[BOUQUINS] Estelle Tharreau – Il Était Une Fois La Guerre

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Titre : Il Était Une Fois La Guerre
Auteur : Estelle Tharreau
Éditeur : Taurnada
Parution : 2022
Origine : France
250 pages

De quoi ça cause ?

Sébastien Braqui est soldat. Sa mission : assurer les convois logistiques. Au volant de son camion, il assiste aux mutations d’un pays et de sa guerre. Homme brisé par les horreurs vécues, il devra subir le rejet de ses compatriotes lorsque sonnera l’heure de la défaite. C’est sa descente aux enfers et celle de sa famille que décide de raconter un reporter de guerre devenu son frère d’âme après les tragédies traversées « là-bas ».

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que c’est Taurnada, une maison d’édition dont le catalogue regorge de pépites.

Parce que c’est Estelle Tharreau, ses quatre précédents romans m’ont tous fait forte impression.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Taurnada, et tout particulièrement Joël, pour leur confiance renouvelée.

Avant d’entrer dans le vif du sujet je tiens à préciser que je place ceux – et celles – qui crachent à la gueule des soldats qui rentrent de campagne, au même niveau que les raclures qui aboient « Suicidez-vous ! » aux flics lors de manifestations. Libre à tout un chacun de condamner un conflit dans lequel notre armée est engagée, mais ce n’est pas une raison pour mépriser les militaires qui ont pris part à ce conflit ; ils n’ont fait que leur boulot et, ne serait-ce que pour ce qu’ils ont vu ou enduré, méritent le respect.

Autant vous le dire franco, avec ce bouquin Estelle Tharreau m’a pris aux tripes. Elle a su trouver les mots justes pour décrire l’inexorable dérive d’un soldat et d’une famille. Un soldat qui s’emmure dans le silence tout simplement parce qu’il ne trouve pas les mots pour expliquer à sa femme et à sa fille ce qu’il ressent, et encore moins ce qu’il a vécu. Une épouse et une fille qui ne comprennent pas ce silence qu’elles ne savent comment interpréter.

Au fil des campagnes auxquelles participe Sébastien, on voit le Shonga (un pays fictif situé quelque part en Afrique) s’enfoncer dans la déchéance et la misère ; les soldats français ont de plus en plus de mal à comprendre leurs missions… d’autant qu’elles vont parfois frôler l’absurdité (livraison d’armes et de vivres à ceux qui étaient les ennemis d’hier). Les soldats vont aussi devoir assister, avec interdiction formelle d’intervenir, aux massacres interethniques (toute ressemblance… n’est à priori pas le fruit du hasard).

Outre le stress post-traumatique engendré par ce que Sébastien a dû voir et parfois faire, il va aussi devoir composer avec la haine de la population civile à son retour en France, une armée qui ne veut plus de ces vétérans – perdants d’une guerre sale et impopulaire –, une administration fidèle à elle-même…

Au fil des chapitres on alterne entre une narration à la troisième personne (ou plus exactement une narration omnisciente puisqu’elle n’est pas centrée sur un unique personnage) et une narration à la première personne qui donne alors la parole à un reporter de guerre qui s’est lié d’amitié avec Sébastien.

Les différentes parties du roman se présentent sous forme d’un compte à rebours allant de 1095 jours avant explosion à Explosion. Un sinistre décompte qui laisse présager le pire. Un pire qui va commencer à prendre forme dans l’esprit de Sébastien jusqu’à planifier son ultime action dans les moindres détails.

La grande force du roman est de s’intéresser à l’épouse (Claire) et à la fille (Virginie) de Sébastien, on voit le fossé se creuser inexorablement à grand renfort de non-dits. Le traitement des personnages est un sans-faute qui participe grandement à la réussite du bouquin.

Un récit souvent dur, mais toujours empli d’humanité ; un thriller psychologique totalement maîtrisé qui est aussi un magnifique hommage à nos soldats.

PS : je suis très en retard dans la rédaction et la mise en ligne de ce post, comme beaucoup – j’aimerai dire tout le monde, mais malheureusement pour certains la fin de l’année n’a pas forcément un air de fête –, j’ai été quelque peu occupé avec les préparatifs de Noël.

MON VERDICT

Coup double