En effet l’auteur fait des défenseurs de la planète de véritables psychopathes qui défendent un écoterrorisme extrême et destructeur.

En toute franchise je dois avouer que David Coulon m’a scotché avec ce roman, je ne m’attendais pas du tout à ce que le récit prenne une telle tournure. Le bougre sait y faire pour jouer avec les nerfs et les certitudes de ses lecteurs – ce qui implique de malmener ses personnages – mais aussi et surtout pour rendre son roman totalement addictif. On est sur le fil du rasoir quasiment de la première à la dernière page… et on en redemande.

Le récit est certes porté par le personnage de Lif, mais ce sont Joris, Ludmilla et leurs pairs qui rendent le roman franchement anxiogène. Un pari aussi osé que casse-gueule que de miser sur des adolescents comme vecteurs du cauchemar qui attend Lif. David Coulon relève haut la main le défi.

Si je devais chercher le petit bémol (genre caillou dans la chaussure du marathonien) du roman, je signalerais quelques redondances qui deviennent parfois pénibles quand elles ne sont pas franchement inutiles (franchement, on s’en bat les couilles de la façon dont il faut prononcer Roro).

Certains pointeront sans doute du doigt l’invraisemblance du scénario imaginé par l’auteur, pour ma part j’ai envie de dire que cela fait partie de la magie de la fiction : accepter l’improbable et finir par y croire. Là encore je tire mon chapeau à l’auteur… même si certains passages sont peut-être un tantinet too much.

Un sans-faute absolu jusqu’à la dernière partie du récit, celle qui doit essayer d’expliquer l’inexplicable. On avait déjà plus ou moins compris le pourquoi du comment des motivations de Joris et Ludmilla, ceux-ci n’étant pas avares d’explications. Le problème tient surtout dans la chute soudaine de tension, alors que l’on était tenu hors d’haleine – à la limite même de l’asphyxie –, l’appel d’air est un peu trop brutal.

Demain Disparue est incontestablement un roman qui ne rentre pas dans une case prédéfinie, au vu de la dimension humaine omniprésente on pourrait parler de thriller psychologique, mais difficile toutefois de laisser de côté l’aspect anticipation, voire post-apocalyptique. Pour ma part je me contenterai de dire que c’est un roman audacieux maîtrisé de bout en bout, l’auteur nous mène à la baguette et on le suit presque malgré nous quitte à être parfois quelque peu déstabilisé et souvent fortement bousculé.

[BOUQUINS] Armelle Carbonel – Enigma

Domaine de la Haute-Barde. Un énigmatique orphelinat, théâtre de terribles événements. Par une nuit d’orage, soixante-neuf ans plus tôt, des enfants ont mystérieusement disparu.

Spécialiste des édifices à l’abandon, la journaliste et cinéaste Barbara Blair va tenter de comprendre ce qui leur est arrivé. Mais les habitants du petit village n’apprécient guère cette étrangère qui vient remuer ce passé trouble, d’autant qu’un nouveau drame ne tarde pas à les frapper.

Entre légende et réalité, Barbara est confrontée à une énigme qui menace de réveiller les démons d’autrefois mais aussi ses plus douloureux souvenirs.

Certains secrets doivent être tus à tout jamais, au risque de vous hanter jusqu’à votre dernier souffle.

Parce que c’est Armelle Carbonel, une auteure qui a su marquer les esprits dès son premier roman (Criminal Loft) pour finir, au fil des romans par imposer sa griffe dans le monde du thriller (fortement saupoudré de noir) francophone.

Je remercie les éditions Fayard et la plate-forme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

J’ai découvert Armelle Carbonel via les regrettées éditions Fleur Sauvage et son premier roman – hors auto-édition – Criminal Loft. D’emblée l’auteure a démontré qu’elle maîtrisait les règles aussi bien du thriller psychologique que du roman noir. Un talent qui a été crescendo au fil des romans, l’auteure poussant toujours plus loin dans la noirceur de l’âme humaine.

Avec ce cinquième roman Armelle Carbonel confirme cette tendance, elle va prendre un malin plaisir à jouer avec vos nerfs et votre adrénaline, n’hésitant pas à rebattre totalement les cartes pour achever le lecteur.

Une fois de plus l’auteure opte pour situer son intrigue dans un lieu hors du commun et surtout de sinistre réputation, en l’occurrence un ancien orphelinat qui a été le théâtre d’une disparition en masse (et sans doute d’un massacre) qui demeure inexpliqué à ce jour. L’endroit parfait pour générer une ambiance anxiogène au possible.

En parallèle, il sera souvent fait référence à un autre lieu et à une autre époque, clins d’œil qui nous renvoie à un précédent roman de l’auteure, Sinestra. Roman qui s’avère être le seul que je n’aie pas encore eu l’occasion de lire (publié initialement chez Ring qui ne proposait aucune offre numérique). Une lacune qui ne s’avérera jamais gênante pour la compréhension de l’intrigue.

Une intrigue qui va se tisser et s’étoffer entre le passé et le présent, entre les faits et les légendes, entre secrets, non-dits et mensonges.

Si Armelle Carbonel aime malmener ses personnages, cela ne l’empêche nullement de leur accorder un soins tout particulier. Des personnalités souvent complexes, à commencer par Barbara Blair qui s’investit à fond dans le travail pour essayer d’oublier un drame survenu quatre ans plus tôt, sur un autre tournage. Un drame qui a aussi profondément marqué son équipe, David et Warren.

Là encore rien n’est définitivement acquit, l’auteure est capable de faire basculer ses personnages en un claquement de doigts (un plaisir qu’elle ne boudera pas au fil des chapitres).

