[BOUQUINS] Laurent Obertone – Guerilla – Le Dernier Combat

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Titre : Guerilla – Le Dernier Combat
Auteur : Laurent Obertone
Éditeur : Magnus
Parution : 2022
Origine : France
332 pages

De quoi ça cause ?

Après vingt-sept jour d’une crise sans précédent, l’ordre semble enfin rétabli. C’est en tout cas ce que voudrait faire croire Victor Escard, le nouveau président qui se pose en sauveur et en garant du très-bien-vivre-ensemble. Quitte à mentir ouvertement et manipuler les foules…

Mais Escard ne devrait pas réjouir trop vite de son succès, Vincent Gite, désormais ennemi public n°1 à la suite de l’attentat de Vincennes, est toujours à ses trousses. D’autre part, le capitaine Danjou et ses légionnaires ne sont pas décidés à déposer les armes.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Comme son nom le suggère fortement, c’est le dernier volet de la trilogie Guerilla. Impossible de faire l’impasse après deux tomes qui m’ont tenu en haleine…

Ma Chronique

Vous le savez sans doute je suis réfractaire aux maisons d’éditions ne proposant pas d’offre numérique, pas question pour moi de verser un centime à ces gens-là. Les éditions Magnus (co-fondée par Laurent Obertone) étant dans la même logique marketing que feues les éditions Ring, je n’achèterai aucun de leurs titres.

Ne pas acheter ne signifie pas pour autant ne pas lire… L’option cadeau permet de contourner la limite (merci au père Noël pour ce roman). Sans parler de l’offre alternative, par laquelle je suis passé pour me procurer une version numérique du bouquin.

D’emblée je dois vous avouer que ce dernier tome est celui qui m’a le moins convaincu. L’effondrement décrit dans les deux premiers tomes est la conséquence directe du laxisme et du renoncement porté par la politique du très-bien-vivre-ensemble ; le sauveur providentiel, Victor Escard, propose un retour à la normale dans la droite ligne de son prédécesseur… à la puissance 10 ! J’ai du mal à croire que le français moyen puisse accepter cette idée et se laisser berner à nouveau. J’espère ne pas me tromper…

Suite directe de ma remarque précédente, j’ai été franchement dérangé par les passages relatifs aux prétendus dédommagements dûs aux prétendues victimes d’exclusion (ethnique, religieuse ou sexuelle). À force de pousser le bouchon, ça devient franchement too much et pas du tout crédible.

Je tiens toutefois à souligner qu’il y a quelques bonnes idées qui évitent le naufrage, ainsi je n’ai eu aucun mal à croire en la manipulation des foules par les médias – d’autant que seuls les médias officiels ont le droit d’émettre – ; il en va de même pour les dérives des milices mises en place par Escard et ses sbires pour restaurer l’ordre et la confiance.

J’ai tout particulièrement apprécié de retrouver des personnages déjà croisés dans les précédents opus et de découvrir la suite de leur parcours (souvent chaotique).

Parmi les nouveaux venus j’ai bien aimé le personnage de Laurent Buvard, un enquêteur mandaté par Escard pour trouver et neutraliser Vincent Gite. Marcel et ses élans éthyliques apporteront quelques touches d’humour bienvenues pour détendre l’atmosphère.

Heureusement la bataille de Paris vient redistribuer les cartes et donne au roman un second souffle bienvenu. Dommage qu’il faille attendre le chapitre 38 pour voir jaillir l’étincelle qui va sortir la France moyenne de sa torpeur.

Pour la suite des évènements, Laurent Obertone ne se laisse pas emporter par l’euphorie et l’optimisme ambiant. Il porte un regard plutôt juste sur la nature humaine face au pouvoir. On aimerait y voir un certain cynisme mais ne nous berçons pas d’illusions, le Pays des Bisounours n’existe pas !

Si ce troisième opus m’a moins convaincu que les précédents, il n’en reste pas moins nécessaire pour clore une intrigue qui s’étalera qui nous fera découvrir sur sept jours (du vingt-huitième au trente-quatrième jours). Une trilogie qui mérite d’être découverte même si son propos heurtera la bien-pensance de certains lecteurs.

