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Titre : L’Empreinte
Auteur : Alexandria Marzano-Lesnevich
Éditeur : Sonatine
Parution : 2019
Origine : USA (2017)
480 pages
De quoi ça cause ?
En 2003 Alexandria Marzano est une étudiante en droit farouchement opposée à la peine de mort. Lors d’un stage en Louisiane, elle découvre le dossier Langley, une affaire qui va profondément l’ébranler et la faire douter de ses propres convictions.
En 1992, Ricky Langley, 26 ans, tue Jeremy Guillory, un enfant de six ans venu jouer avec ses petits voisins. Déjà condamné pour des affaires de pédophilie, Langley sera condamné à mort. En 2003, son procès sera révisé.
Pour Alexandria cette affaire a une résonance bien particulière, elle fait remonter à la surface ses propres souvenirs d’enfance, ces années durant lesquelles son grand-père a abusé d’elle et de sa sœur cadette…
Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?
Parce que c’est Sonatine. Et même si ce titre s’écarte de leur ligne éditoriale habituelle, il m’intriguait et titillait ma curiosité.
Sonatine et Net Galley ayant donné une suite favorable à ma demande, je profite de l’occasion pour découvrir ce titre en avant-première (parution le 24 janvier).
Ma Chronique
Avant toute chose je tiens à remercier chaleureusement les éditions Sonatine et la plate-forme Net Galley pour leur confiance renouvelée.
Si ce titre m’intriguait tout particulièrement c’est parce qu’il est un cocktail étonnant entre la reconstitution façon True Crime (l’affaire Langley demeure le thème central du récit) et des éléments autobiographiques (principalement les abuse subis par l’auteure et leurs conséquences). Afin de combler les blancs laissés par les diverses (et nombreuses) sources consultées, Alexandria Marzano-Lesnevich a dû faire jouer son imagination afin de consolider son récit.
Ce bouquin est le fruit de dix années de labeur et plus de 30 000 pages (plus les innombrables photos et vidéos) relatives à l’affaire Langley consultées. Un bouquin qui a bien failli ne jamais voir le jour, au vu de la réaction de l’auteure quand elle a pris connaissance de l’affaire Langley :
Je suis venue ici pour aider à sauver l’homme à l’écran. Je suis venue pour contribuer à sauver des hommes tels que lui. Je suis venue parce que mes idéaux et mon identité existent indépendamment de ce qui s’est produit dans le passé. Il le faut. Sinon, que me réserve la vie ?
Mais je regarde l’homme à l’écran, je sens les mains de mon grand-père sur moi, et je sais. Malgré la formation que j’ai suivie, malgré le but que je poursuivais en venant travailler ici, malgré mes convictions.
Je veux que Ricky meure.
On sent à la lecture du bouquin, et tout particulièrement quand Alexandria Marzano-Lesnevich évoque son propre parcours, qu’elle a dû effectuer un énorme travail sur elle-même pour exprimer tout ce qu’elle avait sur le cœur et la conscience. À ce titre l’exercice apparaît comme une forme d’exutoire (voire d’exorcisme) face à ce passé qui l’empoisonne par ses non-dits accumulés.
En lisant tout ce qui a trait à l’affaire Langley, on ne peut que s’incliner devant le formidable travail de documentation et de synthèse réalisé par l’auteure. On en viendrait presque à oublier que l’on est cœur d’une affaire aussi sordide que réelle, tant on a l’impression d’être plongé dans un très bon polar.
Alexandria Marzano-Lesnevich s’efforce de retranscrire les faits bruts (et ce n’est pas évident au vu des nombreuses déclarations contradictoires de Ricky Langley), évitant toute interprétation personnelle et surtout ne prenant pas parti. De même elle évite toute impression de voyeurisme malsain, ne s’attardant pas inutilement sur les détails les plus glauques de l’affaire.
En refermant ce bouquin, j’en viendrai presque à ressentir un plaisir coupable à avoir trouvé cette lecture captivante (même si par moments ce fut oppressant) de bout en bout.
Reconnu coupable de meurtre au premier degré (avec préméditation), Ricky Langley sera condamné à mort. Un second procès commuera sa peine en prison à perpétuité, le meurtre au second degré (sans préméditation) étant retenu comme chef d’accusation. En 2018, un cinquième jugement remet en question l’intention même de donner la mort… Un verdict qui pourrait valoir à Ricky Langley de sortir de prison après 26 années de détention. Le verdict final devrait être connu dans les prochaines semaines.
Je sais que bon nombre de bien-pensants doivent se dire que justice a été rendue, que Langley a payé sa dette à la société et autres conneries du genre… Pour ma part j’espère bien qu’il crèvera en prison sans jamais avoir revu la lumière du jour. À 52 ans il peut encore nuire aux enfants qui auraient le malheur de croiser sa route. Cette opinion n’engage que moi, mais je l’assume totalement.