À tel point d’ailleurs que je ne sais trop comment interpréter l’épilogue du roman. Est-ce une ultime révélation qui remet totalement en cause tout ce que l’on croyait savoir ? Ou est-ce simplement une autre branche de l’arbre des possibles ? À chacun de l’interpréter comme bon lui semblera.

Plus que jamais Armelle Carbonel fait honneur à son surnom de « nécromancière », incontestablement une plume devenue incontournable pour les amateurs de thrillers bien glauques.

[BOUQUINS] Guillaume Clicquot – Prenez-Moi Pour Une Conne

AU MENU DU JOUR


Titre : Prenez-Moi Pour Une Conne
Auteur : Guillaume Clicquot
Éditeur : Fayard
Parution : 2023
Origine : France
324 pages

De quoi ça cause ?

« Je m’appelle Orane de Lavallière, j’ai 58 ans. J’ai sacrifié tous mes diplômes pour me dévouer à ma famille et à la réussite de mon mari, Xavier. Ma mission de mère au foyer accomplie, ce salopard m’a quittée pour une jeunette. Une histoire banale. Il m’a prise pour une conne, et il n’avait pas tort. Endormie par mon confort de vie et aveuglée par mes certitudes de petite bourgeoise naïve et coincée, je n’ai rien vu venir. Xavier m’a détruite. Je me suis relevée. Pourtant son souvenir m’obsède, son existence me ronge. Je me sens impuissante. À moins que… »

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Avant toute chose c’est le titre du roman qui a attisé ma curiosité, le pitch a fait le reste.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

J’avoue sans aucune honte qu’avant de croiser ce roman via Net Galley je ne connaissais pas du tout Guillaume Clicquot mais, paradoxalement j’ai déjà eu l’occasion de me frotter à son travail, ses précédents romans Garde Tout, Surtout Les Gosses (2015) et Poivre Et Sel (2018) ayant tous les deux fait l’objet d’adaptations cinématographiques (respectivement Papa Ou Maman et Joyeuse Retraite, films sur lesquels il a endossé la casquette de scénariste).

Tout au long du roman l’auteur laisse la parole à Orane de Lavallière, femme trahie et bafouée par son mari, qui va passer du chagrin, à la colère… et plus si affinités. En attendant le résultat de sa mise en scène, elle nous raconte son histoire, sa vie de famille et de couple.

Comme dans un épisode de Columbo on sait d’entrée de jeu qui est la victime et qui est la coupable. Autant dire que le côté strictement policier du roman est secondaire.

Nous avons donc un macchabée et une coupable mais en l’occurrence nous d’emblée envie de prendre parti pour Orane qui nous apparaît comme la véritable victime dans cette histoire. Victime d’un sale type, égoïste, infidèle et lâche (il plaque sa femme par mail… après 3 enfants et 33 ans de vie commune).

Donc cette « brave » Orane décide que finalement la meilleure option est de supprimer son ordure d’ex-mari. Mais voilà, il ne faut pas faire n’importe quoi et encore moins n’importe comment, pas question de se faire épingler par les flics. Ce salopard ne mérite pas que justice lui soit rendue.

C’est donc à grand renfort de romans policiers, de séries TV et de programmes judiciaires comme « Faites entre l’accusé » ou « Enquêtes criminelles », qu’elle va peaufiner son plan et surtout répertorier les erreurs à ne pas faire.

Toute cette partie du récit a quelque chose de réellement jubilatoire, bien que l’on sache pertinemment que si le plan fonctionne un homme mourra. J’avoue sans complexe que l’on éprouve un plaisir sadique à suivre Orane dans ses préparatifs.

Le reste du roman est dans la même veine, cela peut paraitre cruel et amoral de se réjouir de la mort de quelqu’un mais je suis incapable de porter le moindre jugement contre Orane. Tout comme je suis incapable de juger une femme qui bute le mec qui lui fait vivre un enfer… c’est presque dommage qu’il n’y en ait pas plus qui franchissent le pas, ça éviterait bien des féminicides.

Alors happy end ou triomphe de la justice ? Ne comptez pas sur moi pour vous révéler le fin mot de l’histoire.

Un grand merci à Guillaume Clicquot pour ce roman que j’ai dévoré d’une traite. Typiquement le genre de bouquin qui met du baume au cœur. En le refermant vous réaliserez que sous couvert d’humour et de second degré, l’auteur nous questionne sur la place de la femme dans notre société qui s’affirme moderne et égalitaire.

Attention ça piquer…

Je me permets une petite remarque à l’attention de l’auteur et accessoirement des relecteurs et correcteurs. À de nombreuses reprises dans le roman on trouve un problème de guillemet fermé à la place du guillemet ouvert ainsi « Fête des Mères » devient »Fête des Mères ». Ce n’est pas que ce soit rédhibitoire mais à force de se répéter ça fini par piquer les yeux.

Dans le même ordre d’idée, on retrouve quelques erreurs résiduelles (fautes d’accent surtout) qui n’auraient pas dû échapper à un correcteur vu que même Word tique face à ce genre de coquilles.

D’ailleurs tant que je suis dans la suite Microsoft Office, le tableur s’appelle Excel et non Exel.

Je le répète ce n’est nullement rédhibitoire mais je pense sincèrement que ce sont des maladresses qui auraient pu facilement être évitées / corrigées.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Cédric Sire – La Saignée

AU MENU DU JOUR


Titre : La Saignée
Auteur : Cédric Sire
Éditeur : Fayard
Parution : 2021
Origine : France
560 pages

De quoi ça cause ?

Estel Rochand a été écartée de la police à la suite d’une terrible bavure qui a causé la mort d’une innocente. Sa vie est en miettes, son couple à la dérive. Désormais garde du corps de seconde zone, elle se fraie un chemin dans l’existence comme elle l’a toujours fait  : à coups de poing.

