[BOUQUINS] T.E. Grau – Je Suis Le Fleuve

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T.E. Grau - Je suis le fleuve

Titre : Je Suis Le Fleuve
Auteur : T.E. Grau
Éditeur : Sonatine
Parution : 2020
Origine : États-Unis (2018)
288 pages

De quoi ça cause ?

Israel Broussard, vétéran de la guerre du Vietnam, peine à trouver le repos et la paix depuis son arrivée à Bangkok cinq ans plus tôt. Tourmenté par ses souvenirs et de vieux démons du passé c’est dans l’alcool et la drogue qu’il cherche l’oubli.

Tout a commencé cinq ans plus tôt, au Laos. Broussard et une poignée de soldats américains ont été recrutés pour participer à une mission clandestine, l’opération Algernon. Et si la clé de sa rédemption se trouvait justement au Laos…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Sonatine et que le pitch me semblait prometteur.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Sonatine et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Le moins que l’on puisse dire c’est que mon premier contact avec ce roman a failli tourner court. Après quelques pages lues qui semblaient n’avoir ni queue ni tête et/ou écrites sous l’influence de substances illicites, j’ai hésité à l’envoyer valdinguer pour passer à autre chose.

C’est la qualité de l’écriture (et donc de la traduction), non dénuée d’une certaine poésie (à tendance psychédélique certes) qui m’a persuadé de persévérer et de lui laisser sa chance. Ça et sans doute aussi le nombre de pages relativement réduit.

Force m’est de reconnaître que j’ai été plutôt bien inspiré, même si la déception de ce premier contact gâché ne m’a jamais totalement quitté. Non seulement les choses se précisent au fil des pages, mais même les dérives / délires de Broussard finissent par faire sens (plus ou moins en tout cas).

Si aujourd’hui le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est un phénomène connu chez les vétérans, ce n’était certainement pas le cas dans les années 70 / 80. Si on situe la fameuse opération Algernon en 1971 (soit dit en passant le conflit vietnamien commençait déjà à furieusement sentir le sapin et la merde pour les USA), on peut en déduire que l’intrigue actuelle du roman se déroule en 1976.

Ajoutons à cela que le soldat Israel Broussard pourrait être un cas d’écoles pour les spécialistes du SSPT, dans le genre polytraumatisé il décroche le pompon haut la main !

Le moment me semble judicieux pour soulever un deuxième bémol relatif à ce roman. A aucun moment je n’ai réussi à éprouver une quelconque empathie pour les personnages. Qu’il s’agisse de Broussard ou des autres, j’ai instinctivement dressé une barrière entre eux et moi. Et pourtant je ne peux que reconnaître que T.E. Grau apporte beaucoup de soins à brosser ses personnages et leurs personnalités.

Les chapitres alternent entre les souvenirs de Broussard qui remontent peu à peu à la surface (principalement ceux ayant trait à l’opération Algernon) et sa dérive dans les coins les plus glauques de Bangkok… dérive qui semble le mener tout droit vers un naufrage inexorable, sauf que la mort ne semble pas vouloir de lui, comme si elle était un châtiment trop clément pour expier ses fautes.

Si vous souhaitez embarquer avec Broussard pour une croisière le long du Fleuve, sachez que ledit fleuve est du genre agité et que le voyage ne vous laissera pas indemne. L’auteur n’hésite pas à malmener son (anti)héros et ses lecteurs, et il le fait avec brio.

Malgré d’indéniables qualités, je n’ai pas été totalement embarqué ; il n’en reste pas moins que je referme ce bouquin sur un sentiment globalement positif.

MON VERDICT