En début d’année j’avais eu un bon gros coup de coeur pour Back Up, le premier roman de Paul Colize, je m’étais donc promis de garder un oeil sur le gars. Promesse tenue puisque j’ai eu l’occasion de me plonger dans Un Long Moment De Silence, son roman suivant.
Après une émission télé dans laquelle il présentait son livre consacré à la Tuerie du Caire, en 1954, où plusieurs personnes, dont son père, furent tuées, Stanislas Kervyn reçoit un appel qui remettra en cause toutes ses certitudes. Quel est le lien entre Stanislas et Nathan Katz, un rescapé des Camps de la Mort établi aux Etats-Unis depuis 1948 ?
De nouveau l’auteur nous embarque dans une double intrigue. D’un côté on suit Stanislas Kervyn, de nos jours, et les rebondissements de son enquête sur la Tuerie du Caire ; cette partie est écrite à la première personne, comme si elle était racontée par Stan. D’autre part on assiste à l’arrivée de Nathan Katz sur le sol américain en 1948 et à son parcours ; cette fois c’est écrit à la troisième personne. Et de nouveau, la même question que lors de la lecture de Back Up vient nous turlupiner : quel rapport entre Stanislas et Nathan ? On suppose un lien possible assez rapidement, mais gare à ne pas tirer de conclusion trop hâtive. L’auteur a plus d’un tour dans son sac quand il s’agit de brouiller les pistes.
Autre point commun avec Back Up (promis après j’arrête les comparaisons), les titres des chapitres sont en fait les derniers mots du chapitre ; ça doit être la marque de fabrique de l’auteur…
Le personnage de Stanislas Kervyn apparait totalement antipathique dès les premières pages, un connard nombriliste, égocentrique et misogyne. L’archétype de la tête à claques en puissance. Une seule chose l’intéresse (à part se vider les couilles le plus souvent possible et sans sentimentalisme) : résoudre le mystère qui entoure la mort de son père. Avec lui on déterre mes secrets de familles jusqu’à trouver le fin mot de l’histoire.
A contrario Nathan Katz est tout suite attachant, pas seulement à cause de son douloureux passé, on découvre une homme de conviction, profondément humain. Mais lui aussi est bouffé par une obsession, son désir de vengeance envers les criminels de guerre restés impunis, quitte à franchir la ligne blanche pour parvenir à ses fins. En sa compagnie on voyage dans le passé et l’Histoire, de 1948 à nos jours.
C’est pas vraiment le genre d’indice qui va nous aider à lier les deux intrigues. Mais rassurez vous l’auteur viendra en temps et en heure éclairer notre lanterne.
Encore une fois difficile de caser ce roman dans un genre particulier tant il est riche, comme sur la couv’ c’est écrit policier on va dire ça ; c’est vrai que les démarches respectives de Stanislas et Nathan tiennent de la véritable enquête de police (sauf qu’elles ne sont pas réalisées par des flics… bah juste un détail insignifiant). Quoi qu’il en soit l’auteur nous offre un petit bijou parfaitement ciselé (aussi bien dans sa construction que dans son écriture) et surtout hautement addictif.
En lisant la note au lecteur en fin de roman (ne la lisez pas avant sacrebleu, si elle est à la fin c’est pas pour faire joli… couillon va !) on réalise l’importance que doit avoir ce roman pour son auteur. Mais je ne peux en dire plus au risque de vous mettre sur la voie.
Deuxième incursion dans l’univers littéraire et deuxième coup de coeur (à force de coups de coeur je vais finir par me faire un infarct), il ne me reste plus qu’à attendre que son dernier opus ne vienne se prendre dans les mailles de mon Stock à Lire Numérique. Je ne suis pas certain que les romans écrits avant Back Up soient disponibles en France… et j’ai bien assez de livres qui s’accumulent en attendant que je daigne jeter mon dévolu sur eux.
