[BOUQUINS] Bernard Petit – Le Nerf De La Guerre

Le Patron, un homme respecté au Maroc, a monté son business sur le commerce du cannabis. En lien avec les producteurs locaux, il achemine la marchandise vers l’Europe. Mais aujourd’hui plus qu’hier, il faut savoir être inventif pour passer sous les radars de la police. Et pour ça, il peut compter sur Youssef, son bras droit et fils spirituel, celui à qui il destine son empire. Un homme discret, mesuré, à qui l’argent ne fait pas tourner la tête. Tout le contraire de Junior.

Celui-ci a rejoint le réseau pour gérer, depuis Paris, les flux d’argent générés par le trafic. Le problème, c’est que Junior appartient à cette génération qui ne respecte pas les règles établies. Fougueux, impatient, il déborde d’idées et d’ambition. Quitte à mettre en péril le fragile équilibre de toute cette organisation. Pourtant, dans leur monde, les conflits sont toujours mortels…

Parce que le précédent (et premier) roman de Bernard Petit, La Traque, m’avait fait forte impression. On y retrouve la touche unique des polars écrits par des anciens de la maison.

Je remercie les éditions Fleuve et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée.

Après un premier roman des plus aboutis et d’un réalisme bluffant, nous étions nombreux à attendre Bernard Petit au tournant du second roman. Force est de reconnaître que l’auteur relève haut la main le défi !

Jamais un roman ne m’a plongé au cœur du trafic de drogue avec autant de réalisme. Sous la plume hyper documentée de l’auteur, on découvre les méandres du trafic via ses différents acteurs. Un univers impitoyable où le moindre écart peut s’avérer mortel.

Pour tisser son intrigue Bernard Petit oppose deux visions du trafic de stupéfiant. Avec le sage Youssef d’un côté, qui préfère miser sur un réseau discret qui respecte les règles que le milieu a plus ou moins édictées au fil du temps. De l’autre se trouve le jeune et impétueux Junior, qui veut voir toujours plus grand et aller toujours plus loin, quitte à bafouer certaines de ces règles qu’il estime dépassées.

Tous les aspects du trafic sont abordés sans tabou dans ce roman. De l’acheminement à la revente en passant par le stockage et les divers montages financiers – de plus rudimentaire au plus élaboré – permettant à l’argent de passer sous les radars des autorités.

Bien entendu ces divers aspects plus ou moins techniques vont permettre au roman de se démarquer mais ce n’est pas non plus l’assurance d’avoir un bon thriller entre les mains. L’auteur nous concocte une intrigue largement à la hauteur de son important travail documentaire. Une intrigue qui m’a tenu en haleine quasiment de la première à la dernière page.

Une intrigue dans laquelle la police ne va intervenir que tardivement, mais le moins que l’on puisse dire c’est que leur apparition sera des plus remarquée. Les différents services impliqués vont unir leurs efforts pour mettre en place un plan particulièrement audacieux dans l’espoir de faire dérailler la mécanique parfaitement huilée qui leur fait face.

Les personnages sont particulièrement soignés, pas question de tomber dans le piège du manichéisme à deux balles où tout doit être noir ou blanc. Ici tout est nuancé, ainsi certains « méchants » vous apparaîtront comme plutôt sympathiques alors que d’autres demeureront de véritables pourritures sans foi ni loi.

Assez peu d’intervenants du côté des forces de l’ordre mais l’auteur en profite pour pointer du doigt des conditions de travail difficilement conciliables avec une vie sociale ou familiale. Un métier qui doit aussi composer avec un manque d’effectif et de moyens auquel viendront s’ajouter de nombreuses tracasseries administratives. Un métier qui va exiger beaucoup de ceux qui s’y engagent mais ne leur rendra pas grand-chose, surtout pas la reconnaissance.

Bernard Petit opte pour une approche très visuelle, sans fioriture. Il faut que ça claque comme un coup de feu et que ça fasse mouche instantanément. Un choix qui s’avérera payant, tant on aura du mal à lâcher le bouquin une fois qu’il nous aura ferré.

Pour l’anecdote, l’image de la couv’ renvoie à l’un des personnages du roman… et pas des moindres !

Avec ce roman l’auteur signe un sans faute captivant et fascinant de bout en bout. Je frétille déjà d’impatience dans l’attente du prochain roman de Bernard Petit.