Avant de clore cette chronique, je vous invite à découvrir l’interview de Laurent Obertone sur Breizh Info (je ne cautionne pas ce média mais l’auteur tend à être blacklisté par les médias plus traditionnels)

MON VERDICT

[BOUQUINS] Laurent Obertone – Guérilla – Le Temps Des Barbares

AU MENU DU JOUR

L. Obertone - Le Temps Des Barbares
Titre : Guérilla – Le Temps Des Barbares
Auteur : Laurent Obertone
Éditeur : Ring
Parution : 2019
Origine : France
427 pages

De quoi ça cause ?

Trois jours. C’est le temps qu’il aura fallu pour que la France sombre dans un chaos sans précédent. Plus d’État. Plus de règles. Désormais c’est chacun pour soi.

Alors que la plupart essayent tant bien que mal d’assurer leur survie, d’autres organisent la résistance face à la montée en puissance du Califat. Et pendant ce temps, dans les coulisses de ce qu’il reste du pouvoir, on échafaude des plans en vue de reprendre les choses en mains, mais surtout de sortir de la crise la tête haute.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que j’avais beaucoup aimé le premier tome (voir ma chronique).

Il me tardait de lire la suite, mais il m’a fallu patienter le temps de produire une version numérique du bouquin (cf aparté).

Ma Chronique

Comme vous le savez peut-être je pratique un boycott actif des éditeurs ne proposant pas d’offre numérique, tant pis si cela me fait passer à côté de titres susceptibles de me plaire (c’est notamment le cas des bouquins des éditions Ring et ceux de sa petite sœur Métropolis). C’est une question de principe, tu me snobes, je te snobe.

Et pourtant voilà que je propose une chronique d’un titre de Ring. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis me direz-vous. Sans doute, mais la vérité est un peu plus complexe que ça ; je vous expose le parcours du bouquin dans l’aparté qui suit ma chronique.

Et puisque je parle d’imbéciles (admirez la transition), je précise à toutes fins utiles que ce roman reste dans l’esprit du précédent et des divers essais de Laurent Obertone, il est donc fortement déconseillé aux bobos gauchos bien-pensants autoproclamés, adeptes du très-bien-vivre-ensemble mais paradoxalement hermétiques à tout propos contraire à leurs idéaux (qui a dit illusions ?).

Ce second tome fait suite directe au précédent et vous invite à suivre l’évolution (?) de la situation du quatrième au vingt-septième jour, vous plongeant au cœur d’un indicible chaos.

Âmes sensibles s’abstenir, Laurent Obertone ne nous épargne rien dans l’horreur et la dépravation du genre humain (exécutions, violences gratuites, viols, nécrophilie, cannibalisme…). La déshumanisation poussée à l’extrême !

On retrouvera avec plus ou moins de plaisir des personnages déjà croisés précédemment (le colonel et la fillette, Vincent Gite, Cédric et Alice, le Dr Cachet et la psy). Mais il faudra aussi compter sur des retrouvailles notoirement déplaisantes avec Aboubakar, Calife autoproclamé de Seine-Saint-Denis et ses hordes de fanatiques décérébrés.

Et bien entendu il faudra aussi compter sur de nouveaux venus, dont Victor Escard, représentant dans l’ombre (pour ne pas dire planqué) de l’autorité et du pouvoir. Un esprit aussi tordu que cynique qui planifie une sortie de crise tout à son honneur, tant pis si pour cela il faut faire durer le chaos et travestir honteusement la vérité.

Comme dans le premier opus les chapitres alternent entre les lieux et les personnages ce qui ne nous empêche pas de rapidement trouver nos marques. Dommage que dans la première partie l’auteur se soit laissé entraîner sur des sentiers de traverses qui n’apportent strictement rien à l’intrigue (je pense notamment aux chapitres consacrés à Raoul.le).

Le contraste entre les partisans du très-bien-vivre-ensemble et les événements en cours est encore plus saisissant que dans le premier tome.

Si le style ne brille pas forcément par sa richesse, au niveau de l’orthographe on a parfois l’impression que l’auteur a voulu placer des mots très recherchés pour donner plus de consistance à ses tournures de phrases… raté ! Ça sonne faux plus qu’autre chose.

Un exemple parmi d’autres : … comme les hyphes de cet inquiétant mycélium parti à l’assaut du monde.
Qui aurait pu donner un truc du genre : … comme les filaments d’un inquiétant lichen parti à l’assaut du monde.

Malgré quelques faiblesses, Laurent Obertone nous propose un thriller d’anticipation plutôt bien fichu. J’ai été (un peu) moins convaincu quant à la plausibilité des événements que ceux décrits dans le premier opus, mais au niveau de l’action et du rythme ça envoie du lourd. Si l’auteur devait écrire une suite (ce qui ne s’impose pas même s’il y a encore matière à un roman supplémentaire, mais avec une tout autre approche), je répondrai présent sans la moindre hésitation.

