[BOUQUINS] Jean Reno – Emma

Rien ne prédestinait Emma à vivre une telle aventure. Masseuse dans un centre de thalassothérapie en Bretagne, et encore bouleversée par la disparition de sa mère, elle est envoyée, à 28 ans, au sultanat d’Oman pour former les équipes d’un centre de bien-être. À la tête de cet établissement luxueux, le très séduisant fils d’un ministre influent.

Mais celle dont les mains font des merveilles se retrouve au cœur d’une incroyable affaire d’état. Pourchassée par des hommes du palais de Mascate, elle devient la femme à abattre. Face aux pièges qui lui sont tendus, une autre Emma se révèle alors. Redoutable. Intrépide. Et qui pourrait bien faire le bonheur des services secrets français…

Je reconnais sans complexe que c’est la curiosité qui m’a poussé vers ce bouquin. Plus que le pitch à proprement parler, c’est surtout l’envie de découvrir une nouvelle facette de Jean Reno qui a motivé mon choix de lecture.

Comme la plupart d’entre nous je connais Jean Reno en tant qu’acteur dont la carrière a d’abord été boostée par Luc Besson qui lui confiera des rôles secondaires dans Le Dernier Combat et Subway avant de le mettre en avant dans Le Grand Bleu, Nikita et Léon. Mais c’est surtout son interprétation de Godefroy de Montmirail dans Les Visiteurs de Jean-Marie Poiré qui marquera les esprits (et les zygomatiques) du public.

Au vu de la grande diversité des rôles qu’il a pu interpréter au fil de sa carrière d’acteur, il était difficile d’imaginer quel ton il donnerait à Emma, son premier roman. S’agissant d’un thriller d’espionnage, j’espérais retrouver une certaine noirceur dans le traitement de son intrigue.

Nous allons donc faire connaissance avec Emma, une masseuse dans un centre de thalassothérapie du Morbihan. D’emblée on découvre un personnage fortement marqué par un drame personnel et qui traîne depuis un lourd sentiment de culpabilité. Un personnage que l’auteur parvient facilement à rendre attachant avec son côté électron libre. Et puis elle a un chat, c’est donc forcément quelqu’un de bien !

De fil en aiguille (et surtout après une séance de massage) notre sympathique Emma va se retrouver à Oman où va elle va devoir former l’équipe en charge des massages dans un impressionnant complexe de thalassothérapie. Les choses sérieuses peuvent alors commencer…

C’est presque à l’insu de son plein gré que la formatrice va se retrouver à jouer les espionnes au service de la France. Je reconnais volontiers que l’ensemble est plutôt agréable à lire, mais n’espérez pas de brusques montées d’adrénaline, ça reste globalement très gentillet.

Si je ne crache sur de la guimauve en friandise (aaah les Chamallows de Haribo), j’en suis nettement moins friand quand elle s’invite dans une intrigue où elle ne s’imposait pas. Une touche de romance à la James Bond ça passe, mais quand ça dégouline de toute part on frôle l’indigestion. J’ai parfois eu la désagréable impression d’avoir un bouquin Harlequin entre les mains.

À sa décharge Jean Reno avoue avoir eu dans l’idée d’écrire avant tout une histoire romantique, pas de bol pour moi j’ai lu cette interview après avoir lu le roman.

Ce serait malhonnête de ma part de dire que ce bouquin est condamné au naufrage ou aux oubliettes, franchement je ne me suis pas ennuyé un seul instant en le lisant. Je le referme juste avec une pointe de déception face à des attentes non satisfaites.

Même si l’auteur reste dans le vague quant à une éventuelle suite, la fin laisse une porte grande ouverte à un prochain retour d’Emma 007. Malgré un ressenti mi-figue, mi-raisin je répondrai présent en espérant que les faiblesses de ce premier roman seront rectifiées.

[BOUQUINS] Olivier Descosse – Le Cirque Du Diable

Massif de la Meije. Un corps congelé, entièrement nu, retrouvé par des surfeurs lors d’un ride dans le Cirque du Diable. Le lieu est inaccessible et connu pour les légendes funestes qui l’entourent. Au même moment dans le Haut-Var, trois cadavres calcinés sont découverts au fond d’une bergerie abandonnée, en pleine forêt.

La première affaire est confiée à Paul Cabrera, policier de la Crime qui a fait ses armes à la BAC Nord et se déplace uniquement en Harley ; la seconde à Chloé Latour, cheffe de groupe à la brigade criminelle de Marseille, dont la classe et la froideur suscitent défiance et jalousie.

La glace, le feu… Et si ces deux énigmes n’en faisaient qu’une ? Des sommets inviolés aux ZAD sauvages, des as de la glisse aux groupes survivalistes, Paul Cabrera et Chloé Latour réalisent d’étranges recoupements. Avec une certitude : le ou les assassins disposent de capacités physiques hors du commun.

Pour le plaisir de retrouver Chloé Latour que j’ai rencontré dans le précédent roman d’Olivier Descosse, Peurs En Eaux Profondes. Un personnage que j’ai appris à apprécier et qu’il me tardait de retrouver.

Je remercie les éditions XO et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Pour son nouveau roman, Olivier Descosse renoue avec deux de ses personnages récurrents. Deux pour le prix d’un… what else ? C’est Paul Cabrera – héros de trois romans publiés entre 2003 et 2005 –, qui va enquêter sur la scène de crime des Hautes-Alpes. Pour sa part, Chloé Latour – découverte l’an dernier dans Peurs En Eaux Profondes –, va devoir élucider le mystère autour d’un triple homicide dans le Haut-Var.