Quentin Falconnier, policier spécialisé en cybercriminalité, enquête sur un site du Dark Web, qui propose des vidéos de torture et de mise à mort en direct. Qui peut bien se cacher derrière cette «  red room  » appelée  La Saignée,  diffusant des meurtres à la perversité absolue ? Le jeune homme se lance corps et âme dans cette nouvelle croisade  : découvrir l’identité du coupable derrière le masque du bourreau, et l’arrêter. Coûte que coûte.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Cédric Sire et que le pitch du présent roman attisait particulièrement ma curiosité.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Pour son nouveau roman, Cédric Sire va fouiner dans les entrailles du Dark Net, pour y remonter ce qu’il peut y avoir de plus glauque puisqu’il s’agit d’une « red room », un site via lequel les utilisateurs – contre une généreuse contribution – peuvent assister en livestream à une séance de torture suivie d’une mise à mort de la victime.

Ces fameuses « red rooms » font un peu office de légende urbaine du Dark Net, tout le monde en a entendu parler, mais personne n’en a jamais vu. À se demander si elles existent vraiment ou si ce n’est qu’un mythe 2.0 (ce qui, soit dit en passant, ne serait pas plus mal… et surtout beaucoup plus rassurant).

L’intrigue se déroule selon deux arcs narratifs. Du côté on suit le parcours d’Estel Rochand, ex-flic virée suite à une bavure, elle s’est rabattue sur la sécurité. Après une mission qui tourne mal, elle démissionne malgré les menaces de son employeur. Alors qu’elle désespérait de trouver un nouveau job, un écrivain à succès et à la réputation sulfureuse, lui propose de l’embaucher comme garde du corps.

De l’autre côté Quentin Falconnier, un lieutenant de police spécialisé dans la traque des cybercriminels, se trouve confronté à ce qui semble être une véritable « red room » située en France. Il va tout mettre en œuvre pour neutraliser le site et identifier le bourreau. Une femme qui semble prendre un réel plaisir à exécuter les ordres des utilisateurs connectés.

Le fil rouge semble s’imposer comme une évidence… un peu trop évidente justement. Au fil des chapitres les indices s’accumulent en ce sens, mais j’ai refusé d’y croire. Refusé de croire que Cédric Sire aurait pu se laisser aller à une telle évidence, ce serait indigne de l’auteur qui a imaginé les personnages d’Eva Svarta et Alexandre Vauvert.

Estel et Quentin, deux personnages aux personnalités bien marquées, mais qui doivent aussi composer avec leurs propres démons… une cohabitation pas toujours évidente. Si ce sont eux qui portent l’intrigue, les personnages secondaires ne se contenteront pas de meubler le récit, loin s’en faut ! Les rôles des uns et des autres se préciseront au fil des chapitres, donnant parfois lieu à un total revirement de situation.

Une intrigue boostée à l’adrénaline qui ne laissera que peu d’occasions au lecteur de reprendre son souffle. Une intrigue à ne pas mettre entre toutes les mains, le ton est donné d’entrée de jeu dès la scène d’ouverture… âmes sensibles s’abstenir !

La violence et les effusions de sang ne sont pas gratuites, elles sont mises au service de l’intrigue. Si le rythme imposé est des plus soutenu, ça n’empêche pas le récit d’être hyper documenté afin de le rendre parfaitement crédible… tout en restant accessible aux profanes. Bref, une intrigue totalement maîtrisée qui mettra vos nerfs à rude épreuve.

L’écriture de Cédric Sire nous plonge en totale immersion au cœur de l’intrigue, un style direct qui privilégie le rythme. Exactement ce qu’il faut pour faire de ce roman un thriller aussi captivant qu’addictif.

 MON VERDICT

Coup de poing

[BOUQUINS] Armelle Carbonel – L’Empereur Blanc

AU MENU DU JOUR


Titre : L’Empereur Blanc
Auteur : Armelle Carbonel
Éditeur : Fayard / Mazarine
Parution : 2021
Origine : France
414 pages

De quoi ça cause ?

1965, Arkansas. Bill Ellison, un jeune auteur noir et ardent défenseur des droits civiques, est assassiné par le Ku Klux Klan alors qu’il s’était réfugié dans Crescent House, une maison abandonnée de sinistre réputation. En revanche personne ne connait les circonstances exactes de la mort de Myra Ellison, l’épouse de Bill.

De nos jours. Cinq auteurs organisent une retraite littéraire à Crescent House. Non seulement l’un manque inexplicablement à l’appel mais rapidement des événements de plus en plus inquiétants s’enchaînent.

Dans le même temps, dans la ville voisine de Shannon Hills, une famille entière est sauvagement assassinée.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Armelle Carbonel. Ses romans Criminal Loft et Majestic Murder m’avaient fait forte impression. Son précédent roman, Sinestra, ayant été publié chez Ring, un éditeur qui refuse le numérique, je n’ai pas jugé utile de le lire. Bien content de la retrouver dans un circuit éditorial qui respecte tous les lecteurs sans aucune discrimination.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Fayard et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Autant annoncer la couleur d’entrée de jeu, pour son nouveau roman, Armelle Carbonel nous mitonne un thriller psychologique qui va soumettre vos neurones et vos nerfs à rude épreuve. Plus d’une fois vous vous demanderez s’il n’y aurait pas un soupçon de fantastique dans l’affaire, afin d’expliquer une situation bien tordue.

Le roman est divisé en deux parties. La première relate le séjour des auteurs à Crescent House et se déroule quasiment à huis-clos, c’est aussi l’occasion de découvrir l’histoire de Bill Ellison. Ça envoie déjà du lourd mais ce n’est qu’une mise en bouche avant la seconde partie qui va rapidement se révéler encore plus complexe et sombre.

