[BOUQUINS] Jean-Laurent Del Socorro – Je Suis Fille De Rage

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Titre : Je Suis Fille De Rage
Auteur : Jean-Laurent Del Socorro
Éditeur : ActuSF
Parution : 2019
Origine : France
350 pages

De quoi ça cause ?

1861. La guerre civile déchire les Etats-Unis à la suite de la Sécession de certains états du sud. Les deux camps se préparent à ce conflit inédit, chacun étant persuadé de sortir en grand vainqueur de cette guerre.

Tout au long du conflit, Lincoln s’entretiendra en tête à tête avec La Mort dans le bureau présidentiel de la Maison Blanche.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que ça fait un moment que ce bouquin me fait de l’œil depuis les tréfonds de mon Stock à Lire Numérique. Un Book Club sur le thème de la fantasy désignera ce roman comme heureux élu, c’est l’occasion rêvée pour succomber à la tentation.

Ma Chronique

D’entrée je tiens à préciser que le côté fantasy est quasiment inexistant, un président qui cause avec La mort lorgne plus vers le registre fantastique si vous voulez mon avis. Mais ce bouquin est avant tout un roman choral historique pour lequel Jean-Laurent Del Socorro a produit un énorme travail de documentation (comme l’atteste la bibliographie sélective en fin d’ouvrage) afin de rester aussi fidèle que possible à l’Histoire de la Guerre de Sécession.

J’avoue très humblement que ma connaissance de la guerre civile américaine se limite à ce que j’ai pu voir au cinéma et à la télévision… et la lecture de la série BD Les Tuniques Bleues. Autant dire que je suis franchement profane sur le sujet.

Dans le roman de Jean-Laurent Del Socorro les personnages historiques (Lincoln en tête, mais aussi les généraux Grant – Nord – et Lee – Sud – et d’autres encore plus ou moins connus) côtoient les personnages inventés par l’auteur qui prendront une part plus ou moins active au conflit.

Dans le même ordre d’idée, le lecteur va alterner entre les documents historiques (extrait de presse, échanges officiels ou personnels des acteurs du conflit) et le récit à proprement parler.

L’auteur aide le lecteur profane à y voir plus clair grâce à un guide de lecture et une carte qui s’avéreront de précieux alliés.

Le roman est divisé en cinq parties (une par année de guerre, de 1861 à 1865), elles-mêmes découpées en chapitre donnant voix à un point de vue (c’est le principe du roman choral, que les anglo-saxons appellent tout simplement point of view – PoV pour les intimes). On passe ainsi du point de vue Nordiste à celui Sudiste sans que l’auteur ne cherche à faire pencher la balance dans un sens ou un autre.

La construction s’avère d’une redoutable efficacité, l’immersion est totale, en quelques heures vous vivez les cinq années de guerre civile qui ont déchiré les Etats-Unis. On découvre ainsi que l’esclavage n’a pas immédiatement une motivation pour Lincoln qui visait avant tout à réunifier le pays, ce n’est qu’en 1863 qu’il fera de l’esclavage un de ses chevaux de bataille (par conviction ou par stratégie ? à chacun de se faire sa propre opinion sur le sujet).

L’image que l’on peut se faire de certain héros de la guerre de Sécession tels que Grant ou Sherman prend du plomb dans l’aile quand on songe au nombre de vies qu’ils ont sacrifié… était-ce vraiment le prix à payer pour remporter la victoire ?

Dans le camps Sudiste le général Lee apparaît comme un fin stratège qui doit gérer des ressources moindres que ses adversaires du Nord mais donnera bien du fil à retordre à ses ennemis avant de se rendre… bien conscient que prolonger le combat reviendrait à sacrifier inutilement des soldats déjà lourdement éprouvés.

À l’opposé Nathan Forrest est un illuminé mystique qui trouve dans la Bible la justification de sa haine contre le Nord et de son racisme. J’avoue que je connaissais pas du tout ce personnage, mais, comme vous pourrez le constater, chez certains la haine fait partie intégrante de leur personne. Ce n’est pas une fin de conflit ou une défaite qui les changera.

Certains personnages apportent heureusement un peu de légèreté au milieu de la boue, des larmes et du sang. Je pense notamment à ces amoureux qui ridiculisent gentiment le couple mythique d’Autant En Emporte Le Vent.

