[BOUQUINS] Valentin Musso – Voici Demain

Chloé et Paul vivent dans une ferme isolée, au pied des Pyrénées. Ils partagent leur quotidien avec Mathieu, qui enseigne à Paul différentes techniques de chasse et de survie. Le trio a renoncé à tout confort moderne et s’est coupé du monde pour se rapprocher de la nature.

Mais la réalité ne va pas tarder à se rappeler à eux quand l’impensable se produit, plongeant le pays dans la panique. Dans cet environnement devenu hostile, le moindre événement peut avoir des conséquences dramatiques. Une mauvaise chute, un animal sauvage qui rôde, l’irruption d’un inconnu…

La vie déjà précaire de Chloé, Paul et Mathieu vacille. Pourtant, leur cauchemar ne fait que commencer : ils sont loin de se douter du véritable danger qui les guette.

Parce que ça faisait déjà un moment que j’avais envie de découvrir l’univers littéraire de Valentin Musso, le petit frère de Guillaume.

A en croire la quatrième de couv’, ce dernier roman l’éloigne de son genre de prédilection qui reste le polar / thriller.

Dès les premières pages, Valentin Musso veut imposer une atmosphère anxiogène et oppressante. Le lecteur se retrouve plongé dans un huis clos, au cœur d’une ferme isolée, perdue dans les bois, où vivent un homme et une femme dont on ignore presque tout. Le monde extérieur semble avoir été ravagé par un mystérieux mal.

De prime abord, tous les ingrédients de la dystopie classique semblent réunis : isolement, menace invisible, perte de repères, et un climat de peur diffuse. Pourtant, à mesure que le récit avance, ce cadre se fissure. Valentin Musso cultive un peu trop l’ambiguïté, sème le doute, et l’on en vient à se demander si ce que l’on perçoit est bien réel. J’ai rapidement eu la certitude qu’il y avait anguille sous roche, que l’auteur jouait volontairement avec les codes du genre pour mieux nous égarer.

Et il faut reconnaître que le pari est réussi. Valentin Musso parvient à surprendre à plusieurs reprises, notamment à la fin de la première partie, lorsque se révèle le véritable lien qui unit Paul et Chloé. Puis, à la fin de la seconde partie, une autre révélation bouleverse notre perception de l’histoire et redéfinit tout ce que nous pensions avoir compris. Même en se doutant que l’auteur prépare un twist, on se fait balader.

Pendant une grande partie du roman, les personnages de Paul et Chloé demeurent énigmatiques. Cette distance crée d’abord une légère frustration, quand les pièces du puzzle finissent par s’emboîter, leurs comportements et leurs réactions prennent enfin sens.

Il serait tentant d’aborder d’autres aspects du roman, mais ce serait trahir le choix de Valentin Musso, qui préfère laisser dans l’ombre certaines zones jusqu’au moment qu’il juge opportun. Ne souhaitant pas spoiler, je resterai donc dans une approche très générale du roman.

Sur le plan formel, la construction narrative est particulièrement maîtrisée. L’auteur alterne les points de vue et les styles : un récit à la troisième personne se mêle à des passages à la première personne, où Paul et Chloé prennent tour à tour la parole. Cette alternance fluidifie le récit, renforce l’immersion émotionnelle et offre une compréhension plus fine de leurs tourments intérieurs. Le résultat est d’une grande cohérence, à la fois sur le plan psychologique et narratif.

Nul doute que je poursuivrai ma découverte de ses romans : Valentin Musso s’impose comme une voix singulière dans le paysage du thriller français, différente de celle de son frère Guillaume, mais tout aussi efficace quand il s’agit de tenir le lecteur en haleine.

[BOUQUINS] Collectif, sous la direction d’Yvan Fauth – Toucher Le Noir

AU MENU DU JOUR


Titre : Toucher Le Noir
Auteur : Collectif, sous la direction d’Yvan Fauth
Éditeur : Belfond
Parution : 2021
Origine : France
336 pages

De quoi ça cause ?

11 auteurs mettent le toucher à l’honneur.
10 nouvelles fondues au noir.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Principalement pour la même raison qui m’avait poussé à découvrir les deux précédents recueils proposés par Belfond et dirigé par Yvan Fauth : Yvan himself ! Le seul, l’unique !

Une fois encore l’ami Yvan réunit une belle brochette d’auteurs autour d’un thème commun.