J’avoue sans aucun remord avoir un peu de mal à entrer dans l’histoire qui paraissait un peu trop convenue… mais c’était sans compter sur le talent (et le sadisme) d’Armelle Carbonel ! Quand les choses commencent à se décanter (et ça arrive assez vite, je vous rassure) on est littéralement happé par l’intrigue, impossible de lâcher le morceau une fois que l’on a commencé à rogner l’os qu’elle nous tend.

Pour qu’un thriller psychologique fonctionne de manière optimale il faut des personnages à la hauteur. Là encore l’auteure ne laisse rien au hasard. À commencer par son quinté d’auteurs aux personnalités vachement prononcées, du coup cinq caractères aussi trempés enfermés ensemble ça fait des étincelles… au risque de foutre le feu aux poudres. On retrouve les mêmes personnalités fortes et affirmées avec l’enquêteur John Dudley et le docteur Amber Duke (qui sont les piliers de la seconde partie du roman). Mais aucun personnage n’est laissé sur le bas-côté, tous bénéficient d’un traitement approfondi qui les positionne là où ils doivent être dans le déroulé de l’intrigue. Sans oublier le plus complexe d’entre tous, le fameux Empereur blanc, mais ça ce sera à vous de le découvrir !

Comme indiqué en ouverture de la présente chronique, l’intrigue va mettre vos nerfs à rude épreuve, si j’avais deviné certains points mineurs force est toutefois de reconnaître que Armelle Carbonel m’a baladé dans son roman ; je n’ai rien vu venir et j’étais loin d’imaginer un truc aussi chiadé.

Encore un bouquin que j’ai dévoré sans modération. Armelle Carbonel confirme brillamment qu’elle fait désormais partie des auteurs qui compte dans le monde du thriller français (et francophone… et plus si affinités). Je n’avais aucun doute sur la question mais c’est toujours un plaisir de découvrir des titres de cette qualité qui viennent confirmer mon ressenti.

MON VERDICT

[BOUQUINS] JP Delaney – La Femme Parfaite

AU MENU DU JOUR

JP Delaney - La femme parfaite

Titre : La Femme Parfaite
Auteur : JP Delaney
Éditeur : Fayard
Parution : 2020
Origine : États-Unis
464 pages

De quoi ça cause ?

Lorsque Abbie se réveille dans une chambre hôpital, Tim Scott, un des acteurs majeurs de l’Intelligence Artificielle, lui apprend qu’elle n’est pas la « vraie » Abbie mais un robot créé à l’image de la jeune femme disparue cinq ans plus tôt. Une IA ultra perfectionnée, dotée de capacités d’apprentissage et d’empathie.

À en croire Tim, son époux, ils formaient un couple idéal et elle était une épouse et une mère parfaite. Et pourtant, plus Abbie se renseigne sur sa relation avec Tim et sur « sa » disparition, plus elle s’interroge et doute…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que j’avais beaucoup aimé les deux précédents romans de JP Delaney, La Fille D’Avant et Mensonge.

Contrairement à son précédent roman, Mensonge, qui divisait clairement les lecteurs, les réactions allant de « j’ai adoré » à « j’ai détesté » ; celui-ci suscite des réactions globalement positives sur Babelio.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard / Mazarine et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Tout laisse à penser que JP Delaney est particulièrement friand de nouvelles technologies, après la maison hyper connectée de La Fille D’Avant c’est cette fois une IA empathique qui est au cœur du présent roman. Une IA qui, à ce jour, reste du domaine de la fiction mais pour combien de temps encore ? Quand on voit la vitesse à laquelle évoluent les recherches autour de la question on peut légitimement supposer que la réalité va bientôt rattraper la fiction.

Si l’essentiel du bouquin est consacré à l’intrigue présente, construite autour du « personnage » d’Abbie version IA, quelques chapitres (bénéficiant d’une numérotation distincte) retracent le parcours d’Abbie (version humaine) depuis son arrivée dans les locaux de Scott Robotics (la société fondée par Tim) jusqu’à sa disparition.

Mais c’est surtout dans sa narration que le roman se distingue. Jusqu’à ce que l’auteur ne lève le voile sur le sujet, on ne sait pas avec certitude qui est le narrateur ou la narratrice. L’emploi de la seconde personne du singulier sème en effet le doute. S’agit-il d’Abbie qui, par sa nature non-humaine, porte un regard distant sur elle-même ou il y aurait-il une autre explication à ce choix ?

Si la forme est maîtrisée, le fond l’est tout autant. Les personnages sont particulièrement bien travaillés. On ressent rapidement une réelle empathie pour cette IA qui cherche à comprendre ce qui est arrivé à son homologue humaine ; paradoxalement c’est sans doute le personnage qui dégage le plus d’humanité dans ce roman.

Il faut dire que le personnage de Tim Scott apparaît d’entrée de jeu comme imbuvable, certes c’est un génie dans son domaine (l’Intelligence Artificielle) mais humainement parlant c’est une merde finie ! Un égo démesuré combiné à un manque total d’empathie… Au fil des pages mon aversion pour le bonhomme ne s’est jamais démentie.

Le troisième personnage central de ce roman est Danny, le fils de Tim et Abbie. Souffrant du syndrome de Heller, une forme aussi sévère que rare d’autisme apparaissant entre 2 et 3 ans chez l’enfant et se caractérisant par une brusque détérioration du langage et du comportement. La situation de Danny va rapidement s’imposer comme l’un des éléments phares dans le déroulé de l’intrigue.

Un thème qui tient particulièrement à cœur à JP Delaney, étant lui-même parent d’un enfant autiste. De fait le roman est très bien renseigné sur cette forme méconnue d’autisme et les façons de gérer la situation. Le message passe sans jamais prendre le dessus sur l’intrigue elle-même.

