Pour cette nouvelle étape de mon Challenge retrouvailles je continue à naviguer entre les genres, cette fois la fiction cotoie l’Histoire en compagnie de Serge Brussolo et Le Suaire Ecarlate, deuxième opus du Cycle de Wallah.
A la mort de la sorcière à l’origine du sort, le don de Wallah disparaît. Libérée de ses obligations d’assassin et protectrice du Baron de Ponserrat, elle rejoint le forain Bézélios. Eternel « honnête truand », Bézélios s’est mis dans l’idée de monter une arnaque religieuse. Un pari qui pourrait se révéler fatal s’il venait aux oreilles de l’inquisiteur Jome le Noir, l’homme d’église a en effet déclaré une guerre impitoyable aux trafiquants de fausses reliques…
Je ne suis pas particulièrement fan des romans historiques, ni même de la période du Moyen Age (une espérance vie qui ne dépasse guère les 30 ans et une Eglise toute puissante… pour moi ça ressemble plus à l’enfer qu’au paradis !) mais il est des auteurs, comme Jean Teulé ou Serge Brussolo, qui, par leur formidable talent de conteur, m’embarquent totalement dans leur récit, quel que soit le contexte.
Au fil des pages la fiction côtoie l’Histoire, on sent que l’auteur s’est bien documenté sur le Moyen-Âge, sans être trop didactique et sans lourdeur, il nous plonge au coeur de son intrigue, parsemant son récit de faits authentiques sur les us et coutumes de l’époque (une époque où l’ignorance populaire faisait les choux gras de l’Eglise).
Dans la première partie du récit Wallah donne un peu l’impression de subir les événements plutôt que d’en être l’actrice ; ça peut surprendre mais ça correspond plutôt bien à son état d’esprit du moment, elle est un peu larguée maintenant qu’elle se retrouve livrée à elle même. Mais elle se reprendra vite quand la troupe se retrouvera embarquées au coeur d’intrigues et complots visant à trouver un héritier légitime au trône de France (on est en pleine guerre de Cent Ans, la situation était pour le moins trouble).
Une intrigue menée sans temps mort, pleine de surprises et de belles trouvailles. Wallah y croisera, comme précédemment, des personnages hauts en couleur ; certains plutôt burlesques, d’autres au contraire qui font froid dans le dos. J’avoue avoir eu un faible pour Masaki, un samouraï maître des poisons plein de sagesse et de bon sens (une bouffée d’oxygène face à l’obscurantisme ambiant). Il pourrait sembler un tantinet déplacé dans le contexte mais grâce au talent de l’auteur sa présence s’intègre parfaitement à l’intrigue.
J’ai passé un trés agréable moment en compagnie de ce bouquin, je ne sais pas si l’auteur compte faire vivre d’autres aventures à Wallah, si tel était le cas je les suivrai avec plaisir. Quoi qu’il en soit ça ne fait que conforter mon envie de découvrir davantage l’univers littéraire de Serge Brussolo, d’autant que l’auteur est des plus prolifiques.
Pour l’indécrottable athée que je suis, les quelques piques que Serge Brussolo adresse à l’Eglise sont plutôt jouissives, il le fait tantôt avec humour, tantôt de façon plus acerbe, selon le personnage qui s’exprime. Je vous livre trois exemples parmi tant d’autres :
« Les paroles de la Bible lui traversent l’esprit : Mangez, ceci est mon corps, buvez, ceci est mon sang. Elle s’est toujours étonnée de ce que les chrétiens ne s’offusquent jamais du caractère cannibale de ce commandement, eux qui n’hésitent nullement à accuser les autres religions de « pratiques abominables ». » (Wallah)
« Il y a beau temps qu’il a compris que les hommes d’Église ont besoin du Diable pour exister. Sans lui, ils ne sont rien. La menace diabolique autorise la prolifération des bûchers. C’est utile quand on veut se débarrasser de ses ennemis politiques… et confisquer leurs biens ! » (Arno)
« Vous n’avez guère l’esprit scientifique, vous, les Occidentaux. La religion tient lieu d’explication commode à tout ce que vous refusez d’étudier. » (Masaki)