Deux flics qui bossent à la Crim’ de Marseille, mais ne se connaissent que de nom… et de réputation. Au fil des parties découpant le roman, le lecteur va alterner entre deux enquêtes distinctes. Il faudra quasiment attendre les deux tiers du bouquin pour que leurs enquêtes respectives ne fassent qu’une et que nos deux flics de choc (chacun à sa façon) se rencontrent et enquêtent de concert.

Paul et Chloé avaient chacun des a priori sur l’autre, leur coopération plus ou moins forcée, va leur permettre d’apprendre à se connaître et à se respecter. Deux personnalités affirmées qui vont s’avérer complémentaires sur une enquête particulièrement complexe et face à un tueur implacable.

J’ai bien aimé l’opposition des caractères de ces deux enquêtes qui, soit dit en passant, vont devoir mener sans l’aide directe de leurs équipes respectives. Ils pourront heureusement compter sur le renfort humain et matériel de la gendarmerie de Briançon.

Même si Chloé Latour est toujours minée par son passé douloureux, j’ai trouvé le personnage plus apaisé et moins directif que dans le précédent roman. Ou alors c’est que je me suis habitué aux petits travers de la nana.

Force est de constater qu’en matière de perversité meurtrière Olivier Descosse n’y va pas avec le dos de la cuillère. Deux de « ses » victimes feront en effet l’objet d’une mise à mort particulièrement atroce.

L’auteur nous concocte une intrigue qui tourne autour de thèmes qui sont dans l’air du temps, tel que l’écologie, la collapsologie et une pointe de survivalisme. Mais pas que… Une intrigue plutôt bien ficelée qui vous réservera quelques surprises au fur et à mesure que le voile se lèvera et que les implications des uns et des autres se préciseront.

Il est vrai que la nature en général, et la montagne en particulier, fait partie intégrante de l’intrigue. D’autant que le fameux Cirque du Diable est sujet à d’anciennes superstitions qui en font un endroit maudit.

Les chapitres sont courts, le style est direct, pas de fioritures pour égarer le lecteur, le fond avant la forme. Un choix généralement payant en matière de thriller, et la recette fonctionne parfaitement dans le présent roman.

J’ai lu une critique du roman dans laquelle le lecteur en question soulignait des erreurs de l’auteur concernant le fonctionnement et l’organisation de la Légion étrangère. N’étant pas expert en la matière je ne me prononcerai pas, une chose est sûre je n’ai rien trouvé de choquant susceptible de nuire au déroulé et à la crédibilité de l’intrigue.

Dans une interview publiée sur le site des éditions XO, Olivier Descosse promet que Chloé Latour et Paul Cabrera seront de retour dans de futurs romans, mais chacun de leur côté cette fois. Je ferai en sorte de répondre présent pour ces rendez-vous futurs, et qui sait, peut-être que d’ici là je prendrai le temps de découvrir les précédentes enquêtes de Paul Cabrera.

[BOUQUINS] Olivier Bal – Roches De Sang

AU MENU DU JOUR


Titre : Roches De Sang
Auteur : Olivier Bal
Éditeur : XO
Parution : 2023
Origine : France
474 pages

De quoi ça cause ?

Londres, 2019. Mirosvlav Horvat, un homme d’affaires serbe, est retrouvé mort chez lui, égorgé après avoir reçu plusieurs coups de couteau. Sur la baie vitrée une inscription en corse, en lettres de sang : Chè la mia ferita sia murtale. Que ma blessure soit mortelle.

Marie Jansen, inspectrice à Europol, qui cherchait à démasquer Horvat, suspecté d’être à la tête d’un puissant réseau criminel, va devoir comprendre ce qui pouvait lier la « victime » à l’île de beauté…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce qu’Olivier Bal fait partie de ces (trop nombreux) auteurs qui intègrent mon Stock à Lire Numérique et qui finissent dans les limbes. Mieux vaut tard que jamais, j’ai intercepté celui-ci avant qu’il ne sombre.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions XO et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

C’est ma première incursion dans l’univers littéraire d’Olivier Bal, un auteur que j’avais envie de découvrir depuis déjà quelques temps. Son nouveau roman va vous faire voyager aussi bien dans le temps que dans l’espace.

Le prologue nous transporte sur l’île de beauté, le 1er août 1993 (par la suite vous verrez que ça coince au niveau de la date), où l’on rencontre le jeune Ange Biasani en fort mauvaise posture. Pour en savoir plus il faudra attendre les derniers chapitres du roman (et cette incohérence chronologique qui me laisse perplexe).

Ensuite on fait un bond dans le temps et dans l’espace pour se retrouver à Londres en décembre 2019. Un magnat serbe a été assassiné chez lui, poignardé à plusieurs reprises avant d’être égorgé. Unique indice, une phrase inscrite en lettres de sang sur la baie vitrée : Chè la mia ferita sia murtale.

Un crime qui ne fait pas vraiment les affaires d’Europol, et tout particulièrement de l’équipe de Marie Jansen qui traquait la victime – soupçonnée d’être à la tête d’un vaste réseau criminel – depuis de longues années. Pourquoi le tueur a-t-il laissé cette énigmatique signature écrite en langue corse ? Quel est le lien entre le magnat / mafieux et la Corse ?

À partir de cet instant les chapitres alternerons entre l’enquête de Marie Jansen et le périple de quatre jeunes corses – Ange, Théo, Dumé et Fred – qui, au cours de l’été 1993, vont se lancer dans une succession de braquages sensés leur apporter la fortune… Si ce n’est que, bien entendu, les choses ne vont pas vraiment se passer comme prévu.

