[BOUQUINS] Lorraine Letournel Laloue – HS 7244

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L. Letournel - HS 7244
Titre : HS 7244
Auteur : Lorraine Letournel Laloue
Éditeur : Belfond
Parution : 2019
Origine : France
288 pages

De quoi ça cause ?

Marius espérait faire le voyage de ses rêves avec ce séjour en Russie en compagnie de sa moitié, l’amour de sa vie, Camille. Sauf qu’un matin, Marius va se réveiller dans une cellule crasseuse, prisonnier dans un camp qui va se révéler être une véritable antichambre de l’Enfer.

Pourquoi a-t-il été fait prisonnier ? Qui sont ses geôliers / tortionnaires ? Où est Camille ?

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

C’est un peu par hasard, en panne d’inspiration en visitant Net Galley, que j’ai découvert ce roman. Le titre m’a intrigué, puis la couv’ à la fois sobre et sombre m’a tapé dans l’œil, enfin la quatrième de couv’ a enfoncé le clou de la curiosité.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Belfond et Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Avant d’entrer dans le vif du sujet je dirai simplement : âmes sensibles s’abstenir. Le bouquin est terriblement violent, glauque et désespéré ; Lorraine Letournel Laloue n’épargne ni ses personnages ni ses lecteurs. Cette violence n’est toutefois pas gratuite, elle est mise au service d’une cause juste, pour pointer du doigt et dénoncer une situation amorale et abjecte.

Pour son premier roman, l’auteure ose un choix audacieux, engagé et assumé. Si son roman reste une oeuvre de fiction, elle s’inspire toutefois de faits réels (attention à ne pas confondre s’inspirer de faits réels et relater des faits réels). Si l’auteure révèle assez tard dans son récit le pourquoi de ces persécutions en tout genre (violences physiques et psychologiques, humiliations et privations en tout genre), il n’est toutefois pas difficile de se faire une idée de la chose quand on sait que l’intrigue se déroule en Tchétchénie de nos jours.

Alors : noir c’est noir, il n’y a plus d’espoir ? Oui et non.

Oui, parce que l’auteure nous propulse au cœur de l’horreur dans ce que l’humanité peut avoir de plus odieux et abominable ; incontestablement un roman d’une absolue noirceur qui vous broiera le cœur et vous vrillera les tripes.

Non, parce que même plongé dans le pire des cauchemars les victimes se serrent les coudes et se soutiennent mutuellement. Autant les bourreaux sont dépeints comme des monstres déshumanisés, autant les victimes dégagent une formidable humanité, dans ce qu’elle a de meilleur cette fois.

Une lecture coup-de-poing qui nous fait relativiser nos petits tracas du quotidien et apprécier de vivre dans le pays des droits de l’homme (même si tout n’est pas parfait, loin s’en faut). Un roman qui, dans toute son horreur, est aussi une ode à la liberté et à la tolérance.

Un premier roman osé, mais redoutablement efficace. Au risque de me répéter, je conclurai ma présente chronique en vous invitant à le lire, même si l’exercice se révélera parfois éprouvant moralement et nerveusement, mais c’est pour la bonne cause.

Je tire mon chapeau (que je ne porte pas) à Lorraine Letournel Laloue qui s’impose d’entrée de jeu dans la cour des grands du roman noir francophone.

MON VERDICT
Coup de poing

[BOUQUINS] Bryan Reardon – Le Vrai Michael Swann

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B. Reardon - Le vrai Michael Swann
Titre : Le Vrai Michael Swann
Auteur : Bryan Reardon
Éditeur : Gallimard
Parution : 2019
Origine : USA (2018)
432 pages

De quoi ça cause ?

Julia et Michael Swann vivent paisiblement dans leur maison de la banlieue de Philadelphie avec leurs deux enfants.

Un soir, alors que Michael est au téléphone avec Julia depuis New York, la liaison est brusquement interrompue. Une bombe a explosé à Penn Station, où se trouvait justement Michael…

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que Bryan Reardon m’avait bluffé avec son précédent et premier roman, Jake. J’espérais retrouver la même intensité et la même humanité dans ce second roman ; mais aussi quelque chose de différent.

Ma Chronique

La lecture du roman Jake de Bryan Reardon fut incontestablement une révélation de l’année 2018, un véritable tsunami émotionnel d’où se dégageaient une humanité et une empathie phénoménales ; c’est ce que j’espérais retrouver en ouvrant Le Vrai Michael Swann, le second roman de l’auteur. La même intensité, mais servie par une intrigue complètement différente de celle de Jake.

Incontestablement Bryan Reardon sait mettre des mots sur la détresse humaine et nous faire ressentir des émotions fortes. De nouveau il confronte ses personnages (Julia Swann en l’occurrence) aux pires situations et pour y faire face ils devront puiser dans une force qu’ils ignoraient posséder. Le premier deal est donc rempli haut la main, on retrouve des émotions brutes et un récit profondément humain.

L’intrigue est plutôt bien construite et devient rapidement addictive, mais je l’ai trouvée trop proche de celle de Jake ; les deux récits n’ont bien évidemment rien en commun sur le fond, mais c’est dans la forme et plus particulièrement dans la façon de les traiter que les similitudes sont flagrantes. J’espérais une approche totalement nouvelle, donc un peu déçu sur ce coup.

Au fil des chapitres l’on découvre les grandes étapes qui ont marqué la vie de Julia et Michael, leur rencontre, la naissance des enfants, le déménagement… Une famille de la classe moyenne parmi tant d’autres, avec des hauts et des bas comme tout le monde. Des gens ordinaires en somme dont on partage le quotidien dans une Amérique en proie à la crise ; en pleine campagne électorale qui se soldera par la victoire de Donald Trump.

Bryan Reardon nous mitonne une intrigue qui tient plutôt bien la route malgré quelques détails qui manquent de vraisemblance, pas de quoi gâcher le plaisir, ni de quoi nous couper l’envie de connaître le fin mot de l’histoire.

C’est volontairement que je ne m’épanche ni sur l’intrigue ni sur les personnages. C’est un roman qui gagne à être découvert au fil des pages.

Je referme le bouquin plutôt satisfait, mais pas totalement conquis. J’espère que le troisième roman de l’auteur, déjà disponible outre-Atlantique, me surprendra par une approche différente de l’intrigue et une construction inédite du récit.

MON VERDICT