J’ai particulièrement aimé suivre les parcours de Caroline (la Fille qui n’a plus de père), Kate (l’Affranchie qui n’est pas libérée), Jenny (la Capitaine qui force le destin) ou encore Minuit et son Bleu. D’autres ne feront que des passages éclairs dans le conflit (tels que Sue, Soldate confédérée et Nolan, Soldat de l’Union).

Ce roman fut une belle surprise et une belle découverte, captivant de bout en bout.

MON VERDICT

[BOUQUINS] George R.R. Martin – Le Volcryn

GRR Martin - Le VolcrynSi j’ai inscrit Le Volcryn au programme de mon challenge 100% SF ce n’est pas forcément dans l’espoir de découvrir un roman exceptionnel (même s’il a remporté le prix Locus du meilleur roman court en 1981) mais plutôt pour découvrir George R. R. Martin dans un autre style que la fantasy (au cas où vous ayez quitté la planète Terre ces dernières années il est l’auteur du Trône De Fer).
Un équipage de neuf experts triés sur le volet décolle d’Avalon à bord du vaisseau Armageddon, commandé par Royd Eris, leur mission est d’entrer en contact avec les volcryns, une race extra-terrestre supposée beaucoup plus évoluée que les humains qui se déplace aux confins de l’espace connu dans de gigantesques vaisseaux-cités. Au fil du voyage, le confinement aidant, des tensions et autres frustrations apparaissent ; quand le télépathe du groupe fait état d’une menace intérieure l’ambiance devient encore plus tendue…
Quand le premier tome du Trône De Fer est paru, en 1996, George R. R. Martin avait 48 ans, on peut donc légitimement supposer qu’il ait eu une vie littéraire avant et c’est effectivement le cas puisque son premier roman (hors nouvelles), L’Agonie De La Lumière, a été publié en 1977, si l’on prend en compte les nouvelles les débuts littéraires de l’auteur datent de 1971. Le Volcryn est son second roman (même si j’avoue avoir un peu de mal à m’y retrouver entre les nouvelles, les nouvelles longues, les romans courts et les romans).
La chose se présente donc au format roman court (160 pages), réédité en 2010 par Actusf, histoire de surfer sur le succès du Trône De Fer. Au-delà de l’aspect purement marketing (il est vendu moins de 10 €) c’est une bonne chose car ce roman est bien plus riche que ne pourrait le laisser penser son épaisseur. Le voyage spatial est prétexte pour l’auteur de nous offrir un huis-clos plus que convaincant, comme il se doit l’ambiance à bord du vaisseau devient de plus en plus étouffante au fur et à mesure que les personnages s’interrogent, de fait les tensions, les soupçons et les non-dits se multiplient ; il faut dire que le fait que le commandant du vaisseau ne se présente à eux que sous forme d’un hologramme n’aide pas à établir une relation de confiance. Dans un premier temps on se demande si la menace est réelle ou non, puis qui se cache derrière tout ça ; bien entendu je ne répondrai à aucune de ces questions !
Pour un roman aussi court la psychologie des personnages est plutôt approfondie, parmi l’équipage deux leaders s’imposent, Karoly D’Branin et Melantha Jhirl, ils sont sans doute un peu moins « bras cassés » que les autres ; mais c’est surtout le commandant de bord qui retient toute notre attention, lui aussi est-il bien réel ? Joue-t-il franc jeu avec l’équipage ? Qui est-il exactement ? Les questions le concernant ne manquent pas et les réponses ne manqueront pas de vous surprendre. Et ces fameux volcryns qui sont ils donc ? Vous aurez la réponse en lisant ce court mais très bon roman.
Le bouquin se lit d’une traite, une fois pris dans sa spirale infernale vous ne pourrez plus le lâcher (d’autant que le rythme monte crescendo) ; je me suis lancé de cette lecture sans grande conviction et j’en ressors agréablement surpris et même franchement comblé ; du coup ça m’a donné envie de découvrir les deux autres titres de George R. R. Martin que l’éditeur propose dans son catalogue (il s’agit de Skin Trade, un polar teinté fantastique, et de Dragons De Glace, un recueil de nouvelles).