Le personnage de Marie Jansen est plutôt complexe à aborder – et plus encore à trouver sympathique –, totalement investie dans son boulot, elle néglige sa famille (un mari et une fille de 3 ans). Elle reconnaît d’ailleurs sans complexe n’avoir aucun instinct maternel. Il faut dire qu’elle aura besoin de toute sa pugnacité professionnelle pour démêler l’écheveau de cette enquête. Une enquête qui va la conduire aux quatre coins de l’Europe (Angleterre, Suisse, Grèce, Croatie… et Corse), plongeant toujours plus loin dans la noirceur de l’âme humaine.

Au niveau des personnages de « l’intrigue corse », j’ai tout suite éprouvé une forte empathie pour Ange Biasani. Par la suite, je n’ai pu que succomber au côté gros nounours de Dumé. Même Fred, bien que beaucoup plus réservé, m’est apparu sympathique. En revanche dès le départ j’ai tiqué sur Théo Biasani, le frère cadet d’Ange, avec lui les emmerdes sont assurées.

Plus loin dans le roman on fera la connaissance de trois gamines qui, malgré leur jeune âge, ont déjà connu l’enfer et sont promises à pire encore. Jusqu’à ce qu’elles croisent, par le plus grand des hasards, la route des frères Biasani et de de leurs potes.

Dans le camp des méchants, Francis Venturi est l’archétype du parrain corse qui se prend pour Don Corleone alors qu’il n’est qu’un modeste chef de clan parmi d’autres. Avec Horvat et son homme de main, Dragan, on joue clairement dans la classe supérieure au niveau des pourritures.

L’intrigue est rondement menée, une fois que l’on a mis la main dans l’engrenage, on aura bien du mal à lâcher prise. Certes il y a quelques éléments que l’on repère facilement (pas besoin d’avoir fait des études supérieures de criminologie pour deviner qui se cache derrière le Balafré), on se laisse toutefois volontiers porter par l’auteur.

J’ai trouvé ce roman aussi captivant que palpitant, avec Ange, ses amis et les gamines, j’ai vibré au rythme de leurs aventures. J’ai partagé leurs joies mais aussi leurs douleurs… mais contrairement à Ange j’ai la rancune tenace, le pardon n’est pas ma tasse de thé.

Olivier Bal parvient rapidement à nous faire aimer « son » assassin, plutôt que de le juger on a envie de le féliciter et de cracher – et plus si affinités – sur le corps de ses victimes. Concernant son identité, je dois reconnaître que je l’avais fortement soupçonné dès que l’on apprend qui se cache derrière Baba Yaga. Un indice donné par le flic croate permet d’ailleurs de « démasquer » Baba Yaga avant que Marie ne fasse sa connaissance.

Un roman qui met aussi en avant les décors magnifiques (tels que décrits dans le bouquin, n’ayant jamais eu l’occasion de constater de visu) de la Corse, mais aussi son côté obscur avec cette petite mafia qui la gangrène en quasi impunité… merci à la sacro-sainte omerta qui permet à des ordures de continuer à imposer leurs lois.

Je terminerai cette chronique en revenant sur la question chronologique qui me turlupine. J’ai simplement contacté Olivier Bal sur FB, ce dernier m’a répondu – rapidement et fort sympathiquement – qu’il s’agissait tout simplement d’une coquille oubliée. Si vous êtes lecteur numérique et savez modifier le code d’un roman, vous pouvez remplacer le 1er août 1993 par le 29 juillet 1993 dans le prologue.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Henri Lœvenbruck – Les Disparus De Blackmore

AU MENU DU JOUR


Titre : Les Disparus De Blackmore
Auteur : Henri Lœvenbruck
Éditeur : XO
Parution : 2023
Origine : France
519 pages

De quoi ça cause ?

1925. Blackmore est une paisible île anglo-normande au large de Guenersey, mais depuis quelques mois des disparitions inexpliquées sèment la terreur au sein de la population.

Face à l’inertie de la police, Lorraine Chapelle, la première femme ayant obtenu un diplôme de criminologie en France, et Edward Pierce, détective privé britannique et expert en sciences occultes, vont devoir s’allier pour lever le voile sur ces inquiétantes disparitions…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Henri Lœvenbruck, un auteur pour le moins éclectique qui excelle dans tous les genres auquel il se frotte.

Pour le côté Lovecraft de l’intrigue… même si celui-ci reste à prouver.

Ma Chronique

Je remercie les éditions XO et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

C’est un pur hasard si, après la lecture du dernier roman de Stephen King, je reste dans un contexte très inspiré par H.P. Lovecraft. Mais ne vous fiez pas aux apparences, le roman de Henri Lœvenbruck est radicalement différent de celui du King, tant par son contexte que par son intrigue.

Henri Lœvenbruck situe son intrigue en 1925 sur l’île de Blackmore, une île anglo-normande née de l’imagination de l’auteur. Un cadre fictif auquel il parvient à donner corps et vie à grand renfort de détails, que ce soit sur la géographie de l’île, son histoire, sa culture et ses traditions. Mais aussi la ville de Blackmore, ses bâtiments et ses habitants. Tout est d’un réalisme saisissant.

Le duo d’enquêteurs atypique est un choix plutôt classique, pour ne pas dire banal, dans les romans policiers et les thrillers. L’auteur ne déroge pas à la règle en associant les personnages de Lorraine Chapelle, une criminologue française qui ne jure que par la science, et d’Edward Pierce, un détective britannique expert en sciences occultes. Elle est aussi extravertie – à la limite de la provocation – que lui est introverti. Sans surprise le duo va s’avérer aussi efficace que complémentaire.

