[BOUQUINS] Collectif, sous la direction d’Yvan Fauth – Déguster Le Noir

AU MENU DU JOUR


Titre : Déguster Le Noir
Auteur : Collectif, sous la direction d’Yvan Fauth
Éditeur : Belfond
Parution : 2023
Origine : France
304 pages

De quoi ça cause ?

Treize auteurs et autant de nouvelles pour mettre le goût à l’honneur, on passe à table… avec une nappe noire bien entendu.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

La question ne se pose pas. Déguster Le Noir est le cinquième et dernier voyage sensoriel orchestré par Yvan et les auteurs qui ont accepté de se prêter au jeu.

Du coup le recueil grille la priorité à ses pairs obtenus via Net Galley et toujours en attente de lecture.

Ma Chronique

Je remercie chaleureusement les éditions Belfond et la plateforme Net Galley pour leur confiance renouvelée. Sans oublier Yvan, pour son amitié malgré la distance et pour nous avoir fait vibrer au fil de la découverte des cinq sens du noir.

Pour cet ultime voyage c’est le goût qui est mis à l’honneur. Treize auteurs ont répondu présents afin de sublimer le noir et faire frétiller nos papilles. Parmi eux, dix intègrent pour la première fois la redoutable black team d’Yvan Fauth.

Si la grande majorité des auteurs ne m’est pas inconnue, j’avoue que deux auteures du présent recueil sont des découvertes : Anouk Langaney et Patricia Delahaie.

Treize textes à dévorer ou à savourer, chauds ou froids, avec les doigts ou avec les couverts en argent de Mamie Germaine… Qu’importe du moment que vous vous régalez !

Le noir se décline à toutes les sauces sous les plumes acérées des auteurs, du policier au fantastique, en passant par la science-fiction.

C’est à Bernard Minier que revient l’honneur d’ouvrir les agapes avec une mise en bouche qui se déguste saignante. Le titre annonce la couleur.

Suivra une première « auteure découverte » avec Anouk Langaney et son texte qui se déroule comme un menu de l’apéritif au pousse café. Un menu fort appétissant soit dit en passant.

Cédric Sire pointe du doigt les diktats du mannequinat avec une riposte pour le moins radicale.

Pierre Bordage opte pour l’anticipation, un domaine dans lequel il n’a plus rien à prouver, pour nous faire goûter à l’amertume de son intrigue.

Christian Blanchard revisite Des Souris Et Des Hommes de Steinbeck, avec un personnage tout en muscles mais pas très futé et son acolyte toujours à la recherche d’un bon plan pour aller de l’avant.

Avec Nicolas Jaillet le burn-out prend tout son sens.

Jérémy Fel nous offre une vision d’avenir bien sombre, sur fond de réchauffement climatique, de secrets de famille et de télé-réalité.

Sous la plume de Sonja Delzongle, un grand classique de la littérature policière, la jalousie, est sublimé pour notre plus grand plaisir pervers.

Nicolas Beuglet nous une ode très particulière au « fait maison » qui ne devrait pas vous laisser indifférent. À savourer le ventre vide de préférence…

Concernant la nouvelle de Patricia Delahaie, seconde « auteur découverte » du recueil, je dois être passé à côté de quelque chose. Elle m’a totalement laissé de marbre.

Ian Manook nous initie à la préparation d’une feijoada sur fond de retrouvailles entre deux vieux amis. Un régal pour le palais mais aussi pour les amoureux de la langue Molière et son argot. Le titre du recueil prend tout son sens avec ce texte.

Jacques Expert donne la parole à un goûteur confronté à un chantage mortel, quelle que soit sa décision, le prix à payer sera énorme.

C’est R.J. Ellory, fidèle parmi les fidèles, puisque présent dans quatre de ces cinq recueils sensoriels, qui clôt ce festin. Et quelle fin de dégustation en apothéose !

