En errant dans les rayonnages de votre librairie préférée il est difficile de rester indifférent à la couv’ et au titre de ce bouquin, Il Est De Retour, signé Timur Vermes. La frange, la moustache dessinée par le titre, aucun doute possible sur l’identité de ce fameux « Il »… Et oui c’est bien lui.
Berlin, été 2011. Adolf Hitler reprend connaissance dans un terrain vague au coeur d’une Allemagne qu’il ne connait plus. Si le pays a changé ce n’est pas le cas du führer, bien déterminé à reprendre les choses en main. Pour se faire il va user et abuser de l’arme d’abrutissement massif ultime qu’est la télévision…
Avant d’aller plus loin je vous invite à méditer cette phrase de Pierre Desproges : « On peut rire de tout mais pas avec n’importe qui« . Si vous n’adhérez pas, si le second (voire plus) degré est un concept étranger pour vous, non seulement je vous plains mais en plus je vous invite à passer votre tour sur ce coup.
Deuxième mise au point concernant l’auteur, Timur Vermes est certes allemand et certes trop jeune (né en 1967) pour avoir connu la seconde guerre mondiale, mais il est aussi juif, je doute fort que la Shoa lui soit totalement inconnue et plus encore qu’il ait besoin de leçons de morale prétendument bien pensante. Si vous voulez connaitre le pourquoi du comment de son choix il suffit de taper son nom dans Google, les articles le concernant ne manquent pas et sont globalement bien ficelés.
Dernier point à ne pas perdre de vue, historique cette fois. En 1933 Hitler n’a pas pris le pouvoir par la force ou les armes, il a été démocratiquement élu. Son programme était clairement affiché dans Mein Kampf, y compris la solution finale. Ca ne change rien au fait qu’il soit dans le top ten des plus grands salopards de l’Histoire (avec Staline, Mao et Pol-Pot).
Bon si malgré ces mises en garde vous avez pris le bouquins avec une certaine appréhension et y avez vu une ode au nazisme alors dans ce cas vous êtes tout bonnement incurable, désolé de vous l’annoncer sans prendre de gants. Nicht mein Gott ! L’humour ne passera pas par vous…
Je ne dis pas qu’il faut être un âne pour ne pas lire ce bouquin (il y a un tas de raisons qui peuvent vous poussez à l’éviter) ou ne pas l’avoir aimé (chacun ses goûts, je respecte les vôtres) ; simplement ayez de vrais arguments pour motiver votre décision plutôt que des clichés faciles.
Aucun message politique sous-jacent, le propre de la satire est justement de taper là où ça fait mal. Car c’est bel et bien ce que vous lirez en parcourant ce bouquin, une satire de la société contemporaine et du pouvoir des médias sur les foules. Qu’ils vous encensent ou vous diabolisent, vous aurez à coup sûr un fan club grandissant. Le but du jeu n’est pas seulement de faire rire mais aussi de faire réfléchir et éventuellement d’alerter.
Ma motivation première en prenant ce bouquin tenait d’avantage à une simple curiosité qu’à un réel intérêt ; l’intérêt n’est venu qu’au fil des pages et des sourires. Un intérêt qui s’est parfois émoustillé du fait de quelques longueurs et de digressions germano-germaniques (heureusement un glossaire est proposé à la fin du bouquin afin d’y voir un peu plus clair) qui risquent de décourager le lecteur non germanophile.
L’auteur ne fait pas les choses à moitié en prenant le parti d’écrire son bouquin à la première personne, comme si c’était Hitler qui nous livrait ses pensées et projets. Le but avoué étant de donner plus authenticité à son récit. Pari réussi au point d’en être parfois troublant. Une provocation de plus assumée par l’auteur.
Au final une lecture pas désagréable mais ni transcendant, ni indispensable ; aucun regret toutefois, ma curiosité a été satisfaite. Dommage que l’auteur n’ait pas opté pour une fin plus aboutie, sur le coup on reste sur notre faim ce qui est toujours un peu frustrant au moment de refermer un livre.
Le bouquin peut d’ores et déjà se targuer d’être une belle machine commerciale, plus d’un millions d’exemplaires vendus en Allemagne, traduit en 35 langues et les droits pour une adaptation au cinéma déjà acheté par Constantin Film.