Initialement nos deux enquêteurs vont être mandatés pour lever le voile sur trois disparitions inexpliquées survenues sur l’île ces derniers mois. Une quatrième disparition, puis un meurtre viendront rapidement compliquer une affaire déjà pleine de zones d’ombre.

Ajoutez à cela une généreuse dose de mythologie celtique combinée à un soupçon de culte des Grands Anciens et vous aurez alors une vision d’ensemble (quoique très superficielle) de ce qui attend notre duo de choc. Autant dire que la rationalité et l’esprit cartésien de Lorraine risque d’être mis à rude épreuve face à ce qu’elle considère comme du grand n’importe quoi.

Le roman se veut un hommage à la littérature populaire – pour ne pas dire pulp –, en souvenir de l’œuvre du grand-père de l’auteur. Sur ce point c’est une totale réussite, l’intrigue est plutôt bien construite et le bouquin se lit quasiment tout seul (si j’ai mis près de deux semaines à le lire, c’est parce que j’étais en congés).

Paradoxalement, c’est aussi cet aspect du roman qui me laisse un arrière-goût d’inachevé. J’aurais aimé que certains aspects de l’intrigue soient plus développés, et, plus globalement, que l’ensemble gagne en complexité et en densité.

Un petit bémol qui pourrait rapidement être oublié si Lorraine et Edward devaient revenir à Blackmore dans un prochain roman de l’auteur.

Il n’en reste pas moins que j’ai passé un très agréable moment en compagnie de ce roman. Une fois de plus Henri Lœvenbruck prouve qu’il est comme à la maison, quel que soit le registre auquel il se frotte.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Amélie Antoine – Aux Quatre Vents

AU MENU DU JOUR


Titre : Aux Quatre Vents
Auteur : Amélie Antoine
Éditeur : XO
Parution : 2022
Origine : France
439 pages

De quoi ça cause ?

1985. Sabran-sur-la-Lys est un petit village du Nord de la France où tout le monde se connaît. Un village paisible jusqu’à ce qu’un mystérieux inconnu achète le château qui surplombe le village et fait sa fierté… sans toutefois le rouvrir au public.

Par la suite l’homme achète maison sur maison dans le village avant de faire démonter portes et fenêtres et de les laisser, ainsi défigurées, à l’abandon. Qu’est-ce qui pousse cet inconnu à s’acharner ainsi sur ce village ?

C’est ce que va tenter de découvrir Léa, une jeune femme revenue vivre dans le village qui l’a vu grandir depuis quelques années. Pour cela elle va devoir déterrer des secrets du passé que personne de voudrait voir remonter à la surface. Des secrets qui remontent aux heures sombres de la seconde guerre mondiale…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Bien que généralement peu friands de romans ayant pour toile de fond la seconde guerre mondiale, celui-ci a tout de suite titillé ma curiosité. Sans doute parce que l’idée que les évènements du passé puissent venir expliquer ceux du présent me « parlait »…

Ma Chronique

Je remercie les éditions XO et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

La genèse de ce roman est plutôt originale : c’est en effet Jack Koch – dessinateur & illustrateur – qui a soufflé à Amélie Antoine les grandes lignes d’une histoire qu’il a imaginé (un homme achète les maisons d’un village avant de faire retirer portes et fenêtres et de les abandonner à leur triste sort). L’auteure a été séduite par cette histoire, à charge pour elle de se l’approprier et de l’étoffer pour la transformer en roman.

Pour l’anecdote les deux artistes se connaissent bien puisqu’ils ont déjà collaboré à un album jeunesse en 2019, Ernest et Moi, publié chez Michel Lafon.

Ce n’est que le second roman d’Amélie Antoine que je lis, même si le précédent, Raisons Obscures, m’avait fait forte impression. La faute au temps… ou plus exactement au manque de temps.

Pour construire son intrigue Amélie Antoine va nous faire voyager des années 80 aux années de la France occupée. Un voyage dans le temps nécessaire pour comprendre le parcours de Léa, de Ludmilla et de Clément. Mais aussi pour découvrir les sombres secrets enfouis dans les mémoires de Sabran-sur-la-Lys.

Je reconnais volontiers que les années d’Occupation allemande ont dû être traumatisantes pour beaucoup français (et pas seulement les Juifs, obligés de vivre cachés pour espérer échapper aux idées nauséabondes de la doctrine nazie). Mais je ne ferai pas non plus la politique de l’autruche en passant sous silence les dérives de la Libération (délations pas toujours justifiées, exactions en tout genre, basses vengeances…).

N’ayant pas vécu ces sombres années je ne vais pas pérorer à grand renfort de « moi je » qui aurait fait ci ou pas fait ça… Ceux qui tiennent ce genre de discours me donnent envie de leur rabattre le caquet à coup de lattes dans les gencives. Ne disposant d’un permis de latter illimité, je me contente en général de faire référence à la chanson de Jean-Jacques Goldman, Né en 17 à Leidenstadt. Si ça ne suffit pas je fais appel à Audiard : « J’parle pas aux cons, ça les instruit. » Un tantinet prétentieux certes, mais efficace.

Difficile toutefois de rester de marbre face au parcours de Charlotte, à l’autoritarisme borné de son père et au silence soumis de sa mère… c’est quasiment tout un village qui va se liguer contre elle parce qu’elle est tombée amoureuse de la « mauvaise » personne. Malgré les rumeurs et l’hostilité grandissante, elle restera fidèle à ses idéaux et à ses sentiments.

À travers ses nombreux personnages, Amélie Antoine, explore les multiples facettes de l’âme humaine, dans ce qu’elle a de plus répugnant, mais aussi dans ce qu’elle a de plus beau. Un roman qui vous prendra aux tripes plus d’une fois et jonglera avec vos émotions à la manière d’un clown épileptique et parkinsonien.