La nature même d’Abbie 2.0 pose inévitablement des questions d’éthique, là encore l’auteur aborde le sujet avec beaucoup de savoir-faire. Ce sont en effet des questions que les développeurs (et même, le cas échéant, le législateur) devront se poser si un jour des formes aussi avancées d’IA devaient voir le jour.

D’autres thèmes sont abordés au fil des pages, mais je vous laisse le plaisir de les découvrir par vous-même…

Avec La Femme Parfaite, JP Delaney signe son roman le plus abouti. Une lecture à la fois addictive, divertissante et intelligente ; le piège se referme dès les premières pages sur le lecteur, pour ne se rouvrir qu’une fois le bouquin terminé !

Quant à moi, il me tarde de découvrir le quatrième roman signé JP Delaney dont le pitch est des plus alléchant ! Qui sait, peut-être que pour patienter un peu je me lancerai dans la découverte de thrillers signés sous un autre nom de plume (Jonathan Holt ou Tony Strong). Les titres publiés sous sa véritable identité (Anthony Capella) ne m’inspirent pas outre mesure… en plus de ne pas être disponibles dans la langue de Molière.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Adrian McKinty – La Chaîne

AU MENU DU JOUR

A. McKinty - La Chaîne

Titre : La Chaîne
Auteur : Adrian McKinty
Éditeur : Fayard
Parution : 2020
Origine : Irlande (2019)
400 pages

De quoi ça cause ?

Le monde de Rachel s’écroule quand elle apprend que sa fille a été enlevée. Pour la récupérer non seulement elle va devoir payer une rançon, mais aussi à son tour kidnapper un enfant et ainsi perpétuer la Chaîne…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est juste impossible de résister à un pitch pareil.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Fayard et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Je suppose que l’un des pires cauchemars que puisse vivre un parent est le kidnapping de son enfant. Présentement Adrian McKinty repousse les limites du cauchemar en obligeant le parent déjà fortement ébranlé à devenir lui-même un kidnappeur et ainsi à faire vivre la même épreuve à un autre parent. Difficile d’imaginer un scénario plus pervers et plus sadique.

La première partie du roman est une totale réussite. On y suit le parcours de Rachel, contrainte d’enlever un enfant si elle veut sauver sa propre fille. On vit intensément le cauchemar de Rachel et tout ce qui lui passe par la tête au fur et à mesure qu’elle met son plan en application. L’auteur dose avec justesse les phases d’action et celles de réflexion.

Malheureusement l’implacable mécanique, que l’on pensait pourtant bien rodée, se grippe dans la seconde partie du récit. Vouloir anéantir la Chaîne, après ce qu’elle leur a fait subir, est en soi légitime, mais on a parfois l’impression que Adrian McKinty veut en finir au plus vite, quitte à brûler des étapes. Les choses s’enchaînent trop rapidement, avec trop de facilité et de façon trop prévisible. Bref, le capital crédibilité de l’intrigue fond comme neige au soleil.

Il serait sévère et injuste pour le coup de considérer cette seconde partie comme bâclée, elle n’est simplement pas à l a hauteur des promesses que nous faisait miroiter une première partie tout simplement géniale. Du coup il est difficile de masquer sa déception, un peu comme si on te promet du caviar, mais qu’on te sert des œufs de lump premier prix.

Impossible de ne pas s’attacher au personnage de Rachel, divorcée depuis peu, elle reste toutefois en très bon terme avec son ex-mari. Mauvais karma, alors même que sa fille est enlevée, elle apprend que son cancer récidive et va de nouveau devoir subir les affres de la chimiothérapie.

Dans l’ensemble l’auteur apporte beaucoup de soins à ses personnages, mention spéciale aux jumeaux maléfiques qui vous feront froid dans le dos plus d’une fois.

Son intrigue est aussi pour l’auteur l’occasion de pointer du doigt l’importance que les réseaux sociaux a prise dans le quotidien de chacun (et pas uniquement des ados), et comment ils peuvent se retourner contre leurs utilisateurs.

George Orwell se trompait. Dans le futur, ce ne sera pas l’État qui aura l’œil sur chaque individu avec de gros systèmes de surveillance. Les gens se chargeront de ça eux-mêmes. Ils mâcheront le travail à l’État en mettant sans cesse en ligne les lieux où ils se trouvent, leurs centres d’intérêt, leurs goûts culinaires, leurs restaurants préférés, leurs idées politiques et leurs loisirs. Tout ça sur Facebook, Twitter, Instagram et les autres réseaux sociaux. Nous sommes notre propre police politique.

Je referme ce bouquin globalement satisfait par cette découverte, et ce malgré l’impression tenace que l’intrigue aurait pu être encore plus aboutie. Là où ça aurait pu être un excellent thriller, nous n’avons « qu’un » très bon thriller.

Avant de lire La Chaîne je n’avais jamais entendu parler d’Adrian McKinty, le bonhomme n’en est pourtant pas à son coup d’essai et à déjà quelques romans policiers à son actif. Il va falloir que je me penche plus attentivement sur la question…

MON VERDICT
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[BOUQUINS] Maxime Girardeau – Persona

AU MENU DU JOUR

M. Girardeau - Persona

Titre : Persona
Auteur : Maxime Girardeau
Éditeur : Fayard (Mazarine)
Parution : 2020
Origine : France
432 pages

De quoi ça cause ?

Franck Somerset, commissaire à la Crim’ du 36, est appelé sur une scène crime peu ordinaire. En effet, la victime est vivante mais elle a été torturée et mutilée avec un acharnement aussi sadique qu’expert.

