[BOUQUINS] Collectif, à l’initiative d’Yvan Fauth – Écouter Le Noir

AU MENU DU JOUR


Titre : Écouter Le Noir
Auteur : Collectif
Éditeur : Belfond
Parution : 2019
Origine : France
288 pages

De quoi ça cause ?

13 auteurs réunis autour du thème de l’audition.
11 nouvelles sur fond noir.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que cet ouvrage est une initiative d’Yvan, ami (même si nous ne nous « connaissons » que par le biais du net) et blogueur pour qui j’ai énormément d’estime.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Belfond et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Je ne suis pas forcément un grand fan de la nouvelle même si je reconnais volontiers que, pour un auteur, l’exercice est délicat, voire périlleux. Le temps de quelques pages, il faut donner vie à des personnages et mener à terme une intrigue ; aller à l’essentiel pour toucher le lecteur au cœur et aux tripes, en évitant les raccourcis trop faciles qui laisseraient une impression de travail inachevé (ou pire, bâclé).

Les auteurs ayant répondu à l’invitation d’Yvan comptent parmi la fine fleur de la littérature noire francophone (mais pas que…), le nec plus ultra du genre. À travers ce recueil ils confirment leur immense talent, certains se dévoileront même sous un jour totalement inattendu.

C’est Barbara Abel et Karine Giebel qui ouvrent le bal, avec une nouvelle à quatre mains qui donne le ton et m’a laissé sans voix (à défaut de me laisser sans ouïe). Suivront, par ordre d’apparition, Jérôme Camut et Nathalie Hug, Sonja Delzongle, François-Xavier Dillard, R.J. Ellory, Nicolas Lebel, Sophie Loubière, Maud Mayeras, Romain Puértolas, Laurent Scalese et Cédric Sire.

Si aucun des auteurs présents ne m’est inconnu, il y en a certains dont je n’ai pas encore eu l’occasion d’explorer l’univers (Barbara Abel, Nicolas Lebel, Sophie Loubière et Laurent Scalese) ; découvrir leurs nouvelles me donne un aperçu de leur immense talent et ne fait qu’attiser davantage ma curiosité eu égard à leur travail…

Je ne vais pas me lancer dans un avis détaillé pour chacune des nouvelles ici présentes, d’une part afin de laisser intact le plaisir de la découverte, mais aussi parce que j’estime que cette approche ne ferait pas pour autant avancer le schmilblick (et un peu aussi par pure fainéantise).

Tour à tour les auteurs explorent le thème de l’audition sous toutes ses facettes (qu’il s’agisse de surdité, de bruits en tout genre – parfois amis, parfois ennemis – ou encore de musique…). De même les auteurs jouent sur tout le spectre du noir, du classique sur fond policier / thriller, au fantastique en passant même par l’humour.

Comme souvent dans ce genre de recueil, il y a les nouvelles qui font mouche et celles pour lesquelles on a l’impression d’avoir raté le coche sans vraiment pouvoir s’expliquer le pourquoi du comment de la chose. Il n’en reste pas moins que globalement la qualité est au rendez-vous (certaines flirtent même avec l’excellence) ; pas vraiment une surprise vu le panel des auteurs ayant accepté de se prêter au jeu.

Afin d’illustrer mon propos ci-dessus, je terminerai cette chronique par l’attribution d’une note (sur 5) à chacune de ces nouvelles ; comme d’hab cette notation n’engage que moi :

B. Abel et K. Giebel – Deaf : 5
J. Camut et N. Hug – Archéomnésis : 2.5
S. Delzongle – Tous les chemins mènent au hum : 3.5
F.X. Dillard – Ils écouteront jusqu’à la fin : 5
R.J. Ellory – Bloodline : 4.5
N. Lebel – Sacré chantier : 3.5
S. Loubière – Zones de fracture : 4
M. Mayeras : Echos : 4
R. Puértolas – Fête foraine : 4
L. Scalese – Quand vient le silence : 5
C. Sire – Le diable m’a dit : 5

Ce qui nous fait une honorable moyenne de 4.2 sur 5 que j’arrondis volontiers à 4.5 pour saluer l’initiative de ce recueil.