Le talent de conteur d’Amélie Antoine et la justesse de son propos font que cette alchimie entre Histoire et fiction fonctionne à la perfection. Difficile de trancher entre les voies choisies par Léa et Clément, leurs parcours sont à la fois proches et pourtant radicalement différents, et leur choix est totalement compréhensif quand on se place dans la peau du personnage qui défend son point de vue.

Comme tente de l’expliquer Léa à Clément, rien n’est jamais tout noir ou tout blanc dans l’absolu :

La vérité est bien plus complexe que vous voulez bien le croire : ceux que vous haïssez du plus profond de votre cœur parce qu’ils sont responsables de la mort de votre mère sont aussi ceux qui ont sauvé la vie d’une gamine juive. Ce sont les mêmes personnes, les mêmes…

Je nuancerai le propos en disant que les villageois ont sauvé la vie de Léa simplement en se taisant alors qu’ils ont participé – activement ou passivement – à la perte de Charlotte.

Je terminerai cette chronique par quelques mots de remerciements qui pourraient surprendre, mais ceux qui ont lu ce roman comprendront : Merci le chien !

MON VERDICT

[BOUQUINS] Olivier Descosse – Peurs En Eau Profonde

AU MENU DU JOUR


Titre : Peurs En Eau Profonde
Auteur : Olivier Descosse
Éditeur : XO
Parution : 2022
Origine : France
488 pages

De quoi ça cause ?

Quand le corps d’une jeune femme est repêché au large de Marseille, l’enquête est confiée à l’équipe de la commandante Latour. De prime abord tout laisse à penser à une noyade accidentelle, mais Latour décide malgré tout de creuser au-delà des apparences. Rapidement des éléments troublants vont contredire l’hypothèse de la noyade accidentelle…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

C’est d’abord la couv’ qui a attiré mon regard, avant même de voir le titre du bouquin et le nom de l’auteur, j’ai été attiré par ce corps flottant en eau profonde.

Comme ça faisait déjà quelques temps que j’avais envie de découvrir l’univers littéraire d’Olivier Descosse, autant profiter de l’occasion.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions XO et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Bien qu’étant de la génération Grand Bleu (le film de Luc Besson, sorti en 1988), je n’ai jamais été sensible à l’appel du large. J’ai certes fait un peu d’apnée mais ça tenait plus du barbotage que de la véritable plongée… à 20 000 lieux (sous les mers, forcément) de la plongée technique (Tech pour les intimes) dont il est question dans le roman d’Olivier Descosse.

L’auteur profite de son intrigue pour permettre au lecteur de découvrir un univers assez peu connu du grand public : la plongée technique. Ces plongeurs de l’extrême (appelés teks) opèrent souvent à des profondeurs supérieures à 100 mètres, ce qui nécessite un entraînement intensif et un matériel lourd spécifique (ils ne se contentent pas de regarder le paysage, leur job est d’assurer des opérations techniques ou de renflouage). Inutile de préciser que dans de telles conditions, la moindre erreur peut être lourde de conséquences.

C’est clairement un domaine que je découvre et sur ce point je ne peux que saluer le travail de documentation de l’auteur, on est en totale immersion (le mot ne saurait sonner plus juste) avec les plongeurs au cours de leurs périlleuses interventions.

L’essentiel de l’intrigue du roman est porté par deux personnages, d’un côté la commandante Chloé Latour, chef d’équipe à la BC de Marseille, et de l’autre Jean Sardi, patron d’une société de Tech et plongeur lui-même. Deux personnalités au caractère affirmé mais fortement marquées par le poids (et les drames) du passé.

J’ai apprécié le fait que Olivier Descosse ne fasse rien pour attirer spontanément l’empathie du lecteur vers ses personnages. Au contraire, il faut un certain temps pour s’habituer à leur personnalité et les adopter. Il faut bien reconnaître que le tempérament impulsif et directif de Chloé Latour en font parfois une parfaite tête à claques. Quant à Jean Sardi, c’est plutôt sa tendance à caliméroter qui va parfois nous porter sur les nerfs (Sors toi les doigts du cul mec et arrête de t’apitoyer son ton triste sort).

Les personnages secondaires ne sont pas pour autant laissés pour compte, qu’il s’agisse de l’équipe – pour le moins hétéroclite – de Latour, ou de celle de Sardi. Mais il est vrai que pour les deux enquêteurs ce crime a une résonnance aussi particulière que personnelle.

L’intrigue à proprement parler reste relativement classique, on devine même assez vite qui est plus à même de se cacher derrière le meurtre de Lola. Reste à comprendre ses motivations… Classique mais rondement menée, on se laisse volontiers entraîner dans l’enquête de Chloé et Jean. On a envie d’en savoir plus et les chapitres défilent fluidité.

Olivier Descosse prouve qu’il ‘n’est pas besoin de revisiter les règles du genre pour livrer un thriller abouti. C’est vrai que le relatif classicisme du récit pourrait rebuter les lecteurs les plus blasés, personnellement ça ne m’a pas dérangé outre mesure, du moment que l’ensemble tient la route.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Cai Jun – Comme Hier

AU MENU DU JOUR


Titre : Comme Hier
Auteur : Cai Jun
Éditeur : XO
Parution : 2022
Origine : Chine (2017)
398 pages

De quoi ça cause ?

13 août 1999. Une lycéenne disparaît…
13 août 2012. Une adolescente est retrouvée sans vie dans un parc d’attractions…
13 août 2017. Un professeur d’informatique, son épouse et leur fils de cinq ans meurent dans un incendie…

Trois drames qui ont tous eu lieu dans la rue Nanming. seraient-ils liés les uns aux autres ? L’inspecteur Ye Xiao, chargé de l’enquête sur la dernière affaire, doit répondre à tout prix à cette question.