Ma Chronique

Je remercie les éditions Belfond et Yvan qui m’ont fait parvenir le présent recueil.

Après l’audition et la vue, Yvan Fauth continue d’explorer le noir à travers nos cinq sens (et un soupçon de sixième sens) ; les onze auteurs qui ont répondu présents à l’invitation du maître de cérémonie mettent le toucher à l’honneur. Un toucher qui, à n’en point douter, va se décliner sous toutes ses formes (sauf rectal !).

Parmi les invités à la table d’honneur on retrouve deux auteurs qui s’étaient déjà prêtés au jeu dans Regarder Le Noir (Laurent Scalère et Maud Mayeras) ; les neuf autres sont des nouveaux venus dans l’aventure… nouveaux mais certainement pas novices ! Ce sont des plumes connues et reconnues de la littérature noire et/ou policière.

Ce sont Frank Thilliez et Laurent Scalèse qui ouvrent le bal avec un texte écrit à quatre mains. Les auteurs font le pari audacieux de nous raconter leur histoire dans l’ordre antéchronologique (on commence par la fin pour remonter vers le début).

Valentin Musso nous invite ensuite à suivre un couple qui sur le chemin du retour après une sortie au restau. Un retour de soirée où tout va basculer.

Avec Solène Bakowski nous cheminerons sur les sentiers tortueux et hypocrites de la foi. Un texte aussi puissant qu’émouvant (on pourrait ajouter éprouvant, énervant…).

Benoît Philippon nous offre un périple à fleur de peau dans le monde de l’art dans ce qu’il a de plus indécent, non par ce qu’il peut montrer ou représenter mais par les prix que certaines œuvres peuvent atteindre. Un concept poussé à l’extrême.

Eric Cherrière nous concocte une histoire de vengeance qui se mange froide sur fond de pollution plastique.

Michaël Mention signe la nouvelle la plus longue du présent recueil. La plus minimaliste aussi puisqu’elle met en scène deux individus dans une cabine d’ascenseur à l’arrêt. L’auteur déploiera tout son savoir-faire pour sublimer ce point de départ et surprendre les lecteurs.

Avec Danielle Thiéry vous découvrirez que la musique n’adoucit pas toujours les mœurs, les dernières notes sont juste sublimes.

Ghislain Gilberti nous invite à une traque aux frontières du réel dans laquelle les prédateurs se feront proies et inversement. Une approche audacieuse qui démarque clairement son récit des autres.

Jacques Saussey nous emmène en Italie à la rencontre d’un prisonnier qui a un véritable don pour le dessin… un don qui va se transformer en malédiction.

Maud Mayeras nous livre un récit qui nous glacera les sangs tant par son absolue noirceur que par sa triste part de vérité que l’auteure nous rappelle à la fin de son récit.

La visite s’achève en compagnie de Franck Thilliez et Laurent Scalése qui nous font découvrir la seconde partie de leur récit en deux actes. Une relecture des faits dans l’ordre chronologique cette fois.

Comme pour les précédents recueils je vais donc attribuer une note sur 5 à chacune des nouvelles composant ce recueil. Au risque de me répéter ces notes n’engagent que moi et sont le reflet de mon ressenti personnel.

  • F. Thilliez & L. Scalèse – 8118 : Envers / 4
  • V. Musso – Retour De Soirée / 4.5
  • S. Bakowski – L’Ange De La Vallée / 5
  • B. Philippon – Signé / 5
  • E. Cherrière – Mer Carnage / 4
  • M. Mention – No Smoking / 5
  • D. Thiéry – Doigts D’Honneur / 4.5
  • G. Gilberti – L’Ombre De La Proie / 5
  • J. Saussey – Une Main En Or / 4.5
  • M. Mayeras – Zeru Zeru / 5
  • F. Thilliez & L. Scalèse – 8118 : Endroit / 4

Soit une honorable moyenne de 4,6 sur 5 que mon infinie mansuétude me pousse à arrondir à un carton plein de 5 Jack ! Pour remercier les auteurs, parce qu’ils le valent bien comme le prouvent leurs récits. Et pour remercier Yvan qui poursuit, pour notre plus grand plaisir, l’aventure.

Rendez-vous l’année prochaine pour une nouvelle exploration du noir par le biais d’un sens encore inédit (l’odorat ou le goût ? telle est la question).

MON VERDICT