Mon cher Yvan tu peux considérer que le challenge a été remporté haut la main. Tu peux remettre ça quand tu veux !

MON VERDICT

[BOUQUINS] Romain Puértolas – Les Nouvelles Aventures Du Fakir Au Pays D’IKEA

AU MENU DU JOUR

R. Puértolas - Les Nouvelles Aventures Du Fakir...

Titre : Les Nouvelles Aventures Du Fakir au Pays D’Ikea
Auteur : Romain Puértolas
Éditeur : Le Dilettante
Parution : 2018
Origine : France
283 pages

De quoi ça cause ?

Aja, le modeste fakir devenu riche grâce au récit de son périple hors norme, jouit pleinement des joies que lui offre sa fortune et de sa vie en couple. Jusqu’au jour où il réalise qu’il a perdu son âme d’aventurier, vendue au nom de sa petite vie pépère.

Pour y remédier, il décide de se rendre en Suède afin de rencontrer Monsieur IKEA et lui demander de lui fabriquer un lit à clou, modèle KISIFROTSIPIK, dont la fabrication a été arrêtée, le produit ayant été dangereux pour le consommateur (la bonne blague !).

En route vers un nouveau périple riche en rebondissements…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Après la lecture (aussi éprouvante que réjouissante) de Maudite !, j’avais besoin d’une bouffée d’oxygène avant d’enchaîner sur un nouveau thriller. Le roman de Romain Puértolas, et ses retrouvailles inattendues avec un fakir que j’avais beaucoup aimé m’a semblé parfaitement indiqué pour décompresser.

La couv’ façon « pull moche de Noël » a fini de me convaincre que c’était exactement ce qu’il me fallait…

Ma chronique

Je ne pensais pas que j’aurais l’occasion de croiser à nouveau le chemin de ce brave Ajatashatru Lavash Patel (Aja pour les intimes… et pour faire simple), fakir de son état qui nous a régalé d’un extraordinaire voyage dans une armoire IKEA. Quelle bonne surprise de le retrouver pour un nouveau périple que l’on peut supposer aussi extraordinaire et divertissant que le précédent.

Si vous n’avez pas aimé le précédent voyage du fakir, je doute fort que celui-ci trouve grâce à vos yeux. A contrario, si, comme moi, vous avez apprécié cette première escapade loufoque (voire burlesque), vous devriez vous régaler en lisant ce second opus. On y retrouve en effet tous les ingrédients qui ont fait le succès du premier.

Le récit multiplie les situations hautement improbables, mais ô combien divertissantes, les jeux de mots parfois foireux, mais toujours poilants et les références pour le moins décalées (qui eut cru que Céline Dion ou Alain Souchon seraient un jour qualifiés de « grands philosophes » ?)… un vrai plaisir pour les zygomatiques ! De même vous y retrouverez certains personnages déjà croisés dans le précédent roman, mais aussi une belle brochette de nouveaux venus qui ne dénotent pas dans le paysage du fakir.

Certes l’effet de surprise est moindre, mais je peux vous assurer toutefois que ce nouveau voyage ne manquera pas de vous étonner. C’est notamment l’occasion de découvrir le dur apprentissage du fakirat (cherchez pas, ça n’existe pas) que le jeune Aja a dû subir sous la tutelle d’un maître dont les méthodes et les agissements sont pour le moins douteux (pour rester poli… et surtout ne pas trop en révéler sur l’histoire).

Sous couvert d’humour Romain Puértolas en profite aussi pour égratigner, sans méchanceté, mais sans condescendance non plus, certains travers de notre société (sans parler des dérives de certains individus). Il le fait subtilement, sans chercher à créer la polémique ; parfois pointer du doigt un détail qui dérange vaut tous les longs discours de politique politicienne. Plutôt que de perdre du temps à maugréer après le bavard qui s’écoute parler, on réfléchit plus sereinement à certaines questions.