Très vite, la jeune Sheng Xia vient l’épauler. Cette hackeuse de génie est décidée à venger la mort de l’enseignant avec lequel elle a programmé Comme Hier : une application de réalité virtuelle qui permet à chacun de voyager dans sa mémoire profonde et les souvenirs des autres…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que son précédent roman publié par XO, La Rivière De L’Oubli m’avait paru prometteur malgré quelques bémols mineurs. J’étais donc curieux de voir si ce nouveau roman tiendrait la route…

Ma Chronique

Je remercie les éditions XO et la plate-forme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Ah que voilà une chronique qui va me donner du fil à retordre… J’ai eu un mal fou à « entrer » dans ce bouquin et pourtant l’intrigue en elle-même me donnait envie d’en savoir plus.

La lecture fut parfois laborieuse sans que je puisse vraiment m’expliquer le pourquoi du comment du truc.

Je pourrais mentionner le fait d’être passé à côté de nombreuses références à des artistes (auteurs, acteurs…) chinois et à leurs œuvres qui me sont totalement inconnus, mais je ne crois pas, parce qu’en fait je m’en fous royalement.

En revanche j’ai retrouvé le même défaut que dans La Rivière De L’Oubli, Cai Jun a tendance à se répéter et à la longue ça devient saoulant : on a pigé que Sheng Xia a une tumeur au cerveau et qu’elle peut caner à tout moment… pas besoin de nous rebattre les oreilles avec ça à chaque chapitre !

Plus probablement un mix entre réel et virtuel qui a du mal à trouver son point d’équilibre, certains passages virtuels auraient pu être raccourcis afin d’éviter cette désagréable sensation de déjà-vu d’un chapitre à l’autre.

Passons maintenant aux points positifs, qui viennent largement contrebalancer ces bémols. À commencer par l’intrigue qui est globalement bien ficelée, non seulement les personnages vont devoir tirer au clair les meurtres de 2017, mais aussi essayer de comprendre le lien qu’il peut y avoir avec les événements de 1999 et 2012. Une intrigue qui vous réservera son lot de rebondissements et de surprises.

J’ai beaucoup aimé le trio de personnages qui mène la danse. Un inspecteur de police un tantinet désabusé, une jeune hackeuse au caractère bien trempé (et au langage fleuri) et un brillant neurochirurgien qui préfère agir dans l’ombre plutôt que de s’exposer.

Impossible de ne pas mentionner Ouyang Xiaozhi, la Démone disparue en 1999, qui servira de guide à Sheng Xia, la Démone de 2017, dans le monde virtuel de Comme Hier. Une mention spéciale à Sishen, le chien de Sheng Xia qui va prendre activement part à l’intrigue.

Mais le véritable tour de force de Cai Jun et de nous plonger en totale immersion dans la Chine du XXIe siècle ; dépaysement garanti pour les Occidentaux ! Un pays où les traditions perdurent et cohabitent avec l’essor des nouvelles technologies.

Le style de l’auteur est parfaitement adapté au thriller, il ne s’embarrasse pas de fioritures et va à l’essentiel… même si parfois il pourrait faire encore plus concis.

Globalement le ressenti final reste positif, la qualité de l’intrigue, les personnages et le contexte prennent le dessus sur les bémols cités plus hauts… mais ceux-ci n’en restent pas moins désagréables.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Xavier Müller – L’Armée De Darwin

AU MENU DU JOUR


Titre : L’Armée De Darwin
Série : Erectus – Tome 2
Auteur : Xavier Müller
Éditeur : XO
Parution : 2021
Origine : France
487 pages

De quoi ça cause ?

Sept ans après la pandémie Kruger les erectus vivent dans des réserves à l’écart des sapiens. Le débat entre pro et anti est toujours vif mais le véritable danger est ailleurs. Un scientifique voit dans les erectus un possible renouveau de l’humanité, il va créer un nouveau virus, dérivé du Kruger, qui transformera les infectés en erectus « amélioré »…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que j’avais été emballé par Erectus, j’étais curieux de découvrir quelle suite Xavier Müller allait donner à son récit.

Ma Chronique

Avec Erectus Xavier Müller avait réussi à rendre crédible (sinon plausible) une histoire de virus totalement improbable… à une époque (pas si lointaine que ça) où le genre humain n’avait pas à se soucier d’un virus dont le nom semble tout droit sorti d’une brasserie mexicaine.

Après un premier tome totalement maîtrisé, Xavier Müller se devait de tenir le niveau tout en proposant une intrigue 100% originale… pas question de se contenter d’une resucée d’Erectus au vilain parfum de déjà-vu. Et l’auteur évite l’écueil de la facilité en nous plaçant sept ans après la pandémie Kruger, sapiens et erectus cohabitent en un fragile équilibre qui ne satisfait pleinement personne.

Chez les sapiens le débat entre pro et anti erectus fait rage alors que la communauté scientifique s’échine à gérer les conséquences de la pandémie. C’est de cette gestion de crise qu’il sera essentiellement question dans les premiers chapitres du roman. Alors certes ça ne démarre pas sur les chapeaux de roues mais ça permet de planter le décor et de nous ancrer dans le monde d’après Kruger.

Qui aurait pu prévoir que les cartes allaient être redistribuées par une nouvelle pandémie ? Provoquée cette fois en parfaite connaissance de cause par un scientifique en mal de reconnaissance qui rêve d’une humanité 2.0. Humanité dont il serait à la fois le berger et le gourou.