En lisant les divers retours sur ce roman, j’ai découvert que le propos de Laurent Obertone serait assez proche (dans sa thématique plus que dans son approche à proprement parler) d’un roman autoédité de Franck Poupart, Demain Les Barbares – Chroniques Du Grand Effondrement, il va falloir que je me penche sur la question, d’autant plus que ledit bouquin semble plutôt avoir été plutôt bien accueilli (4 étoiles chez Amazon, 3.8/5 chez Babelio)…

MON VERDICT

Aparté technique

À la base on m’a fourni un scan (version PDF) du bouquin, c’est ce document que j’ai converti au format doc (Word) afin de pouvoir le retoucher (suppression des n° de pages et des césures notamment). Et c’est à partir de ce fichier retouché que j’ai créé une version epub brute.

Restait l’étape la plus laborieuse du processus, la finalisation du fichier epub. J’aurais pu partir du scan pour corriger les inévitables coquilles OCR, rectifier les sauts de lignes intempestifs et appliquer les différents styles, mais c’eut été trop fastidieux. C’est pourquoi j’ai opté pour un passage en librairie et me suis offert le bouquin au format papier (mon premier achat papier depuis plus de deux ans). Et c’est à partir du bouquin que j’ai pu finaliser ma version numérique, et donc le lire à l’écran (PC et liseuse).

À vrai dire j’ai fait un peu plus que finaliser le fichier, j’en ai profité pour corriger certaines fautes d’orthographe oubliées par l’éditeur (tout en conservant les termes construits de toutes pièces par Laurent Obertone) et je me suis permis de retoucher (très légèrement) certaines maladresses syntaxiques (poudre à la place de neige, perso ça me pique les yeux, poudreuse eut été plus approprié).

En mon âme et conscience ça ne m’aurait pas dérangé de « travailler » uniquement à partir du scan, c’est d’abord par convenance personnelle que j’ai acheté le roman (et aussi parce que j’avais déjà le premier opus au format papier).

[BOUQUINS] Laurent Obertone – Le Diable Du Ciel

AU MENU DU JOUR

L. Obertone - Le Diable du Ciel
Titre : Le Diable Du Ciel
Auteur : Laurent Obertone
Éditeur : Ring
Parution : France
Origine : 2017
280 pages

De quoi ça cause ?

24 mars 2015. Un A320 de la compagnie Germanwings s’écrase dans les Alpes du Sud françaises. Un agent du BEA est dépêché sur place afin d’identifier les causes possibles de ce crash inexplicable.

Quand il apprendra que le crash est un acte volontaire du copilote, Andreas Lubitz, il va tout mettre en oeuvre pour essayer de comprendre le pourquoi du comment d’un tel acte. Il va ainsi mener une enquête approfondie, mais éprouvante…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Bonne question. Le truc qui s’invite sans prévenir alors que je suis en pleine session de rattrapage de la Rentrée Littéraire 2018 (même si je sais pertinemment que je n’en rattraperai que quelques morceaux, condamnant les autres aux tréfonds de mon Stock à Lire Numérique), est justement arrivé ici un peu par hasard…

Ma chronique

Il y a encore quelques (pas si lointaines) années, j’aurai juré que le numérique ne passerait jamais par moi ! À ma décharge à l’époque numérique voulait dire format PDF… Le truc totalement inadapté à la lecture d’un roman. Puis est apparu l’epub qui m’a converti au numérique (comme dirait l’autre : il n’y a que les imbéciles qui ne changent jamais d’avis).

Aujourd’hui je ne lis quasiment que des ebooks (bin oui, pas de place pour la demi-mesure dans mon esprit tourmenté). Je pousse même le vice jusqu’à m’être fait la promesse de ne jamais débourser le moindre sou pour acheter un bouquin en provenance d’un éditeur n’offrant pas une alternative numérique. RING fait malheureusement de ces éditeurs réfractaires au numérique. Pour la présente chronique, je n’ai pas dérogé à ma promesse, c’est une succession de (heureux) hasards et un brin de motivation qui m’ont permis de lire ce bouquin au format epub.

Au fil de mes errances sur le net, je croise une version PDF du bouquin. Version non commerciale, plutôt genre brut de décoffrage suite numérisation maison. J’ai repris le même processus que celui utilisé pour lire Invasion (avec beaucoup plus de corrections à effectuer) pour pondre ma propre version epub du présent bouquin.