En plus de son équipe habituelle, Franck va pouvoir compter sur le renfort d’Elga Salustri, cadre supérieure chez Google et particulièrement au fait de tout ce qui tourne autour du milieu d’où vient la victime…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que le pitch me semblait des plus prometteurs. Une impression renforcée par la campagne de promotion organisée par Fayard qui nous promettait un « Seven à Paris »… c’est pas rien comme référence.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

À mon sens le film Seven, réalisé par David Fincher en 1995 est l’un des thrillers les plus couillus de ces dernières années, à ce titre il reste (et restera) dans les annales du genre. Alors forcément quand l’éditeur fait la promotion de Persona en le qualifiant de « Seven à Paris », ça ne peut que titiller ma curiosité… mais attention à ne pas se planter, on s’attend à ce que l’élève (Maxime Girardeau) soit à la hauteur du maître !

L’intrigue du roman est tellement ancrée autour des GAFAM (Google – Amazon – Facebook – Apple – Microsoft) – ces cinq géants de l’informatique qui collent des ulcères à notre Manu élyséen et brouille ses relations avec son homologue yankee, Donald – que la promo aurait presque pu se permettre d’écrire Seven 2.0.

Il n’y a pas que la brutalité du mode opératoire et les mises en scène orchestrées par leurs auteurs qui permettent de rapprocher le roman de Maxime Girardeau du film de David Fincher (en ce sens Maxime Girardeau monte d’un cran dans la perversité puisque son John Doe laisse ses victimes en vie… dans un corps hors d’usage). En effet Franck Somerset porte le même nom que l’inspecteur incarné par Morgan Freeman dans le film, et plus avant dans l’intrigue nous croiserons un certain Tom Mills, agent de la DEA, Mills étant aussi le patronyme du personnage incarné par Brad Pitt dans Seven.

Ah oui, j’oubliais un détail, et non des moindres, Persona est le premier roman de Maxime Girardeau. D’une part il prouve avec un évident brio qu’il est encore possible de surprendre (à défaut d’innover) dans un genre où l’on pourrait être tenté de penser (à tort, fort heureusement pour nous) que tout a déjà été dit. D’autre part il confirme que le thriller français a encore de beaux jours devant lui, et n’a pas à rougir de la concurrence anglophone. Pour un coup d’essai, on peut faire pire…

Si l’auteur ne fait rien pour rendre ses personnages attachants, j’ai tout de même eu un faible pour Franck Somerset, un flic à l’ancienne, un tantinet désabusé par le monde 2.0 qui l’entoure. Elga Salustri quant à elle n’est pas particulièrement antipathique mais elle est tellement imprégnée de cet univers propre aux GAFAM, qu’elle semble parfois vivre dans un autre monde, un monde qui tend parfois à privilégier le virtuel à l’humain.

Par contre Maxime Girardeau sait y faire pour que le personnage de Kahl Doe (faut-il y voir un clin d’œil au John Doe de Seven ?) soit en tout point méprisable. Un suspect idéal ? J’ai immédiatement pensé que la ficelle était trop flagrante (oui je sais, je pléonasme). Mais je peux me planter… j’dis ça, j’dis rien.

Non seulement l’auteur garde un contrôle absolu sur ses personnages et son intrigue, mais il se distingue aussi par sa plume qui ne manque ni de piquant ni de cynisme ; il porte un regard sans concession sur le monde d’aujourd’hui et sur ses dérives (avérées ou potentielles).

Le fait que l’auteur soit particulièrement bien informé quant au fonctionnement de ces GAFAM ne doit rien au hasard, il a en effet une longue expérience professionnelle marketing en leur sein.

Je vous laisse découvrir l’origine du titre en lisant le bouquin, à moins que vous ne connaissiez déjà ce terme qui fait à la fois référence à la psychologie (Jung) et aux stratégies marketing. Un indice : l’accroche « Je sais qui tu es » qui figure sur la couv’ du bouquin vous tend une sacrée perche. Mais non, pas la poiscaille ! Vous ne pensez décidément qu’à bouffer et à bai… (Saint Valentin oblige, j’ai pas pu m’en empêcher… oui je sais, je suis un indécrottable romantique).

Vous l’aurez compris, j’ai été totalement emballé par ce bouquin (même s’il n’est pas exempt de défauts mineurs), la référence à Seven était audacieuse, mais force est de reconnaître que l’élève fait honneur à son maître. Du coup je n’hésiterai pas, et ce sera mon dernier mot (Jean-Pierre, Camille… et les autres), à dire que ce roman est foutrement couillu !

Un premier roman prometteur (bin oui j’ai menti, ce n’était pas mon dernier mot) qui place la barre haute pour les suivants. Cerise sur le gâteau, Maxime Girardeau n’exclut pas de possibles retrouvailles dans un prochain roman…

MON VERDICT
Coup de poing

En aparté

J’espère que la version numérique mise à disposition sur Net Galley n’est pas la version finalisée du roman. Outre certains problèmes mineurs de codage (insécables notamment), il y a quelques coquilles résiduelles dont beaucoup de mots coupés qui figurent en l’état dans le texte (be-soin au lieu de besoin par exemple).

Et deux exemples plus dérangeants, ci-dessous :

« Une odeur de moisissure le submergea. Elle lui piquait les narines. Elle se répandait partout. Elle grignotait les plaintes, boulottait les plafonds, s’infiltrait sous les papiers peints jaunis. »
M’est d’avis que la moisissure est bien plus attirée par les plinthes que par les plaintes.

« Sa tête commença par cartographier les dimensions de la pièce rectangulaire : une trentaine de mètres carrés, avec 5 mètres de large et 46 de profondeur environ. »
Commençons par un petit rappel mathématique (géométrie plus exactement) concernant le calcul de la surface d’un rectangle : S(urface) = L(ongueur) x l(argeur).
Donc une pièce de 46 mètres sur 5 correspond à une surface de 230 (46 x 5) m²… Ce qui me semble foutrement grand pour un espace censé être confiné.
Du coup on va considérer que ladite pièce mesure 30 m² et que sa largeur est bien de 5 mètres ; on arrive donc à une profondeur (longueur) de 6 mètres (30 = L x 5 d’où L = 30 / 5 = 6).