Quand notre professeur foldingue met son plan machiavélique et ravageur en branle, le rythme du récit change du tout au tout. L’auteur nous balade tambour battant au gré de son intrigue et de ses multiples évolutions ; c’est à peine s’il nous laisse le temps de reprendre notre souffle entre les chapitres. On veut savoir, on doit savoir !

La première vague viendra du ciel puisque c’est un moustique, l’aedes aegypti (que l’on connait bien en Nouvelle-Calédonie), qui servira de vecteur de contamination et de propagation. Un nouveau défi pour la communauté scientifique : comment éradiquer le moustique sans nuire à l’équilibre de l’écosystème tout entier ?

« Une usine à moustiques » australienne avait une piste pour combattre le Ganesh : issu de recherches collaboratives, leur procédé consistait à inoculer aux femelles une bactérie capable de stopper la transmission de certaines maladies, type dengue, à l’être humain.

Sur ce coup la réalité rattrape la fiction, une telle bactérie existe bel et bien, la bestiole s’appelle wolbachia et est actuellement au cœur d’un vaste programme de lutte contre la dengue et autres maladies transmises par le moustique mené par le World Mosquito Program et soutenu par l’OMS. La Nouvelle-Calédonie a bénéficié d’un lâcher de moustiques infectés et les résultats ont été des plus concluants.

Même si le Ganesh est encore plus dévastateur (et plus improbable) que le Kruger, Xavier Müller arrive à rendre son intrigue crédible en plus d’être hautement addictive.

Il faut dire aussi que l’auteur ne laisse rien au hasard, surtout pas ses personnages à qui il apporte un soin particulier. C’est avec plaisir que j’ai retrouvé ceux déjà croisés dans Erectus, un contentement renforcé par la place accordée aux erectus (particulièrement au clan de la pierre-levée) et leur rôle dans le déroulé de l’intrigue de ce second opus. Tout comme j’ai eu plaisir à rencontrer de nouveaux personnages, à commencer par Lauryn Gordon et Alice (la fille d’Anna).

Alors this is the end ou doit-on attendre (espérer ?) un retour des erectus, sapiens et ganesh dans un troisième tome ? Très franchement il y aurait matière à une suite, paradoxalement je serai tenté de dire qu’une suite ne s’impose pas. En tout état de cause le seul à détenir la réponse à cette question est l’auteur.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Olivier Merle – Dans L’Ombre Du Loup

AU MENU DU JOUR

O. Merle - Dans l'ombre du loup
Titre : Dans L’Ombre Du Loup
Auteur : Olivier Merle
Éditeur : XO
Parution : 2021
Origine : France
540 pages

De quoi ça cause ?

Quand M. Kerdegat, un notable de la ville de Rennes, s’adresse à la police pour se plaindre d’appels et de lettres anonymes, c’est le commandant Hubert Grimm qui le reçoit avec pour consigne de ne pas faire de vagues.

Même si Grimm, récemment muté à Rennes, considère que l’affaire est plutôt banale, il va mobiliser son équipe pour mener une enquête rigoureuse. Il va rapidement comprendre que Kerdegat, en plus d’être un individu méprisable, a bien des secrets à cacher aux enquêteurs…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Avant tout par curiosité, la quatrième de couv’ nous promettant une rencontre avec « un flic pas comme les autres ».

Ma Chronique

Je remercie les éditions XO et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Quelques mots sur l’auteur avant d’entrer dans le vif du sujet. Olivier Merle est le fils du romancier Robert Merle, connu pour ses romans historiques (on lui doit notamment la série Fortune de France). Après quelques titres en littérature jeunesse et quelques romans historiques, Olivier Merle signe son premier thriller avec Dans L’Ombre Du Loup.

J’ai pris l’habitude de ne pas prendre pour argent comptant les annonces (promesses ?) des bandeaux et quatrième de couv’, force est toutefois de constater qu’en l’occurrence Hubert Grimm est vraiment « un flic pas comme les autres ». Ce n’est pas tant par ses méthodes qu’il sort de l’ordinaire (au contraire, malgré un caractère affirmé il a tendance à respecter – plus ou moins – les procédures), mais plutôt par sa personnalité tourmentée.

Outre le fait d’avoir du mal à se remettre d’une histoire d’amour compliquée (comme on dit sur la fesse du bouc), il est surtout climato-dépressif au plus haut degré… à ce niveau on pourrait même parler de collapsophobie tant ça vire à l’obsession chez lui. Genre de gars tu bouffes une côte de bœuf à côté de lui, il t’explique ne long en large et en travers les multiples impacts environnementaux de la consommation de viande… bref au bout de 30 secondes tu n’as qu’envie, lui enfoncer la gueule dans son tofu pour qu’il s’étouffe avec (oui, je suis un carnivore revendiqué et assumé) !

Malgré sa barbaquophobie le personnage est intéressant et attachant. Il peut aussi compter sur le soutien de son équipe. Trois flics ayant chacun leur personnalité, leurs forces et leurs faiblesses. Une équipe qui se complète parfaitement aussi bien sur le terrain que dans les tâches administratives.

L’enquête ne démarre pas forcément tambour battant, il faut que les choses se mettent en place et que Grimm et son équipe explorent les différentes pistes et les divers indices. Peu à peu les choses vont s’accélérer, d’autant que l’affaire va se compliquer avec la découverte d’un corps découpé déposé devant chez Kerdegat.

L’intrigue à proprement parler est plutôt bien menée, même si parfois j’ai trouvé que l’équipe tirait des conclusions un peu hâtives ou séchait sur des éléments plutôt évidents… il n’en reste pas moins que ce roman vous réservera quelques belles surprises et quelques revirements pour le moins inattendus.

