AU MENU DU JOUR
Titre : Dévorer Les Ténèbres
Auteur : Richard Lloyd Parry
Éditeur : Sonatine
Parution : 2020
Origine : Angleterre (2011)
528 pages
De quoi ça cause ?
Lucie Blackman est une Britannique de 22 ans venue tenter sa chance à Tokyo avec une amie. C’est à Roppongi, le quartier chaud de la capitale nippone, qu’elles trouveront un travail comme « hôtesses de bar ». Lucie est arrivée à Tokyo le 3 mai 2000, le 1er juillet de la même année elle disparaît…
Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?
À vrai dire je n’avais jamais entendu parler de Lucie Blackman avant de découvrir ce bouquin. C’est la disparition de Tiphaine Véron, une touriste française, le 29 juillet 2018 alors qu’elle visitait le Japon, qui m’a orienté vers cette enquête sur une autre disparition au pays du soleil levant.
Ma Chronique
Je remercie chaleureusement les éditions Sonatine et Net Galley pour leur confiance renouvelée.
Lucie Blackman a disparu lé 1er juillet 2000, le procès de son meurtrier présumé s’ouvrira en juillet 2001, mais ce n’est qu’en décembre 2008 que sera rendu le verdict final.
Richard Lloyd Parry est correspondant du Times à Tokyo, très vite il s’intéressera à la disparition de Lucie Blackman et à ses suites ; des années durant il suivra l’affaire de près et restera en contact avec divers intervenants (la famille de Lucie, divers témoins plus ou moins directs, les autorités tokyoïtes…). Ce récit est le résultat de ces longues années d’enquête et d’entretiens divers et variés, un récit qui ne se limite pas un compte rendu juridique détaillé, mais s’attache aussi aux conséquences sur la famille Blackman et sur l’« après ».
Si le travail documentaire de l’auteur est impressionnant et son récit on ne peut plus exhaustif, je dois avouer qu’en refermant ce bouquin je reste sur un sentiment mitigé. Autant il peut être captivant par moment, autant certains passages m’ont semblé d’un ennui mortel.
Tout ce qui concerne le portrait de Lucie Blackman, de sa famille et de ses amis ainsi que sa disparition et ses suites directes permettent de cerner précisément la personnalité de la victime.
De nombreux faits et détails nous permettent d’appréhender la société japonaise et de prendre la mesure des nombreuses différences avec nos sociétés occidentales (notamment en ce qui concerne l’approche de la séduction et de la sexualité).
La partie que j’ai trouvé la plus passionnante est celle relative au procès, notamment parce qu’elle met en évidence les particularités du système judiciaire nippon. Un système qui tendrait à rendre les procès un tantinet soporifiques.
À la différence des tribunaux britanniques ou américains, où la seule exigence est de prouver les faits, les tribunaux japonais attachent une grande importance au mobile. Ce qui doit être prouvé devant la cour, ce sont le raisonnement et l’impulsion qui ont entraîné le crime ; ils constituent le facteur fondamental qui déterminera la peine d’un condamné. Le qui, le comment, le où et le quand ne suffisent pas : un juge japonais exige de savoir le pourquoi.
L’idée qu’un criminel se montre fourbe, obstiné et menteur et qu’avoir affaire à ce genre d’individu était précisément le rôle de la police ne venait quasiment jamais à l’esprit des enquêteurs. Ils n’étaient pas incompétents, ils ne manquaient pas d’imagination, ils n’étaient ni paresseux ni complaisants – ils étaient simplement victimes d’un coup de malchance totalement inattendu : sur un million de criminels au Japon, il y en avait un de malhonnête, et c’est sur celui-ci qu’ils étaient tombés.
C’est au niveau de l’enquête de police que le bât blesse, certes elle a traîné en longueur dans les faits, mais j’ai trouvé que la partie du récit qui y fait mention contenait de nombreuses longueurs. J’avoue sans la moindre honte avoir parcouru de nombreux passages en diagonale.
D’autre part le rythme de lecture est quelque peu cassé par les nombreux appels de note (191 au total) qui obligent le lecteur à de perpétuels va-et-vient entre le texte et les notes en question.
Richard Lloyd Parry pointe du doigt les nombreux faux pas et ratés de la justice japonaise dans le cadre de l’affaire Lucie Blackman. Des couacs qui sont justement la résultante des particularismes nippons face à un suspect qui ne rendre pas dans leur moule.
Si l’auteur souligne que le cas de Lucie Blackman n’est pas un cas isolé, il insiste toutefois sur le fait que Tokyo est l’une des villes les plus sûres pour les touristes ; notamment pour les touristes de sexe féminin.
Globalement la lecture de ce bouquin a été un agréable moment mais les bémols soulignés précédemment ont fait que j’ai souvent laissé le bouquin de côté afin de privilégier un roman en lieu et place. Ce n’est qu’à l’ouverture du procès que je me suis complètement immergé dans cette lecture.