Comme à l’accoutumée je vous livre mes notes sur 5 pour chacune des nouvelles du présent recueil, je rappelle que ces notations n’engagent que moi et sont le reflet de mon ressenti en fin de lecture :

  • B. Minier – Le Goût Des Autres : 4
  • A. Langaney – Ripaille : 3
  • C. Sire – Tous Les Régimes Du Monde : 5
  • P. Bordage – Amertumes : 5
  • C. Blanchard – Joé : 5
  • N. Jaillet – Alfajores : 4
  • J. Fel – Dans L’Arène : 5
  • S. Delzongle – Jalousies : 4
  • N. Beuglet – La Visite : 5
  • P. Delahaie – Un Père A La Truffe : 2
  • I. Manook – Feijoada : 5
  • J. Expert – Le Goûteur : 4
  • R.J. Ellory – Scène De Crime : 5

Soit une très honorable moyenne de 4,3 sur 5, que j’arrondis volontiers à 4,5.

En matière de lecture je ne suis pas un grand fan de la nouvelle – à moins qu’elles ne soient signées Stephen King –, force est de reconnaître qu’à travers ces cinq recueils, ce difficile exercice plumesque a retrouvé grâce à mes yeux.

Mes sincères félicitations à Yvan pour avoir mené à bien un projet qui lui tenait à cœur, un projet qui a réuni 47 auteurs (sauf erreur de ma part) et 58 textes qui ont fait la part belle au noir, le déclinant à toutes les sauces. Merci à tous ces auteurs qui ont rejoint le projet et nous ont régalé tout au long de ce voyage en cinq étapes.

Je ne sais pas quels sont les éventuels projets éditoriaux futurs d’Yvan, mais s’il souhaite renouveler l’expérience avec une nouvelle approche (les 7 péchés capitaux par exemple, j’dis ça, j’dis rien), et pourquoi pas dans un autre registre, c’est avec le même enthousiasme que je répondrai présent.

MON VERDICT

Jérémy Fel – Les Loups A Leur Porte

J. Fel - Les loups à leur porteUn titre découvert un peu au hasard de mes pérégrinations webesques, devant l’enthousiasme des lecteurs (et notamment d’une certaine Belette Cannibale endémique à la Belgique) je me suis donc laissé tenter par Les Loups A Leur Porte de Jérémy Fel.
Difficile, voire impossible de vous proposer un pitch quelconque tant la construction du roman est déconcertante. Rassurez j’ai été déconcerté (et occasionnellement surpris) dans le bon sens du terme, le moins que l’on puisse c’est que pour un premier roman Jérémy Fel n’a pas fait le choix de la simplicité en optant pour ce que j’appellerai un roman de nouvelles.
Roman de nouvelles ? Ca y est il a fumé la moquette le Lord !!! Et bin non, je suis toujours non fumeur, alcoolémie au niveau zéro et à peu près sain d’esprit (faut le dire vite). En lisant les deux premiers chapitres je me dis que j’ai entre les mains un recueil de nouvelles tant il n’y a aucun lien entre les deux récits. Avec le troisième chapitre un semblant de lien (ténu, vachement ténu même) pointe son museau. Au fil des chapitres, du temps (de la fin des années 70 à nos jours) et de l’espace (des Etats-Unis à la France), on découvre des personnages, des liens et tout se met progressivement en place. Chapeau bas Monsieur Fel, vous avez réussi un coup de maître !
Etrange que les éditions Rivages ait inscrit ce titre dans leur collection littérature générale, il a en effet tous les atouts pour figurer chez Rivages Noir. Peut être une option marketing visant à séduire un public plus large. Globalement l’intrigue distille un sentiment de malaise, certains chapitres sont d’une dureté et d’une noirceur incontestable. Âmes sensibles s’abstenir mais vous passeriez alors à côté d’une perle rare.
Une fois que l’esprit s’est adapté à ce choix narratif hors norme, l’intrigue prend une tout autre dimension, on essaye (vainement) de trouver les liens avant que l’auteur ne nous les dévoile. Un bouquin qui de déconcertant devient rapidement hautement addictif. Cerise sur le gâteau, l’auteur adopte un style qui tend à fluidifier la lecture.
Je peux aisément concevoir que la sauce ne prenne pas auprès de certains lecteurs ; pour ma part je me suis lancé sans réelle conviction et j’en ressors aux anges. C’est une lecture qui exige un réel investissement personnel, aussi bien en terme de temps (laissez le bouquin 3 mois sur la table de chevet avant de le reprendre et vous serez largué) que de réflexion. Pour un premier roman Jérémy Fel place la barre haute, très haute…

MON VERDICT
jd4Coup de poing