Comme à l’accoutumée l’auteur se prête à un humour tout en finesse, pas forcément toujours raffiné, mais jamais vulgaire, et surtout sans langue de bois.

J’ai apprécié ce second voyage en compagnie de ce fakir qui ne manquera jamais de nous surprendre, tout comme j’ai aimé cette plume qui sait nous divertir avec brio et intelligence, mais aussi avec beaucoup d’humanité.

Je terminerai cette chronique en vous laissant méditer sur l’incompréhension d’Aja quand il découvre que IKEA ne fabrique plus son fameux lit de fakir, le produit ayant été jugé dangereux pour le consommateur :

« Le KISIFRØTSIPIK en petit pin suédois, avec des clous en acier inoxydable, hauteur réglable, en trois coloris avait disparu du catalogue de la célèbre marque de meubles en kit scandinave pour la simple et bonne raison qu’il blessait les gens ! C’était aussi stupide que si Smith & Wesson adressait aujourd’hui un communiqué à tous ses clients pour qu’ils rendent leurs armes au prétexte qu’elles pouvaient tuer. »

Ah oui j’oubliais (mode Columbo), ne comptez pas trop sur ce bouquin pour parfaire votre connaissance ou découvrir les cultures hindoues et/ou suédoises ; vous seriez à même de commettre de gros impairs lors d’un prochain voyage dans ces lointaines contrées…

MON VERDICT

La minute du râleur maniaco-obsessionnel…

J’ai trouvé bizarre (pour ne pas dire plus) le découpage du livre numérique, les différentes parties d’un même chapitre faisant l’objet de pages distinctes (chaque partie correspondant à un fichier html constituant l’epub) plutôt que de se suivre, séparées soit par un saut de ligne, soit par un séparateur quelconque.

Je ne sais pas s’il en est de même avec la version papier (j’en doute fort), le fait est que j’ai fini par retravailler la structure du bouquin en séparant les parties d’un même chapitre par une étoile (*) afin de limiter ces sauts de page intempestifs.

Maniaquerie quand tu nous tiens…

[BOUQUINS] Romain Puértolas – La Petite Fille Qui Avait Avalé Une nuage Gros Comme La Tour Eiffel

R. Puertolas : La petite fille qui avait avalé un nuage...Je poursuis mon programme (si on peut appeler ça comme ça étant donné que je n’ai pas vraiment de liste définie à l’avance, ni d’ordre établi) de lecture en alternant entre mon Challenge retrouvailles et le reste de mon Stock à Lire Numérique ; mon objectif premier étant de varier les plaisirs (et donc les genres) autant que faire se peut. Au menu du jour La Petite Fille Qui Avait Avalé Un Nuage Gros Comme La Tour Eiffel de Romain Puértolas.
Providence Dupois a enfin reçu les papiers d’adoption pour Zahera, une petite marocaine hospitalisée depuis toujours pour une mucoviscidose. La nouvelle mère n’a qu’une hâte, s’envoler pour le Maroc afin de rapatrier sa fille. Seulement voilà un volcan islandais a décidé au même moment de cracher un nuage de cendres qui interdit de vol tous les appareils. Rien n’empêchera Providence de rejoindre Zahera, quitte à se rendre là-bas en volant de ses propres « ailes »…
L’écriture de Romain Puértolas produit un effet magique sur les lecteurs (en tout cas sur moi) ; aussi improbables que soient ses récits, on se laisse bercer par la magie des mots, les talents de conteurs, l’authenticité et la sensibilité (à ne pas confondre avec la mièvrerie) de l’auteur. Ce sont des lectures qui font du bien au moral et vous donne le pep’s pour la journée.
Si vous avez été hermétique au voyage du fakir alors passez votre chemin, c’est un modèle de sérieux et de rigueur à côté du périple aérien de Providence ! Pour ma part j’ai lu ce livre comme un conte, ou plutôt une fable. Vous savez ce qu’on dit, il y a une part de vérité derrière chaque légende… la question est de savoir si la vérité est plus belle ou plus sombre que la légende.
Je n’ai donc pas été totalement surpris par le retournement final, même si je ne m’attendais pas forcément à ça. D’un autre côté l’auteur prévient ses lecteurs dès l’exergue en citant Boris Vian : « Cette histoire est entièrement vraie puisque je l’ai inventée d’un bout à l’autre. » (L’Ecume des Jours).
Providence croisera des personnages hauts en couleurs (et parfois même des grands de ce monde) lors de son périple. Un périple plein de charme et d’émotions. L’auteur aborde des thèmes graves (dont la maladie, et plus particulièrement la maladie chez l’enfant) avec légèreté sans jamais tourner le sujet en dérision. A ce titre j’ai aussi craqué pour Zahera, une gamine de sept ans pleine de vie, d’espoirs et d’ambitions malgré la maladie qui lui ronge inexorablement les poumons.
L’absurdité des situations n’empêche nullement l’auteur de jouer la carte d’un humour tout en finesse et celle d’une sincérité qu redonnerait presque fois en l’être humain…
Un regret ? Oui, celui d’avoir refermé trop tôt ce bouquin qui fait chaud au coeur et à l’âme. Lu en une journée. Je terminerai cette chronique en trois mots Monsieur Puértolas : Vivement le prochain !