L’écriture et le style d’Olivier Merle permettent une lecture fluide. Pour sa première incursion dans le monde du polar, l’auteur n’a pas à rougir du résultat. Certes ce n’est pas parfait, mais le roman n’en reste pas moins convaincant et efficace.

MON VERDICT
 

Morceau choisi

Au niveau des gouvernants, nous sommes entrés dans une nouvelle période : celle de l’homme-à-grosses-couilles. L’homme-à-grosses-couilles prend le pouvoir un peu partout sur la planète.
[…]
Ils débarquent en nombre, on ne voit plus qu’eux : Trump, Poutine, Xi Jinping, Bolsonaro, Erdogan, Salvini, Orban, etc., etc., etc., je pourrais les citer tous, mais on y serait encore demain matin ! L’homme-à-grosse-couilles est là ! Or, l’homme-à-grosses-couilles n’en a rien à faire de la planète. Rien du tout ! Il la détruit parce que sa destruction augmente sa puissance ! Et il n’y a que ça qui compte pour lui : le pouvoir et l’argent ! L’homme-à-grosses-couilles n’a qu’une perspective : sa propre jouissance. Et il est convaincu que la planète tiendra bien encore un peu, au moins jusqu’à ce qu’il meure. C’est tout ce qui lui importe. Ce qui adviendra après sa mort, il s’en contrefout, l’homme-à-grosses-couilles ! Voilà pourquoi tu as perdu, toi, le petit Grimm, recroquevillé sur ton étroit lopin de terre qui se dégrade inéluctablement !
[…]
Tu vois, l’homme-à-grosses-couilles, c’est que de la haine, que du pur macho violent ! Tu enfermes Greta Thunberg avec Trump, Poutine et Xi Jinping dans une pièce, je suis sûre qu’ils lui font subir une tournante avant de la pendre au plafond à un croc de boucher !

[BOUQUINS] Nicolas Beuglet – Ça N’Arrivera Pas

AU MENU DU JOUR

N. Beuglet - Ca n'arrivera pas
Titre : Ça N’Arrivera Pas
Auteur : Nicolas Beuglet
Éditeur : XO
Parution : 2020
Origine : France
28 pages

De quoi ça cause ?

Et si on se projetait en 2022 ? Qu’en sera-t-il de la pandémie, du vaccin, des restrictions de liberté ? Dans cette fiction, Nicolas Beuglet déroule le scénario qu’il redoute.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Par curiosité, pour voir à quoi pourrait ressembler le monde de demain si l’on doit continuer de vivre avec cette saloperie de Covid-19.

Ma Chronique

Je remercie les éditions XO et Net Galley pour la mise à disposition, en accès libre, de cette nouvelle de Nicolas Beuglet.

Cette nouvelle est disponible gratuitement sur le site de l’éditeur (format PDF) et toutes les plateformes de vente en ligne (format epub).

Clairement Nicolas Beuglet opte pour une vision dystopique de l’avenir sous la menace du Covid-19… sauf qu’en l’occurrence ce n’est pas le virus qui semble le plus menaçant dans cette affaire.

Jean Cassini et sa fille, Maïa, font partie de cette minorité qui a refusé de se faire vacciner, ils ont de fait été marginalisés suite à une série de mesures prises « par précaution ». Jean n’est pas anti-vaccin, c’est le principe de cette vaccination quasi obligatoire qu’il entend  contester en ne s’y pliant pas.

Le monde de demain tel que décrit par Nicolas Beuglet est réellement glaçant tant il apparaît comme liberticide, mais je crois que le pire est surtout de savoir que certaines mesures décrites sont déjà plus ou moins en vigueur (pas forcément en France… pour le moment).  De fait le pire du pire (pas très français ce truc, mais je ne trouve pas de superlatif qui sonne juste) est justement de ne pas pouvoir se dire avec certitude que ça n’arrivera pas ! À l’heure où l’idée d’un passeport sanitaire est évoquée (du bout des lèvres) par certains, on est en droit de se poser des questions.

Et si cette première campagne de vaccination ne portait pas les fruits attendus (espérés ?) ; quelle sera la suite pour venir à bout de cette pandémie ? En ce sens le texte de Nicolas Beuglet pourrait quasiment être considéré comme d’intérêt public, le but avoué étant d’éveiller les consciences avant qu’il ne soit trop tard.

Et ben moi je pense au contraire qu’on a fait une grosse connerie de ne pas se réveiller avant. Il y avait forcément une autre façon de faire sans renoncer à notre liberté. On nous a juste présenté les choses en nous disant que c’était ça ou rien et on n’a pas réfléchi. On nous a dit : « C’est obligatoire, c’est pour votre sécurité, c’est pour relancer l’économie », et on n’a vu que ça… Alors qu’aujourd’hui j’ai encore peur tout le temps et je n’ai même plus ma vraie liberté.

Il est rare que je consacre une chronique à une nouvelle isolée, pour celle-ci, cela m’a paru indispensable. Outre le fait de poser les bonnes questions, le texte est de très bonne qualité et l’histoire très bien ficelée.

Pour votre gouverne je ne suis ni complotiste paranoïde, ni antivax (la menace Covid étant – à ce jour – inexistante en Nouvelle-Calédonie, je ne vais pas non plus me ruer à la pharmacie pour me faire vacciner), cela ne m’empêche pas de me demander jusqu’où on peut aller pour le bien de tous.

J’aurai pu clore cette année 2020 sur une note un peu plus optimiste, disons que cette ultime chronique est à l’image de l’année écoulée. À l’année prochaine…

MON VERDICT
Coup de poing