[BOUQUINS] Emil Ferris – Moi, Ce Que J’Aime C’est Les Monstres – Livre Premier

Chicago, fin des années 1960. Karen Reyes, dix ans, adore les fantômes, les vampires et autres morts-vivants. Elle s’imagine même être un loup-garou : plus facile, ici, d’être un monstre que d’être une femme.

Le jour de la Saint-Valentin, sa voisine, la belle Anka Silverberg, se suicide d’une balle en plein cœur. Mais Karen n’y croit pas et décide d’élucider ce mystère. Elle va vite découvrir qu’entre le passé d’Anka dans l’Allemagne nazie, son propre quartier prêt à s’embraser et les secrets tapis dans l’ombre de son quotidien.

Les monstres, bons ou mauvais, sont des êtres comme les autres, ambigus, torturés et fascinants.

Attention OLNI (objet littéraire non identifié) en approche. Attention chef d’œuvre.

Ça fait déjà quelques années que ce roman fait partie de ma bédéthèque, j’attendais simplement la sortie du second tome pour pouvoir enchaîner sans attendre (il aura quand même fallu patienter sept ans pour découvrir le diptyque dans son intégralité).

Pour un premier essai Emil Ferris a placé la barre haut, très haut même ! Il lui a fallu six ans de travail pour venir à bout de son roman graphique, un pavé de plus de 800 pages. La genèse du bouquin, expliquée sur le rabat de la quatrième de couverture, est aussi extraordinaire que le bouquin lui-même. Je n’en dirai pas plus, les plus curieux – et accessoirement les plus fainéants – peuvent toutefois aller sur la page Wikipédia de l’auteure pour en apprendre davantage.

Avant de découvrir le fond, c’est d’abord la forme qui frappe le lecteur. Ça envoie du lourd (au sens propre, comme au figuré). Emil Ferris opte en effet pour un dessin presque exclusivement réalisé au stylo-bille (un choix d’autant plus audacieux qu’il laisse peu de marge pour les corrections… un loupé et c’est toute la planche qu’il faut redessiner) et donne vie à ses illustrations à grand renfort de hachures. D’autre part l’auteure revendique sa volonté de casser les codes de la bande dessinée traditionnelle, optant pour une mise en page qui peut, de prime abord, paraître chaotique, avant de s’avérer parfaitement réfléchie.

Au fil des pages nous suivrons Karen Reyes, une jeune fille pas forcément très bien dans sa peau qui cache son mal-être sous un déguisement de loup-garou. Le bouquin se présente comme un mix entre journal intime et carnet de croquis, Karen nous raconte pêlemêle son quotidien auprès de sa mère et de son frère Deeze, son « enquête » sur la mort de la voisine, Anka Silverberg, qui va la plonger au cœur de l’Allemagne nazie et ses réflexions sur la société américaine. Là encore ça peut paraître un peu fourre-tout, mais à aucun moment le lecteur ne se sentira perdu.

Difficile de ne pas ressentir d’empathie pour le personnage de Karen, son histoire est plaidoyer pour le droit à la différence, ou plus exactement pour le droit d’être soi-même, sans avoir à se soucier de ce qu’en penseront les autres. J’ai aussi eu un faible pour le frangin, Deeze, un curieux mélange de bad boy et de Dom Juan.

Au fil des pages on trouvera de nombreuses références à l’art, avec notamment des reproductions de l’auteure de toiles existantes. J’avoue que je n’ai pu résister à l’envie de comparer les œuvres originales avec les reproductions de l’auteure et son style graphique très particulier, force est de constater que le résultat est bluffant.

Dès sa publication le bouquin a connu un énorme succès public et critique mais il a aussi été salué par de grands noms de la bande dessinée contemporaine (notamment part Art Spiegelman, l’auteur du roman graphique Maus). Il s’est aussi imposé dans de nombreux festivals dédiés à la BD, raflant plusieurs prix, dont Eisner en 2018 (meilleur album, meilleur auteur et meilleure colorisation) et le Fauve d’or (distinction qui récompense le meilleur album) au festival d’Angoulême 2019.

Un grand merci aux éditions Monsieur Toussaint Louverture qui nous livre une véritable œuvre d’art, grâce à leur travail, le contenant est à la hauteur du contenu.

Je m’en vais de ce pas (ou presque) me lancer dans la lecture du second opus.