Je connaissais le Laurent Obertone comme essayiste (La France Orange Mécanique et Utoya) et comme romancier (Guerilla) ; pour ce Diable Du Ciel l’auteur combine les deux casquettes, s’il s’agit bien d’une oeuvre de fiction basée sur une triste réalité, c’est aussi le résultat d’un impressionnant travail documentaire.

J’ai d’ailleurs été surpris de voir que RING classait ce bouquin dans sa collection thriller, je le voyais comme un docu-fiction, mais au final je dois reconnaître qu’il est un mix réussi entre les deux : un docu-fiction qui se lit comme un thriller (même si on connaît déjà la fin de l’histoire).

Le récit nous plonge dans la peau du narrateur, un enquêteur du BEA qui veut essayer de comprendre l’incompréhensible, de donner un nom à l’innommable. Pour se faire, il doit cerner le personnage d’Andreas Lubitz, quitte à essayer de se mettre à sa place, de raisonner comme lui.

Comprendre n’est pas pardonner, il n’en sera d’ailleurs jamais question. Pas question non plus de chercher des excuses ou de quelconques circonstances atténuantes à Andreas Lubitz. Son geste est impardonnable, sa folie a provoqué la mort de 149 victimes innocentes, faisant de lui le plus meurtrier des tueurs de masse, doublé d’un assassin (le geste ayant, selon toute vraisemblance, été prémédité).

Le narrateur (tout comme l’auteur) construit sa réflexion autour de deux axes, le premier se concentrant sur la personnalité d’Andreas Lubitz, le second reconstituant les vols Düsseldorf-Barcelone (4U9524) et Barcelone-Düsseldorf (4U9525) ; ce dernier n’arrivera jamais à destination.

L’enquête démontrera que Andreas Lubitz n’aurait jamais dû être déclaré apte au poste de copilote, mais ses mensonges, non-dits et autres dissimulations lui ont permis d’éviter l’interdiction et d’obtenir sa licence de vol. L’auteur nous livre un portrait psychologique détaillé (et à charge) de Lubitz, assorti des réactions des interlocuteurs que le narrateur rencontrera au fil de son enquête (réactions extraites des différents rapports d’enquête).

La reconstitution du vol 9525 est glaçante de réalisme, on a vraiment l’impression d’être spectateur du drame qui se joue à l’insu de tous (du commandant d’abord, puis du personnel navigant et enfin des passagers). Suivra la prise de conscience progressive (dans le même ordre) que l’inéluctable est en train de se produire. Jusqu’à la perte de contact avec l’appareil quand il percute le flanc de montagne.

On aurait pu redouter une sensation de voyeurisme malsain, mais il n’en est rien. L’auteur évite cet écueil en misant avant tout sur le côté humain du drame.

Ne cherchez aucune dimension mystique dans le titre du roman, c’est la traduction littérale du pseudo utilisé par Lubitz pour se connecter à sa tablette (Skydevil).

Travail de relecture oblige j’ai dû lire le bouquin deux fois de suite (un premier survol, après travail sur le code, pour corriger les coquilles les plus évidentes, et une lecture plus attentive pour traquer les erreurs résiduelles), toujours avec la même intensité, incapable de le lâcher… presque malgré moi.

En fermant le bouquin, reste une question qui tourne en boucle : est-ce qu’on aurait pu éviter ce drame ? On a envie d’y croire, mais finalement ça reviendrait à pointer du doigt des éventuelles négligences ; réécrire l’histoire après coup est facile, pour ma part je pense que cette question est condamnée à rester sans réponse.