MON VERDICT
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[BOUQUINS] Romain Puértolas – L’Extraordinaire Voyage Du Fakir Qui Etait Resté Coincé Dans Une Armoire Ikea

R. Puèrtolas - L'Extraordinaire Voyage Du Fakir...J’ai mis à profit mes derniers jours de congés (la reprise demain va être dure, après trois semaines de glande totale) pour me plonger dans un titre qui a fait quelques va-et-vient dans mon Stock à Lire Numérique, le temps de trouver une version correcte lisible sur tous supports. Ce fut périlleux mais l’attente en valait la peine, place donc à ma chronique de L’Extraordinaire Voyage Du Fakir Qui Etait Resté Coincé Dans Une Armoire Ikea, titre à rallonge que l’on doit à Romain Puértolas.
Ajatashatru Lavash Patel, un fakir du Rajasthan, un tantinet escroc et imposteur, se rend à Paris, aux frais de sa communauté, dans le but de s’acheter un nouveau lit à clous chez Ikea. Le type étant fauché comme les blés, hormis un faux billet grotesque destiné à payer son achat, il décide de passer la nuit dans le magasin. Une décision qui va complètement chambouler ses plans…
Commençons par le mauvais point, d’autant qu’il n’incombe pas à l’auteur mais à l’éditeur, Le Dillettante. Proposer une quatrième de couverture qui résume le bouquin de A à Z est un choix qui me dépasse ; jamais je n’aurai imaginé qu’un tel niveau de crétinerie marketing puisse être atteint !
De prime abord j’ai tout de suite pensé à un périple improbable un peu à la façon de Jonas Jonasson, et sur ce point je n’ai pas été déçu, on retrouve des éléments communs entre les deux auteurs (intrigue rocambolesque, personnages hauts en couleurs…), mais il y a chez Romain Puértolas et son fakir une dimension plus sociale (même si je n’adhère pas totalement à son propos, cela n’engage que moi et ne m’a pas empêché d’apprécier le récit).
Au fil de son périple, qui le conduira de Paris à Tripoli, en passant par Londres (ou presque) et Rome, et avant son retour en France, le personnage d’Ajatashatru évolue tout au long de l’intrigue, le roublard s’humanise au contact des autres et découvre les vertus de l’altruisme. Ne vous fiez pas aux apparences, à aucun moment on ne tombe dans la mièvrerie à deux balles.
Un récit plein d’humour, de malice mais aussi d’humanité (avec une pointe d’émotions, juste ce qu’il faut) et d’intelligence. La plume et le style sont légers, une fois que vous aurez plongé le nez dans le roman vous ne pourrez plus le lâcher avant la dernière page (d’autant qu’il est relativement court, 252 pages). Que demander de plus pour finir ces congés sur une note de bonne humeur ? Sinon un rab de congés !