[BOUQUINS] Jodorowsky & Giménez – La Caste Des Métabarons – Tomes 5 à 8

Depuis des siècles, les Castaka exploitent seuls la planète Marmola, grâce au secret de l’épyphite, une huile antigravitationnelle qui leur permet de manipuler le marbre comme s’il ne pesait rien. Lorsque l’existence de l’épyphite est dévoilée à la galaxie, c’en est fini de la tranquillité de la famille, et l’histoire des méta-barons va commencer, dans le sang, la mort, et la trahison, quand tous les vautours de la galaxie vont les assiéger pour leur arracher leur secret.

L’année 2024 du blog s’est achevée sous le signe du roman graphique, 2025 s’ouvre de même avec ce second opus de l’intégrale de La Caste Des Méta-Barons. Il devrait en être de même pour ce début janvier, ayant la ferme intention de découvrir le diptyque des Monstres d’Emil Ferris.

Ces quatre tomes constituent la seconde et dernière partie de La Caste Des Méta-Barons, publiés entre 1998 et 2003 ils vous invitent à poursuivre l’histoire des méta-barons en découvrant, tour à tour (et parfois en destins croisés), les destins de Tête d’Acier, Aghora et Sans-Nom, le dernier de la lignée.

Un quotidien fait de violence et de combats, d’une part en raison du processus initiatique des méta-barons qui leur impose d’endurer maintes souffrances afin de prouver leur valeur, avec en guise d’ultime épreuve un duel à mort contre son propre père. Le méta-baron étant par essence un mercenaire, œuvrant principalement au service de l’Empire, il devra aussi affronter les envahisseurs qui menacent Terra 2014. Sans parler de divers complots et trahisons internes qui viendront alimenter un emploi du temps déjà bien chargé.

On retrouve le même univers graphique fortement empreint de biotechnologie qui fait parfois penser au génialissime H.R. Giger (à qui l’on doit notamment le xénomorphe du film Alien ainsi que son vaisseau).

L’histoire des méta-barons nous est toujours contée par Lothar et Tonto, les deux robots qui attendent le retour de leur maître, Sans-Nom. Les deux tas de ferrailles sont toujours aussi prompts à se chamailler à grand renfort de noms d’oiseaux robotiques.

Le huitième et dernier tome marque clairement la fin d’un cycle… et pour moi la fin de mon immersion dans l’univers des méta-barons, je passe mon tour pour la série Méta-Baron qui rebondit sur la conclusion de la présente série.

Les couvertures originales des tomes 5 et 6

Les couvertures originales des tomes 7 et 8

Bilan livresque 2024

Du fait de l’année écoulée en NC, marquée par les exactions survenues en mai / juin, et de son impact sur mon emploi du temps professionnel – et accessoirement sur mon humeur et ma motivation générale –, ce ne sont que 34 romans qui auront été lus en 2024.

Si la quantité n’était pas au rendez-vous, la qualité était heureusement bien de la partie puisque la note moyenne de mes lectures est de 4.1 sur 5. Les notes attribuées vont 2.5 à 5 et se répartissent comme suit :

  • 6 romans font carton plein avec la note 5
  • 7 titres ratent de peu le top avec une note de 4.5
  • 13 lectures s’en sortent avec un très honorable 4
  • 4 bouquins obtiennent la note de 3.5
  • 3 titres dépassent tout juste la moyenne avec une note de 3
  • 1 roman obtient un petit 2.5

7 bouquins voient leur note associée à un bonus :

  • 3 coups double (coup de cœur et coup de poing)
  • 2 coups de cœur
  • 2 coups doubles

Vu le faible nombre de lectures sur l’année, je vais déroger à la forme habituelle de mon bilan et ne pas le décliner mois par mois. Au lieu de ça je vais vous livrer mon top 5 dans l’ordre de lecture :

Bonne et heureuse année 2025

Après une année 2024 particulièrement sombre pour la Nouvelle-Calédonie, on ne peut qu’espèrer que 2025 soit plus apaisée pour le territoire et les calédoniens.

Une pensée particulière pour les victimes de ces exactions, aux entrepreneurs et les travailleurs indépendants qui ont perdu tout ou partie de leur outil de travail, à ceux et celles qui ont perdu leur boulot, à ceux et celles qui n’ont pu accéder aux structures de soins.

Ni pardon, ni oubli.

Je vous souhaite à tous et toutes une bonne et heureuse année 2025 et vous présente tous mes voeux pour cette nouvelle année.