[BOUQUINS] JP Delaney – Mensonge

AU MENU DU JOUR

JP Delaney - Mensonge
Titre : Mensonge
Auteur : JP Delaney
Éditeur : Fayard
Parution : 2019
Origine : Etats-Unis (2018)
432 pages

De quoi ça cause ?

Extrait de la quatrième de couv’

Étudiante en art dramatique à New York, Claire finance ses cours de théâtre en jouant un rôle peu conventionnel : elle flirte, pour le compte d’un cabinet d’avocats spécialisé dans les divorces, avec des hommes mariés suspectés d’infidélité.

Sa couverture fonctionne parfaitement, jusqu’à ce que l’une de ses « proies » soit soupçonnée de meurtre… La police exige alors de Claire qu’elle utilise ses talents d’actrice pour pousser Patrick Fogler à confesser son crime.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que j’avais apprécié le précédent roman de JP Delaney, La Fille D’Avant, tout en lui reprochant un évident manque de profondeur au niveau des personnages. J’espérais donc une intrigue aussi bien construite et maîtrisée avec des personnages nettement plus étoffés.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard et Net Galley pour leur confiance renouvelée qui m’a permis de découvrir ce roman en avant-première (sortie le 18 septembre).

Dans ses remerciements l’auteur nous apprend que ce roman est la réécriture complète d’un de ses précédents bouquins publié dix-sept ans plus tôt. Il ne m’a pas fallu longtemps pour identifier le titre en question (merci Google), publié en français sous le titre L’Appât et signé Tony Strong (Anthony Capella de son vrai nom).

Si le précédent roman de JP Delaney (le premier signé sous ce pseudonyme), La Fille D’Avant, m’avait séduit par la qualité de son intrigue, j’étais nettement plus mitigé quant à la profondeur des personnages qui étaient soit creux, soit trop stéréotypés. Autant dire que j’attendais beaucoup de ce second roman, ni plus ni moins qu’un sans-faute aussi bien au niveau de l’intrigue que des personnages. Et bien entendu j’espérais aussi quelque chose de complètement différent du précédent roman.

Je n’aurai jamais imaginé que l’on puisse construire l’intrigue d’un thriller autour de Charles Baudelaire et de son recueil Les Fleurs Du Mal ; un challenge d’autant plus grand quand l’auteur est britannique. Et bin si ! Et ça fonctionne même rudement bien. Donc niveau surprise et originalité le deal est rempli.

Si certains aspects de l’intrigue s’avèrent parfois prévisibles, nul doute que bien des retournements de situation vous laisseront sur le cul. Je reconnais volontiers m’être laissé berner plus d’une fois… et j’ai adoré ça. Rien à redire l’auteur mène sa barque d’un main de maître et je peux vous assurer que la traversée sera tout sauf un long fleuve tranquille !

JP Delaney nous offre un thriller psychologique parfaitement maîtrisé et je ne vous apprendrais pas que pour que la sauce prenne dans ce genre de roman, il faut apporter un soin tout particulier aux personnages.

L’accroche en couverture annonce la couleur avec le très prometteur : « Aime-moi. Confie-toi. Mais ne me crois pas. » Et je vous garantis que ce n’est pas une simple accroche marketing. Au fil des pages nous n’aurons de cesse de comprendre qui manipule qui, qui dit la vérité, qui ment… Qu’il s’agisse de Claire (l’apprenti comédienne), de Patrick (le présumé coupable qu’elle doit démasquer) ou de la police (tout particulièrement via le personnage de Kathryn Latham, profiler de son état).

Impossible de lâcher le bouquin une fois que vous aurez mordu à l’hameçon. Et tout est mis en oeuvre pour rendre l’appât irrésistible dès les premières pages. Je l’ai dévoré en deux jours, les obligations professionnelles imposant une pause forcée ; sans ça nul doute que je l’aurai lu d’une traite.

J’aimerai tempérer mon enthousiasme en soulevant un bémol (même minime) mais rien ne me vient à l’esprit après avoir refermé ce roman. Si je voulais pinailler, limite user de mauvaise foi, je pourrai toujours dire que ce bouquin ne révolutionnera pas le genre mais force est de reconnaître que les révolutions sont rares dans un genre si souvent décliné à toutes les sauces possibles et imaginables.

Ce sera donc un coup de cœur amplement mérité.

Un troisième titre signé JP Delaney est d’ores et déjà disponible en VO et un quatrième est annoncé pour 2020. Je frétille déjà d’impatience dans l’attente de leur parution en français ; en espérant retrouver la même qualité, voire plus encore.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Anders Roslund & Börge Hellström – 3 Secondes

AU MENU DU JOUR

Roslund & Hellström - 3 Secondes
Titre : 3 Secondes
Auteurs : Ander Roslund & Börge Hellström
Éditeur : Mazarine / Fayard
Parution : 2019
Origine : Suède (2009)
592 pages

De quoi ça cause ?

Piet Hoffmann mène une double vie. Le bon mari et bon père de famille est aussi un infiltré au sein d’une puissante organisation criminelle polonaise qui souhaite étendre son activité en Suède en prenant le contrôle du trafic de drogue en milieu pénitentiaire.

Lorsqu’une opération de routine se solde par une exécution dans un appartement au cœur de Stocklom, le détective Ewert Grens est bien déterminé à résoudre cette affaire. Au risque de faire voler en éclat la couverture de Piet Hoffmann alors qu’il prépare une ultime opération potentiellement décisive dans la lutte contre le crime organisé…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que le duo Roslung et Hellström est souvent présenté comme la relève de Stieg Larsson, l’auteur de la trilogie Millénium. Qui plus est il semblerait que cette trilogie, 3 Secondes, 3 Minutes , 3 Heures ait connu un énorme succès en Scandinavie et au-delà.

