[BOUQUINS] Hervé Le Corre – Traverser La Nuit

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H. Le Corre - Traverser la nuit
Titre : Traverser La Nuit
Auteur : Hervé Le Corre
Éditeur : Rivages
Parution : 2021
Origine : France
317 pages

De quoi ça cause ?

Louise élève seule son jeune fils. En plus d’un quotidien pas toujours facile, elle doit composer avec un ex qui revient régulièrement à la charge et la tabasse tout aussi régulièrement.

Jourdan est chef de groupe à la PJ de Bordeaux. Avec son équipe ils enquêtent sur le meurtre d’une jeune prostituée.

Pourquoi lui plutôt qu’un autre ?

Parce que l’écriture d’Hervé Le Corre m’avait séduit à la lecture de Prendre Les Chiens Pour Des Loups, au point de presque faire oublier une intrigue bien monotone… Je voulais voir si cette fois l’intrigue serait à la hauteur du style.

Ma Chronique

En lisant Prendre Les Chiens Pour Des Loups j’avais été littéralement subjugué par la qualité de l’écriture de Hervé Le Corre, un véritable régal pour les yeux et l’esprit. Il rendrait presque la noirceur de son récit poétique… et surtout on en viendrait à oublier que l’intrigue ne casse pas trois pattes à un canard.

Avec Traverser La Nuit j’ai retrouvé cette écriture magnifique mais cette fois elle venait sublimer une réelle intrigue portée par trois personnages « forts ».

Il y a Louise qui élève seule son jeune fils et gagne tant bien mal sa vie en travaillant comme aide à domicile. Son cauchemar s’appelle Lucas, un ex qui revient régulièrement à la charge et qui lui cogne dessus tout aussi régulièrement. Outre son fils, elle trouve un semblant de réconfort en compagnie de son amie Naïma.

Il y a Jourdan, commandant à la PJ, désabusé par la folie des hommes et les scènes de crime. Prisonnier de lui-même, il regarde sa vie personnelle partir à vau-l’eau, incapable de communiquer avec sa femme et sa fille.

Puis il y a Christian, marqué par une courte expérience militaire et une mère toxique, depuis il assassine des femmes pour exprimer son mal-être dans la violence. Chaque fois il s’acharne sur ses victimes qu’il poignarde à de nombreuses reprises.

Hervé le Corre sait y faire pour décortiquer les méandres de l’esprit de ses héros. Il sait mettre les mots justes sur leurs douleurs et leurs tourments, des mots crus, sans fausse compassion. Des mots qui nous prennent aux tripes.

Trois personnages pour deux arcs narratifs distincts, avec les déboires de Louise d’un côté et l’enquête de Jourdan et son groupe de l’autre. Deux axes qui finiront par se rencontrer, pour le meilleur et pour le pire.

À l’image de ses personnages et de la nuit – omniprésente au fil des pages –, l’intrigue est fortement teintée de noire. Une intrigue qui grimpe progressivement en intensité jusqu’à un final qui m’a laissé sur le cul (je n’ai rien vu venir).

L’auteur porte un regard sans concession sur les dérives de notre société… Celle d’avant la crise sanitaire. Celle des grèves, des manifestions, du ras-le-bol généralisé.  Ces dérives qui ont donné naissance au mouvement des gilets jaunes, une juste mobilisation à la base, avant de sombrer dans le grand portnawak.

MON VERDICT
Coup de poing

[BOUQUINS] Hervé Le Corre – Prendre Les Loups Pour Des Chiens

H. Le Corre - Prendre Les Loups Pour Des ChiensAu hasard des sorties littéraires j’aime, de temps en temps, oser la découverte. En l’occurrence c’est la première fois que je lis un roman de Hervé Le Corre, et tant qu’à faire autant commencer par la fin avec Prendre Les Loups Pour Des Chiens.
A sa sortie de prison, Franck espère que c’est son frère, Fabien, qui viendra le chercher mais c’est Jessica qui se présente, une jeune femme amie de Fabien. Elle l’informe que Fabien est en Espagne pour quelques jours, ils l’attendront dans la ferme des parents de Jessica…
Dès le départ on a envie de gueuler à Franck de se tirer d’ici, de mettre le plus de distance possible entre lui et cette famille de dégénérés. Tout là-bas pue les emmerdes à plein nez, mais pourtant Franck reste et s’implique même dans les affaires de Jessica et ses parents.
Jessica, bipolaire par excellence et pétasse de première, la beauté empoisonnée qui vous fera une pipe le matin au réveil mais voudra vous arracher les yeux avec les ongles le soir au coucher. Ses sautes d’humeur mettront vos nerfs à rude épreuve, plus d’une fois vous aurez envie de lui exposer la tronche à grands coups de clé à molette.
Puis il y a les Vieux, les parents, taciturnes et aigris, même si la vie semble n’avoir plus rien à leur apporter (à part des emmerdes supplémentaires) il s’y accrochent… Et nous pauvres lecteurs contraint de les subir crevons d’envie de couper la branche à laquelle ils se raccrochent.
Heureusement il y a Rachel, la fille de Jessica, une gamine mutique qui semble en avoir beaucoup (trop) vu et subi. On ne peut que s’attacher à cette gamine, on a envie de la prendre dans nos bras et de l’emmener loin, très loin, de ses trois timbrés que sont sa mère et ses grands-parents.
La plume d’Hervé Le Corre est d’une redoutable efficacité quand il s’agit de restituer l’ambiance oppressante qui règne autour de cette famille. On sent le poids des secrets, les non-dits sont presque aussi importants que le su et le vu. Rien à redire l’écriture est remarquable, on ne peut que succomber à ses charmes.
Mais cela ne m’empêche pas de refermer le bouquin avec un sentiment mitigé. Je n’ai pas vraiment réussi à m’embarquer dans l’intrigue (peut être parce que j’en avais deviné les grandes lignes très rapidement). Du coup j’ai maintenu une espèce de distance de sécurité entre le récit et mes émotions, sans jamais réussir à briser cette frontière invisible.
Une intrigue qui tourne en mode diesel, il faut du temps (beaucoup de temps) pour chauffer le terrain mais une fois que les choses se mettent en branle l’accélération est supersonique ! Je reconnais volontiers que globalement l’intrigue est bien construite mais a aucun moment je n’ai été réellement surpris par la tournure prise par les événements.
Au final je dirai que j’ai passé un très bon moment sur la forme (la plume de l’auteur) mais sans jamais être totalement emballé par le fond (l’intrigue). Peut être que j’ai raté le coche sur ce coup, le fait est que l’étincelle ne s’est pas produite entre ce bouquin et moi.
Toutefois la qualité de l’écriture de Hervé Le Corre m’encourage à persévérer dans la découverte de son univers littéraire.

MON VERDICT
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