MON VERDICT

[BOUQUINS] Laurent Obertone – Guerilla

L. Obertone - GuerillaAu menu du jour un bouquin dont la médiasphère bien pensante préfère éviter de parler… même en dire du mal serait lui faire trop d’honneur à en croire ces laquais du politiquement correct. C’est donc avec un plaisir redoublé que je me suis lancé dans la lecture de Guerilla, le roman de Laurent Obertone.
Une intervention de police de routine dans une cité de la Courneuve dégénère. Tandis que leur adjudant est roué de coups et que sa collègue est à son tour mencaée, le troisième policier sort son arme et tire, tuant les six agresseurs. La police est pointée du doigt, les médias dénoncent le fascisme policier, les cités s’embrasent, certains en profitent pour jeter de l’huile sur le feu, d’autres pour passer à l’offensive. Inexorablement la France bascule dans le chaos…
Jusqu’alors Laurent Obertone s’était plutôt illustré en tant qu’essayiste rejetant la langue de bois et n’hésitant pas à appuyer là où ça fait mal, quitte à caresser à rebrousse-poil le politiquement correct. Je ne me permettrai de juger ni l’homme, ni son travail, à chacun de se forger sa propre opinion (de préférence après avoir lu les bouquins de l’auteur plutôt qu’en suivant le mouvement). Pour ma part j’aurai tendance à dire que Guerilla, s’inscrit dans la suite logique de ses essais sur la France, qualifiée successivement d’Orange Mécanique et de Big Brother : une vision empirique de l’avenir.
Un bon essayiste ne fait pas forcément un bon écrivain. Sans doute bien conscient de cette réalité, Laurent Obertone opte pour un style minimaliste, ce qui n’empêche pas certaines maladresses et lourdeurs. Il n’en reste pas moins que globalement le bouquin se lit plutôt bien. Les chapitres sont courts et dynamiques, le rythme est assuré.
Alors crédible ou pas ? Pour ma part j’ai envie de croire que non, je ne peux envisager un tel niveau de renoncement et de culpabilisation chez le peuple français (voir aparté n°2). Outre ce point (qui n’est point de détail), l’enchaînement des événements, tel que le décrit Laurent Obertone, impliquerait un sacré concours de circonstances (et une bonne dose de pas de bol). Je considère donc Guerilla comme une fiction d’anticipation plus que comme une éventuelle mise en garde contre un réel danger potentiel.
Quoiqu’il en soit ce n’est pas forcément un roman à mettre entre toutes les mains. De nombreuses scènes de violence sont décrites sans concession, avec un réalisme cru qui risque de choquer plus d’un lecteur. Je ne reprocherai pas ce parti pris à l’auteur, au contraire rien de tel qu’un bon électrochoc pour nous ouvrir les yeux et nous faire réfléchir.
Les personnages sont nombreux, ils viennent d’horizons divers et variés et se retrouveront impliqués plus ou moins intensément dans le déroulement des événements. dans un premier temps on serait tenté de crier au cliché, voire au manichéisme, mais au fil des chapitres les nuances se précisent chez certains… tandis que d’autres, d’un côté comme de l’autre, restent des irrécupérables.
Laurent Obertone vous invite à suivre les trois journées qui verront la France trembler, vaciller puis s’effondrer. Une fois le chaos bel et bien installé, baisser de rideau ! Comme un pied de nez histoire de dire aux français, vous l’avez bien cherché, maintenant démerdez-vous. Ou, pour reprendre les mots de l’auteur : « La morale de cette histoire, c’est qu’une telle histoire n’a pas de morale. Les moralistes ont tué les réalistes, le réel tuera la morale. Et voilà. Il n’y a d’issue pour personne« .
Roman engagé ou non ? Très honnêtement il faudrait avoir des putains d’oeillères pour refuser de croire que certaines cités sont devenues de véritables zones de non droit, que ces mêmes cités sont un couvoir pour les apprentis djihadistes et autres radicalisations. Est-ce utile de rappeler que la menace du terrorisme islamiste est toujours bien réelle ? Enfin l’absence de sortie de crise clôt ce débat stérile, Laurent Obertone ne suggère aucune solution miracle et n’érige rien ni personne contre la montée du chaos ; difficile dans ce contexte de parler de prosélytisme…

MON VERDICT
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Aparté n°1.
Je me suis promis de bannir de mes achats les éditeurs qui n’offrent pas d’alternative numérique, quitte à passer à côté de très bon titres. Ring fait malheureusement partie de ces éditeurs refusant de vivre avec leur temps. Et pourtant me voilà vous proposant une chronique d’un roman issu du catalogue de Ring. C’est à y perdre son latin ou son lapin, non ?
Et bin non. Et ce pour deux raisons : primo, je n’ai interdit à personne de m’offrir des bouquins en provenance de ces éditeurs ; secundo, si de généreux artisans de l’ebook prennent les choses en mains afin de pallier les lacunes de ces éditeurs, j’aurai bien tort de bouder mon plaisir (pour info je me fous éperdument de l’aspect illégal de la démarche donc inutile de prendre la zone de comm pour le mur des lamentations).
En l’occurrence Guerilla répond aux deux critères, le Père Noël l’a déposé au pied du sapin et j’ai par la suite récupéré une version numérique alternative.