Les éditions Fayard et Net Galley ayant donné une suite favorable à ma demande, je vais pouvoir me faire ma propre idée sur la chose…

Ma Chronique

Je remercie les éditions Fayard et la plate-forme Net Galley qui ont répondu favorablement à ma sollicitation.

Et on va commencer par crever l’abcès en pointant tout de suite le plus gros défaut de ce roman, à savoir sa quatrième de couverture qui est beaucoup trop bavarde. En quelques lignes on nous dévoile plus de la moitié du bouquin ! Un tel amateurisme (sans parler du manque de respect pour les lecteurs) est indigne d’un éditeur comme Fayard.

C’est d’autant plus regrettable que, à l’instar de Stieg Larsson avec son premier tome de la trilogie Millénium, les auteurs prennent leur temps pour mettre en place le contexte et ses enjeux. Et vlan, tout l’effet recherché est balayé en l’espace de quelques lignes mal pensées (pour rester poli).

Anders Roslund et Börge Hellström apportent effectivement beaucoup de soin à la mise en place de leur intrigue, une lenteur assumée qui aurait pu nuire au plaisir du lecteur, mais il n’en est rien ; au fil des chapitres on a pleinement conscience de l’importance des enjeux et donc de la nécessité de déplacer ses pions avec prudence, sans précipitation.

La montée en puissance se fait progressivement jusqu’au changement radical de rythme à partir du moment où Piet Hoffmann est incarcéré (incarcération qui donne le coup d’envoi de l’opération qu’il a monté avec son agent de liaison) ; il faut dire que la mécanique, d’apparence parfaitement huilée, va rapidement s’enrayer et échapper à tout contrôle. Et Piet Hoffmann se retrouver seul contre tous…

Le lecteur, qui jusqu’alors parcourait tranquillement ce roman, page après page, se retrouve totalement happé par ce changement de rythme, partagé entre l’envie de tourner frénétiquement les pages afin de savoir comment tout ça va se terminer, et celle de profiter pleinement de chaque passage, faisant fi, tant bien que mal, des brusques montées d’adrénaline qui ne manqueront pas de l’assaillir !

Il leur était déjà arrivé de griller des informateurs. Nous ne savons pas qui il est. De laisser tomber des infiltrés, lorsque les questions commençaient à pleuvoir. On ne travaille pas avec des criminels. De regarder ailleurs quand la chasse était lancée et que l’organisation criminelle infiltrée réglait les choses à sa manière.
Mais jamais dans une prison, jamais dans un lieu clos et sans issue.

Ce premier opus a été publié en 2009 en Suède, et, fort de son succès, traduit en plusieurs langues. Il aura quand même fallu attendre 10 ans pour que le public francophone puisse enfin bénéficier d’une traduction. C’est long, mais franchement ça valait le coup d’attendre !

D’un autre côté cette attente ne présente pas que des inconvénients, les deux prochains opus, 3 Minutes et 3 Heures sont en effet respectivement annoncés pour mars et mai 2019. Le public suédois aura dû attendre 2016 (Tre Minuter), puis 2018 (Tre Timmar écrit sans Börge Hellström, décédé en 2017), pour avoir le fin mot de l’histoire…

J’ai découvert le duo Roslund & Hellström avec ce roman, mais ils sont loin d’être des novices du genre ; ils ont notamment à leur actif quatre romans faisant intervenir Ewert Grens et son équipe. Si leur enquêteur fétiche n’est pas le personnage central de 3 Secondes, il n’en reste pas moins un intervenant majeur (parfois presque à l’insu de son plein gré) dans le déroulé de l’intrigue.

Quel étrange spécimen ce Ewert Grens… Certes il doit composer avec les fantômes de son passé, mais c’est un peu facile de se planquer derrière eux pour justifier ses brusques poussées de colère et un comportement qui flirte parfois avec l’irrationnel. Le gars n’a pas que des défauts, c’est notamment un enquêteur tenace qui ne lâche pas le morceau avant d’être certain de n’avoir négligé aucune piste (et dans la présente enquête, il a largement de quoi se triturer les neurones). Il n’en reste pas moins que je n’ai pas du tout accroché au personnage (sauf peut-être en ce qui concerne son côté asocial, allez savoir pourquoi).

Ce n’est toutefois le plus méprisable des individus que vous croiserez dans ce roman. Que les criminels soient des ordures n’étonnera personne, après tout ils sont payés pour ça, difficile de leur reprocher de faire leur job dans ces conditions. Les pires spécimens en l’occurrence sont plutôt les ronds de cuir qui retournent leur veste selon le sens du vent, n’hésitant pas à sacrifier les autres du moment que cela serve ou protège leurs intérêts.

Heureusement en face de tout ce beau monde Piet Hoffmann ne manque pas de ressources quand il s’agit d’assurer ses arrières ou d’évoluer en terrain hostile. Et Dieu sait que les auteurs ne manqueront pas de lui en faire voir de toutes les couleurs.

Malgré un démarrage un peu poussif, j’ai été plus que convaincu par ce bouquin. Un thriller aussi haletant que captivant, mené de mains de maître. Une mise en bouche plus que prometteuse, il me tarde découvrir la suite…

Fort du succès du roman, une adaptation pour le cinéma devrait voir le jour en août 2019 ; la chose s’appellera The Informer et sera réalisée par Andrea Di Stefano. C’est Joel Kinnaman qui interprétera le rôle de Piet Hoffmann… rebaptisé pour l’occasion Pete Koslow, américanisation du scénario oblige. Pas sûr que ce soit du meilleur augure quand on voit ce que Hollywood a fait de Millénium.

MON VERDICT