Étiquette : Paul Colize
[BOUQUINS] Paul Colize – Back Up
Il est des bouquins à côté desquels je serai passé sans mes errances sur le Net, un roman qui semble n’inspirer que des critiques béates d’admiration c’est pas net ça. La tentatrice première a été Zofia, puis d’autres ont enfoncé le clou, encore et encore ! Il m’était donc impossible de passer à côté de ce Back Up de Paul Colize, et d’y apporter mon grain de sel…
Je ne vous gratifierai pas d’un pitch maison vu que c’est quasiment impossible à présenter en quelques mots, du coup vous aurez le droit à un simple copier-coller de la quatrième de couv’. Quel rapport entre la mort en 1967 des musiciens du groupe de rock Pearl Harbor et un SDF renversé par une voiture à Bruxelles en 2010 ? Lorsque l’homme se réveille sur un lit d’hôpital, il est victime du Locked-in Syndrome, incapable de bouger et de communiquer. Pour comprendre ce qui lui est arrivé, il tente de reconstituer le puzzle de sa vie…
Une mise en bouche plutôt appétissante non ? D’autant que la couverture du bouquin est elle aussi à la hauteur. Alors pourquoi serai-je passé à côté crévindiou ? Un auteur inconnu au bataillon (à mon bataillon en tout cas) et un titre qui ne m’inspire pas plus que ça, comme quoi ça tient à pas grand chose… Aujourd’hui je peux vous assurer que je ne regrette de m’être laisser tenter, ce bouquin vous offre une expérience de lecture assez unique en son genre. Rien que la playlist qui ouvre le bouquin vous fera saliver et suer des tympans !
Et d’ailleurs puisqu’on parle de genre bien malin celui ou celle qui pourra classer ce roman dans un genre ou un autre, la collection Folio Policier fait inévitablement penser à un polar, la mention roman noir sur la couverture parle d’elle même ; sauf que oui mais non, c’est à la fois un peu de tout ça et beaucoup plus que ça. Par contre une chose est certaine, l’auteur sait y mettre les formes, selon la partie du récit qu’il aborde il modifie son style en fonction de ses personnages, mais l’écriture est toujours superbement maîtrisée.
L’intrigue est construite autour de trois axes. D’une part en 1967, avec les derniers jours de Pearl Harbor (à ne pas confondre avec Les prochains jours de Pearl Harbor, chanson qui figure au répertoire de Michel Sardou) et l’enquête du journaliste Michael Stern en vue de comprendre ce qui s’est réellement passé. Les deux autres axes du récit se déroulent simultanément en 2010. Avec d’abord le parcours médical de la victime non identifiée et pas vraiment déterminée à collaborer avec le staff médical. Ensuite avec les souvenirs (parfois peu glorieux) de notre mystérieux inconnu, des souvenirs sur fond des sixties rebelles et du rock n roll, des souvenirs plein de grands noms qui ont laissé une empreinte indélébile dans l’Histoire de la musique (Elvis, les Beatles, les Stones, Pink Floyd, Clapton, Hendrix, les Who… et bien d’autres). Ca pourrait être confus mais que nenni, une fois encore l’auteur prouve qu’il tient les rênes de son bouquin, à aucun moment il ne nous embrouille l’esprit.
Paul Colize impose à son récit un rythme lent, presque lancinant, mais jamais ennuyant, on contraire il nous scotche à sa plume et on plane avec lui (sans absorber aucune des saloperies qu’il fait ingurgiter à ses personnages). On se laisse embarquer en gardant dans un coin de la tête LA question du bouquin : quel est le rapport entre les événements de 1967 et ceux de 2010 ? Il va falloir vous armer de patience pour commencer à envisager le début d’une piste probable et même une fois ce rapport établi je vous promets que vous n’êtes pas au bout de vos surprises ! Jusqu’à la dernière ligne de la dernière page l’auteur vous surprendra.
L’auteur réussit habilement à combiner littérature et rock n roll, mais il n’est pas nécessaire d’être un passionné de rock pour apprécier son roman, disons que c’est un peu la cerise sur le gâteau. Pour ma part je suis du genre à préférer le silence quand je lis, afin de pouvoir plonger pleinement dans le bouquin, sans aucun élément parasite pour me distraire, tout au plus je veux bien un léger fond sonore à base de musique classique (sauf l’Opéra, d’une part je ne suis pas fan et d’autre part les voix perturberont mon immersion). La lecture de ce bouquin n’aura pas fait exception à la règle, j’adore le rock des années 60 et 70 mais pas pendant que je lis, par contre pendant mes pauses je m’offrais un petit échantillon rock histoire de prolonger la magie…