Aparté n° 2.
J’espère franchement ne jamais connaître cette France du très-bien-vivre-ensemble décrite par Laurent Obertone. Un état, un pouvoir et un peuple n’ayant plus la moindre fierté nationale, tout juste des rampants ayant adopté la pensée unique afin de faire le moins de vague possible. Un peuple ayant fait de la lâcheté et de l’hypocrisie un art de vivre.
Je ne veux pas d’une société où la tolérance passe par le renoncement et la culpabilisation, je n’ai pas honte de ce que je suis, je l’assume et le revendique. Ca ne m’empêche pas d’ouvrir mes bras aux autres, mais s’ils viennent chez moi c’est à eux de s’adapter à mon monde et non l’inverse !
J’ai heureusement encore suffisamment foi en la France et aux Français pour croire que ça ne peut pas arriver ; pour penser que face à une telle dérive, la mobilisation serait massive, dans un grand élan national(iste), pour crier haut et fort : NON ! Notre identité nationale est essentielle et ne constitue en rien un obstacle à la tolérance et au vivre-ensemble.

[BOUQUINS] Laurent Obertone – Utoya

L. Obertone - UtoyaJe ne fais pas partie de la gente bien pensante qui fut outrée par La France Orange Mécanique (Parfois sans même avoir pris la peine de le lire), le précédent titre de Laurent Obertone, avec Utoya l’auteur s’aventure de nouveau sur un terrain glissant.
22 juillet 2011, 17h18, Anders B. Breivik débarque sur l’île d’Utoya où se tient, comme tous les ans, un rassemblement des jeunesses du parti travailliste. 17h21, le premier coup de feu retentit et une première victime s’effondre. A 18h34, Anders Breivik se rend à la police, laissant 69 cadavres sur l’île. Plus tôt dans la journée un attentat à Oslo avait fait 8 morts, le poseur de bombe était Anders Breivik…
Plutôt que de m’arrêter aux critiques de presse bobo/intello/gaucho (rayez les mentions inutiles… ah merde y’en a pas), j’aborde ce bouquin en gardant à l’esprit la préface de Stéphane Bourgoin, spécialiste incontesté en France des tueurs en série et tueurs de masse : « Il nous faut louer le travail titanesque de Laurent Obertone et la minutie exceptionnelle qu’il a développée pour reconstituer le parcours authentique d’Anders Breivik et des drames d’Utoya, jusque dans ses moindres détails« .
En s’identifiant à Breivik l’auteur ne cautionne ni son idéologie, ni son action, il nous fait vivre les événements à la première personne afin de leur donner encore plus d’impact. Le récit est entrecoupé de nombreux extraits de documents officiels (rapports d’autopsie, témoignages, greffes du procés, bilans psychiatriques…) qui viennent confirmer que Laurent Obertone n’est pas en pleine « croisade néoréac » (in Les Inrocks, journal connu pour sa totale impartialité, n’est-il point ?).
Certains reprochent la froideur du récit. Normal puisqu’on le vit à travers le personnage Breivik et que le gars n’a jamais manifesté le moindre remords, convaincu que son combat est juste et qu’il sera perçu comme un Templier des temps modernes par les générations futures ; donc oui il reste de marbre face aux faits qui lui sont reprochés et face aux survivants et aux familles.
Dérangeant ? Inconstestablement, pas le bouquin en soi (même si le fait de démarrer le récit à Utoya fait tout de suite l’effet d’une douche glacée) mais que de tels individus puissent exister et faire leur propagande en toute liberté, voire dans l’indifférence générale. Dérangeants aussi le nombre de dysfonctionnements qui ont retardé l’intervention de la police.
L’auteur a fait un choix osé et assumé, sans doute a-t-il pris certaines libertés pour combler les blancs les vides mais globalement, sur le fond, on est effectivement face à un travail hyper-documenté. Sur la forme, ça passe ou ça casse… Pour moi ça passe, même si parfois la plongée dans un esprit aussi malsain laisse des relents acides (et éventuellement des envies de meurtres).
Bien que hautement instructif et intéressant n’espérez pas lire ce bouquin comme vous liriez un roman, personnellement j’ai étalé cette lectures sur plusieurs semaines, le temps d’assimiler et de digérer les différentes parties du récit, m’est d’avis que c’est la seule façon de saisir toute la richesse de cet essai de Laurent Obertone.